Devoir surveillé : UE12 - thème 1 (Algèbre linéaire) - 2 heures Questions de cours E désigne un espace vectoriel de dimension de dimension finie sur un corps K (supposé commutatif). Rappeler les notions suivantes. 1. La définition d’une famille libre de E. Une famille pvi qiPI est libre si pour toute partie finie de I - que l’on peut assimiler à v1, nw, n P N˚ , on a : @pλi q P K n , n ÿ λi vi “ 0E ñ λi “ 0K , @i P v1, nw. i“1 2. Le théorème du rang. @f P LpEq, dimpKerf q ` dimpImf q “ dim E. 3. La formule de Grassmann. @F, G sev de E, dimpF ` Gq “ dim F ` dim G ´ dimpF X Gq. 4. Une définition de la propriété : ! les trois sous-espaces vectoriels de E, notés F, G et H sont en somme directe . " Plusieurs définitions possibles : – @x P F ` G ` H, D ! pxF , xG , xH q P F ˆ G ˆ H tel que x “ xF ` xG ` xH . – L’application de F ˆ G ˆ H dans E définie par : pu, v, wq ÞÑ u ` v ` w est injective. – F X G “ t0E u et pF ` Gq X H “ t0E u. Problème : Matrices stochastiques Soit n un entier naturel non nul. On dit qu’une matrice M “ pMi,j qpi,jqPv1,nw2 de Mn pRq est stochastique en ligne si @i P v1, nw, Mi,j ě 0 et n ÿ Mi,j “ 1. j“1 Une matrice M P Mn pRq est stochastique en colonnes si t M est stochastique en lignes. 1. Montrer que si M P Mn pRq est stochastique en lignes, alors 1 est valeur propre de M et que le vecteur de Rn dont toutes les coordonnées sont égales à 1 est vecteur propre associé à la valeur propre 1. Évident. 2. Pensez-vous que 1 soit valeur propre d’un matrice de Mn pRq stochastique en colonnes ? Justifier. Puisque 1 est vp de M stochastiche en lignes, 1 est racine du polynôme detpM ´ xIn q. Mais, le déterminant d’une matrice est égal au déterminant de sa transposée. Il en résulte que 1 est racine de detpt M ´ xt In q “ detpt M ´ xIn q, où t M est stochastique en colonnes. Le réel 1 est donc aussi vp de toute matrice stochastique en colonnes. 3. Montrer que le produit de deux matrices stochastiques en lignes est une matrice stochastique en lignes. Que pensez-vous du produit de deux matrices stochastiques en colonnes ? Justifier. Que pensez-vous du produit d’une matrice stochastique en lignes et d’une matrice stochastique en colonnes ? Justifier. Soit M et P deux matrices stochastiques en lignes. La positivité des coefficients de la matrice produit est claire puisque chaque coefficients de cette matrice est une somme de produits de nombres positifs. Explicitions la somme de la ligne k P v1, nw de la matrice produit M P : ˜ ¸ ˜ ¸ n n n n n ÿ ÿ ÿ ÿ ÿ pM P qkl “ Mkj Pjl “ Mkj Pjl . l“1 La somme n ÿ l“1 j“1 j“1 k“1 Pjl est la somme des coefficients de la ligne j de la matrice P , elle donc égale à 1. k“1 Mais alors, la somme des coefficients de la ligne k de la matrice produit est égale à n ÿ Mkj - qui j“1 est la somme des coefficients de la ligne k de M . D’où le résultat. Si M et P sont stochastiques en colonnes, alors t M et t P sont stochastiques en lignes et leur produit, d’après ce qui vient d’être vu, t M t P aussi. Mais, alors t pt M t P q “ P M est stochastique en colonnes. Le produit de deux matrices stochastiques en colonnes est donc une matrice stochastique en colonnes. Un contre-exemple suffit à justifier que le produit d’une matrice stochastique en lignes par une matrice stochastique en colonnes, n’est pas en général une matrice stochastique. ¨ ˛ ¨ 0.6 0.2 0.8 ˝ ‚ˆ ˝ 0.4 0.3 0.5 ˛ ¨ 0.44 0.2 ‚“ ˝ 0.46 0. ˛ 0.68 ‚. 0.62 4. On note Sn l’ensemble des matrices stochastiques en lignes de Mn pRq ; on note SppM qpĂ Cq le spectre de M , (l’ensemble des valeurs propres de M ) et on munit Rn de la norme du sup, définie par @X “ pxi qiPv1,nw P Rn , }X}8 “ sup |xi |. iPv1,nw Pour alléger les notations, on note désormais }.} cette norme et on admet que l’application de Mn pRq dans R` définie par M ÞÑ sup }M X} XPRn ,}X}“1 est une norme sur Mn pRq. On l’appelle la norme de matrice subordonnée à la norme du sup sur Rn et on la note |||.|||. 4.a) Justifier que @X P Rn , }M X} ď |||M |||.}X}. Si X est le vecteur nul, le résultat est trivial, les membres de l’inégalité étant nuls. X } ď |||M ||| puisque la norme de M est le sup des }M U } pris sur Si X n’est pas nul, alors }M }X} les vecteurs U de norme 1. D’où, }M X} ď |||M ||| ñ }M X} ď |||M |||.}X}. }X} 4.b) Montrer que si M P Sn , alors |||M ||| ď 1. Soit M P Sn et X de norme 1. Alors, }M X} est la plus grande valeur absolue des coordonnées n ÿ de M X. Soit i P v1, nw, la coordonnée d’indice i est égale à Mij xj et j“1 n ÿ | n ÿ Mij xj | ď }X} j“1 Mij “ }X}. j“1 Donc, }M X} ď }X} “ 1. Mais alors, le sup du membre de gauche, pris sur les X de norme 1, reste inférieur ou égal à 1, ce qui revient à dire que la norme de M est inférieure ou égale à 1. 4.c) Soit λ P SppM q. En considérant un vecteur propre de M de norme égale à 1, justifier que |λ| ď 1. Soit λ une vp de M et X un Vp associé de norme 1. On a M X “ λ X ñ }M X} “ |λ| }X} “ |λ|, mais, }M X} ď |||M |||.}X} ď 1 ˆ 1 “ 1. d’où, |λ| ď 1. 5. Soit M P Sn telle que 1 soit valeur propre simple et que @λ P SppM q, λ ‰ 1, |λ| ă 1. 5.a) Montrer que si M est diagonalisable, alors la suite pM n qnPN est convergente (sous-entendu ”lorsque n tend vers `8”). M étant diagonalisable, il existe une matrice de passage, notée P , telle que P ´1 M P “ D, où D est la matrice diagonale des vp de M . On en déduit que @k P N, M k “ P ´1 Dk P . Mais, les éléments diagonaux de Dk sont des nombres réels de valeurs absolues strictement inférieures à 1 à l’exception de 1, leurs puissances tendent ¨ ˛ donc vers 0, ou vers 1, lorsque k tend vers `8. On 1 p0q ‚P . en déduit que lim M k “ P ´1 ˝ k p0q p0q 5.b) Montrer que si SppM q Ă R, alors la suite pM n qnPN est convergente. (Il sera commode d’utiliser la décomposition de Dunford de M - dont on rappelera l’énoncé précis.) Lorsque M admet toutes ses vp dans R (i.e. lorsque son polynôme caractéristique est scindé), si M est diagonalisable, le résultat est acquis d’après le 5.a). Sinon, M est trigonalisable et il existe alors une matrice de passage P telle que ¨ ˛ p0q ‚ P ´1 M P “ ˝ p0q A 1 où A est une matrice triangulaire supérieure à n ´ 1 lignes et n ´ 1 colonnes dont les vp sont les vp de M , à l’exception de la vp simple 1. Ainsi, toutes les vp de A sont, en valeurs absolues, ˛ p0q ‚ strictement inférieures à 1. On en déduit que pour tout entier naturel k, P ´1 M k P “ ˝ p0q Ak (c’est une conséquence de la définition du produit matriciel). ¨ 1 Montrons maintenant que la suite de matrices pAk qkPN tend vers 0 lorsque k tend vers `8. La matrice A a toutes ses (n ´ 1) valeurs propres réelles, elle admet donc une décomposition de Dunford (elle n’est pas diagonalisable, car M le serait, ce qui est exclu dans le cas étudié). Cela signifie que A “ D ` N , avec D diagonalisable, T nilpotente et DN “ N D. Alors, il existe une matrice inversible Q telle que : Q´1 A Q “ Q´1 pD ` N qQ “ ∆ ` N 1 , ∆ diagonale et N 1 nilpotente. On en déduit que pQ´1 A Qqk “ Q´1 Ak Q “ p∆ ` N 1 qk “ ∆k ` ˆ ˙ ˆ ˙ k k ∆k´1 N 1 ` ¨ ¨ ¨ ∆k´j`1 N 1j´1 , 1 j´1 où j est l’indice de nilpotence de N (et de N 1 ). La formule du binôme est applicable car ici les deux matrice commutent, c’est une propriété essentielle de la décomposition de Dunford. Lorsque k tend vers `8, les éléments diagonaux de ∆ étant strictement inférieurs à 1 en valeurs absolues, ∆k tend vers 0. Pour les autres termes de la somme - en nombre fini -, par exemple ˆ ˙ k ∆k´i N 1i pour i P v1, j ´ 1w, on a : i ˆ ˙ ˆ ˙ k k } ∆k´i N 1i } ď }N 1 }i } ∆k´i }. i i Mais, dans cette expression }N 1 }i ne dépend pas de k (c’est une constante) et les éléments non nuls ˆ ˙ k de la matrice diagonale ∆k´i sont tous de la forme ! pun polynôme en kq ˆ λk ", où |λ| ă 1. i Un tel produit, c’est bien connu, tend vers 0 lorsque k tend vers `8 (la fonction exponentielle impose sa limite à la fonction puissance). Ainsi, tous les coefficients de cette matrice tendent vers 0 et la matrice tend elle-même vers 0. Ce résultat vaut pour chaque terme de la somme finie égale à Q´1 Ak Q. On en déduit que cette matrice a pour limite la matrice nulle lorsque k tend vers `8 et donc que pAk q tend vers la matrice nulle aussi. En revenant à la matrice M , on a ˛ ˛ ¨ p0q 1 p0q ‚ ‚“ ˝ lim P ´1 M k P “ lim ˝ k k p0q O p0q Ak ¨ 1 ¨ et lim M k “ P ˝ k ˛ 1 p0q p0q O ‚P ´1 . 5.c) On considère la matrice ¨ 0, 1 0, 2 ˚ M “˚ ˝0, 4 0, 1 0, 4 0, 6 ˛ 0, 7 ‹ 0, 2‹ ‚. 0, 3 Cette matrice est-elle stochastique en lignes ou en colonnes ? Déterminer SppM q. L’étude de la convergence de la suite pM n qnPN relève-t-elle des des cas précédemment étudiés ? Conjecturer le comportement de la suite pM n qnPN dans ce cas. Comment pourriez-vous justifier ? La matrice est trivialement stochastique en lignes. Pour déterminer ”à la main” son spectre, on peut multiplier la matrice par 10 et chercher le spectre de 10M . Bien entendu, si λ est une vp de M , 10 λ est une vp de 10M . On a : detp10M ´ xI3 q “ 1 ´x 2 7 4 4´x 2 1 6 3´ x “ p1 ´ 4 xq ´x 6 2 3´ x ´ 2 4 6 7 3´ x ` 4 2 7 ´x 2 . Le développement de ce déterminant (qui peut, évidemment, être avantageusement calculer avec une machine) donne detp10M ´ xI3 q “ ´x3 ` 8x2 ` 8x ´ 120. Il est facile d’observer que 10 est vp (puisque 1 est vp de M qui est stochastique en lignes), d’où χ10M pxq “ ´px ´ 10qpx2 ` 2x ` 12q. Le trinôme x2 ` 2x ´ 12 n’admet pas de racines réelles et le polynôme caractéristique de 10M , comme celui de M , n’est donc pas scindé. L’étude de la convergence de la suite pM n qnPN ne relève donc pas des deux cas traités précédemment. Un calcul des puissances successives de M conduit à conjecturer que la suite converge aussi dans ce cas. Avec une calculatrice, dès le calcul de M 6 , les coefficients ”stationnent à 10´3 près” (i.e. les trois premières décimales des coefficients de le matrice restent inchangées d’un puissance à la suivante). La détermination des vp complexes de M va ? fournir une?justification de cette convergence. Un ´1 ` 11 ´1 ´ 11 calcul facile montre que ces vp sont 1, et . Les deux racines commplexes sont 10 10 de modules strictement inférieurs à 1. Si on considère M comme une matrice à coefficients complexes, ses trois vp étant simples, elle est C-diagonalisable et on ¨ peut lui˛appliquer la démarche 1 p0q ‚P ´1 . Dans ce cas, la du 5.a). Il en résulte que la suite pM k qkPN converge vers P ˝ p0q O matrice de passage est à coefficients dans C, mais la matrice M et toutes ses puissances étant réelles, la convergence de la suite justifie que la matrice limite est réelle (les coefficients de M k sont des suites réelles qui convergent, R étant fermé dans C, elles convergent vers un réel). 6. Lorsque la suite pM n qnPN converge, justifier que si X0 P Rn est un vecteur de probabilité (i.e. toutes ses coordonnées sont positives et leur somme égale à 1), alors le vecteur M n X0 converge vers un point fixe de l’application X ÞÑ M X. On a, pour tout k P N, M k`1 X0 “ M pM k X0 q. Si on note F l’application qui à X associe M X - qui est trivialement continue sur Rn , alors M k`1 X0 “ F pM k X0 q. La suite pM k q étant convergente, en passant à la limite sur k, on obtient lim M k`1 X0 “ F plim M k X0 q k k et, en notant M la matrice limite, on a M X0 “ F pM X0 q. Le vecteur M X0 est donc un point fixe de F . 7. Quels liens repérez-vous entre les questions de ce problème et les programmes officiels des classes du lycée ? Dans les PO des classes terminales scientifiques, enseignement de spécialité, figure le thème d’étude ! marches aléatoires " sur un graphe. La modélisation de ces marches conduit à des matrices sto- chastiques (de dimensions 2ˆ2, ou 3ˆ3, le plus souvent) et l’étude du comportement asymptotique de ces marches est demandée. Ce comportement asymptotique est déterminé par le comportement de la suite de matrices pM k qkPN lorsque k tend vers `8, où M est une matrice stochastique. Les résultats précédents permettent donc de justifier les comportements asymptotiques possibles de ces marches aléatoires (lorsque la matrice M est facile à réduire, ce que l’énoncé conduit les élèves à faire).