90 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014
DOSSIER
Hépatite B : brose,
cancer et traitements
Dépistage et prévention
du carcinome hépatocellulaire
chez les patients porteurs
du virus de l’hépatite B
Screening and prevention of hepatocellular carcinoma in
hepatitis B carriers
M. Lequoy*, L. Fartoux*
*
Service d’hépatologie, hôpital Saint-
Antoine, Paris.
L
e carcinome hépatocellulaire (CHC), 5e cancer le
plus fréquent chez l’homme et 6e chez la femme,
est une complication majeure des maladies
chroniques du foie et survient dans environ 85 % des
cas sur un foie cirrhotique (1). Le CHC est responsable
de plus de 500 000 décès par an dans le monde et,
bien que toutes les étiologies de cirrhoses soient
concernées, on estime que 50 % d’entre elles dans
le monde sont liés au virus de l’hépatite B (VHB) [2].
En France, le CHC est responsable de 6 500 décès
par an, dont 10 % en rapport avec le VHB. Malgré les
progrès thérapeutiques, la mortalité globale reste
élevée, et la médiane de survie inférieure à 12 mois,
tous stades confondus. Ce mauvais pronostic est
principalement expliqué par la découverte du CHC
à un stade trop avancé pour bénéfi cier d’un traite-
ment curatif. Seuls 30 % des CHC sont accessibles
au diagnostic initial aux traitements curatifs que
sont la résection chirurgicale, l’ablation percutanée
et la transplantation hépatique. Plus de 2 milliards
de personnes dans le monde sont exposées à l’hépa-
tite B, et environ 350 millions présentent une hépa-
tite chronique (3). Les études publiées montrent que
le CHC est la cause du décès de 25 % des patients
atteints d’une hépatite B chronique (4). Le CHC sur
hépatopathie chronique B survient sur foie cirrho-
tique mais également sur foie non cirrhotique, car
différents mécanismes infl ammatoires et molé-
culaires directs ou indirects interviennent dans le
développement de cette carcinogenèse hépatique.
Les patients infectés par le VHB représentent donc
une catégorie à risque de développement du CHC
pour laquelle le dépistage et la prévention sont des
enjeux majeurs et pour laquelle des recommanda-
tions existent.
Épidémiologie du CHC et virus B
Les études épidémiologiques suggèrent depuis long-
temps une relation entre l’infection par le VHB et
le CHC. La détection de l’antigène HBs (AgHBs)
chez les patients ayant un CHC varie entre 60 et
80 % en Asie du Sud-Est et en Afrique noire, mais
ne dépasse pas 10 à 20 % en Europe du Nord et
aux États-Unis. Dans les régions d’endémie du VHB,
les patients cirrhotiques ont 3 fois plus de risques
de développer un CHC que ceux ayant une hépa-
tite chronique sans cirrhose, et 16 fois plus que les
porteurs asymptomatiques ou inactifs. Dans les
pays occidentaux, le taux d’incidence du CHC est
de 0,02/100 personnes-années chez les porteurs
inactifs, de 0,3/100 personnes-années chez les
sujets avec hépatite B chronique sans cirrhose et
de 2,2/100 personnes-années chez les sujets avec
cirrhose compensée (5). Chez les patients porteurs
d’une hépatite B chronique, les facteurs de risque de
CHC peuvent être classés de la façon suivante (1) :
les facteurs liés au patient tels qu’un âge supé-
rieur à 50 ans, le sexe masculin, un antécédent
familial de CHC au premier degré, la co-infection
par le VIH, le VHD (virus de l’hépatite Delta) ou
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014 | 91
Points forts
»Dans le monde, 50 % des CHC sont liés au VHB.
»Chez les patients porteurs de l’hépatite B, la cirrhose reste le facteur de risque principal de CHC.
»
Le dépistage concerne les patients cirrhotiques, mais, en l’absence de cirrhose, les autres facteurs de risque
de CHC tels que l’âge, le sexe, l’origine ethnique et les antécédents familiaux doivent être pris en compte.
»L’objectif du dépistage est de détecter le CHC à un stade accessible aux traitements curatifs.
»
L’application du dépistage du CHC est encore insuffisante, même dans les pays dans lesquels l’infra-
structure sanitaire l’autoriserait.
»La meilleure prévention du CHC lié au VHB est la vaccination.
»
L’impact bénéfique du traitement antiviral et de la virosuppression est bien démontré en termes
de réduction du risque de CHC en présence d’une cirrhose.
Mots-clés
Carcinome
hépatocellulaire
HépatiteB chronique
Cirrhose
Dépistage
Score de risque
Prévention
Highlights
»
Worldwide, 50% of HCC are
HBV-related.
»
Among the patients with
hepatitis B, cirrhosis remains
the main risk factor for HCC.
»
HCC screening is recom-
mended for patients with
cirrhosis. Without cirrhosis,
other risk factors for HCC such
as age, gender, ethnicity and
family history should be taken
into account.
»
The main goal of HCC
screening is to detect small
tumors eligible for curative
treatments.
»
The application of screening
for HCC is still insuffi cient, even
in countries where the health
infrastructure allows it.
»
The best prevention for HCC
related to HBV is vaccination.
»
The benefi cial impact of anti-
viral therapy and viral suppres-
sion is demonstrated in terms
of reducing the risk of HCC in
patients with cirrhosis.
Keywords
Hepatocellular carcinoma
Chronic hepatitis B
Cirrhosis
Screening
Risk score
Prevention
le VHC (virus de l’hépatite C), la consommation
d’alcool, l’exposition à l’afl atoxine, l’association à
une stéatohépatite dysmétabolique ou encore la
présence de certains polymorphismes (chromo-
some 6 HLA-DP et HLA-DQ, chromosome 8p12,
chromosome 1p36.22) [1] ;
les facteurs liés à la sévérité de l’atteinte hépa-
tique, tels que le degré de fi brose, le caractère évolué
de la cirrhose (présence de grosses varices œsopha-
giennes, thrombopénie inférieure à 75 000/mm
3
,
TP inférieur à 75 %, hyperbilirubinémie, hypoal-
buminémie), le degré d’activité de l’hépatite (taux
d’ALAT et d’AFP élevés), la présence d’une dysplasie
à grandes cellules ;
les facteurs liés au virus lui-même : une répli-
cation virale élevée et prolongée attestée par la
présence de l’AgHBe et par un taux élevé d’ADN
du VHB, un taux élevé d’AgHBs, le génotype C, les
délétions pré-S, les mutations activatrices II (T1653),
les mutations dans la région précore (V1753, T1762
et A1764).
À partir de tous ces facteurs de risque, certaines
équipes ont tenté d’établir des scores prédictifs
combinant ces facteurs afin d’identifier, chez
les patients infectés par le VHB, des groupes de
patients à risque plus ou moins élevé de développer
un CHC. M.H. Lee et al. (6) ont récemment proposé
un score prédictif de CHC en associant 8 variables :
l’âge, le sexe, l’histoire familiale, le taux d’ALAT, la
charge virale du VHB, le taux d’AgHBs, la présence
de l’antigène HBe et le génotype (figure 1, p. 92).
Une autre équipe a développé 3 scores (CU-HCC,
GAG-HCC et REACH-B) fondés sur les paramètres
précédemment cités, afin de prédire le risque de
CHC à 10 ans chez les patients naïfs de traite-
ment anti-VHB. Leurs validité et applicabilité ont
été démontrées au sein d’une grande cohorte de
patients asiatiques (7). Peu de données existent à
ce jour concernant la validation de ces scores dans
les populations caucasiennes parmi lesquelles les
patients ayant un CHC sont presque tous cirrho-
tiques.
Le risque de survenue du CHC chez les patients
porteurs d’une hépatite B chronique est donc très
variable d’un individu à l’autre. Le poids de chacun
des facteurs de risque à l’échelle individuelle est
difficilement appréciable. Il faut retenir que la
cirrhose reste le facteur de risque le plus important,
mais l’histoire familiale de CHC au premier degré,
la virémie et l’infl ammation jouent également un
rôle non négligeable.
Dépistage
Population cible du dépistage
La pertinence d’un dépistage est associée à l’effi ca-
cité des traitements que l’on peut proposer pour les
lésions dépistées. Le dépistage du CHC lié au VHB fait
l’objet de recommandations qui sont résumées dans
le tableau, p. 92. Les patients candidats au dépistage
sont soit des patients cirrhotiques (compensés ou
décompensés en attente de transplantation hépa-
tique), soit des patients porteurs d’une hépatopathie
chronique B non cirrhotique qui sont considérés
comme étant à haut risque de CHC. Les recomman-
dations insistent sur la prise en compte de 3 facteurs
précédemment décrits : l’âge du patient, l’existence
d’une histoire familiale de cancer du foie et l’origine
ethnique (tableau, p. 92).
Modalités pratiques du dépistage
Un bon test de dépistage doit être accessible, de
faible coût, et doit comporter un minimum de
risques pour le patient. Léchographie hépatique
est actuellement l’examen de choix : elle présente
une innocuité parfaite, elle est peu coûteuse et
facilement disponible. En revanche, l’échographie
manque de puissance pour les nodules de moins
de 1 cm, elle n’est pas réalisable chez environ 10 %
des patients (le plus souvent du fait d’une obésité)
et elle dépend de l’opérateur. Dans ce cas, l’IRM et
le scanner peuvent être utilisés, sans que l’utilisa-
tion de l’un ou l’autre ne fasse aujourd’hui l’objet
d’un consensus. Léchographie de contraste n’a pas
sa place dans le dépistage du CHC, car le passage
très bref du produit de contraste ne permet pas
l’exploration de l’ensemble du parenchyme hépa-
tique ; cependant, elle reste utile pour la caracté-
risation d’une lésion focale déjà identifi ée. Il faut
souligner que le dosage de l’alpha-fœtoprotéine
92 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014
DOSSIER
Hépatite B : brose,
cancer et traitements Dépistage et prévention du carcinome hépatocellulaire
chez les patients porteurs du virus de l’hépatiteB
n’est fi nalement plus recommandé (8) du fait de
sa mauvaise sensibilité (10 à 20 %). En effet, ce
marqueur induit de nombreux faux positifs (surtout
en cas d’hépatite chronique virale) et faux négatifs
(CHC de petite taille, par exemple). La périodicité de
l’échographie hépatique est recommandée selon un
rythme semestriel. Une étude française prospective
a comparé le dépistage tous les 3 mois au dépistage
tous les 6 mois et a montré que celui réalisé tous
les 3 mois permettait, certes, la mise en évidence
d’un plus grand nombre de nodules hépatiques,
mais de taille trop petite pour être caractérisables
et pour permettre une décision thérapeutique.
Aussi, leur dépistage ne permet pas une prise en
charge thérapeutique curative plus précoce (9).
Les dernières recommandations de l’EASL 2012
préconisent donc la réalisation d’une échographie
hépatique tous les 6 mois, ce délai pouvant être
ramené à 3 ou 4 mois en cas de découverte d’un
nodule infracentimétrique (8). La découverte écho-
graphique d’une lésion focale au cours du dépistage
déclenche un algorithme diagnostique prenant en
compte des données morphologiques (scanner ou
IRM) et proposant un recours à la biopsie guidée de
la lésion pour examen anatomopathologique dans
certaines circonstances (8).
Résultats du dépistage
Les données de la littérature sont faibles dans la
démonstration du bénéfi ce du dépistage en termes
de survie. Un seul essai randomisé chinois portant
sur des patients porteurs chroniques du VHB avec
ou sans cirrhose a évalué l’intérêt du dépistage et
a montré un bénéfi ce en termes de survie chez les
patients soumis à une échographie tous les 6 mois,
et ce malgré une observance médiocre du dépis-
tage (10). Les résultats de cette étude sont en
accord avec ceux des études rétrospectives euro-
péennes (11, 12). Pour des raisons éthiques évidentes,
il n’est pas envisageable que d’autres essais rando-
misés soient menés pour répondre à cette question.
Une étude américaine réalisée à partir des données
du système américain d’assurance santé Medicare
montre que moins de 10 % des patients identifi és
comme cirrhotiques avaient eu une surveillance
conforme aux recommandations (13). L’application
du dépistage du CHC paraît encore trop insuffi sante,
même dans les pays dans lesquels l’infrastructure
sanitaire l’autoriserait. Par ailleurs, le diagnostic
de cirrhose est contemporain de celui de CHC dans
environ la moitié des cas, ce qui signifi e que l’enjeu
est non seulement celui du dépistage du CHC mais
également de la détection des patients cirrhotiques.
Dans ce sens, l’avènement des tests non invasifs de
brose, à présent validés dans l’hépatite B, pour-
rait permettre d’améliorer la détection des patients
cibles (14).
Prévenir l’apparition du CHC
Vaccination anti-VHB
La première approche visant à réduire l’incidence
du CHC lié au VHB consiste en des mesures de
prévention primaire ayant pour objectif de réduire
l’infection par le virus. À l’échelle mondiale, il s’agit
de la vaccination. Il a été démontré que l’incidence
du VHB est clairement réduite par la vaccination
Tableau. Recommandations concernant le dépistage du CHC lié au VHB.
Population Méthode
AASLD
2010
Cirrhose
Pas de cirrhose
– Homme asiatique > 40 ans
– Femme asiatique > 50 ans
– Histoire familiale
– Sujet africain
Échographie tous les 6 mois
EASL-EORTC
2011
Cirrhose
– Child A et B
– Child C si attente de TH
Pas de cirrhose
– Hépatite chronique
– Histoire familiale
Échographie tous les 6 mois
60
0
10
20
30
40
046 1210 14 18 20
Années de suivi
Risque cumulé de CHC (%)
Risque élevé
p < 0,001
60,1 %
10,6 %
2,6 %
Risque modéré
Risque faible
50
2 8 16
Figure 1. Risque cumulé de CHC selon le score de risque (6).
La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014 | 93
DOSSIER
22
2
0
6
10
14
20
102 6 1191213
Années de suivi Années de suivi
Incidence cumulée de CHC (%)
Incidence cumulée de CHC (%)
Groupes selon l’évolution du taux d’ADN VHB
(en copies/ml) au long cours
A
Nombre de personnes à risque (groupes selon l’évolution du taux d’ADN VHB à long terme en copies/ml)
107 107 107 107 107 107 107 107 105 105 105 103 102 102
137 137 137 137 137 136 134 131 130 127 123 120 114 113
336 336 335 335 334 332 332 332 329 325 324 319 314 314
309 309 309 309 309 307 305 305 305 305 303 303 302 302
251 251 251 251 251 250 250 249 249 249 247 246 246 246
2 020 2 018 2 018 2 016 2 016 2 014 2 013 2 012 2 011 2 010 2 008 2 004 2 002 2 002
7,1 %
19,8 %
5,1 %
2,3 %
2,1 %
0,9 %
> 107
entre 106 et 107
entre 105 et 106
entre 104 et 105
< 104
Groupe contrôle : < 107 à l’inclusion
4
8
12
16
18
3 4 5 7 8 10
16
2
0
4
10
14
102 6 1191213
Profil du taux d’ALAT (en UI/l) à long terme
B
Nombre de personnes à risque
(
profil du taux d’ALAT en UI/l à long terme
)
191 191 191 191 191 187 185 183 181 178 176 172 168 168
452 452 452 451 450 450 450 449 448 443 439 433 431 431
570 570 570 570 570 569 567 567 566 566 566 564 558 557
1 621 1 621 1 620 1 619 1 619 1 617 1 617 1 614 1 613 1 612 1 607 1 603 1 601 1 601
4,9 %
13,5 %
2,4 %
1,3 %
Anormal persistant
Anormal transitoirement
Limite supérieure de la normale
Strictement normal
6
8
12
3 4 5 7 8 10
Figure 2. Association entre le taux d’ADN du VHB, sa cinétique et l’incidence du CHC (9).
contre le VHB. Après la mise en œuvre de la grande
campagne nationale de vaccination à Taïwan en
1984, une étude publiée en 1997 a montré que l’inci-
dence du CHC chez les enfants de 6 à 9 ans avait
diminué de 0,52 pour 100 000 à 0,13 pour 100 000
entre 1984 et 1986 (p < 0,001) [15]. Une seconde
étude réalisée en 2009 a montré, avec un recul de
20 ans, que l’incidence du CHC, chez des patients
âgés de 6 à 19 ans, était diminuée dans la cohorte des
patients vaccinés (64 CHC en 37 709 304 personnes/
année) par rapport aux non-vaccinés (444 CHC en
76 496 406 personnes/année) [p < 0,001] (16).
La meilleure prévention du CHC lié au VHB est donc
la vaccination.
Traitement antiviral
La seconde approche en termes de prévention est
d’empêcher ou de retarder la survenue du CHC en
cas de cirrhose déjà constituée ou en cas d’hépa-
topathie chronique non cirrhotique. La carcino-
genèse hépatique liée au VHB fait intervenir, de
façon schématique, des mécanismes moléculaires
directs, au premier rang desquels la réplication
virale et l’intégration du génome viral dans celui
de l’hôte, ainsi que des mécanismes de régénéra-
tion et d’infl ammation menant au développement
d’une fi brose, puis d’une cirrhose. Il a été démontré
que le taux d’ADN du VHB était un facteur prédictif
indépendant de CHC. En effet, les résultats des 2
études de cohorte prospectives REVEAL publiées
en 2006 et 2011 montrent une association entre
réplication virale et risque de CHC (fi gure 2A) et
entre la cinétique de la charge virale B au cours du
suivi et le risque de CHC (fi gure 2B) [17, 18]. La viro-
suppression apparaît donc intuitivement comme un
excellent moyen de réduire l’incidence du CHC. En
2004, une étude randomisée contrôlée comparant
l’évolution, en termes de complications, des patients
traités par lamivudine à celle des patients non traités
a montré une réduction de l’incidence des épisodes
de décompensation hépatique et du risque de CHC
dans le groupe traité (19). D’autres études avec ces
traitements antiviraux donnent des résultats contra-
dictoires quant à la diminution de l’incidence du
CHC sous traitement, qui s’expliquent probablement
par leurs nombreux biais, comme la variabilité de la
durée de suivi ou l’hétérogénéité des populations
étudiées (20, 21). Avec les analogues nucléosidique
94 | La Lettre de l’Hépato-gastroentérologue Vol. XVII - n° 2 - mars-avril 2014
DOSSIER
Hépatite B : brose,
cancer et traitements Dépistage et prévention du carcinome hépatocellulaire
chez les patients porteurs du virus de l’hépatiteB
et nucléotidique de 2e génération (respectivement
l’entécavir et le ténofovir), plus effi caces en termes
de virosuppression, certaines études ont montré une
régression de la fi brose, voire de la cirrhose (22), lais-
sant suggérer, par ce mécanisme, une réduction du
risque de CHC. Cependant, l’effet du traitement anti-
viral sur l’incidence du CHC est diffi cile à mettre en
évidence, car un suivi long est nécessaire pour évaluer
ce critère de jugement. Dans une étude rétrospective
incluant une large population de patients traités par
entécavir et de patients non traités, T. Hosaka et
al. montrent que le traitement par entécavir réduit
l’incidence du CHC sur une longue période de suivi
(5 ans) [23]. Les patients contrôles, recrutés sur une
période précédant l’ère des traitements antiviraux,
étaient appariés aux patients traités selon un score
de propension. Afi n d’assurer le meilleur appariement
entre les groupes traité et non traité, les auteurs ont
utilisé des scores de risque de CHC validés au sein de
populations différentes. Cette étude montre que le
traitement par entécavir réduit l’incidence du CHC,
et ce de façon plus importante que le traitement
par lamivudine (fi gure 3). L’impact du traitement
antiviral sur l’incidence du CHC est d’autant plus
marqué que le score de risque de CHC est important :
patients majoritairement de sexe masculin, âge élevé,
cirrhose et activité de l’hépatopathie importante.
Une autre étude confi rme ces données en démon-
trant, chez les patients cirrhotiques, une réduction
du risque de CHC et de la mortalité à 5 ans (de
cause hépatique et globale) [7] sous traitement par
entécavir. Il faut souligner que la virosuppression du
VHB chez les patients cirrhotiques réduit le risque de
CHC, mais sans l’annuler. Cette réduction du risque
de CHC est également démontrée dans la population
des patients non cirrhotiques, mais de façon moins
importante compte tenu du faible risque de CHC
chez ces patients.
Conclusion
Plusieurs facteurs de risque sont identifiés dans
la survenue du CHC dans l’hépatite B chronique,
avec comme facteur principal la présence d’une
cirrhose. Aussi, le dépistage est recommandé en cas
de présence d’une cirrhose dans cette population. Il
doit être proposé également en l’absence de cirrhose
en fonction de l’âge, du sexe, de l’origine ethnique
et des antécédents familiaux. L’impact bénéfi que
du traitement antiviral et de la virosuppression est
bien démontré en termes de réduction du risque de
CHC en présence d’une cirrhose. Chez les patients
non cirrhotiques, le bénéfi ce semble fort probable,
mais reste moins documenté, car il est plus diffi cile
à mettre en évidence.
50
0
20
30
056
Durée du traitement (années)
Taux cumulés de CHC (%)
Contrôles
Patients cirrhotiques
LAM
ETV
A
Patients à risque (n)
ETV 79 79 72 53 35 17
LAM 49 49 41 35 32 29
Contrôles 85 85 76 65 54 47
20,9 %
38,9 %
11,4 % 12,2 %
19,7 % 22,2 %
28,5 %
2,6 % 4,3 % 7,0 % 7,0 %
10
40
1 2 3 4
4,8 %
50
0
20
30
056
Durée du traitement (années)
Taux cumulés de CHC (%)
Contrôles
Patients non cirrhotiques
LAM
ETV
B
Patients à risque (n)
ETV 237 237 192 132 66 27
LAM 133 133 124 119 117 112
Contrôles 221 221 201 181 168 113
3,2 %
3,2 %
0 % 0 % 0,8 % 2,5 %
3,2 % 4,9 %
1,6 % 2,2 % 3,6 %
10
40
1 2 3 4
1,0 %
Figure 3. Diminution de l’incidence du CHC chez les patients cirrhotiques traités par entécavir (23). Pas de différence signifi cative chez les patients non
cirrhotiques.
Marie Lequoy déclare ne pas avoir de liens d’inrêts.
Références
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