La Lettre du Pneumologue Vol. XII - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2009 | 107
DROIT MÉDICAL
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NOUVEAU EN 2009
NOUVEAU EN 2009
Actualité de droit médical
Gilles Devers, avocat au Barreau de Lyon, docteur en droit HDR
EXPERTISE
Un expert qui n’est plus
désigné par les juridictions
peut être radié de la liste
tenue par la Cour d’appel
Cour de cassation, 2e chambre civile,
14 mai 2009, n° 09-10712
Un médecin s’est vu refuser sa réinscription
sur la liste des experts judiciaires de la Cour
d’appel au motif qu’il n’était plus désigné.
Cette décision est annulée, car s’il est exact
que le médecin n’était plus sollicité par les juri-
dictions judiciaires, il faisait l’objet de plusieurs
désignations par les tribunaux administratifs ou
la commission régionale de conciliation et d’in-
demnisation des accidents médicaux (CRCI).
Il n’existe qu’une liste d’experts, celle tenue
par la Cour d’appel, mais qui fait référence
pour les autres juridictions.
Article 2 II de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971
EXPERTISE
Un expert doit être radié
de la liste s’il ne suit pas la
formation juridique
Cour de cassation, 2e chambre civile,
14 mai 2009, n° 09-10765
Un médecin expert, spécialiste de la chirurgie
de la main, a sollicité sa réinscription sur la
liste des experts judiciaires. Il reconnaît ne
pas avoir effectué les sessions de formation
juridique, mais souligne le court délai écoulé
entre son inscription initiale et la demande de
réinscription pour s’organiser, et fait état de
ses activités d’enseignement ainsi que celle de
responsable de la Société française de chirurgie
de la main. Il indique que ce retard dans sa
formation est en voie d’être comblé, puisqu’il
a depuis suivi deux sessions, et souligne qu’il a
effectde nombreuses missions d’expertises
administratives et judiciaires.
La Cour prononce pourtant sa radiation. Ses
compétences professionnelles sont indéniables
et le nombre de missions d’expertise effectuées
n’est pas contesté, mais le médecin sollicitant
sa réinscription doit préalablement suivre la
formation relative aux principes directeurs
du procès et aux règles de procédure. Cette
carence, “compte tenu de l’importance que la
glementation attache à l’obligation de forma-
tion”, fait obstacle à sa réinscription.
Article 2 II de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971
DROIT DES PATIENTS
Après une hospitalisation sous
contrainte, un établissement
peut refuser de transmettre
directement le dossier et
imposer l’intermédiaire d’un
médecin
Conseil d’État, 10 avril 2009, n° 289795
Un patient hospitalisé sur demande d’un tiers
a demandé ensuite la communication de
son dossier. Le directeur, estimant que cette
communication directe comportait pour le
patient des risques d’une gravité particulière,
a saisi la commission départementale des
hospitalisations psychiatriques qui a rendu un
avis subordonnant la consultation du dossier
dical à un accompagnement par un médecin
librement choisi.
Le patient a contesté devant la juridiction admi-
nistrative l’existence de ce risque, mais il ne
produit comme preuves qu’un jugement de
tribunal d’instance ordonnant la main levée
d’une mesure de tutelle et des témoignages. La
juridiction estime que ces éléments ne suffisent
pas à remettre en cause l’appréciation portée
par le directeur du centre hospitalier au regard
de la gravides pathologies psychiatriques qui
ont motivé son hospitalisation à la demande
d’un tiers.
Ce faisant, le Conseil d’État fait une lecture
stricte du quatrième alinéa de l’article L. 1111-7
du code de la Santé publique : “À titre excep-
tionnel, la consultation des informations
recueillies, dans le cadre d’une hospitalisation
sur demande d’un tiers ou d’une hospitalisation
d’office, peut être subordonnée à la présence
d’un médecin sig par le demandeur en cas
de risques d’une graviparticulière. En cas de
refus du demandeur, la commission départe-
mentale des hospitalisations psychiatriques
est saisie. Son avis s’impose au détenteur des
informations comme au demandeur”.
DROITS SOCIAUX DES PATIENTS
En cas d’arrêt de travail, toute
activité doit être autorisée
préalablement par le médecin
sous peine de privation des
indemnités journalières
Cour de cassation, 2e chambre civile,
9 avril 2009, n° 07-18294
Une patiente en arrêt de travail pendant environ
6 mois, s’était livrée à plusieurs reprises à une
activide chant lors de représentations publi-
ques données par une association à laquelle
elle adhérait. La CPAM, du fait de cette activité
non autorisée, avait interrompu le versement
des indemnités journalières.
La Cour d’appel avait donné tort à la Caisse,
estimant que cette activité constituait une acti-
vité ludique à caractère bénévole entrant dans
le champ de la vie privée. Mieux, la Cour avait
salué l’aboutissement d’un processus d’ins-
108 | La Lettre du Pneumologue Vol. XII - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2009
DROIT MÉDICAL
cription sociale, en soulignant que, pour les
médecins traitants, cette activité de socialisa-
tion participait à l’action thérapeutique.
La Cour de cassation annule l’arrêt de la Cour
d’appel et donne raison à la Caisse, car l’as-
surée, qui avait bénéficié d’une indication de
repos, avait particià ces activités sans auto-
risation préalable du médecin traitant.
Attention donc à la rédaction des prescrip-
tions !
L. 321-1 du code de la Sécurité sociale
DROITS SOCIAUX DES PATIENTS
La prolongation d’un arrêt
maladie peut être une cause
de licenciement si l’absence du
salarié ne peut être comblée
par des mesures provisoires
Cour de cassation, chambre sociale,
6 mai 2009, n° 08-41073
Un salarié a été licencié pour des absences
prolongées ayant perturbé le fonction nement
de l’association et rendant nécessaire son
remplacement définitif. Pour dire ce licencie-
ment valable, la Cour retient que la prolon-
gation des arrêts de travail rendait aléatoire la
recherche de dépannages et nécessitait, pour
répondre aux besoins du service, un rempla-
cement définitif.
DROITS SOCIAUX DES PATIENTS
En matière d’accident du
travail, la faute inexcusable de
l’employeur est retenue si
celui-ci aurait dû avoir
conscience du danger et qu’il
n’a pas pris les mesures
préventives
Cour de cassation, chambre civile,
2, 7 mai 2009, n° 08-12998
Une femme, salariée exerçant à l’international
a été hospitalisée le 11 décembre 2003 à Paris
pour une crise de paludisme après avoir assuré
deux missions à l’étranger, l’une du 18 au 21
novembre 2003 en Côte d’Ivoire et l’autre du
1er au 5 décembre 2003 en Egypte. Les soins
ont été pris en charge au titre de la législation
professionnelle sur les accidents du travail, mais
la salariée a demandé que soit reconnue la
faute inexcusable de l’employeur, qui permet
d’obtenir, outre les droits sociaux, l’indemni-
sation complète du préjudice.
La Cour d’appel avait rejeté cette demande
en retenant qu’aucun vaccin n’existe contre
le paludisme, que la salariée avait été déclarée
apte à des missions à l’étranger sans restrictions
géographiques par le médecin du travail le 14
mars 2002, et qu’elle emportait toujours des
bombes antimoustiques.
La Cour de cassation casse cet arrêt. Pour elle,
l’employeur avait nécessairement conscience
du danger auquel la salariée était exposée, et
devait prouver qu’il avait pris des mesures de
prévention et d’information nécessaires pour
la protéger.
C’est une décision sévère pour l’employeur,
mais bien dans la ligne jurisprudentielle, très
protectrice des droits du salarié. L’employeur
est tenu envers le salarié d’une obligation de
sécurité de résultat en ce qui concerne les acci-
dents du travail. Le manquement à cette obli-
gation a le caractère d’une faute inexcusable
“lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir
conscience du danger auquel était soumis le
salarié et qu’il n’a pas pris les mesures néces-
saires pour l’en préserver.”
Code de la Sécurité sociale, art. L. 452-1 et code du Travail,
art. L. 4121-1 et L. 4121-2
CARRIÈRES MÉDICALES
Le jury du concours des
praticiens hospitaliers doit,
à peine de nullité de ses
délibérations, établir une grille
de notation
Conseil d’État, 8 avril 2009, n° 303930
Un médecin (internat à l’université américaine
d’Harvard et thèse à l’Institut Ludwig for Cancer
Research de Bruxelles) s’est porté candidat au
concours de type II de praticien des établisse-
ments publics de santé. Le jury ayant écarté sa
candidature, il a formé un recours.
L’épreuve orale d’entretien, qui porte sur les
connaissances scientifiques, sur l’activi profes-
sionnelle et sur l’aptitude du candidat à exercer
en équipe, doit être appréciée en fonction de
la grille de notation. Or, cette grille n’avait pas
été établie, ce qui conduit le Conseil d’État à
annuler la délibération du jury.
Arrêté du 28 juin 1999 relatif à l’organisation du concours de
praticien des établissements publics de santé, article 29.
RESPONSABILITÉ MÉDICALE
Au cas d’une symptomatologie
non parlante, la faute est de
ne pas avoir mis en œuvre la
surveillance qui aurait permis
de trouver le bon diagnostic
Conseil d’État, 3 avril 2009, n° 306777
Les parents d’une jeune enfant recherchent la
responsabilihospitalière du fait du retard de
diagnostic de la méningite à pneumocoque.
Il n’est pas contesté qu’une symptomatologie
rendait difficile le diagnostic. Mais, l’état de
l’enfant lors d’une consultation, sistant depuis
quatre jours au drainage et aux antibiotiques
prescrits selon le diagnostic initial d’infection
à type d’otite microbienne, nécessitait une
réévaluation de ce diagnostic ainsi qu’une
mise en observation pour une évaluation plus
objective, aidée d’examens complémentaires à
comparer aux examens antérieurement réalisés
le 1
er
février et des avis autres que celui de
l’interne de garde. Ces éléments établissent un
retard fautif, qui a compromis les chances de
rétablissement total ou partiel l’enfant.
RESPONSABILITÉ MÉDICALE
Si une erreur de diagnostic
n’est pas nécessairement
fautive, il en va différemment
lorsque l’évolution des
signes cliniques n’est pas
interprétée correctement
Cour administrative d’appel de Nancy,
9 avril 2009, n° 07NC00765
Lors d’une hospitalisation le 1er septembre 1999,
les signes cliniques présentés par un patient
qui souffrait d’un abcès du tiers inférieur de la
jambe gauche, pouvaient correspondre à une
arthrite septique et l’intervention chirurgicale
La Lettre du Pneumologue Vol. XII - n° 4-5 - juillet-août-septembre-octobre 2009 | 109
DROIT MÉDICAL
À savoir
La Lettre du Pneumologue
est indexée dans la base Pascal
de l’Institut de l’information scientifique
et technique du CNRS (INIST-CNRS).
qu’il a subie le 18 septembre 1999, consistant
en un drainage ri-osseux, était conforme aux
données de la science. En revanche, les clichés
de la cheville de face et de profil, réalisés le 18
octobre 1999, permettaient d’établir avec certi-
tude un diagnostic d’ostéomyélite ou d’ostéite
de l’extrémité du tibia gauche, en particulier
chez un patient dont le passé médical le prédis-
posait au développement d’une telle affection,
puisqu’il était porteur de la maladie de Rendu-
Osler et avait été opéré d’un abcès cérébral en
1984. Ce retard à poser un tel diagnostic a eu
pour conséquence de différer de deux mois la
réalisation d’une trépanation du foyer osseux,
seul traitement chirurgical adapté à son état,
et a conduit à opérer inutilement le patient à
trois reprises les 22 octobre, 4 et 10 novembre
1999, provoquant notamment l’excision du
tendon du jambier anrieur. Ces faits engagent
la responsabilité pour faute médicale.
ACTUALITÉS GÉNÉRALES
Le médecin gynécologue de
Dati convoqué par son conseil
de l’ordre pour violation du
secret médical et publicité
Paris-Match a publune interview du médecin
qui a accouché Rachida Dati, le 2 janvier, sous
le titre : “J’ai raccompagné Rachida Dati à la
sortie de la clinique”, faisant le récit par le
menu des soins prodigués, sur un ton assez
“people”. Le conseil de l’ordre des médecins
de Paris a aussitôt demandé des explications,
envisageant des poursuites disciplinaires.
Tout le monde sait que l’enfant est par sa-
rienne, mais cela n’autorise par le médecin à
donner la moindre indication sur ce qu’il a
pratiqué, et ses déclarations sont une violation
du secret dical (art. R. 4127-4 du code de la
Sanpublique). Ensuite, le médecin a vanté sa
pratique qui a permis une reprise d’activité si
rapide, ce qui constitue une forme de publici
prohibée (art. R. 4127-19).
ACTUALITÉS GÉNÉRALES
La Cour d’appel de Washington
condamne les fabricants de
tabac américains à retirer les
mentions “légères” des
paquets de cigarettes
afin de ne pas tromper les
fumeurs sur la nocivité des
produits
La Cour d’appel de Washington, par un arrêt
du 22 mai 2009, sanctionne la volonté des
cigarettiers de mentir aux consommateurs en
mettant en avant le caractère moins nocif des
produits “light”, et les condamne à retirer des
paquets de cigarettes les mentions “légères”,
“ultra-légères” qualifiées de trompeuses. Philip
Morris a saisi la Cour suprême.
L’arrêt vise une étude, publiée par le British
Medical Journal en 2004, démontrant que
la consommation régulière de ces cigarettes
“légères” entraîne les mes risques de cancer
que les produits dits “normaux”. Les entre-
prises font la publicité de ce tabac “light” en
communiquant sur leur taux de goudron et
de nicotine plus bas que pour les cigarettes
“classiques”. Cependant, dans les faits,
cette réduction des taux est annihilée par le
comportement des fumeurs qui consomment
un nombre plus important de cigarettes pour
obtenir les mêmes doses de nicotine.
Par ailleurs, le niveau plus faible des compo-
sants, notamment la nicotine, inciterait
les consommateurs de tabac à aspirer plus
longuement la fumée, augmentant ainsi les
effets de dépendance. Au final, les cigarettes
“light” seraient même plus dangereuses que
les produits classiques, car elles provoqueraient
une dépendance plus forte tout en faisant
courir aux fumeurs les mêmes risques pour
la santé.
En décembre 2008, la Cour suprême améri-
caine avait dit recevable l’action des fumeurs
contre les fabricants de tabac pour tromperie
au motif que le label “light” était présenté
comme étant moins nocif.
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