F. Petitjean L’Encéphale, 2006 ;
32 :
1051-5, cahier 3
S 1054
Plusieurs études expérimentales ont validé cette appro-
che au cours des 25 dernières années. Une méta analyse
sur 1 185 patients (16) montre un effet global positif, avec
une taille d’effet satisfaisante (effect size = 0,55,
vs
0,1).
Une étude québécoise (5) montre une amélioration de la
symptomatologie, du fonctionnement cognitif et social, et
de la qualité de vie.
Les modules IPT s’appuient sur le soutien émotionnel
et les interactions de groupe, sur un entraînement des
fonctions attentionnelles, perceptuelles, et cognitives, et
un entraînement aux compétences sociales et à la réso-
lution de problèmes. Ils utilisent des exercices à domicile
et des sorties d’intégration.
La mise en œuvre de ces programmes doit répondre à
des principes de base, définis par W. Anthony et
R. Liberman (1), et s’inspirant des thérapies cognitivo-
comportementales : une relation confiante, chaleureuse
et respectueuse, la fixation à l’avance de la durée du pro-
gramme de soins, l’utilisation du jeu de rôle, la prescription
de tâches à domicile, et l’information du patient quant aux
changements observés. L’optimisation des résultats
s’appuie sur un renforcement des progrès au fur et à
mesure, et sur une implication de la famille ou de l’envi-
ronnement naturel.
Il est nécessaire de mesurer les progrès observés avec
ces programmes. Parallèlement aux instruments de mesu-
res classiques de la symptomatologie psychiatrique, des
instruments spécifiques d’évaluation ont été développés,
concernant soit les fonctions cognitives, soit le fonctionne-
ment social, comme la batterie CANTAB
(Cambridge Neu-
ropsychological Test Automated Battery)
(19), instrument
informatisé d’évaluation cognitive, ou comme la CASIG
(Client’s Assessment of Strengths, Interests and Goals)
(22), qui comporte un volet de mesure des symptômes
(CASIG-I) et un volet de mesure du fonctionnement social
(CASIG-S). Ces instruments sont disponibles en français.
Le questionnaire de Francfort permet au sujet d’auto-
évaluer son fonctionnement cognitif (7). La MCAS
(Mult-
nomah Community Ability Scale)
, (2, 6) est une échelle
d’évolution du fonctionnement social, la LQLP
(Lan-
cashire Quality of Life Profile)
, (20) est une échelle de qua-
lité de vie utilisée dans de nombreux pays.
Traitements cognitivo-comportementaux
Il faut faire une distinction entre les programmes de
remédiation cognitive et les traitements cognitivo-compor-
tementaux. Ceux-ci ont été développés initialement dans
la dépression et les troubles anxieux, et leurs principes
ont été par la suite appliqués au délire et aux hallucina-
tions.
Les programmes de remédiation cognitive permettent
un travail sur les fonctions cognitives de base : elles visent
à améliorer ce qui est sous-jacent à la symptomatologie
du patient.
Les thérapies cognitivo-comportementales intervien-
nent sur les symptômes eux-mêmes et sur les processus
cognitifs qui pérennisent les symptômes psychotiques,
dans des indications surtout centrées sur les symptômes
résistants aux antipsychotiques. On obtient ainsi souvent
une prise de recul du patient par rapport à ses symptômes
positifs.
CONCLUSION
L’époque du « poly pragmatisme préscientifique » évo-
quée par H. Häfner en 1975 (10, 18) est révolue : il existe
des méthodes dont l’efficacité a été démontrée par des
données probantes. La psychoéducation, l’entraînement
aux habiletés sociales et la remédiation cognitive doivent
être mis en œuvre selon des séquences adaptées à cha-
que patient.
La diffusion de ces techniques ainsi que l’élaboration
de formations adaptées à leur mise en place restent
cependant à développer.
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