La Lettre du Pneumologue • Vol. XX - n° 2 - mars-avril 2017 | 107
DOSSIER
Allergologie
Points forts
»
Les conseillers médicaux en environnement intérieur (CMEI) enquêtent, sur prescription médicale,
surlaqualité de l’environnement intérieur et réalisent des prélèvements (poussière, moisissures, etc.)
etdes mesures d’allergènes biologiques et de polluants chimiques.
»
Cette enquête, ces prélèvements et les conseils donnés au patient peuvent aider le médecin dans
son diagnostic et dans la prévention tertiaire, et améliorer le traitement des maladies asthmatiques
et allergiquesliées à l’environnement intérieur.
»Les CMEI peuvent adapter les mesures conseillées aux moyens socio-économiques des patients.
»
Le bénéfice clinique et médico-économique a été confirmé par différentes études françaises et américaines.
»
Un grand nombre de médecins n’ont pas encore l’habitude de faire appel à des CMEI par méconnaissance
de la profession ou des structures disponibles.
Mots-clés
Conseiller médical
en environnement
intérieur
Asthme
Allergie
Polluants intérieurs
Éducation
thérapeutique
Highlights
»
Medical Indoor Environment
Counselors (MIEC) study the
quality of the indoor environ-
ment and carry out sampling
(dust, mold, etc.) and measure-
ments of biological allergens
and chemical pollutants in the
indoor air.
»
This investigation and these
samples can help the physi-
cian in his diagnosis, orienting
the research of sensitization
according to the allergens
found, and in the tertiary
prevention, preventing the
maintenance and helping the
treatment of asthmatic and
allergic diseases.
»
MIEC can adapt the recom-
mended measures to the socio-
economic level of the patients.
»
The clinical and medico-
economic benefit has been
confirmed by various French
and American studies.
»
Nevertheless, a large number
of doctors are not used to pre-
scribe the investigation of a
MIEC because of an insufficient
knowledge of the profession or
the structures available.
Keywords
Medical indoor environment
counselor
Asthma
Allergy
Indoor pollutants
Therapeutic education
qui a analysé 650 visites à domicile dans la région
Provence-Alpes-Côte d’Azur entre 2002 et 2007,
retrouvait, par exemple, la présence de moisissures
dans 74,4 % des cas et un dosage semi-quantitatif
des acariens positif sur la poussière des matelas dans
56,3 % des cas.
La recherche de ces allergènes, notamment des
moisissures, permet aussi quelquefois un diag-
nostic étiologique dans le cadre d’un bilan de
pneumopathie d’hypersensibilité (6). Cette
enquête et ces prélèvements peuvent parfois aider
le médecin dans son diagnostic, orientant alors
la recherche de sensibilisations en fonction des
allergènes retrouvés. Le CMEI aide ainsi à établir
la relation sensibilisation/exposition et/ou symp-
tômes/exposition, à connaître la charge allergique
environnementale, mais également à mettre en
place et/ou à apprécier l’efficacité des mesures
d’éviction.
Sa connaissance des différents partenaires tech-
niques et institutionnels, ainsi que de leurs fonc-
tions respectives, susceptibles d’intervenir dans le
domaine de l’habitat et de la santé, lui permet un
rôle de conseiller pour la mise en œuvre d’éven-
tuelles mesures d’éviction des polluants domes-
tiques ou des allergènes (notamment l’éradication
des acariens), et l’adaptation de l’habitat à la
pathologie respiratoire ou allergique sous-jacente.
Il peut en effet informer les personnes sur les
organismes auxquels elles peuvent faire appel,
comme l’Agence nationale de l’habitat (ANAH),
les associations départementales d’information
sur le logement (ADIL), le Conseil d’architecture,
d’urbanisme et de l’environnement (CAUE), etc.
Cette connaissance des différents partenaires
techniques et institutionnels permet également
d’adapter les mesures conseillées aux moyens
socio-économiques des patients.
Les CMEI ont ainsi un rôle dans la prévention
tertiaire des maladies allergiques, des pneumo-
pathies d’hypersensibilité et de l’asthme, qu’ils
aident à traiter et dont ils préviennent le maintien
en mettant en place des techniques d’éviction des
allergènes.
Enfin, ils peuvent enrichir les données cliniques et
environnementales dans le cadre d’études cliniques,
épidémiologiques et environnementales.
Impact de la visite
sur la prise en charge du patient
Le rôle des CMEI a été évalué et validé, et le béné-
fice clinique a été confirmé par différentes études
françaises et américaines (notamment celles de De
Blay en 2003 et de Morgan en 2004). L’étude de
F. de Blay (7) a, par exemple, démontré l’augmenta-
tion de l’observance des techniques d’éviction des
aca riens et la diminution du taux d’allergènes en
cas de conseils délivrés à la fois par le médecin
et par le CMEI par rapport à des conseils délivrés
seulement par le médecin. Cela était concomitant
d’une réduction des symptômes et des exacerba-
tions d’asthme dans l’étude de W.J. Morgan (8).
Cet essai contrôlé, randomisé, réalisé entre 1998
et 1999 auprès de 937 enfants de 7 grandes villes
américaines, porteurs d’un asthme atopique, visait à
étudier l’impact d’une intervention à domicile dans
l’éviction globale des allergènes et le contrôle de
l’asthme. La charge en allergènes était significati-
vement plus basse à 1 an dans le groupe interven-
tionnel que dans le groupe témoin (par exemple, la
charge en Dermatophagoides farinae dans la literie
était respectivement de –59 % [extrêmes : –65 ; –51]
et –14 % [extrêmes : –27 ; 0,73]), cela étant associé
à un nombre de jours avec symptômes significa-
tivement plus faible par période de 15 jours (3,39
contre 4,2 jours à 1 an, respectivement). Il existait
dans cette étude une corrélation entre le taux de
diminution de la charge en allergènes et la réduc-
tion de la symptomatologie asthmatique. Comme
évoqué dans l’étude de A. Vagner (9), il semblerait
que seule l’éviction globale des pneumallergènes soit
efficace dans la prise en charge et la réduction de la
symptomatologie de l’asthme atopique.
Une étude observationnelle anglaise de 2009, menée
sur une cohorte d’enfants asthmatiques, a estimé
qu’une augmentation des thérapeutiques avait été
évitée chez 55 % d’entre eux du fait d’une identifi-
cation des facteurs de mauvais contrôle de l’asthme,
notamment d’une éviction des allergènes qui persis-
taient dans 33 % des cas (10). Une étude française
de 2009, réalisée sur les dossiers de 400 patients
et à partir de questionnaires adressés aux 200 der-
niers patients visités, corrobore ces résultats sur le
terrain (11). La satisfaction globale des patients a été