II ESPACES COMPLETS - ESPACES COMPACTS ESPACES CONNEXES Dans tout le chapitre, K désigne le corps R ou C. 1. Espaces métriques complets 1.1 Dénition Soit (E; d) un espace métrique ; on dit qu'une suite (xn )n2N d'éléments de E est une suite de Cauchy si elle vérie 8" > 0; 9N 2 N; 8n; m 2 N; n N et m N =) d(xn; xm) < ": 1.2 Proposition Toute suite convergente d'un espace métrique est une suite de Cauchy. Preuve : Soit (xn )n2N une suite d'éléments d'un espace métrique (E; d) convergeant vers une limite l, alors 8" > 0; 9N 2 N; 8n 2 N; n N =) d(xn; l) < 2" d'où 8n; m 2 N; n N et m N =) d(xn; xm) d(xn; l) + d(l; xm) < 2" + 2" = ": 1.3 Remarques a) La réciproque de la proposition précédente est fausse : il existe des suites de Cauchy qui ne sont pas convergentes. Par exemple la suite (1=n)n2N est une suite de Cauchy dans l'espace métrique E =]0; +1[ muni de la distance usuelle d1 (x; y ) = jx y j mais n'est pas convergente dans E . b) Deux distances topologiquement équivalentes sur un même espace E ont les mêmes suites convergentes mais pas les mêmes suites de Cauchy : la notion de suite de Cauchy n'est donc pas une notion topologique mais bien métrique ; par exemple si on considère l'espace E =]0; +1[, la distance usuelle d1 et la distance d(x; y ) = j ln(x=y )j sont topologiquement équivalentes sur E mais la suite (1=n)n2N est une suite de Cauchy pour d1 alors qu'elle ne l'est pas pour d. (cf. exercice) c) Deux distances métriquement équivalentes sur un espace E ont les mêmes suites de Cauchy. 1 1.4 Proposition Soit (xn )n2N une suite d'éléments d'un espace métrique (E; d) ; si (xn )n2N est une suite de Cauchy et possède au moins une valeur d'adhérence, alors (xn )n2N est convergente. Preuve : La suite (xn )n2N est une suite de Cauchy, donc pour tout " > 0 il existe N1 2 N tel que 8n; m 2 N; n N 1 " et m N1 =) d(xn ; xm ) < : 2 D'autre part, la suite (xn )n2N possède une valeur d'adhérence l donc il existe une application ' : N ! N strictement croissante telle que la sous-suite (x'(n) )n2N converge vers l, donc il existe N2 2 N tel que 8n 2 N; n N =) d(x' n ; l) < 2" : L'application ' étant strictement croissante, on a 8n 2 N; '(n) n, alors en posant N = max(N ; N ), pour tout n N , on a '(n) n N donc d(xn ; x' n ) < " . D'autre part, , pour tout n N , on a n N , donc d(x' n ; l) < " . Ainsi on a " " n N =) d(xn ; l) d(xn ; x' n ) + d(x' n ; l) < + = " 2 2 2 1 ( ) 2 1 2 ( ) ( ) ( ) 2 2 ( ) donc (xn )n2N converge vers l. 1.5 Proposition Soient (E; dE ) et (F; dF ) deux espaces métriques et f : E ! F une application uniformément continue. Alors l'image par f de toute suite de Cauchy d'éléments de E est une suite de Cauchy d'éléments de F . Preuve : cf. exercice. 1.6 Remarque L'image d'une suite de Cauchy par une application continue n'est pas nécessairement une suite de Cauchy : par exemple, la suite (1=n)n2N est une suite de Cauchy dans E =]0; +1[ mais si on considère l'application continue f dénie sur E par f (x) = 1=x, alors l'image par f de la suite (1=n)n2N est la suite (n)n2N qui n'est pas une suite de Cauchy. 1.7 Proposition On considère p espaces métriques (E1 ; dE1 ), (E2 ; dE2 ), , (Ep ; dE ) et leur produit cartésien E = E1 E2 Ep muni de l'une des trois distances équivalentes d1 , d2 ou d1 dénies en I.5.4. Alors une suite (xn )n2N d'éléments de E , où xn = (x1n ; x2n ; ; xpn ) pour tout n 2 N, est une suite de Cauchy si et seulement si chacune des suites (xin )n2N est une suite de Cauchy dans Ei . p Preuve : en exercice. 1.8 Dénition On dit qu'un espace métrique (E; d) est complet si toute suite de Cauchy d'éléments de E est convergente. On appelle espace de Banach tout espace vectoriel normé complet. 2 1.9 Exemples a) R muni de la distance usuelle est un espace complet : c'est donc un espace de Banach. b) C muni du module est un espace complet : c'est donc un espace de Banach. c) ]0; +1[ muni de la distance usuelle n'est pas complet. d) Q muni de la distance usuelle n'est pas complet. Preuve : a) Montrons que R muni de la distance usuelle est un espace complet : considérons une suite (xn )n2N de Cauchy dans R et notons Xp = fxn = n pg pour tout p 2 N. Comme une suite de Cauchy de R est bornée, les ensembles Xp sont tous bornés et de plus la suite des diamètres (Xp ) tend vers 0 quand p ! +1 : en eet, pour tout p 2 N, Xp+1 Xp donc (Xp+1 ) (Xp ), de plus la suite (xn )n2N est de Cauchy, on en déduit alors que 8" > 0; 9N 2 N; 8p 2 N; p N =) (Xp) (XN ) < ": On peut donc considérer ap = inf Xp et bp = sup Xp pour tout p 2 N et on a de manière évidente (Xp ) = bp ap pour tout p 2 N. Comme la suite d'ensembles (Xp )p2N est décroissante, il est clair que la suite (ap )p2N est croissante et la suite (bp )p2N est décroissante ; de plus bp ap = (Xp ) ! 0 quand p ! +1 donc les suites (ap )p2N et (bp )p2N sont adjacentes : elles convergent donc vers une même limite a . De plus, on a 8p 2 N; xp 2 Xp donc ap xp bp d'où xp ! a quand p ! +1 et ainsi (xn )n2N est convergente. b) Considérons une suite (zn )n2N de Cauchy dans C : alors, si on note xn =Rezn et yn =Im zn pour tout n 2 N, de l'égalité jzn zm j2 = jxn xm j2 + jyn ym j2 , on déduit aussitôt que les suites (xn )n2N et (yn )n2N sont des suites de Cauchy dans R donc convergent resp. vers des limites x et y puisque R est complet. Alors il est clair que la suite (zn )n2N converge vers z = x + iy et ainsi C est complet. c) On a vu en 1.2 que la suite (1=n)n2N est une suite de Cauchy dans l'espace métrique ]0; +1[ qui n'est pas convergente, donc ]0; +1[ n'est pas complet. d) Montrons que Q muni de la distance usuelle n'est pas complet : considérons pour tout n 2 N l'ensemble An = fm 2 N = m2 2:4n g ; alors An est un sous-ensemble non vide majoré de N, donc admet un plus grand élément que l'on notera an . Posons rn = an =2n pour tout n 2 N : alors pour tout n 2 N, rn 2 Q et, comme an 2 An et an + 1 62 An , rn vérie l'encadrement p p 2 21n rn 2 donc (rn )n2N est une suite de Cauchy d'éléments de Q qui ne converge pas dans Q puisque, si elle convergeait, ce serait vers un rationnel r vériant r = 2, ce qui est impossible. 2 1.10 Proposition a) On considère p espaces métriques (E1 ; dE1 ), (E2 ; dE2 ), , (Ep ; dE ) et leur produit cartésien E = E1 E2 Ep muni de l'une des trois distances topologiquement équivalentes d1 , d2 ou d1 dénies en I.5.4 ; alors E est complet si et seulement si tous les Ei p sont complets. 3 b) On considère p espaces vectoriels normés (E1 ; k:kE1 ), (E2 ; k:kE2 ) (Ep ; k:kE ) et leur produit cartésien E = E1 E2 Ep muni de l'une des trois normes équivalentes dénies en I.7.4 ; alors E est un espace de Banach si et seulement si tous les Ei sont des espaces de Banach . En particulier Kp est un espace de Banach pour chacune des trois normes dénies en I.7.4. p Preuve : en exercice. 1.11 Théorème Soit (E; d) un espace métrique complet et (F \n )n2N une suite décroissante de fermés non vides de E telle que n! lim ( F ) = 0 ; alors Fn est non vide et réduit à un point. n +1 n Preuve : 2N Considérons pour tout n 2 N un élément xn 2 Fn , alors la suite (xn )n2N est une suite de Cauchy, en eet : pour tout n 2 N, si m n alors xn et xm 2 Fn puisque la suite (Fn )n2N est décroissante, donc d(xn ; xm ) (Fn ) ; or n! lim (Fn ) = 0 donc +1 8" > 0; 9N 2 N; 8n 2 N; n N =) (Fn) < " on en déduit 8" > 0; 9N 2 N; 8n; m 2 N; m n N =) d(xn; xm) < " et ainsi (xn )n2N est une suite de Cauchy. Par conséquent elle converge vers une limite x 2 E puisque E est complet. Or, pour tout n 2 N, si m n, alors xm 2 Fn qui est fermé \ donc x 2 Fn , donc x 2 Fn qui est ainsi non vide. n2N \ Supposons que Fn contient un autre élément y, alors, pour tout n 2 N, x et y 2 Fn n2N donc d(x; y ) (Fn ), on en déduit que d(x; y ) = 0 puisque n! lim (Fn ) = 0, et par +1 \ conséquent x = y : Fn est donc réduit à un point. n2N 1.12 Proposition a) Soit (E; d) un espace métrique et A un sous-ensemble de E ; si A est complet pour la distance induite par d, alors A est fermé dans E . b)Soit (E; d) un espace métrique complet et A un sous-ensemble de E ; alors A muni de la distance induite par d est un espace complet si et seulement si A est fermé dans E . Preuve : a) Supposons A complet et montrons que A est fermé : soit x 2 A, alors il existe une suite (xn)n2N d'éléments de A qui converge dans E vers x. Cette suite étant convergente, est de Cauchy donc converge dans A puisque A est complet et ainsi x 2 A : A est donc fermé. 4 b) Supposons A fermé dans (E; d) complet et considérons une suite de Cauchy (xn )n2N d'éléments de A ; alors (xn )n2N converge dans E vers une limite x 2 E puisque E est complet, or A est fermé donc x 2 A et ainsi la suite (xn )n2N converge dans A : A est donc complet. 1.13 Théorème Soit (E; k:kE ) un espace vectoriel normé et (F; k:kF ) un espace de Banach, alors l'espace L(E; F ) des applications linéaires continues de E dans F est un espace de Banach pour la norme k:kL(E;F ) . Preuve : Soit (Tn )n2N une suite de Cauchy d'éléments de entiers n et m, on a : L(E; F ), alors pour tout x 2 E et tous kTn(x) Tm(x)kF kTn TmkL E;F :kxkE ( ) donc (Tn (x))n2N est une suite de Cauchy de l'espace complet F : on en déduit que (Tn(x))n2N possède une limite dans F que l'on notera T (x). Il est clair que T est une application linéaire, montrons qu'elle est continue et que (Tn )n2N converge vers T dans L(E; F ) : la suite (Tn)n2N étant de Cauchy, pour tout " > 0 il existe N 2 N tel que 8n; m 2 N; n N et m N =) kTn TmkL E;F < " donc, pour tout x 2 E , on a : 8n; m 2 N; n N et m N =) kTn(x) Tm(x)kF < "kxkE or l'application norme est continue sur F donc kTn (x) Tm (x)kF ! kTn (x) T (x)kF quand m ! +1, d'où ( ) 8n 2 N; n N =) kTn(x) T (x)kF "kxkE : On déduit de cette majoration, tout d'abord que 8x 2 E; kT (x)kF kTN (x)kF + kTN (x) T x)kF kTN kL E;F kxkE + "kxkE ( donc ( ) 8x 2 E; kT (x)kF kTN kjL E;F + " kxkE ( ) c'est-à-dire T est continue, et ensuite que 8n 2 N; n N =) kTn T kL E;F " donc (Tn )n2N converge vers T dans L(E; F ). ( ) 5 1.14 Corollaire et dénition On appelle dual topologique d'un K-espace vectoriel normé E et on note E 0 l'espace L(E; K) des formes linéaires continues sur E ; alors E 0 est un espace de Banach pour la norme k:kL(E;K) . Preuve : K étant un espace de Banach d'après 1.9, il sut d'appliquer le théorème 1.13. 1.15 Dénition Soit f une application dénie sur un espace métrique E à valeurs dans un espace métrique F : on dit que f est contractante s'il existe k 2]0; 1[ tel que f est k-lipschitzienne. 1.16 Théorème du point xe Soit (E; d) un espace métrique complet et soit f : E ! E une application contractante ; alors f admet un unique point xe : il existe un unique x0 2 E tel que f (x0 ) = x0 . Preuve : L'application f étant contractante, il existe k 2]0; 1[ tel que 8x; y 2 E; d(f (x); f (y)) kd(x; y): Considérons la suite (xn )n2N dénie par récurrence de la manière suivante : x0 2 E et 8n 2 N; xn+1 = f (xn). Alors on a 8n 2 N; d(xn+1; xn) knd(x1; x0) en eet, l'inégalité est vériée pour n = 0, et si elle est vériée au rang n pour un certain n 2 N, on a d(xn+2 ; xn+1 ) = d(f (xn+1 ); f (xn )) kd(xn+1 ; xn ) kn+1 d(x1 ; x0 ) par hypothèse, donc l'inégalité est vériée au rang n + 1. On en déduit que la suite (xn )n2N est de Cauchy : en eet, si m n, on a d(xm ; xn ) m X1 j =n d(xj +1 ; xj ) m X1 j =n k j d(x1 ; x0 ) kn 1 k d(x ; x ) 1 0 or k 2]0; 1[ donc kn ! 0 quand n ! +1 ; par conséquent la suite (xn )n2N est de Cauchy dans l'espace complet E , elle converge donc vers une limite x 2 E . Or f est continue puisque lipschitzienne, donc, puisque pour tout n 2 N; xn+1 = f (xn ), on obtient quand n ! +1, f (x) = x : x est donc un point xe de f . Supposons que f admet deux points xes x et y , alors on a d(x; y) = d(f (x); f (y)) kd(x; y) or k 2]0; 1[, donc nécessairement, d(x; y ) = 0 i.e x = y : f possède donc un unique point xe. 6 2. Espaces compacts 2.1 Dénitions Soit (E; d) un espace métrique et A un sous-ensemble de E . a) On[appelle recouvrement ouvert de A toute famille (Ui )i2I d'ouverts de E tels que A Ui . 2 b) On dit que A est compact s'il vérie la propriété dite de Borel-Lebesgue : de tout recouvrement ouvert (Ui )i2I de A, on peut [ extraire un recouvrement ni, i.e il existe un sous ensemble ni J de I tel que A Ui . Lorsque A = E , on dit que E est un espace i2J métrique compact. i I 2.2 Exemples a) Tout espace métrique ni est compact. b) Tout intervalle fermé borné [a; b] de R est compact. Preuve : b) Considérons un recouvrement ouvert (Ui )i2I de [a; b] et notons E l'ensemble des éléments x de [a; b] tel que [a; x] peut être recouvert par un nombre ni d'ouverts de la famille (Ui)i2I : on va montrer que b 2 E et ainsi [a; b] sera compact. L'ensemble E est non vide (a 2 E ) et majoré par b donc E possède une borne supérieure 2 [a; b]. Comme (Ui )i2I est un recouvrement ouvert de [a; b], il existe k 2 I tel que 2 Uk , or Uk est ouvert donc il existe " > 0 tel que ] "; + "[ Uk donc il existe < tel que [; ] Uk ; on a < = sup E donc il existe c 2 E tel que < c et il existe une sous-famille nie (Ui )i2J qui recouvre [a; c] puisque c 2 E : alors, en adjoignant Uk à cette famille nie, on obtient un sous-recouvrement ni de [a; ], donc 2 E . Supposons < b, alors, comme ci-dessus, il existe 2]; b] tel que [; ] Uk et ainsi le recouvrement ni (Ui )i2J [fkg de [a; ] construit précédemment est aussi un recouvrement ni de [a; ], donc 2 E , ce qui est impossible puisque > = sup E . Donc b 2 E . 2.3 Proposition Soit (E; d) un espace métrique. a) Si A un sous-ensemble compact de E , alors A est fermé et borné. b) si E est compact, alors un sous-ensemble A de E est compact si et seulement si il est fermé. Preuve : a) Soit A un compact de E , montrons que A est fermé, i.e E A est ouvert : soit x 2 E A alors, pour tout y 2 A, on pose "y = d(x; y)=2 > 0. La famille (B (y; "y ))y2A est clairement un recouvrement ouvert de A, donc il existe un sous-ensemble ni A0 de A tel que (B (y; "y ))y2A0 est encore un recouvrement ouvert de A puisque A est compact ; 7 posons alors " = min "y . Il est clair que pour tout y 2 A0 , B (x; ") \ B (y; "y ) = ; : en eet, y 2 A0 si z 2 B (x; ") \ B (y; "y ), alors on a d(x; y) d(x; z ) + d(z; y) < "y + "y = d(x; y) ce qui est impossible. On en déduit que B (x; ") E A, et ainsi E A est ouvert. Montrons maintenant que A est borné : La famille (B (x; 1))x2A est clairement un recouvrement ouvert de A, donc il existe un sous-ensemble ni A1 de A tel que (B (x; 1))x2A1 est encore un recouvrement ouvert de A puisque A est compact. Considérons y et y 0 2 A, alors il existe x et x0 2 A1 tels que y 2 B (x; 1) et y 0 2 B (x0 ; 1), d'où d(y; y0 ) d(y; x) + d(x; x0 ) + d(x0 ; y0 ) 2 + M où M désigne maxfd(x; x0 ) = x; x0 2 A1 g. Donc (A) 2 + M et ainsi A est borné. b) On suppose maintenant que E est compact : si A est compact, alors A est fermé d'après a). Si A est fermé, alors E A est un ouvert que l'on notera U0 ; considérons un recouvrement ouvert (Ui )i2I de A, alors la famille (Ui )i2I 0 où I 0 = I [ f0g est un recouvrement ouvert de E , or E est compact, donc il existe un sous-ensemble ni J 0 de I 0 tel que la famille (Ui )i2J 0 est un recouvrement ouvert de E , mais U0 = E A donc la famille (Ui )i2J 0 f0g est un recouvrement ouvert ni de A qui est extrait de la famille (Ui)i2I et ainsi A est compact. 2.4 Dénition On dit qu'un espace métrique (E; d) vérie la propriété de Bolzano-Weierstrass si toute suite d'éléments de E possède au moins une valeur d'adhérence, ou encore, si de toute suite d'éléments de E , on peut extraire une sous-suite convergente. 2.5 Proposition Soit (E; d) un espace métrique vériant la propriété de Bolzano-Weierstrass ; alors, on a : a) pour tout " > 0, E est réunion d'un nombre ni de boules ouvertes de rayon " ; b) soit (Ui )i2I un recouvrement ouvert de E ; alors il existe " > 0 tel que toute boule ouverte de rayon " soit contenue dans l'un des Ui . Preuve : a) Supposons qu'il existe un réel " > 0 tel que E n'est pas réunion d'un nombre ni de boules ouvertes de rayon " ; on va construire par récurrence une suite (xn )n2N d'éléments de E qui ne possède pas de valeur d'adhérence. On considère x0 2 E , comme E 6= B (x0 ; "), il existe x1 2 E tel que d(x0 ; x1 ) " ; supposons construits [ x0 ; x1 ; ; xn 2 E tels que d(xk ; xj ) " pour 0 k < j n, alors, comme E 6= B (xk ; "), il existe xn+1 2 E 0k n tel que d(xk ; xn+1 ) " pour 0 k n. La suite (xn )n2N ainsi construite ne possède donc aucune sous-suite qui soit de Cauchy, donc aucune sous-suite convergente, ce qui contredit l'hypothèse de Bolzano-Weierstrass. 8 b) Supposons que pour tout " > 0, il existe une boule ouverte de rayon " qui n'est contenue dans aucun des Ui : alors pour tout entier n 1, il existe xn 2 E tel que la boule ouverte B (xn ; 1=n) n'est contenue dans aucun des Ui . Or la suite (xn )n2N possède une sous-suite (x'(n) )n2N convergeant vers une limite x par hypothèse, donc il existe i0 2 I tel que x 2 Ui0 ; or Ui0 est ouvert, donc il existe r > 0 tel que B (x; r) Ui0 . De plus, 1='(n) ! 0 et x'(n) ! x quand n ! +1, donc il existe N 2 N tel que 1='(N ) < r=2 et d(x'(N ) ; x) < r=2 et ainsi B (x'(N ) ; 1='(N )) B (x; r) Ui0 , ce qui est absurde. Donc il existe " > 0 tel que toute boule ouverte de rayon " soit contenue dans l'un des Ui . 2.6 Théorème Soit (E; d) un espace métrique ; E est compact si et seulement si E vérie la propriété de Bolzano-Weierstrass. Preuve : Supposons E compact et considérons une suite (xn )n2N d'éléments de E ; pour tout n 2 N, n 2 N, Fn est fermé non vide et posons An = fxp = p ng et Fn = An : pour tout \ \ Fn = ;, alors Fn 6= ; : si on a Fn+1 Fn , pour tout n 2 N. Montrons que n2N n 2N [ E = (E Fn ), et ainsi la famille (E Fn )n2N est un recouvrement ouvert de E ; comme n2N [ E est compact, il existe donc un sous-ensemble ni J de N tel que E = (E Fn ), i.e n2J \ Fn = ;. Or la suite de fermés (Fn )n2N est décroissante, donc si on note m = max J , n 2J \ \ on a Fn = Fm 6= ;. Donc Fn 6= ;. n2J n2N \ Considérons alors x 2 Fn ; on va construire par récurrence une application ' : N ! N n2N strictement croissante telle que 8n 2 N; d(x' n ; x) < n +1 1 ( ) et ainsi (x'(n) )n2N sera une sous-suite de (xn )n2N convergeant vers x, i.e (xn )n2N vériera la propriété de Bolzano-Weierstrass ; x 2 F0 donc la boule ouverte B (x; 1) rencontre A0 : il existe '(0) 2 N tel que d(x'(0) ; x) < 1. Soit n 2 N et supposons construits '(0); '(1); ; '(n) tels que '(0) < '(1) < < '(n) et d(x'(k) ; x) < 1=k + 1 pour 1 0 k n ; x 2 F'(n)+1, donc la boule ouverte B (x; n+2 ) rencontre A'(n)+1 i.e il existe un entier '(n + 1) tel que '(n + 1) '(n) + 1 et d(x'(n+1) ; x) < 1=n + 2. Réciproquement, supposons que E vérie la propriété de Bolzano-Weierstrass et considérons un recouvrement ouvert (Ui )i2I de E ; d'après 2.5 b) il existe " > 0 tel que toute boule ouverte de rayon " est contenue dans l'un des Ui , de plus d'après 2.5 a) il existe [ x1 ; x2 ; ; xn 2 E tels que E = B (xk ; "). Alors, pour tout 1 k n, il existe ik 2 I 1k n [ tel que B (xk ; ") Ui et ainsi E = Ui : E est donc compact. 1k n k k 9 2.7 Corollaire Tout espace métrique compact est complet. Preuve : Soit (E; d) un espace métrique compact et considérons une suite de Cauchy (xn )n2N d'éléments de E alors, d'après 2.6, (xn )n2N admet une valeur d'adhérence puisque E est compact ; or toute suite de Cauchy possédant une valeur d'adhérence converge d'après 1.3, donc (xn )n2N converge et ainsi E est complet. 2.8 Proposition On considère p espaces métriques (E1 ; dE1 ), (E2 ; dE2 ), , (Ep ; dE ) et leur produit cartésien E = E1 E2 Ep muni de l'une des trois distances équivalentes d1 , d2 ou d1 dénies en I.5.4 ; alors E est compact si et seulement si tous les Ei sont compacts. p Preuve : Supposons E compact et prenons a = (a1 ; a2 ; ; ap ) 2 E ; pour i quelconque entre 1 et p, considérons une suite (yn )n2N d'éléments de Ei et posons pour tout n 2 N xn = (a1 ; a2 ; ; ai 1 ; yn ; ai+1 ; ; ap ) alors la suite (xn )n2N est une suite d'éléments du compact E donc, d'après la propriété de Bolzano-Weierstrass, il existe une sous-suite (x'(n) )n2N convergente ; on en déduit que la suite (y'(n) )n2N converge dans Ei d'après I.5.5. Donc Ei est compact d'après 2.6. Réciproquement, supposons que tous les Ei sont compacts 1er cas : p = 2 : considérons une suite (xn )n2N d'éléments de E avec xn = (x1n ; x2n ) pour tout n 2 N. Alors la suite (x1n )n2N d'éléments de E1 possède une sous-suite convergente (x1'1(n))n2N d'après 2.6. De même la suite (x2'1(n))n2N d'éléments de E2 possède une soussuite convergente (x2'2 '1 (n) )n2N , alors la suite (x'2 '1 (n) )n2N converge, i.e la suite (xn )n2N possède une valeur d'adhérence : ainsi E1 E2 est compact. Il sut ensuite de faire un raisonnement par récurrence sur p pour prouver que E est compact dans le cas général. 2.9 Proposition Les compacts de K sont les sous-ensembles fermés bornés de K. Preuve : 1er cas : K = R, alors d'après 2.3, tout compact de R est fermé borné dans R. Réciproquement, si A est un sous-ensemble fermé borné de R alors il existe un segment [a; b] de R qui contient A ; or [a; b] est compact d'après 2.2, donc A, qui est un fermé de [a; b], est compact d'après 2.3. 2ème cas : K = C, alors d'après 2.3, tout compact de C est fermé borné dans C. Réciproquement, si A est un sous-ensemble fermé borné de C alors il existe deux segments [a; b] et [c; d] de R tels que A [a; b] + i[c; d] ; or on prouve facilement avec la propriété de Bolzano-Weierstrass, que [a; b] + i[c; d] est compact dans C, donc A, qui est un fermé de [a; b] + i[c; d], est compact d'après 2.3. 10 2.10 Proposition Soit p 2 N ; les compacts de Kp sont les sous-ensembles fermés bornés de Kp pour l'une quelconque des trois normes k:k1 , k:k2 et k:k1 . Preuve : D'après 2.3, tout compact de Kp est fermé borné dans Kp . Réciproquement, si A est un sous-ensemble fermé borné de Kp , Y alors A est contenu dans un pavé P de la forme Y P = [ak ; bk ] si K = R, et P = ([ak ; bk ] + i[ck ; dk ]) si K = C ; P est compact 1k p 1k p d'après 2.9 et 2.8, donc, d'après 2.3 A est compact puisqu'il est fermé dans P . 2.11 Exemple Toute boule fermée de Kp est compacte pour l'une quelconque des trois normes k:k1 , k:k2 et k:k1 ; il existe néanmoins des espaces vectoriels normés dans lesquels une boule fermée n'est pas nécessairement compacte (cf.exercice). 2.12 Théorème Soient E et F des espaces métriques et f : E ! F une application continue. Alors l'image par f de tout compact de E est un compact de F . Preuve : Soit A[un compact de E et soit (Ui )i2I un recouvrement ouvert de f (A) ; alors A f 1 (Ui ) et tous les f 1 (Ui ) sont ouverts dans E puisque f est continue. Ainsi i2I (f 1(Ui))i2I est un recouvrement ouvert du compact A, il existe donc un sous-ensemble ni J de I tel que f 1 (Ui ))i2J est un recouvrement ouvert de A , ce qui entraîne que (Ui)i2J est un recouvrement ouvert de f (A) qui est donc compact. 2.13 Corollaire Soit E un espace métrique compact et soit f : E ! R une application continue ; alors f est bornée et atteint ses bornes : il existe a et b 2 E tels que inf f (x) = f (a) et sup f (x) = f (b): 2 2 x E x E Preuve : D'après 2.12, f (E ) est compact donc borné, de plus f (E ) est fermé donc inf f (x) et x 2E sup f (x) 2 f (E ). x2 E 11 2.14 Théorème de Heine Soient (E; dE ) un espace métrique compact, (F; dF ) un espace métrique et f : E ! F une application continue, alors f est uniformément continue. Preuve : Supposons que f n'est pas uniformément continue, alors il existe " > (xn)n2N et (yn)n2N d'éléments de E tels que 0 et deux suites 8n 2 N; d(xn; yn) n1 et d(f (xn); f (yn)) ": Or E est compact, donc la suite (xn )n2N possède une sous-suite (x'(n) )n2N qui converge vers une limite x 2 E ; on alors 8n 2 N; d(y' n ; x) d(y' n ; x' n ) + d(x' n ; x) d'où d(y' n ; x) ! 0 i.e y' n ! x quand n ! +1 également ; Comme f est continue, on en déduit que f (x' n ) ! f (x) et f (y' n ) ! f (x), d'où d(f (x' n ); f (y' n )) ! 0 quand n ! +1 par continuité de la distance, ce qui est incompatible avec le fait que, pour tout n 2 N , on a d(f (x' n ); f (y' n )) ": Donc f est uniformément continue. ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) 2.15 Proposition Soit E un espace vectoriel de dimension nie p sur K. alors on a : a) pour toute base x1 ; x2 ; ; xp 2 K, B = (e ; e ; ; ep) 1 2 de E , si on pose pour tout x = p X i=1 xi ei où kxkB = max jx j ip i 1 alors k:kB est une norme sur E , appelée norme associée à la base B ; b) pour toute base B de E , les compacts de l'espace vectoriel normé (E; k:kB ) sont les fermés bornés de E pour la norme k:kB ; c) l'espace vectoriel normé (E; k:kB ) est complet. Preuve : a) la preuve est analogue à celle faite pour la norme k:k1 sur Kp . b) Soit B = (e1 ; e2 ; ; ep ) une base de E . Alors l'application ' : Kp ! E dénie par '(x1 ; x2 ; ; xp ) = p X i=1 xi ei est clairement une isométrie linéaire de (Kp ; k:k1 ) sur (E; k:kB ), donc elle est injective ; or Kp et E ont la même dimension nie, donc ' est bijective. Donc ' est un homéomorphisme de (Kp ; k:k1 ) sur (E; k:kB ). Considérons A un fermé borné de E , alors ' 1 (A) est un fermé de Kp puisque ' est continue ; de plus ' 1 (A) est borné puisque (' 1 (A)) = (A) de façon évidente, donc 12 ' 1 (A) est compact d'après 2.10. On en déduit que A = '(' 1 (A)) est compact puisque ' est continue (cf. 2.12). c) Il est clair qu'une suite d'éléments de E s'identie à une suite d'éléments de Kp via l'homéomorphisme ' donc (E; k:kB ) est complet puisque (Kp ; k:k1 ) est complet. 2.16 Proposition Soit E un espace vectoriel de dimension nie p sur K ; alors toutes les normes dénies sur E sont équivalentes. Preuve : Soit B = (e1 ; e2 ; ; ep ) une base de E ; on va montrer que toute norme k:k dénie sur E est équivalente à la norme k:kB : pour tout x = p X i=1 xi ei , on a p X p X i=1 i=1 kxk = k xieik ! keik kxkB : Montrons maintenant qu'il existe > 0 tel que, pour tout x 2 E , on a kxkB kxk : Considérons la sphère unité S de (E; k:kB ) : S = fx 2 E = kxkB = 1g. Alors S est clairement un ensemble fermé (image réciproque du fermé f1g de R par l'application norme qui est continue) et borné de (E; k:kB ), donc est compact d'après 2.15. D'autre part, l'application k:k est lipschitzienne de (E; k:kB ) dans R, en eet : 8x; y 2 E; jkxk kykj kx yk p X i=1 ! kei k kx y kB donc est continue ; on en déduit que la restriction de l'application k:k à S est bornée et atteint ses bornes d'après 2.13 : il existe a 2 S tel que kak = inf x2S kxk et a 6= 0 puisque kakB = 1, d'où kak =6 0. En outre, pour tout x 2 E f0g, on a x kxkB 2 S; donc kak x kxkB d'où 8x 2 E; kxkB ka1k kxk: Ainsi les normes dénies sur E sont toutes équivalentes à k:kB pour une base quelconque de E , donc sont équivalentes entre elles par transitivité. 13 2.17 Corollaire a) Tout espace vectoriel normé de dimension nie est un espace de Banach. b) Soient E un espace vectoriel normé et F un sous-espace vectoriel de E de dimension nie ; alors F est fermé dans E . Preuve : a) Soit (E; k:k) un espace vectoriel normé de dimension nie p, alors d'après 2.15, pour toute base B de E , l'espace normé (E; k:kB ) est complet ; or d'après 2.16, toutes les normes sont équivalentes sur E donc toute suite de Cauchy (xn )n2N de (E; k:k) est une suite de Cauchy de (E; k:kB ) d'après 1.3 c) donc converge dans (E; k:kB ) : on en déduit aussitôt que (xn )n2N converge dans (E; k:k) puisque les normes sont équivalentes, donc (E; k:k) est complet. b) Le sous-espace F est complet pour la norme induite par celle de E d'après a) donc F est fermé dans E d'après 1.12. 2.18 Proposition Soient E et F des espaces vectoriels normés. Alors, si E est de dimension nie, toute application linéaire de E dans F est continue. Preuve : Soit B = (e1 ; e2 ; ; ep ) une base de E et soit f : E pour tout x = p X i=1 !F une application linéaire. Alors xi ei , on a : kf (x)kF = p X xi f (ei ) i=1 F p X i=1 ! kf (ei)kF kxkB : Or, d'après 2.16, il existe > 0 tel que, pour tout x 2 E , on a kxkB kxkE d'où donc f est continue. kf (x)kF p X i=1 ! kf (ei)kF kxkE 14 3 Espaces connexes 3.1 Dénition Soit (E; d) un espace métrique ; on dit que E est connexe si E ne peut s'écrire comme réunion de deux ouverts disjoints non vides : pour tous ouverts U1 et U2 disjoints de E , E = U1 [ U2 =) U1 = ; ou U2 = ;: 3.2 Proposition Soit (E; d) un espace métrique ; alors les trois conditions suivantes sont équivalentes : a) E est connexe ; b) E ne peut s'écrire comme réunion de deux fermés disjoints non vides ; c) les seuls sous-ensembles de E qui sont à la fois ouverts et fermés dans E sont E et ;. Preuve : a)=) b) : supposons qu'il existe deux fermés F1 et F2 disjoints de E tels que E = F1 [ F2 , alors F1 = E F2 donc F1 est aussi un ouvert et de même, F2 est ouvert ; or E est connexe donc F1 = ; ou F2 = ;. b)=) c) : soit A un sous-ensemble de E qui est à la fois ouvert et fermé, alors E A est fermé et E = A [ (E A), donc A ou E A est vide, i.e A = ; ou A = E . c)=) a) : s'il existe deux ouverts U1 et U2 disjoints de E tels que E = U1 [ U2 alors U1 = E U2 est également fermé, donc U1 = ; ou U1 = E , i.e U1 = ; ou U2 = ; : E est donc connexe. 3.3 Dénition et proposition Soit (E; d) un espace métrique et A un sous-ensemble non vide de E ; on dit que A est connexe si le sous-espace métrique A muni de la distance induite par d est connexe. Ainsi A est connexe si et seulement si, pour tous ouverts U1 et U2 de E vériant A \ U1 \ U2 = ;, on a : A U1 [ U2 =) A \ U1 = ; ou A \ U2 = ;: Preuve : Les ouverts de A muni de la distance induite sont de la forme U \ A où U est un ouvert de E , d'où le résultat. 3.4 Exemples a) Dans un espace métrique, tout singleton fxg est connexe. b) Q n'est pas connexe. c) le sous-ensemble A de C déni par A = fz 2 C = jz j = 6 1g n'est pas connexe. 15 Preuve : p p p p 2 62 Q on a Q ] 1; 2[[] 2; +1[ alors que Q\] 1; 2[6= ; et Q\] 2; +1[= 6 ;. c) A fz 2 C = jz j < 1g [ fz 2 C = jz j > 1g alors que A \ fz 2 C = jz j < 1g = 6 ; et A \ fz 2 C = jz j > 1g = 6 ;. b) Comme p 3.5 Proposition Soient (E; d) un espace métrique et soit A un sous-ensemble connexe de E ; on considère un sous-ensemble B de E vériant A B A, alors B est connexe. En particulier A est connexe. Preuve : Supposons qu'il existe deux ouverts U1 et U2 de E tels que B \ U1 \ U2 = ; et B U1 [ U2 , alors, comme A B , on a A U1 [ U2 ce qui entraîne que A \ U1 = ; ou A \ U2 = ; puisque A est connexe. Supposons par exemple que A \ U1 = ;, alors A E U1 , mais E U1 est fermé donc A E U1 , d'où B E U1 , c'est-à-dire B \ U1 = ;. Ainsi B est connexe. 3.6 Théorème Les sous-ensembles connexes de R sont les intervalles. Preuve : Montrons d'abord que R est connexe : soit A une partie à la fois ouverte et fermée de R et supposons que A 6= ; et A 6= R, alors il existe x 2 R A ; comme A est la réunion de ] 1; x] \ A et de [x; +1[\A et est non vide, alors l'un de ces deux ensembles est non vide : supposons B := [x; +1[\A non vide, alors comme il est minoré par x, il possède une borne inférieure b, or B est fermé comme intersection de deux fermés donc b 2 B . Or on peut écrire B sous la forme B =]x; +1[\A puisque x 62 A donc B est également ouvert, on en déduit qu'il existe " > 0 tel que ]b "; b + "[ B ce qui contredit le fait que b = inf B . Donc A = ; ou A = R : R est connexe. Considérons maintenant un intervalle ouvert I de R ; alors d'après I.6.13, il existe un homéomorphisme f de R sur I . Soit A une partie à la fois ouverte et fermée de I , alors f 1 (A) est à la fois ouverte et fermée dans R puisque f est continue, donc f 1 (A) = ; ou f 1 (A) = R puisque R est connexe. Or f est bijective, donc f (f 1 (A)) = A, d'où A = f (;) = ; ou A = f (R) = I puisque f est surjective : I est donc connexe. Si l'intervalle I n'est pas ouvert, alors l'intervalle ouvert I est ouvert donc connexe d'après ce qui précède, et on a I I I = I donc I est connexe d'après 3.5. Réciproquement, soit A un sous-ensemble non vide de R qui n'est pas un intervalle ; alors il existe x et y 2 A tels que x < y et il existe z 2]x; y [ tel que z 62 A, d'où A ] 1; z [[]z; +1[ avec ] 1; z [\A non vide (car contenant x) et ]z; +1[\A non vide (car contenant y ) alors que A\] 1; z [\]z; +1[= ; : A n'est donc pas connexe. 16 3.7 Proposition Soient (E; dE ) et (F; dF ) deux espaces métriques, A un sous-ensemble de E et f : E ! F une application continue. Alors, si A est connexe, f (A) est connexe. Preuve : Supposons qu'il existe deux ouverts U1 et U2 de F tels que f (A) \ U1 \ U2 = ; et f (A) U1 [ U2 , alors A f 1 (U1 ) [ f 1 (U2 ) ; or f 1 (U1 ) et f 1 (U2 ) sont des ouverts de E puisque f est continue, et vérient A\f 1 (U1 )\f 1 (U2 ) = ;, puisque f (A)\U1 \U2 = ;, on en déduit donc que f 1 (U1 ) \ A = ; ou f 1 (U2 ) \ A = ; puisque A est connexe, d'où U1 \ f (A) = ; ou U2 \ f (A) = ;, et ainsi f (A) est connexe. 3.8 Proposition Soit (E; d) un espace métrique et A un sous-ensemble de E ; on munit l'ensemble f0; 1g de la topologie discrète. Alors les conditions suivantes sont équivalentes : a) A est connexe ; b) toute application continue de A dans f0; 1g est constante. Preuve : Lemme : les parties connexes de f0; 1g sont f0g et f1g. En eet, f0g et f1g sont de toute évidence connexes ; d'autre part, les seuls sous-ensembles non vides de f0; 1g sont f0g, f1g et f0; 1g, et f0; 1g n'est pas connexe puisque f0g et f1g sont à la fois ouverts et fermés dans f0; 1g. a) =) b) : supposons A connexe et considérons une application continue f de A dans f0; 1g, alors, d'après 3.7, f (A) est connexe dans f0; 1g, donc f (A) = f0g ou f (A) = f1g d'après le lemme, i.e f est constante. b) =) a) : supposons A non connexe, alors il existe deux ouverts U1 et U2 de E tels que A \ U1 \ U2 = ; et A U1 [ U2 , A \ U1 6= ; et A \ U2 6= ;. On peut alors dénir une application f sur A en posant f (x) = 1 si x 2 A \ U1 et f (x) = 0 si x 2 A \ U2 ; montrons que f est continue : les ouverts de f0; 1g sont ;, f0g, f1g et f0; 1g et f 1 (;) = ;, f 1 (f0g) = A \ U2 , f 1 (f1g) = A \ U1 et f 1 (f0; 1g) = A, donc l'image réciproque de tout ouvert de f0; 1g est un ouvert de A, et ainsi f est continue alors qu'elle n'est pas constante, donc b) =) a). 3.9 Proposition Soit (E; d) un espace métrique et soit (Ai )i2I une famille de sous-ensembles connexes de [ E telle que, pour tous i; j 2 I , Ai \ Aj 6= ;. Alors Ai est connexe. 2 i I 17 Preuve : Considérons une application continue f de [ 2 i I Ai dans f0; 1g ; pour tout i 2 I , la restriction fjA de f à Ai est continue sur le connexe Ai donc est constante égale à 0 ou 1 d'après 3.8, or on a pour tous i; j 2 I , A[i \ Aj 6= ;, donc la valeur de fjA est la même pour tout i 2 I , i.e f est constante, donc Ai est connexe d'après 3.8. i2I i i 3.10 Proposition On considère p espaces métriques (E1 ; dE1 ), (E2 ; dE2 ), , (Ep ; dE ) et E = E1 E2 Ep leur produit cartésien muni de l'une des trois distances équivalentes d1 , d2 ou d1 dénies en I.5.4. Alors E est connexe si et seulement si Ei est connexe pour tous 1 i p. p Preuve : Supposons E connexe, alors pour tout 1 i p, la projection canonique pi de E sur Ei est continue surjective, donc Ei = pi (E ) est connexe d'après 3.7. Réciproquement, supposons que Ei est connexe pour tous 1 i p ; on va montrer par récurrence sur p que E est connexe : si p = 2, considérons pour tout x2 2 E2 l'application ux2 : E1 ! E1 E2 dénie par ux2 (x1 ) = (x1 ; x2 ) pour tout x1 2 E1 . Alors ux2 est clairement continue, donc l'ensemble ux2 (E1 ) = E1 fx2 g est connexe, de même fx1 g E2 est connexe pour tout x1 2 E1 . Or pour tout (x1 ; x2 ) 2 E1 E2 , (fx1 g E2 ) \ (E1 fx2 g) = f(x1 ; x2 )g donc est non vide, on en déduit alors, d'après 3.9, que l'ensemble A(x1 ;x2 ) := (fx1 g E2 ) [ (E1 fx2 g) est connexe. D'autre part, pour tous (x1 ; x2 ) 2 E1 E2 et[(y1 ; y2 ) 2 E1 E2 , on a A(x1 ;x2 ) \ A(y1 ;y2 ) 6= ; (contient (x1 ; y2 )), donc, d'après 3.9, A(x1 ;x2 ) est connexe, (x1 ;x2 )2E1 E2 or ce dernier ensemble n'est autre que E1 E2 . La suite de la récurrence est laissée au lecteur. 3.11 Proposition et dénition Soit (E; d) un espace métrique et x un élément de E : alors la réunion de tous les sousensembles connexes de E contenant x est un connexe de E , appelé composante connexe de x dans E , que l'on notera C (x) : c'est aussi le plus grand connexe de E contenant x. Preuve : Il sut d'appliquer la proposition 3.9 à la famille des sous-ensembles connexes de E contenant x. 18 3.12 Proposition Soit (E; d) un espace métrique. Alors, on a : a) Pour tout x 2 E , C (x) est fermé dans E ; b) E est connexe () 8x 2 E; C (x) = E ; c) La famille des composantes connexes de E forme une partition de E . Preuve : a ) Soit x 2 E : alors, d'après 3.11, C (x) est connexe, donc C (x) est également connexe d'après 3.5, donc C (x) C (x) puisque C (x) est la réunion de tous les connexes contenant x, donc C (x) = C (x), i.e C (x) est fermé. b) Si 8x 2 E; C (x) = E , alors il est clair que E est connexe. Réciproquement, supposons que E est connexe, alors pour tout x 2 E , E appartient à la famille des sous-ensembles connexes de E contenant x donc E C (x), d'où C (x) = E . c) Pour tout [ x 2 E , C (x) est non vide puisqu'il contient x. On en déduit également que E = C (x). Il reste à montrer que deux composantes connexes non disjointes x 2E coïncident : soient x et y 2 E tels que C (x) \ C (y ) 6= ;, alors C (x) [ C (y ) est connexe d'après 3.9 et contient à la fois x et y , donc on a C (x) [ C (y ) C (x) et C (x) [ C (y ) C (y ), i.e C (y) C (x) et C (x) C (y), d'où C (x) = C (y). Exemple Pour tout x 2 Q, la composante connexe de x dans Q est réduite à fxg. Preuve : Soit x 2 Q ; supposons qu'il existe y 2 C (x) avec y 6= x, par exemple, x < y , alors il existe z 2 (R Q) tel que x < z < y et z 62 C (x) puisque C (x) Q. Alors U =] 1; z [ et V =]z; +1[ sont des ouverts tels que U \ V \ Q = ; et C (x) U [ V ; or C (x) est connexe, donc C (x) \ U = ; ou C (x) \ V = ;, ce qui est impossible puisque x 2 C (x) \ U et y 2 C (x) \ V , donc C (x) = fxg. 3.13 Proposition Soit (E; k:k) un espace vectoriel normé. Alors toute boule de E est connexe. Preuve : a) Soit x 2 E et r > 0 : montrons que la boule ouverte B (x; r) est connexe ; considérons pour tout y 2 E , le segment l(x; y ) := ftx + (1 t)y = t 2 [0; 1]g, alors, si y 2 B (x; r), on a l(x; y ) B (x; r), en eet : 8t 2 [0; 1]; kx (tx + (1 t)y)k = k(1 t)(x y)k = (1 t)kx yk < r: 19 On en déduit que [ 2 y B (x;r ) l(x; y) = B (x; r). Or, pour tout y 2 E , l(x; y ) est connexe puisque c'est l'image par l'application continue t 7! tx+(1 t)y du connexe [0; 1], de plus pour tous y et z 2 B (x; r) on a x 2 l(x; y)\l(x; z ) donc l(x; y ) \ l(x; z ) 6= ;, on en déduit que B (x; r) est connexe d'après 3.9. Considérons maintenant la boule fermée B (x; r) : d'après I.7.2, on a B (x; r) = B (x; r) : il sut donc d'appliquer 3.5 pour montrer que B (x; r) est connexe. 20