tats précoces des essais NSABP B31, NCCTG N9831 et HERA
présentés à l’ASCO cette année ont démontré l’intérêt majeur du
trastuzumab pendant 1 an associé aux taxanes, avec une dimi-
nution d’environ 50 % du taux de rechute. En situation néoadju-
vante, A.U. Buzdar et al. (28)ont retrouvé aussi un intérêt majeur
de l’association, avec un taux de réponse histologique complète
de 65,2 % versus 26,3 %.
Dans tous les traitements adjuvants et néoadjuvants, les sché-
mas thérapeutiques comprenaient des anthracyclines, et le
trastuzumab n’était pas introduit avec les anthracyclines étant
donné sa cardiotoxicité. Or, plus le trastuzumab est admi-
nistré tôt, meilleurs sont les résultats. Il serait donc intéres-
sant d’étudier dans ces situations des schémas sans anthra-
cycline qui permettraient de mettre en route le trastuzumab
le plus rapidement possible. L’essai du BCIRG 006 attendu
à San Antonio devrait répondre à cette question.
Après échec des taxanes, d’autres molécules ont prouvé
leur efficacité, comme la vinorelbine, la capécitabine et la gem-
citabine. D’autres molécules sont actuellement en cours de déve-
loppement, en particulier de nouveaux poisons du fuseau.
Le RPR 109881 est un nouveau taxane dérivé du docétaxel, qui
montre, en préclinique, une absence de résistance croisée et un
passage de la barrière hémato-méningée, avec un profil de tolé-
rance très satisfaisant, notamment une absence de rétention
hydrique et de neuropathie. L’étude de phase II de V. Diéras et
al. (ASCO 2005, abstract 565) retrouvait un taux de réponse de
19,4 % chez les patientes considérées comme résistantes aux
taxanes, et de 41,9 % chez les patientes considérées comme non
résistantes. Un essai de phase III comparant le RPR 109881 à la
capécitabine après échec des taxanes est en cours.
AbraxaneTM AB1007 est une nouvelle formulation sans cremo-
phor du paclitaxel préparée par homogénéisation à haute pres-
sion de paclitaxel en présence d’albumine sérique humaine, abou-
tissant en une suspension colloïdale de nanoparticules (29).
AbraxaneTM a montré des résultats encourageants en première et
deuxième ligne métastatique (J. O’Shaughnhessy, SABCS 2003,
abstract 44), avec un taux de réponse de 33 % et une survie sans
progression médiane de 21,9 mois. Les doses limitantes toxiques
(DLT) sont les neuropathies, les stomatites et les kératites.
Les épothilones appartiennent à la famille des taxanes.
L’ixabépilone, un analogue semi-synthétique de l’épothilone B,
a montré une activité dans les modèles précliniques résistants
au paclitaxel (30). Il existait aussi une synergie avec le
trastuzumab dans les modèles BT474. Les essais de phase II
ont retrouvé des taux de réponse variant de 12 à 44 % (E. Tho-
mas, ASCO 2003, abstract 30 ; H. Roche, ASCO 2003, abstract
69 ; 31). Les toxicités de grades 3-4 retrouvées étaient la neu-
tropénie (35 %), la diarrhée (11 %) et la neuropathie (4 à 23 %).
Une étude néoadjuvante a retrouvé un taux de réponse histolo-
gique complète de 21 % après 4 cycles (A. Llombart-Cussac,
ASCO 2005, abstract 586). D’autres épothilones sont en cours
d’investigation.
Un des intérêts majeurs des épothilones et du RPR est le
passage de la barrière hémato-méningée, alors qu’il semble que
l’incidence des métastases cérébrales augmente (principalement
chez les patientes traitées par trastuzumab, dont le premier
événement métastatique se situe dans 20 à 30 % des cas au
niveau cérébral).
De nouvelles molécules ciblées sont aussi en cours de développe-
ment. Le pertuzumab inhibe l’hétérodimérisation de HER1 et HER2
(32-35). Son site de fixation sur HER2 est donc distinct de celui
du trastuzumab (36, 37). Des essais de phase II sont en cours.
Le GW 572016 ou lapatinib, quant à lui, est un inhibiteur de
tyrosine kinase HER1 et HER2 administré par voie orale. En
monothérapie dans le cancer du sein métastatique multitraité,
le taux de réponse objective était de 5 %, mais avec un taux
de stabilisation de 24 % (K.L. Blackwell, ASCO 2005, abs-
tract 3004). La tolérance était marquée par les rashs cutanés,
la diarrhée, les nausées et la fatigue. Par ailleurs, son asso-
ciation avec l’hormonothérapie s’est avérée synergique
(Q. Chu, ASCO 2005, abstract 3001). Enfin, des essais de
phase I d’association avec le trastuzumab dans des popula-
tions prétraitées ont retrouvé des taux de réponse objective
de 29 % et des taux de stabilisation de 29 % (Storniolo, ASCO
2005, abstract 559).
Le SU 112248 est un inhibiteur de VEGF, PDGF, c-kit et
FLT 3R également administré par voie orale. K.D. Miller et al.
(ASCO 2005, abstract 563) ont retrouvé un taux de réponse
objective de 14 % dans une population de patientes présentant
un cancer du sein métastatique ayant déjà été traité par anthra-
cyclines et taxanes.
Enfin, le rationnel ayant conduit à l’étude des inhibiteurs de
mTOR comme le temsirolimus (CCI-779) ou l’everolimus
(RAD001) est l’amplification d’AKT, la perte des hétérozy-
goties de PTEN et la suractivation de PI3K. Avec ces traite-
ments, la tolérance est marquée par l’hyperglycémie, l’HTA,
l’hyperlipidémie, l’asthénie, la stomatite et la thrombopénie.
Les essais précliniques ont retrouvé une synergie avec l’hormono-
thérapie, les inhibiteurs des récepteurs aux tyrosines kinases, le
trastuzumab et le pertuzumab, les inhibiteurs de IGF1R (effet
supra-additif), le cisplatine et la gemcitabine. L’essai de
phase II de S. Chan (38) a retrouvé un taux de réponse objec-
tive de 9,2 %. Tous ces agents semblent très prometteurs pour
certaines tumeurs “triples négatives” (RO- RP- HER2-) très
agressives et résistantes à la chimiothérapie.
TAXANES ET TRANSFERT
Alors que les taxanes se développent dans des stratégies de traite-
ment conventionnel, les premières thérapeutiques ciblées arrivent.
L’utilisation de ces thérapeutiques adaptées à une cible spécifique
implique de définir la sous-population concernée au sein de la
population globale des patients. Le risque est en effet de diluer les
effets positifs d’une thérapeutique en l’appliquant à une population
non ciblée. L’échec du gefitinib dans les cancers bronchiques en
est l’un des exemples les plus flagrants. C’est dans cette démarche
que le transfert, c’est-à-dire la collaboration entre les équipes de
recherche et les équipes médicales, trouve toute sa place.
Il s’agit tout d’abord d’identifier la maladie, les cibles, et de
comprendre les circuits de signalisation. Il faut ensuite identifier
les marqueurs pharmacocinétiques et de stratification basés sur
la cible (surexpression, mutation, activation…). Les approches
MISE AU POINT
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La Lettre du Cancérologue - Volume XIV - n° 5 - septembre-octobre 2005