s’étendre des écritures de l’histoire au sens très large aux traductions/adaptations de textes latins,
aux ouvrages didactiques, à la poésie et au théâtre. Il s’agira d’examiner quelles figures, mythiques
et historiques, les auteurs privilégient, comment et à quelles fins, dans des textes qui, à des titres
divers, évoquent, recomposent et exploitent un moment et un exemple de la Grèce ancienne, ou
donnent un récit plus continu de son histoire. Selon quelles voies souvent nouvelles et parfois
contrastées s’approprient-ils leur souvenir, tant la distance avec le monde grec ancien laisse place
aux jeux de l’interprétation et à la multiplicité des mécanismes d’assimilation et de réduction de
l’altérité ? Suivant quelles logiques et dans quelles intentions, et pour quels publics retravaillent-
ils les portraits, les récits et leurs significations, en apprivoisant, en réduisant et en captant à leur
profit l’étrangeté des figures grecques mobilisées, ou bien au contraire en l’exacerbant ? Et dans le
premier cas, comment relient-ils les figures de la Grèce ancienne qu’ils réincarnent tant avec
l’Occident médiéval dans la vision qu’ils proposent de sa propre histoire – son lointain passé et son
présent, parfois son futur – qu’avec la Grèce byzantine contemporaine telle qu’ils la perçoivent ?
De l’intégration à des visions subjectives de l’histoire, de l’instrumentalisation politique à
l’allégorisation et la moralisation, pour l’exaltation de modèles exemplaires et la dénonciation de
contre-modèles, quelle place est-elle encore laissée à la séduction de l’étrangeté et de la différence,
à la rêverie sur l’autre et l’ailleurs ?
Par figures de la Grèce ancienne, nous entendons celles des origines jusqu’au IVe siècle avant
J.-C., soit avant la montée en puissance de la Macédoine et les règnes de Philippe et d’Alexandre,
objets de précédents travaux. L’enquête portera ainsi à la fois sur des figures mythiques, qu’elles
soient présentées comme fabuleuses et /ou très souvent intégrées à une vision de l’histoire, et sur
des figures historiques, celles de la Grèce jusqu’au IVe siècle que choisissent d’exploiter en France
les auteurs des XIVe et XVe siècles qui écrivent en français ou en latin :
-les figures mythiques de la Grèce ancienne : figures héroïques de l’histoire des origines
jusqu’au conflit troyen, figures mythologiques intégrées à l’histoire des origines, figures
prophétiques…
-les figures historiques de la Grèce ancienne jusqu’au IVe siècle, de l’histoire politique,
militaire ou intellectuelle des cités grecques, et notamment l’évocation des Grecs dans leur
affrontement des Perses pendant les guerres médiques.
Nous envisageons des communications sur des formes d’écriture différentes, qui à des titres
très divers exploitent une ou des figures grecques, avec (la liste n’est pas exhaustive) :
-l’exploitation accrue de la mythologie grecque des origines dans la littérature allégorique et
morale, avec l’Ovide moralisé et ses prolongements, qu’ils reprennent l’allégorisation ou tendent
à historiciser les « fables », la présence de cette mythologie dans des textes de prédication
-les écritures de l’histoire au sens très large
-histoires universelles, Miroir historial de Jean de Vignay, Renart le Contrefait, Miroir
des histoires, Livre de la Mutacion de Fortune et autres ouvrages de Christine de Pizan,
Bouquechardière, Fleur des histoires de Jean Mansel...
-compilations historiques (recueils sur les hommes et les femmes illustres, adaptations de
Boccace, textes sur les preux et les preuses)
-récits romancés autour d’un personnage (Jason et Hercule selon Raoul Lefèvre…)
-textes autour de l’actualité historique du XIVe siècle et du XVe siècle, notamment ceux
de la cour de Bourgogne, avec l’exploitation du mythe d’origine grecque pour conforter des rêves
d’expédition pour « sauver » la Grèce byzantine (Banquet du Faisan, George Chastelain, Olivier
de la Marche, Guillaume Fillastre, Michaut Taillevent, Jean Molinet et la Complainte de Grèce,
récits de mission en Grèce…) et pour conforter des ambitions de souveraineté.