© La Lettre
du Neurologue
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Décembre2012.
Images en Ophtalmologie
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Éditorial
L’éducation thérapeutique en question
André Grimaldi
(Service de diabétologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris)
Si on devait expliquer l’éducation thérapeutique à un profane,
ondirait qu’ils’agit d’apprendre au patient à devenir son propre
médecin. Du moins est-ce lebut idéal.
Si l’on croit vraiment à cet objectif de l’éducation thérapeutique,
ilestparticulièrement intéressant de se demander comment
sesoignent les médecins compétents en diabétologie lorsqu’ils sont
eux-mêmes diabétiques ? À la vérité, ilsressemblent fort aux autres
patients diabétiques. Etc’estfi nalement assez rassurant ! Néanmoins,
on ne peut qu’être interpellé parlecomportement de certains,
excellents pour soigner les autres et ayant lesplusgrandes diffi cultés
à se soigner.
J’ai ainsi enseigné le diabète et son traitement pendant 10ans aux internes
demédecine générale, avec un médecin généraliste. Celui-ci, arrivé à l’âge
delaretraite, me consulte car ses glycémies sont à plus de 2grammes, et me
confi e : “Jene prends aucun médicament, je ne pense pas qu’ils sont effi caces”.
J’étais un peu surpris ! Nousavons hospitalisé dans le service, pour un mal
perforant plantaire, un professeur de radiologie spécialisé dans la radiologie
ostéo-articulaire et ayant publié des articles sur l’imagerie de l’ostéo- athropathie
nerveuse diabétique. Il avait complètement oublié qu’il était diabétique ! Le fond
d’œil, fait au lit, montra unerétinopathie proliférante nécessitant un traite-
ment par laser en urgence. Unchirurgien vasculaire ayant ponté desdiabé-
tiques, en ayant amputé d’autres, lui-même triple ponté coronarien, ne prenait
aucun médicament. Il m’est adressé par les ophtalmologistes pour la découverte
d’unerétinopathie diabétique, et entre dans le box de consultation en levant les
mains en l’air : “Jemerends !” Etcetteophtalmologue qui “lasérisait” la rétine
de ses patients pendant quesonrein se détruisait, jusqu’à ce qu’elle bénéfi cie
d’une double greffe rein-pancréas… Et tant d’autres…
Que conclure ? Qu’il est bien connu que les cordonniers sont les plus mal chaussés ?
Peut-être… Plus fondamentalement, je pense que, si les médecins sesoignent
souvent mal, c’est que ce sont des gens normaux. Quatre leçons mesemblent
devoir en être tirées.