Les enseignants de l’enseignement supérieur et universitaire aux élections en RDC de 2006 et 2011 : causes de l’échec

Annales FLSH N° 17 Spécial JUOR (2013)
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LES ENSEIGNANTS DE L’ENSEIGNEMENT
SUPERIEUR ET UNIVERSITAIRE AUX
ELECTIONS EN RDC DE 2006 ET 2011 : CAUSES
DE L’ECHEC
Par
Cécile LOSOLO Bouwekama
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ABSTRACT
The advent of democracy in the DRC is confirmed by the
organization of free legislative elections.
Within this study, our reflection goes from the observation
according to which, during the last two legislative elections
organized in Democratic Republic of Congo, academics, compared
with candidates of other social classes, have completely failed.
And get, considering their social role, scholars (academics)
would constitute leadership on the candidates ‘list. Instead of being
considered as an issue favorable to unprivileged situations of society,
the intellectual elise, however, has become subject (object) to
protest, refection, from learned community and to entire society. The
academic, because of precariousness of his living condition, is
classified among social marginals. Face to this de facto reality, most
of Congolese scholars is no longer life models or “references of self-
determination of society” and are, today plunged in deep crisis that is
translated to substitution of values by misbehaviors, leading thus to
underdevelopment.
This study is carried out in Kisangani, in Oriental Province. It
aims at identifying and finding out causes of Congolese academics’
failure, particularly those of High Education, University Research
institution, in order to seize the present reality.
INTRODUCTION
La République Démocratique du Congo a pris, depuis une
décennie, l’option d’organiser les élections libres, démocratiques et
transparentes, dans un cadre juridique établi et de manière régulière
(Doc off LOI N° 06/006 du 09 mars 2006.)
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Assistante de 2ème Mandat à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines
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Dans ce contexte, chaque citoyen, garanti par la loi du pays,
peut briguer un mandat politique.
Notre réflexion, dans cette étude, part de la constatation selon
laquelle, au cours de deux dernières élections législatives organisées
en République Démocratique du Congo, les cadres universitaires ont,
par rapport aux candidats d’autres classes sociales, enregistré un
échec notable.
Or, considérant leur rôle social (DIAMBOMBA M. et al, 2006 :
17), les universitaires devraient constituer le leadership sur la liste
des candidats; cependant, ces derniers sont devenus l’objet de
contestation, de rejet, aussi bien de la part de la communauté savante
que de celle de la société toute entière. Au lieu que l’élite
intellectuelle soit considérée comme une issue favorable aux
situations déshéritées de la société, il s’observe, au contraire, une
rupture entre acteurs interagissant pour la cause de l’instauration des
institutions pouvant assurer la bonne gouvernance et le
développement.
Cette étude est menée à Kisangani, en Province Orientale. Elle
cherche à identifier et dégager les causes de l’échec des
universitaires congolais, particulièrement ceux des institutions de
l’enseignement supérieur, universitaire et recherche scientifique, en
vue de saisir la réalité en face par rapport à ce qu’Yves WINKIN
qualifie de « la théorie et le terrain » (EKAMBO, 2006 :72).
Pour cerner le problème, trois axes seront développés. Le
premier va examiner les enjeux de l’engagement politique de
l’universitaire ; le second volet fera un état de lieu de la situation des
candidats au cours des élections législatives organisées en 2006 et
2011 ; le troisième, enfin, va dégager les causes de l’échec des
enseignants aux élections.
1. ENJEUX DE L’ENGAGEMENT POLITIQUE DE
L’UNIVERSITAIRE CONGOLAIS
En ces dernières années, la volonté manifestée par
l’universitaire congolais de participer à la gestion des affaires
publiques du pays est très remarquée. Qu’est-ce qui motive cet
engagement ? Quels sont les rôles qu’il joue dans cette quête du
pouvoir ? Voilà les quelques questions auxquelles nous tenterons de
répondre dans cette partie du travail.
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Plusieurs raisons motivent la participation massive des
universitaires congolais aux élections organisées en période post-
conflit. Nous citerons ici quelques-unes : les droits garantis par les
instruments juridiques, la lutte des leaderships sociaux et l’intérêt.
1.1. Les instruments juridiques
Depuis son accession à l’indépendance, la R.D.Congo a ratifié
les instruments légaux et juridiques aux standards internationaux que
continentaux. Ces différents documents constituent les bases qui ont
stimulé les esprits tenus sous le joug de se présenter librement aux
élections. Parmi ces documents, on peut citer : la déclaration
universelle des droits de l’homme, le pacte international relatif aux
droits civils et politiques ( MUKAMYAVIRI A. et al, 2011 :34), la
charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la déclaration
de l’UA sur les principes régissant les élections démocratiques en
Afrique, la charte africaine de la démocratie, des élections et de la
gouvernance, qui reconnaissait et garantissait à tout citoyen le droit
de participer à la gestion de l’Etat et d’accéder dans les conditions
d’égalité aux fonctions publiques de son pays. Ils constituent aussi, à
ce titre, des documents fondamentaux gouvernant l’organisation des
élections, régulières, honnêtes et transparentes, expression de la
volonté des électeurs.
1.2. LA LUTTE DES LEADERSHIPS SOCIAUX : UNIVERSITAIRE
ET POLITIQUE
Les actions menées par les universitaires pour la cause noble de
l’indépendance de l’Afrique noire à partir des années 50 et
lesquelles ont abouti à la libération effective du peuple noir du joug
du colonisateur, constitue une preuve de conjonction des faits et des
efforts d’intérêt général entre tous les éléments du système sociétal :
universitaire, politique, économique, culturel, instruit et non-instruit,
riche et pauvre.
Mais, pendant la période de crise sociopolitique qu’à traversé le
pays, l’universitaire congolais a perdu ses valeurs intrinsèques. Au
lieu de constituer une force qui apporte des solutions aux problèmes
de la société, l’universitaire est classé, à cause de la précarité de ses
conditions de vie, parmi les marginaux sociaux. Devant cette réalité
de facto, la plupart des universitaires congolais ont cessé d’être des
modèles de vie ou pour paraphraser KAMBAJI, « des références
d’actions d’autodétermination de la société » (KAMBAJI, 2012 :2-3)
et sont, aujourd’hui, plongés dans une crise profonde qui se traduit
par la substitution des valeurs aux antivaleurs, conduisant ainsi au
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sous-développement. Sur le plan politique, on assiste à une lutte et à
une rupture perpétuelle entre deux pôles d’appoint, à savoir : le
politique et l’universitaire.
Cette reconfiguration actuelle du rôle de l’élite intellectuelle par
la société et par le politique a affaibli les universitaires congolais
devenus à cet effet victimes des idéologies politiques
2
auxquelles ils
sont parfois soumis sans indépendance d’esprit.
La participation des universitaires aux élections organisées à
ces derniers jours est une prise de conscience sur leurs conditions de
vie, un éveil tel que repensé par DAHL Robert : « La politique est
l’un des faits inévitable de l’existence humaine », ou par ARISTOTE,
« L’homme ne peut pas échapper à la vie politique. Il se trouve
concerné totalement sans possibilité d’évasion, la politique est
l’affaire de tout le monde, et les affaires de tout le monde constituent
l’objet de la politique ». (LISSENDJA B. 2010 : 2).
Ce qui justifie en ce sens l’engagement ferme des
universitaires à la vie politique en vue de reformer le système :
« Nous avons longtemps critiqué au salon, à l’écart,… Mais
l’égoïsme de politiciens congolais ne cherche qu’à répondre et à
satisfaire à ses intérêts personnels,… Notre engagement à la
politique active c’est de travailler en faveur du peuple congolais,
d’être sensible à sa misère et de restaurer sa dignité par la
refondation de l’Etat, la reforme de l’administration publique, la
formation d’une armée républicaine, équipée et disciplinée pour la
sécurité effective de territoire national »
3
.
Un autre aspect du problème c’est que, si les élections
constituent un moyen pour instaurer l’Etat de droit et la gestion de la
Res Publica dans la transparence et bonne gouvernance, d’aucuns
estiment qu’elles sont aussi une voie qui amène au changement des
classes sociales des élus. L’expérience récente des élus de 2006 est
concrète et a attiré l’attention de la société toute entière
4
.
2
Nous faisons allusion aux conditions auxquelles sont soumis les universitaires
durant ce moment de crise : des frustrations, des irrégularités de payement de
salaire médiocre. Bref, des conditions socioprofessionnelles précaires, …
Propos recueillis lors de notre entretient avec des enseignants candidats pour
savoir les raisons qui motivent leur participation aux élections.
4
Dans la plupart des cas enregistrés dans la ville, les élus du peuple se sont
amassés plus pour améliorer leurs conditions de vie et celle de leurs familles
que pour s’occuper des problèmes des populations. Dans une enquête menée à
Kisangani, 90% des élus provinciaux se sont construits des maisons en étages,
ont acheté des véhicules luxueux au lieu de répondre aux besoins des
populations, leur base respective.
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Ces facteurs ont motivé tant soit peu les candidatures sinon la
participation massive des universitaires aux élections.
1.3. DES ELECTIONS QUI ATTISENT DES APPETITS
FINANCIERS
Dans un contexte général de précarité, les élections ont été
perçues par beaucoup de citoyens congolais comme une occasion de
s’enrichir et un nouveau marché de l’emploi.
D’abord, en adoptant les textes règlementaires du pouvoir
organisateur, on trouve un flux d’éléments qui concourent à son
fonctionnement :
La composition de la CEI/CENI à tous les niveaux de la vie
nationale (territoire, district, province, nation) : les sept membres
proviennent des partis politiques (dont quatre de la majorité et
trois de l’opposition).Pour chaque bureau, un personnel
administratif et technique doit être engagé. Sur le terrain des
opérations, un nombre important des agents sont formés pour
superviser le processus électoral.
Les organisations de la société civile et étatiques nationales,
régionales, et internationales, intervenant dans les différentes
opérations électorales :
- L’observation nationale est menée par des organisations telles
que le Réseau d’Observation des confessions
religieuses(ROC), le RENOSEC, le ROPI, le CNONGD,
l’AETA, la LINELIT, la Ligue des Electeurs, le CDCE (cadre
de concertation de la société civile pour l’observation des
élections) ;
- L’observation internationale est assurée par les organisations
internationales telles que les Nations-Unies, l’Union
Européenne, l’Union Africaine, la Francophonie, le
Commonwealth, les Organisations Non Gouvernementales
étrangères comme le centre CARTER, EISA, NDI, IFES,
…avec des antennes dissimulées à travers le pays ;
- Les autres organisations dont bénéficient la commission de
l’appui technique et l’accompagnement telles que PNUD, DE,
APEC, USAID, PACE, PACO, UNOPS, DFID, GTZ, FKA,
MONUSCO (MONUC), la Direction Générale des Elections
au Québec.
Les forces de l’ordre et de sécurité (tant gouvernementales,
qu’internationales).
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