néphropAthIe t u B u l o -InterstItIelle AIguë
Rev Med Liège 2010; 65 : 7-8 : 459-463 463
d’une dialyse au stade aigu si le diagnostic est
retardé, mais seulement 10% des patients néces-
sitent une épuration extra-rénale au long cours
(11). La récupération de la fonction rénale est
alors incomplète, avec dans près de 40% des cas,
le maintien à des valeurs au-dessus de la normale
de la créatininémie avec un risque d’évolutivité
vers l’insuffisance rénale chronique (4).
Certains éléments cliniques sont des éléments
de pronostic. En effet, une IRA prolongée (supé-
rieure à 3 semaines), les NTIA associées à la
prise d’AINS et certains aspects histologiques
de l’affection, notamment la présence de granu-
lomes et de la fibrose interstitielle importante,
sont des facteurs de mauvais pronostic (12).
r
a P P e l
d u
r ô l e
d e s
ains
e n
P a t h O l O g i e
r é n a l e
a i g u ë
Outre la NTIA, les AINS peuvent provoquer
une IRA fonctionnelle (pré-rénale), des troubles
ioniques (hyponatriémie et hyperkaliémie), ou
encore un syndrome néphrotique.
L’IRA fonctionnelle se développe principa-
lement chez des patients avec une diminution
du volume circulant effectif (insuffisance car-
diaque, cirrhose, prise d’inhibiteur d’enzyme de
conversion), ou en déplétion volumique vraie
(déplétion hydrosodée, hémorragie, etc). En
effet les prostaglandines produites en intra-rénal
dans cette situation d’hypovolémie relative ou
réelle diminuent les résistances vasculaires pré-
glomérulaires, afin de maintenir un débit de per-
fusion rénale adéquat. Les AINS bloquent cette
production intra-rénale de prostaglandines. Bien
que les inhibiteurs sélectifs de la COX-2 protè-
gent contre les effets indésirables digestifs, ils ne
sont pas pour autant inoffensifs pour le rein, qui
exprime la COX-2 de manière constitutive (9).
Lorsque les AINS provoquent un syndrome
néphrotique, on peut retrouver alors soit une
image de lésions glomérulaires minimes (la né-
phrose lipoïdique ou «minimal change disease»),
soit une glomérulopathie membraneuse.
c
onclusIon
La NTIA est une pathologie de présentation
protéiforme peu spécifique. Dans le cas présenté,
la patiente, a posteriori, a développé une symp-
tomatologie plutôt typique d’une origine toxique
liée aux AINS. En effet, la symptomatologie à
l’avant-plan était digestive, et les symptômes de
type allergique étaient absents.
La présentation clinique de cette pathologie
est souvent peu évocatrice. De plus, les médi-
caments responsables sont très usités, souvent
non signalés lors de l’anamnèse systématique.
Par conséquent, il y a un risque élevé de négliger
ces affections, donc de ne pas les traiter. Ceci
peut avoir des conséquences relativement impor-
tantes sur la fonction rénale et sur le pronostic à
long terme pour le patient.
Les analyses urinaires sont indispensables pour
orienter le diagnostic en présence d’une créatini-
némie accrue. Elles ne sont cependant pas suffi-
samment spécifiques pour établir un diagnostic
de certitude de NTIA. Actuellement, la biopsie
rénale garde toujours une place importante dans
la recherche étiologique des IRA organiques.
L’amélioration clinique et biologique dès l’arrêt
de la thérapeutique inductrice sert également de
test diagnostique.
Les étiologies médicamenteuses de NTIA
nous rappellent la nécessité d’une prudence dans
nos prescriptions ainsi que le danger potentiel de
l’automédication. Les causes infectieuses sont,
en fréquence, de loin dépassées par les causes
médicamenteuses dont les AINS. Le recours à
ces derniers doit toujours être réfléchi. «Primum
non nocere» doit rester au centre de notre atti-
tude de prescripteur.
B
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Les demandes de tirés à part sont à adresser au
Pr. J.M. Krzesinski, Service de Néphrologie-Dialyse-
Hypertension, CHU de Liège, 4000 Liège, Belgique.