DROIT MÉDICAL Actualité de droit médical* Gilles Devers, avocat au Barreau de Lyon, docteur en droit HDR EXPERTISE MÉDICALE Un expert qui n’est plus désigné par les juridictions peut être radié de la liste tenue par la Cour d’appel Cour de cassation, 2e chambre civile, 14 mai 2009, n° 09-10712 Un médecin s’est vu refuser sa réinscription sur la liste des experts judiciaires de la Cour d’appel au motif qu’il n’était plus désigné. Cette décision est annulée, car s’il est exact que le médecin n’était plus sollicité par les juridictions judiciaires, il faisait l’objet de plusieurs désignations par les tribunaux administratifs ou la commission régionale de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux (CRCI). Il n’existe qu’une liste d’experts, celle tenue par la Cour d’appel, mais qui fait référence pour les autres juridictions. � Article 2 II de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 EXPERTISE MÉDICALE Un expert doit être radié de la liste s’il ne suit pas la formation juridique Cour de cassation, 2e chambre civile, 14 mai 2009, n° 09-10765 Un médecin expert, spécialiste de la chirurgie de la main, a sollicité sa réinscription sur la liste des experts judiciaires. Il reconnaît ne pas avoir effectué les sessions de formation juridique, mais souligne le court délai écoulé entre son inscription initiale et la demande de réinscription pour s’organiser, et fait état de ses activités d’enseignement ainsi que celle de responsable de la Société française de chirurgie de la main. Il indique que ce retard dans sa formation est en voie d’être comblé, puisqu’il a depuis suivi deux sessions, et souligne qu’il a effectué de nombreuses missions d’expertises administratives et judiciaires. * Extrait de : © La Lettre du Pneumologue 2009;12(45):107-9. La Cour prononce pourtant sa radiation. Ses compétences professionnelles sont indéniables et le nombre de missions d’expertise effectuées n’est pas contesté, mais le médecin sollicitant sa réinscription doit préalablement suivre la formation relative aux principes directeurs du procès et aux règles de procédure. Cette carence, “compte tenu de l’importance que la réglementation attache à l’obligation de formation”, fait obstacle à sa réinscription. � Article 2 II de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 DROITS SOCIAUX DES PATIENTS La prolongation d’un arrêt maladie peut être une cause de licenciement si l’absence du salarié ne peut être comblée par des mesures provisoires Cour de cassation, chambre sociale, 6 mai 2009, n° 08-41073 Un salarié a été licencié pour des absences prolongées ayant perturbé le fonction­nement de l’association et rendant nécessaire son remplacement définitif. Pour dire ce licenciement valable, la Cour retient que la prolongation des arrêts de travail rendait aléatoire la recherche de dépannages et nécessitait, pour répondre aux besoins du service, un remplacement définitif. CARRIÈRES MÉDICALES Le jury du concours des praticiens hospitaliers doit, à peine de nullité de ses délibérations, établir une grille de notation Conseil d’État, 8 avril 2009, n° 303930 Un médecin (internat à l’université américaine d’Harvard et thèse à l’Institut Ludwig for Cancer Research de Bruxelles) s’est porté candidat au concours de type II de praticien des établissements publics de santé. Le jury ayant écarté sa candidature, il a formé un recours. 158 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 2 - février 2010 L’épreuve orale d’entretien, qui porte sur les connaissances scientifiques, sur l’activité professionnelle et sur l’aptitude du candidat à exercer en équipe, doit être appréciée en fonction de la grille de notation. Or, cette grille n’avait pas été établie, ce qui conduit le Conseil d’État à annuler la délibération du jury. � Arrêté du 28 juin 1999 relatif à l’organisation du concours de praticien des établissements publics de santé, article 29. RESPONSABILITÉ MÉDICALE Si une erreur de diagnostic n’est pas nécessairement fautive, il en va différemment lorsque l’évolution des signes cliniques n’est pas interprétée correctement Cour administrative d’appel de Nancy, 9 avril 2009, n° 07NC00765 Lors d’une hospitalisation le 1er septembre 1999, les signes cliniques présentés par un patient qui souffrait d’un abcès du tiers inférieur de la jambe gauche, pouvaient correspondre à une arthrite septique et l’intervention chirurgicale qu’il a subie le 18 septembre 1999, consistant en un drainage péri-osseux, était conforme aux données de la science. En revanche, les clichés de la cheville de face et de profil, réalisés le 18 octobre 1999, permettaient d’établir avec certitude un diagnostic d’ostéomyélite ou d’ostéite de l’extrémité du tibia gauche, en particulier chez un patient dont le passé médical le prédisposait au développement d’une telle affection, puisqu’il était porteur de la maladie de Rendu-Osler et avait été opéré d’un abcès cérébral en 1984. Ce retard à poser un tel diagnostic a eu pour conséquence de différer de deux mois la réalisation d’une trépanation du foyer osseux, seul traitement chirurgical adapté à son état, et a conduit à opérer inutilement le patient à trois reprises les 22 octobre, 4 et 10 novembre 1999, provoquant notamment l’excision du tendon du jambier antérieur. Ces faits engagent la responsabilité pour faute médicale.