La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue • Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014 | 91
Points forts
»Dans le monde, 50 % des CHC sont liés au VHB.
»Chez les patients porteurs de l’hépatite B, la cirrhose reste le facteur de risque principal de CHC.
»
Le dépistage concerne les patients cirrhotiques, mais, en l’absence de cirrhose, les autres facteurs de risque
de CHC tels que l’âge, le sexe, l’origine ethnique et les antécédents familiaux doivent être pris en compte.
»L’objectif du dépistage est de détecter le CHC à un stade accessible aux traitements curatifs.
»
L’application du dépistage du CHC est encore insuffisante, même dans les pays dans lesquels l’infra-
structure sanitaire l’autoriserait.
»La meilleure prévention du CHC lié au VHB est la vaccination.
»
L’impact bénéfique du traitement antiviral et de la virosuppression est bien démontré en termes
de réduction du risque de CHC en présence d’une cirrhose.
Mots-clés
Carcinome
hépatocellulaire
HépatiteB chronique
Cirrhose
Dépistage
Score de risque
Prévention
Highlights
»
Worldwide, 50% of HCC are
HBV-related.
»
Among the patients with
hepatitis B, cirrhosis remains
the main risk factor for HCC.
»
HCC screening is recom-
mended for patients with
cirrhosis. Without cirrhosis,
other risk factors for HCC such
as age, gender, ethnicity and
family history should be taken
into account.
»
The main goal of HCC
screening is to detect small
tumors eligible for curative
treatments.
»
The application of screening
for HCC is still insuffi cient, even
in countries where the health
infrastructure allows it.
»
The best prevention for HCC
related to HBV is vaccination.
»
The benefi cial impact of anti-
viral therapy and viral suppres-
sion is demonstrated in terms
of reducing the risk of HCC in
patients with cirrhosis.
Keywords
Hepatocellular carcinoma
Chronic hepatitis B
Cirrhosis
Screening
Risk score
Prevention
le VHC (virus de l’hépatite C), la consommation
d’alcool, l’exposition à l’afl atoxine, l’association à
une stéatohépatite dysmétabolique ou encore la
présence de certains polymorphismes (chromo-
some 6 HLA-DP et HLA-DQ, chromosome 8p12,
chromosome 1p36.22) [1] ;
➤les facteurs liés à la sévérité de l’atteinte hépa-
tique, tels que le degré de fi brose, le caractère évolué
de la cirrhose (présence de grosses varices œsopha-
giennes, thrombopénie inférieure à 75 000/mm
3
,
TP inférieur à 75 %, hyperbilirubinémie, hypoal-
buminémie), le degré d’activité de l’hépatite (taux
d’ALAT et d’AFP élevés), la présence d’une dysplasie
à grandes cellules ;
➤
les facteurs liés au virus lui-même : une répli-
cation virale élevée et prolongée attestée par la
présence de l’AgHBe et par un taux élevé d’ADN
du VHB, un taux élevé d’AgHBs, le génotype C, les
délétions pré-S, les mutations activatrices II (T1653),
les mutations dans la région précore (V1753, T1762
et A1764).
À partir de tous ces facteurs de risque, certaines
équipes ont tenté d’établir des scores prédictifs
combinant ces facteurs afin d’identifier, chez
les patients infectés par le VHB, des groupes de
patients à risque plus ou moins élevé de développer
un CHC. M.H. Lee et al. (6) ont récemment proposé
un score prédictif de CHC en associant 8 variables :
l’âge, le sexe, l’histoire familiale, le taux d’ALAT, la
charge virale du VHB, le taux d’AgHBs, la présence
de l’antigène HBe et le génotype (figure 1, p. 92).
Une autre équipe a développé 3 scores (CU-HCC,
GAG-HCC et REACH-B) fondés sur les paramètres
précédemment cités, afin de prédire le risque de
CHC à 10 ans chez les patients naïfs de traite-
ment anti-VHB. Leurs validité et applicabilité ont
été démontrées au sein d’une grande cohorte de
patients asiatiques (7). Peu de données existent à
ce jour concernant la validation de ces scores dans
les populations caucasiennes parmi lesquelles les
patients ayant un CHC sont presque tous cirrho-
tiques.
Le risque de survenue du CHC chez les patients
porteurs d’une hépatite B chronique est donc très
variable d’un individu à l’autre. Le poids de chacun
des facteurs de risque à l’échelle individuelle est
difficilement appréciable. Il faut retenir que la
cirrhose reste le facteur de risque le plus important,
mais l’histoire familiale de CHC au premier degré,
la virémie et l’infl ammation jouent également un
rôle non négligeable.
Dépistage
Population cible du dépistage
La pertinence d’un dépistage est associée à l’effi ca-
cité des traitements que l’on peut proposer pour les
lésions dépistées. Le dépistage du CHC lié au VHB fait
l’objet de recommandations qui sont résumées dans
le tableau, p. 92. Les patients candidats au dépistage
sont soit des patients cirrhotiques (compensés ou
décompensés en attente de transplantation hépa-
tique), soit des patients porteurs d’une hépatopathie
chronique B non cirrhotique qui sont considérés
comme étant à haut risque de CHC. Les recomman-
dations insistent sur la prise en compte de 3 facteurs
précédemment décrits : l’âge du patient, l’existence
d’une histoire familiale de cancer du foie et l’origine
ethnique (tableau, p. 92).
Modalités pratiques du dépistage
Un bon test de dépistage doit être accessible, de
faible coût, et doit comporter un minimum de
risques pour le patient. L’échographie hépatique
est actuellement l’examen de choix : elle présente
une innocuité parfaite, elle est peu coûteuse et
facilement disponible. En revanche, l’échographie
manque de puissance pour les nodules de moins
de 1 cm, elle n’est pas réalisable chez environ 10 %
des patients (le plus souvent du fait d’une obésité)
et elle dépend de l’opérateur. Dans ce cas, l’IRM et
le scanner peuvent être utilisés, sans que l’utilisa-
tion de l’un ou l’autre ne fasse aujourd’hui l’objet
d’un consensus. L’échographie de contraste n’a pas
sa place dans le dépistage du CHC, car le passage
très bref du produit de contraste ne permet pas
l’exploration de l’ensemble du parenchyme hépa-
tique ; cependant, elle reste utile pour la caracté-
risation d’une lésion focale déjà identifi ée. Il faut
souligner que le dosage de l’alpha-fœtoprotéine