Catalyse hétérogène et Chimie fine Joël Barrault, Laboratoire de Catalyse en Chimie Organique (LACCO), UMR CNRS - 6503 40, avenue du Recteur Pineau 86022 POITIERS Cedex (France) [email protected] 1 - Introduction Dans un dossier récent concernant le développement de la catalyse, on trouve l’analyse suivante (1) : « La catalyse est une voie privilégiée d’accès à une chimie propre et performante ». Sans être consommé, un catalyseur est un moyen d’accéder à de nouvelles structures, d’améliorer la productivité des installations, de diminuer les consommations de matières premières et d’énergie, de diminuer l’impact des procédés sur l’environnement, en minimisant les sous-produits ou en traitant des émissions et rejets divers. De fait, 80 % des réactions mises en œuvre industriellement utilisent ont au moins une étape catalytique. Le cabinet britannique Frost & Sullivan, qui a publié une étude en 1998 [1], évaluait le marché européen des catalyseurs à 3,7 Mrds $ en 1998 et à 5 Mrds $ en 2005 (croissance moyenne de 4% par an). La catalyse en chimie – des grands intermédiaires à la chimie fine – représente environ le quart du marché. Les autres débouchés sont l’automobile et les polymères, ainsi que le raffinage et l’environnement considérés aujourd’hui comme des marchés dynamiques. Pourquoi la catalyse hétérogène par rapport à la catalyse homogène ou la catalyse enzymatique ? Il y a plusieurs décennies, il n’était pas habituel d’associer Catalyse hétérogène et Chimie Fine. En effet la catalyse hétérogène faisait souvent référence aux très grandes unités du raffinage ou de la pétrochimie ; la Chimie Organique Fine suggérant quant à elle la synthèse en petite quantité de produits complexes et très chers. Jusqu’aux années 1970-80, l’activité des laboratoires de catalyse hétérogène était d’ailleurs consacrée pour l’essentiel à l’étude des réactions et des catalyseurs de la « chimie lourde ». Néanmoins à partir de cette période et à la suite des premiers chocs pétroliers, une orientation de la catalyse hétérogène vers d’autres applications, à partir de matières premières différentes telles que celles issues de la biomasse, La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 1 / 22 est observée. Au milieu des années 80, le laboratoire de catalyse en chimie organique de Poitiers organise le premier symposium international « heterogeneous catalysis and fine chemicals » (2). A cette époque, on a pu observer que quelques réactions, quelques domaines, quelques familles de catalyseurs avaient été étudiés plus particulièrement : l’hydrogénation chimiosélective, la thiochimie, la fonctionnalisation d’aromatiques, l’oxydation sélective en présence respectivement de métaux supportés, de sulfures, de zéolithes et d’oxydes. Ces familles de catalyseurs étaient déjà utilisées à l’époque en pétrochimie et il ne s’agissait alors que d’une simple transposition d’utilisation sans optimisation particulière pour le nouvel objectif recherché. On pouvait quand même noter les premiers travaux de la chimie organométallique de surface (COMS) c’est à dire l’étude de la réactivité de molécules organométalliques avec des surfaces d’oxydes ou de métaux pour obtenir des catalyseurs mieux définis (dispersion et nature de sites) (3,4). L’expérience et les connaissances du domaine ont donc été mises à profit pour la chimie fine sachant d’autre part que les catalyseurs hétérogènes ont l’avantage d’être facilement séparés du milieu réactionnel et recyclés ou encore d’être utilisés dans des procédés continus . Une autre question posée à l’époque fût la suivante : Qu’est-ce qu’un produit représentatif de la chimie fine et comment faire sa synthèse en présence d’un catalyseur solide (5)? Il n’y a pas de définition générale des différentes classes de produits car elle peut évoluer en fonction du temps. En fait il s’agit d’un produit d’un prix relativement élevé (> 5 euros/kg) et fabriqué à faible tonnage (moins de 10000 t/an). Au plan chimique, Les produits de chimie fine sont souvent multifonctionnels et résultent de synthèses multiétapes mettant en œuvre une chemio-, régio- ou énantiosélectivité dont les mécanismes et les centres actifs nécessaires étaient quasi inconnus à l’époque en catalyse hétérogène. Il était donc vital de comprendre les étapes importantes des processus et de déterminer les centres réactionnels nécessaires pour ces étapes puis de les reproduire à la surface d’un solide. De plus les réactions de chimie fine sont souvent mises en œuvre dans un solvant plus ou moins polaire, dans des conditions douces de sorte que des systèmes polyphasiques complexes (gaz/liquide/solide) avec des problèmes d’agitation, de contrôle de diffusion doivent être spécifiquement étudiés. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 2 / 22 Dans le domaine de la chimie fine, incluant les réactions au départ de la biomasse, une majorité des réactions (80 %) était donc de type stœchiométrique et ce pourcentage n’a encore que faiblement baissé même si aujourd’hui les applications de la catalyse hétérogène à ce domaine sont beaucoup plus nombreuses. Il peut en résulter une production importante de déchets (c’est un domaine qui produisait de 5 à 50 kg de produits secondaires par kg de produit fini / E factor (6)) qu’il est nécessaire de diminuer dans le cadre de l’application des concepts de la chimie verte ou de la chimie durable (7). Au cours de ces dernières décennies, un développement important de travaux de recherche dans cette direction a été observé, encore plus marqué ces toutes dernières années en raison de l’augmentation du prix des produits pétroliers et de la prise de conscience de la nécessité de diversifier les matières premières et du développement des nanosciences. Les nanosciences connaissent en effet un développement considérable en raison d’applications déterminantes dans les domaines de l’électronique, du magnétisme, du stockage d’informations, des revêtements,… Les nanomatériaux qui résultent de ces travaux ont des performances de plus en plus grandes , de plus en plus appropriées, voire nouvelles au fur et à mesure que leur « nanodéfinition » augmente. La catalyse hétérogène utilise ou tente d’utiliser depuis toujours des nanomatériaux, c’est d’ailleurs l’un des domaines d’application les plus anciens. Au cours de ce 21ème siècle, l’une des priorités de la catalyse en particulier en chimie fine sera de savoir réaliser des réactions avec une sélectivité de 100%, évitant ainsi toute réaction secondaire et donc tout rejet polluant. Le développement des nanosciences devrait permettre de progresser dans cette voie, car l’accroissement de cette sélectivité résultera de l’utilisation d’un catalyseur parfaitement défini à l’échelle nanométrique. Cependant les propriétés de ces solides sont peu connues et peu comprises, d’autant moins que la taille des « objets » diminue : i) Combien d’atomes de métal et de promoteur pour constituer un agrégat ayant la propriété désirée pour une étape élémentaire ? ii) Quel est le rôle de la structure de l’agrégat ? iii) Quel est le rôle de la nanoarchitecture contenant l’agrégat actif ? Autant de questions posées, auxquelles les nouveaux moyens d’investigation doivent répondre pour envisager un nouveau saut scientifique, en particulier en chimie fine (8). La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 3 / 22 Par ailleurs, outre la formation de ces matériaux, leur mise en forme est également importante pour envisager une mise en oeuvre réelle des réactions catalytiques revendiquées. La forme, la résistance à l’attrition (à l’écrasement), la porosité,… vont avoir une forte influence sur les performances : Sélectivité, Activité et Stabilité, en particulier pour les réactions en phase liquide. En conclusion de cette démarche, on doit donc prévoir dans le domaine spécifique de la catalyse hétérogène et de la chimie fine ; • une attention particulière pour les réactions économes en réactifs et en énergie et permettant d’aboutir à des procédés totalement sélectifs (100 %) sans formation de déchets qu’il s’agisse de régio-, de chemio- ou d’énantiosélectivité. • l’intégration significative de la catalyse chirale dans les procédés industriels pour l’obtention d’énantiomères et l’utilisation du « pool chiral naturel » pour l’obtention directe des molécules recherchées avec un regard particulier sur la catalyse enzymatique. • une utilisation plus significative de matières premières renouvelables • la mise en œuvre de techniques ou conditions nouvelles en catalyse hétérogène ; milieu supercritique, micro-ondes, liquides ioniques, transfert de phase,… 2 - Quelques exemples choisis de réactions de catalyse hétérogène et de chimie fine Les catalyses mises en œuvre dans toutes ces réactions font appel à : des métaux supportés, des solides acides, basiques ; des oxydes, sulfures, fluorures ; des matériaux multifonctionnels, de porosité contrôlée, des matériaux hybrides pouvant induire une chiralité : des biocatalyseurs. Dans un premier temps des réactions simples ont été mises en œuvre, puis avec le développement des travaux sur la préparation, la chimie des surfaces, la chimie organométallique, des réactions multiétapes (multistades) sont maintenant mises en œuvre. Depuis Berzelius et après les travaux de Sabatier relatifs par exemple à l’hydrogénation, la catalyse hétérogène a été mise en œuvre essentiellement en phase gaz via les procédés de la Pétrochimie (raffinage et grands réactifs). Cependant, comme indiqué précédemment, cette expérience a été mise à profit dans d’autres réactions et nous avons choisi de présenter quelques exemples parmi les plus marquants, en raison de l’histoire, de l’originalité de la thématique, de l’avancée des connaissances,… . La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 4 / 22 2.1 - Synthèse industrielle de mercaptans et dérivés L’exploitation, à partir de 1958, du gisement de gaz de Lacq riche en H2S a conduit très rapidement la SNPA à développer le secteur thiochimie et une gamme importante de produits : mercaptans, sulfures, disulfures, polysulfures, sulfoxydes, thioacides, thiophènes,… (9). De nouvelles voies de synthèse par sulfhydrolyse d’alcools ou d’aldéhydes (9b, c), d’addition sélective d’hydrogène sulfuré sur des oléfines (9a) en présence de sulfures supportés ou de résines ont été découvertes. Les composés obtenus trouvent de nombreuses applications dans les domaines de l’Agrochimie, de l’alimentation animale, de la pharmacie, des lubrifiants, de la pétrochimie, de la cosmétique et des gaz odorants. C’est un domaine tout à fait original, de renommée internationale qui a fortement contribué à la structuration du site de Lacq. 2.2 - Synthèse directe d’amines à partir d’acides ou d’esters Les amines aliphatiques appelées «amines grasses » regroupent toutes les amines primaires (R1NH2), secondaires (R1 R2 NH), tertiaires (R1 R2 R3 N) où l’un des groupements (R1 R2 R3) possède une chaîne hydrocarbonée comportant de 8 à 22 atomes de carbone (acides ou esters). Elles sont essentiellement utilisées comme intermédiaires dans la préparation de sels d’ammonium quaternaires (R3 N+ X-), agents tensioactifs bien connus. Parmi celles-ci, les méthylalkylamines sont particulièrement importantes et obtenues en deux étapes à partir d’acides gras : a) formation du nitrile et b) alkylation et méthylation en présence d’hydrogène (schéma 1); La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 5 / 22 O R O OH + a) O R NH3 R N NH2 R O CH3OH H2 b) R N R R CH NH HCHO CH2 NH2 R CH2 N 3 DMAA 1 R R CH NH R N R HMTA R 2 R NH 4 R R N DAMA DAA TAA Schéma 1 : Amination réductrice d’acides ou d’esters.(DMAA : diméthylalkylamine, DAMA : dialkylméthylamine, DAA : dialkylamine, TAA : trialkylamine) Ces réactions multiétapes se font en présence de catalyseurs bifonctionnels (hydrodéshydrogénant d’une part et acido-basique d’autre part) stables en présence d’eau et d’ammoniac. Des catalyseurs hydrogénants à base de cuivre ou de nickel ont été spécifiquement préparés en fonction des étapes de méthylation par le méthanol ou par l’HMTA (hexaméthylènetétramine) (10). 2.3 - Réactions de fluoration catalytique L’origine de la chimie des composés fluorés d’Arkema vient de la fabrication d’acide fluorhydrique au début du XXe siècle, puis de la mise au point de procédés de production de chlorofluorocarbures (CFC) dans les années 1940-50 (11a). Suite au protocole de Montréal en 1987, ces composés ont été remplacés par les HCFC (hydrochlorofluorohydrocarbures) puis par les HFC (hydrofluorohydrocarbures), ces derniers ayant un impact quasi-nul sur la couche d’ozone. Compte tenu de leurs propriétés physiques et de leur non toxicité, les HFC sont utilisés pour les fluides frigorigènes, les agents d’expansion et des solvants de nettoyage. Diverses techniques et agents de fluoration permettent l’introduction du fluor parmi lesquelles la fluoration par HF en phase liquide ou en phase gazeuse (11b, c). Les fluorations en phase liquide sont généralement effectuées en présence de catalyseurs homogènes de type HFSbCl5 . La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 6 / 22 En phase gazeuse, il peut s’agir d’un échange Cl/F ou de l’addition de HF sur une double liaison en présence de catalyseurs à base d’oxyde(s) de chrome. A titre d’exemple la fluoration de CF3CH2Cl par HF en phase gazeuse est parfaitement réalisée à 380°C en présence d’un catalyseur oxyde de chrome-alumine préalablement fluoré (12). Les sites actifs seraient constitués d’atomes de chrome réversiblement oxydables à la surface du catalyseur où il est de plus nécessaire de maitriser l’acidité de Lewis (addition de promoteur) pour promouvoir l’étape de fluoration par rapport aux réactions secondaires de Deacon et de déshydrofluoration (12). L’extension de cette voie de fluoration à la préparation de synthons fluorés par exemple d’aromatiques fluorés à partir des aromatiques chlorés correspondants est actuellement à l’étude (13) et permettra d’ajouter une nouvelle étape à cette chimie du fluor très riche d’applications. 2.4 - Hydrogénation Sélective en présence de métaux supportés L’hydrogénation sélective de dérivés carbonylés en alcools insaturés a été mise en oeuvre en présence de catalyseurs de la famille des chromites (de cuivre). Le mécanisme de réaction incluant la nature des centres réactionnels a été décrit dans diverses publications et fait intervenir un hydrogène de type hydrure (14,15). Les conditions de réaction sont néanmoins assez sévères car une température comprise entre 200 et 300 °C ainsi qu’une pression parfois supérieure à 100 bar sont généralement utilisées. Les métaux précieux offrent des avantages par rapport aux métaux non nobles en raison de leur plus grande activité permettant d’effectuer la réaction à une température et à une pression plus basses. Ces conditions de réaction moins sévères conduisent généralement à une sélectivité plus importante et par conséquent à une plus faible production de déchets [16]. Les métaux Raney modifiés ont été utilisés dans des conditions plus douces de température et de pression non seulement pour les dérivés carbonylés (14,17) mais également pour l’hydrogénation des nitriles. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 7 / 22 2.5 - Hydrogénation des composés carbonylés α, β insaturés Un exemple typique est l’hydrogénation du citral en géraniol et nérol (schéma 2). En présence d’un catalyseur Rh-SiO2 (dispersion 80%, 80 bar, 340 K), la réaction n’est pas sélective et conduit au citronellal puis au citronellol. Par contre, si le catalyseur est modifié par SnBu4 de façon à obtenir (Rh)2SnBu2, la sélectivité est orientée à 95% vers le géraniol et le nérol (3,7diméthyl-2,6-octadiénol) sans perte d’activité (18). Dans ce cas particulier, la sélectivité résulte d’un contrôle de la surface du catalyseur de façon à obtenir quasi-exclusivement les sites catalytiques voulus « single-site heterogeneous catalysts », qui seraient des combinaisons finies de rhodium et d’étain (4). HOH2C CH2OH (3,7-diméthyl-2,6-octadiènol) Nérol Géraniol (composé E) (composé Z) OHC CHO Néral Géranial (composé E) (composé Z) CHO Citronellal (3,7-diméthyl-6-octenal) CH2OH Citronellol (3,7-diméthyl-6-octenol) CITRAL CHO CH2OH (+ OM) CH3(CH2)7CH=CH(CH2)7CH2OH CH3(CH2)7CH=CH(CH2)7CO2(CH2)8CH=CH(CH2)7CH3 Oléate d'oléyle Alcool oléique CH3(CH2)7CH=CH(CH2)7CH2OH 3,7-diméthyl-6-octanal Alcool oléique 3,7-diméthyloctanol CH3(CH2)7CH=CH(CH2)7CO2CH3 Oléate de méthyle (OM) CH3(CH2)7CH2CH2(CH2)7CO2(CH2)8CH2CH2(CH2)7CH3 Stéarate de stéaryle CH3(CH2)7CH2CH2(CH2)7CO2CH3 Stéarate de méthyle Schéma 2 : hydrogénation sélective du citral La Catalyse en France : une Aventure CH3(CH2)7CH2CH2(CH2)7CH2OH Alcool stéarique Schéma 3 : Hydrogénolyse et transestérification d’esters gras insaturés Juillet 2007 8 / 22 2.6 - Hydrogénolyse d’esters gras insaturés L’hydrogénolyse sélective d’esters méthyliques insaturés en alcools insaturés nécessite, comme dans le cas précèdent, la maîtrise de la chimiosélectivité. Dans le cas des esters gras tel que l’oléate de méthyle (octadéc-9-ènoate de méthyle), il a été montré que la sélectivité en alcool insaturé (octadéc-9-énol) était obtenue en présence de catalyseurs Ru bimétalliques (Co)-Sn supportés (rendement ≥ 80%). Cependant, ce résultat dépend grandement d’une réaction de transestérification entre par exemple l’oléate de méthyle et l’alcool oléique primaire qui permet d’éviter la formation de l’ester saturé (schéma 3) (19, 20). Le contrôle de ces réactions résulte d’une distribution appropriée des centres hydrogénants et basiques à la surface du catalyseur. Des centres mixtes Ru-Snx seraient à l’origine de l’hydrogénation sélective alors que les oxydes SnOx favoriseraient les réactions de transestérification ou/et d’isomérisation cis-trans de la double liaison (20). 2.7 - Hydrogénolyse/Hydrogénation de polyols Les principaux alcools obtenus par hydrogénation des sucres sont le sorbitol à partir du glucose, le mannitol à partir du fructose et le xylitol à partir du xylose [21]. La conversion du glucose est totale avec une sélectivité en sorbitol supérieure à 99,0% sur Ruthénium/C (22). La réaction du glucitol en présence de catalyseurs bimétalliques à base de cuivre a permis de mettre en évidence une formation sélective d’isosorbide avec un catalyseur cuivre –ruthénium (22a, 23). Dans des conditions similaires, le glycérol peut être sélectivement hydrogénolysé en éthylène glycol ou 1,2 propanediol en présence de cuivre de Raney (24). L’hydrogénation catalytique de trois aldonolactones (C6, C5 et C4) d’origine industrielle en polyols correspondants (sorbitol, arabitol, erythritol) a également été réalisée sur des catalyseurs au ruthénium (25). 2.7 - Hydrogénation des dinitriles en diamines Les diamines aliphatiques primaires sont des intermédiaires importants dans l’industrie des polymères. Par exemple, la tétraméthylène diamine est un monomère de la fabrication du polyamide 4,4 alors que la méthylpentaméthylène diamine est utilisée pour l’obtention de La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 9 / 22 thermoplastiques. De même, l’hexaméthylène diamine intervient dans deux productions industrielles importantes connues : le nylon 6,6 par copolymérisation avec l’acide adipique et les isocyanates par réaction avec le phosgène. Les isocyanates sont des intermédiaires dans l’industrie de la peinture. La voie principale pour obtenir les diamines est l’hydrogénation des dinitriles correspondants, généralement en présence de catalyseurs nickel de Raney (26a, b) ou de type Ziegler (26b,c). Cependant, de nombreux produits secondaires peuvent se former, notamment par cyclisation. A partir des travaux réalisés par Rhône-Poulenc, il apparaît clairement autant à l’échelle du laboratoire qu’au stade industriel que les catalyseurs au nickel ou au cobalt de Raney sont les plus appropriés. La modification par différents dopants métalliques, l’addition d’ammoniac ou de bases minérales augmentent l’activité et la sélectivité en amines primaires pour atteindre les spécifications industrielles (26c). En outre, ces travaux ont permis de définir des règles pour le choix des catalyseurs, du solvant, des conditions expérimentales, … Par rapport aux premiers travaux dans le domaine, de nouvelles familles de catalyseurs très sélectifs constituées de centres réactionnels métalliques ou bimétalliques supportés, de métaux Raney ont été découvertes et préparées. Bien évidemment, ces catalyseurs trouvent des applications dans d’autres réactions d’hydrogénation sélective (27). 2.8 - Catalyse basique : Estérification ou/et éthérification sélective(s) d’alcools La catalyse basique, peu utilisée jusqu’à ces dernières années, a trouvé des applications significatives avec par exemple l’activation d’alcools, de sucres, de saccharides d’origine naturelle. En effet il est préférable de mettre en œuvre des solides basiques plutôt qu’acides en raison d’un meilleur contrôle des réactions secondaires. De plus la possibilité de préparer des matériaux mésoporeux basiques minéraux ou hybrides a permis d’ouvrir un nouveau champ d’investigation illustré par les exemples présentés ci-dessous. 2.9 - Transformations sélectives du glycérol En France l’incorporation de 10 % de biocarburants dans le pool « carburants» dans un avenir proche (2008-2010) signifie une augmentation de production d’environ 400 000 à plus de La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 10 / 22 2 000 000 de tonnes. Ceci va mettre à disposition une quantité croissante, par exemple de glycérol dont la valorisation doit être assurée de façon à conforter la balance économique de la filière biocarburant (28). Une des voies explorées est la transformation du glycérol en monoglycérides (agrotensioactifs) par réaction avec des acides ou esters gras. Cependant, la présence de trois groupes hydroxyles sur le glycérol implique le développement de procédés hautement sélectifs afin d’éviter de nombreuses étapes de protection et de déprotection néfastes à la fois pour le coût et l’impact du procédé sur l’environnement. En présence de matériaux mésoporeux basiques des monoglycérides sont obtenus sélectivement à partir du glycérol (29-31) ou à partir de glycidol (32) et d’esters méthyliques d’acides gras, l’un des premiers exemples de sélectivité de forme en chimie fine. Une autre voie est la synthèse directe d’esters de polyglycérols. En présence de catalyseurs mésoporeux basiques, le glycérol est converti totalement en di- et triglycérol (29,33) alors qu’un mélange de réactifs (glycérol et ester méthylique longue chaîne) est transformé sélectivement en esters de diglycérol (33). Dans ces deux cas les solides basiques sont obtenus soit par « insertion » d’éléments basiques minéraux dans la charpente du solide mésoporeux soit par greffage de bases organiques (34,35). 2.10 - Synthèse catalytique d’éthers de saccharose L’utilisation d’un catalyseur PS-NOH possédant un squelette lipophile (polystyrène/PS) et des sites catalytiques hydrophiles (hydroxyde d’ammonium) est capable de déprotoner directement la molécule de saccharose pour conduire sélectivement aux sucroéthers (36,37). La réaction a été étendue avec succès à deux autres disaccharides : le tréhalose et l’isomalt®. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 11 / 22 OH O 4 6 HO HO 2 OH 3 OH O OH O OH HO sacharose OH O HO OH O OH 4 6 HO HO 2 3 OH O 1,2-epoxydodécane OH OH catalyseur HO Disaccharide OH trehalose 4 2 3 OH O OH O OH OH ( )7 mélange de régioisomères 6 HO HO OH OH OH O OH OH OH isomalt® Schéma 4 : éthérification sélective de saccharides 2.11 - Oxydations sélectives Les réactions d’oxydation peuvent également permettre d’obtenir des produits de chimie de spécialités si les catalyseurs solides sont bien choisis. Comme dans les précédents domaines, les recherches de nouveaux systèmes catalytiques mettant à profit les travaux effectués en oxydation partielle d’hydrocarbures et en oxydation en phase homogène et tenant compte des particularités des réactifs et produits de chimie fine ont permis de proposer des voies originales et prometteuses. 2.12 - Oxydation sélective de polyols L’oxydation sélective du glycérol, molécule contenant à la fois des fonctions alcools primaire et secondaire permet de valoriser ce synthon en différents produits d’oxydation (C3). En présence d’air en milieu aqueux, par un choix judicieux du catalyseur (Pd, Pt), du promoteur métallique (Bi) et des conditions de pH, il est possible d’orienter les réactions vers l’oxydation de l’une ou l’autre des fonctions alcool (38). L’oxydation d’une fonction alcool primaire en acide glycérique est favorisée sur Pt ou Pd en milieu basique, alors que l’oxydation de l’alcool secondaire en dihydroxyacétone a lieu en présence du promoteur (Bi) et en conditions acides. L’oxydation catalytique et sélective du glucose en milieu aqueux par l’air, en acide gluconique ou acide glucarique a été obtenue en présence de catalyseurs bimétalliques Pd-Bi supportés avec d’excellentes activités et sélectivités (39,40). La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 12 / 22 L’oxydation de dérivés de carbohydrates (fructose) en furanes fonctionnalisés, par exemple la transformation des pentoses, hexoses peut conduire à des intermédiaires de valeur tels que les derivés du furfural ou du furane. L’un de ces dérivés résultant de la déshydratation du fructose, le 5-hydroxyméthylfurfural (41) peut être sélectivement oxydé en 2,5 furandicarboxyaldéhyde en présence de catalyseurs solides (V2O5/TiO2) (42). Ce composé est d’un certain intérêt pour la synthèse d’antifongiques, de diamines , de bases de Schiff. 2.13 - Oxydations d’aromatiques sur des phtalocyanines immobilisées Les matériaux hybrides contenant des complexes organométalliques dans un environnement contrôlé sont très prometteurs pour développer des procédés propres. Moins étudiées que les porphyrines, les autres complexes biomimétiques qui constituent les sites actifs des enzymes (cytochromes P-450, peroxydases, etc.), les métallophtalocyanines (MPc) sont particulièrement intéressants en catalyse d’oxydation lorsque associés à un oxydant propre (peroxyde, oxygène). Les catalyseurs hétérogènes ont été obtenus par greffage covalent des complexes sur silice [43]. En fonction du mode opératoire, il est possible de fixer les complexes sous forme monomère ou dimère, qui présentent des propriétés catalytiques différentes (schéma 5). SO 3 Na N N N N Fe N N SO 3 Na N HNSO 2 SO 3 Na O N N N N N Fe N N SO 3 Na N HNSO 2 HNSO 2 N HNSO 2 Schéma 5 : présentation schématique du complexe du fer supporté. Les propriétés catalytiques des catalyseurs supportés en oxydation du 2,3,6- triméthylphénol (TMP) et 2-méthylnaphtalène (2MN) en quinones dépendent très fortement de l’organisation structurale des sites catalytiques [43b]. La 2-méthylnaphtaquinone (vitamine K3) et La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 13 / 22 la triméthylquinone (précurseur de la vitamine E) sont obtenues avec une sélectivité de 45 % et de 87 %, respectivement (43c). Cette méthode est aussi applicable à plusieurs types de composés aromatiques, en particulier à d’autres phénols encombrés ou polyfonctionnalisés comme le di-tert-butylphénol ou l’acétamidophénol avec des rendements de quinones pouvant aller jusqu’à 93 %. 2.12 - Époxydation d’esters ou de terpènes Les huiles de soja et de tournesol sont époxydées (schéma 6) avec des rendements supérieurs à 85% (44b,c) en présence d’espèces phopshotungstiques seules ou immobilisées par complexation sur les motifs phosphoramides greffés sur silice (45) ou sur les motifs phosphates de l'hydroxyapatite (HAp) ou par incorporation entre les feuillets d'une hydrotalcite . O CH2OC O O O CHOC O O O O CH2OC O Schéma 6 : époydation de triesters polyinsaturés L’ époxydation par le peroxyde d’hydrogène de terpènes tels que le pinène ou le limonène (schéma 7) en présence de catalyseurs à base de méthyltrioxorhénium (MTO = MeReO3) semble prometteuse, le produit principal est l'aldéhyde campholènique, un intermédiaire intéressant pour l'industrie des parfums (46). O O Schéma 7 : époxydation de terpènes En vue du recyclage de ces systèmes catalytiques, des complexes MTO-poly-N-oxydes d'amines ont été préparés à partir de polymères de type polypyridine et polystyrèneamine. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 14 / 22 2.13 - Réactions de Catalyse acide Les propriétés qui ont fait le succès des zéolithes en Raffinage et Pétrochimie ; acidité et porosité adaptables à la réaction sélective désirée en font aussi des catalyseurs de choix en Chimie Fine. C’est ce qui est présenté ci-après pour la synthèse de cétones aromatiques, précurseurs importants de parfums musqués, d’absorbants UV, d’anti-inflammatoires tels que le paracétamol, l’ibuprofène ou le naproxène (schéma 8). La synthèse de ces cétones est souvent réalisée en utilisant comme agent acylant des chlorures d’acides et comme catalyseurs des acides de Lewis tel que AlCl3. ex. OCH 3 OCH 3 CH3 COCl - HCl AlCl3 COCH 3 OCH 3 CHCOOH CH3 Naproxène Schéma 8 : Acylation de cétones aromatiques Le remplacement d’AlCl3 par un catalyseur acide solide non corrosif, régénérable et du chlorure d’acétyle par l’anhydride ou l’acide acétique est donc particulièrement souhaitable. L’intérêt des zéolithes pour la synthèse industrielle sélective de cétones aromatiques a été démontré par Rhône-Poulenc [47]. Deux procédés ont été développés, l’un pour l’acétylation sélective de l’anisole en paraméthoxyacétophénone sur une zéolithe HBEA, l’autre pour celle du vératrole en diméthoxy-3,4 acétophénone sur une zéolithe HFAU. D’autres réactions d’acylation d’aromatiques (48) et d’aromatiques hétérocycliques tel que le benzofurane (49) ont également été réalisées en présence de zéolithes appropriées. Néanmoins les applications pratiques des zéolites pour la chimie fine sont assez limitées en raison de l’encombrement des substances organiques (réactifs et produits) et de la faible taille des pores et des cavités de ces matériaux (<1nm). Depuis le début des années 90, comme dans le cas de la catalyse basique citée auparavant, la possibilité de préparation d’aluminosilicates mésoporeux avec une taille de pores uniforme pouvant être contrôlée entre 1,5 et 10 nm a ouvert un nouveau champ d’investigation. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 15 / 22 2.14 - Réactions de catalyse asymétrique La catalyse ou la synthèse asymétrique sont connues depuis longtemps en particulier dans l’histoire des produits naturels puisque la chiralité naturelle joue un rôle primordial au niveau biologique et donc de la vie. Les travaux réalisés dans ce domaine ont conduit nombre de leurs auteurs à recevoir de nombreux prix, dont le Prix Nobel, pour des réactions bien évidemment déterminantes mais généralement mises en œuvre en milieu homogène. L’intégration significative de la catalyse chirale dans les procédés industriels pour l’obtention d’énantiomères purs ouvre un marché considérable dans l’industrie pharmaceutique et en agrochimie (50,51). En France plusieurs équipes effectuent des recherches dans le domaine de la synthèse asymétrique et quelques avancées et orientations ont été présentées récemment par F. Agbossou-Niedercorn (52) pour la catalyse homogène et par M. Lemaire et coll pour la catalyse hétérogène (53). « Un des freins au développement industriel de la catalyse asymétrique est lié au coût et/ou à la toxicité des complexes organométalliques utilisés comme catalyseurs dans la plupart des procédés performants. Les expériences de catalyse asymétrique hétérogène ont été réalisées très tôt par exemple et dés la découverte de la catalyse asymétrique par les complexes de métaux de transition (Knowles et Kagan (54)), le problème de l’insolubilisation des complexes a été abordé,… ». Cette phrase tirée de l’article de M. Lemaire (53) présente bien le problème et la difficulté majeure et les exemples cités ci-après sont destinés à montrer quelques avancées dans le domaine de la catalyse « hétérogène asymétrique ». Différentes stratégies peuvent être envisagées pour obtenir des catalyseurs solides énantiosélectifs (55a) ; 1) modification de particules métalliques par un composé chiral, 2) greffage d’un complexe chiral sur un solide, 3) choix d’un support chiral, 4) modification du substrat par un auxiliaire chiral avant réaction Parallèlement aux travaux des groupes de Bayston (ref 51 p. 210) et de Noyori (64), l’équipe de M. Lemaire a étudié diverses réactions de réduction asymétrique par transfert d’hydrure (ligands 6,6’-diam-BINAP immobilisés sur silice). Des ligands azotés (bis-oxazolines) ont un large spectre d’applications en catalyse asymétrique et il a été montré par exemple que la surface d’une silice pouvait être ‘greffée-modifiée’ pour obtenir un catalyseur de réaction de Diels Alder recyclable sans perte des activité et sélectivité obtenues en solution. La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 16 / 22 Des recherches sur de nouveaux ligands chiraux ont également été menées par M.Besson et coll (55) en privilégiant les réactions d’hydrogénation et de transfert d’hydrures. La stratégie de préparation de catalyseurs mixtes consistait à associer des particules métalliques actifs en dissociation de l’hydrogène à des complexes organométalliques (ligands bisoxazolines, diphosphines) pour l’hydrogénation de molécules simples (acétophénone), multifonctionnelles (cétones α, β insaturées) et autres. D. Brunel et coll ont étudié le greffage de « composés actifs » par exemple des isomères de l’éphédrine sur des matériaux mésoporeux de type MTS dont ils ont estimé les performances de stabilité et de sélectivité dans des réactions d’alkylation ( réf 51, p 275). D’autre part le greffage d’enzymes sur différents supports organiques ou inorganiques ouvre également de nouveaux champs d’applications dans le domaine de la catalyse énantiosélective (voir ci-après et ref 51 p. 97). 2.15 - Réactions d’électrocatalyse organique Les concepts de l’électrocatalyse peuvent aussi s’appliquer à l’électrosynthèse. Il s’agit alors de concevoir des électrodes et de les utiliser dans des conditions expérimentales précises pour obtenir une meilleure sélectivité. Les réactions électrochimiques choisies ont un intérêt potentiel en électrosynthèse. Quelques exemples significatifs sont présentés pour montrer l’apport de l’électrocatalyse à la synthèse de composés organiques. 2-15-1 - Réduction électrocatalytique de composés carbonylés L’acide pyruvique a été choisi comme molécule modèle pour étudier l’électroréduction de la fonction carbonyle. Il est industriellement produit par fermentation du glucose dans un milieu de bioconversion à un pH de 4. L’influence des principaux paramètres de réaction a été étudiée afin de trouver des conditions pour orienter sélectivement la réaction soit vers l’acide lactique (rendement de 80%), soit vers le pinacol (acide 2,3-diméthyltartrique) (rendement de 60%) (56,57). 2-15-2 - Électrodes modifiées par un médiateur rédox L’activation électrochimique de médiateurs chimiques TEMPO immobilisés à la surface d’un matériau non catalytique permet de contrôler la chimio et/ou la régio-sélectivité de l’oxydation La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 17 / 22 de carbohydrates (58). Le pouvoir déshydrogénant des cations oxoammoniums (forme active des radicaux aminoxyles) permet l’oxydation sélective d’alcools primaires en présence d’hydroxyles secondaires ; ces cations ont été immobilisés à la surface d’électrodes de carbone pour l’activation de cyclodextrines. Les cyclodextrines sont en effet des molécules « hôtes » naturelles dont le caractère amphiphile permet d’inclure dans leur cavité des molécules hydrophobes et ainsi de former des complexes d’inclusion solubles dans l’eau. Cependant pour être utilisées en tant qu’agent de solubilisation, il faut les modifier chimiquement en conservant leurs propriétés complexantes. Leur transformation en dérivés « percarboxylés » ayant une solubilité accrue d’un facteur 10 à 30 a été réalisée en présence des électrodes citées ci-dessus avec des rendements chimiques supérieurs à 80% à température ambiante et en contrôlant la quantité d’électricité mise en jeu au cours de l’électrolyse. 2.16 - Réactions de catalyse enzymatique La synthèse de composés chimiques variés mettant en œuvre une catalyse enzymatique présente de nombreux avantages par rapport à d’autres réactions : • Le caractère de «Chimie verte » • La sélectivité, en particulier chirale, des enzymes qui conduit à des produits énantiomériquement purs de plus en plus demandés. Une des classes d’enzymes étudiée depuis 15 ans sont les triacylglycérol hydrolases, appelées également lipases. Le rôle naturel de ces enzymes est l’hydrolyse des triglycérides composés d’acides gras à moyennes et longues chaînes. Cependant, placées dans des conditions thermodynamiques favorables, les lipases sont capables d’inverser l’équilibre thermodynamique pour réaliser des réactions de synthèse. Pour cela les réactions doivent être menées en milieux non conventionnels (milieux biphasiques, micelles inverses, solvants organiques, milieux sans solvant, fluides supercritiques…. En outre, grâce à l’ingénierie enzymatique il est possible de construire le catalyseur optimal pour une réaction donnée du point de vue de son activité, de sa stabilité et de sa La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 18 / 22 spécificité. L’optimisation des conditions de fonctionnement des enzymes a fait l’objet de nombreuses études expérimentales et de modélisation (59). Enfin, la nature du support de l’enzyme est également cruciale car elle régit dans ce domaine de la catalyse hétérogène le partage entre phases des réactants. Dans ce cas également, les techniques d’immobilisation sur différents supports ont contribué à leur stabilisation et à leur récupération en vue d’une réutilisation. • Parmi les réactions de biotechnologie appliquée, on peut citer celles utilisant des lipases ou des estérases pour la modification ou la synthèse d’esters (60) de même que les oxydases ou les déshydrogénases pour des réactions d’oxydation ou rédox (61). • La synthèse d’esters naturels à propriété d’arôme a été étudiée. En effet, les esters (C5- C11), provenant d’une gamme d’acides (C1-C4) et d’alcools (C2-C7) ont été préparés par une réaction d’estérification continue mettant en œuvre une lipase industrielle immobilisée (lipase B de Candida Antartica) développée par Novo Nordisk sous le nom de Novozym 435 (62). Les vitesses de réaction sont de l’ordre de 2 à 3 kg d’esters par heure et kg de catalyseur. 3 - Conclusion La présentation générale de cette thématique, de même que les exemples choisis sont simplement destinés à montrer l’évolution rapide de la catalyse hétérogène en chimie fine, au cours de ces trois dernières décennies. C’est un des domaines pour lequel une approche multidisciplinaire a été nécessaire pour la conception de nouveaux catalyseurs, leur caractérisation et la compréhension des mécanismes de surface mis en jeu ; la découverte de nouvelles réactions, leur mise en œuvre et l’analyse fine des produits de réaction. Les aspects de génie catalytique relativement complexes dans ces milieux multiphasiques ont été également étudiés. A partir des matériaux « relativement simples » issus de la pétrochimie au début des années 70, de la transposition des connaissances de la chimie organométallique, du développement des méthodes de synthèse et de caractérisation des nanomatériaux, de l’utilisation de la modélisation moléculaire ; de nouveaux systèmes catalytiques bien mieux définis soit totalement minéraux, soit hybrides ont été préparés. Ils ont permis d’aborder tous les problèmes de La Catalyse en France : une Aventure Juillet 2007 19 / 22 sélectivité en chimie fine. Ces réalisations ont été quelquefois favorisées par la mise en oeuvre de nouvelles technologies ou approches (micro-ondes, conditions supercritiques, milieux ioniques, catalyse biphasique, …) que le lecteur pourra trouver de façon détaillée dans d’autres ouvrages ou comptes-rendus de congrès (63). Compte tenu de l’expérience acquise par les équipes françaises de catalyse, de chimie organométallique, de synthèse organique, de préparation de matériaux catalytiques, de génie des procédés,… la catalyse en chimie fine en France est un domaine de grande renommée qui trouve maintenant des retombées significatives en chimie durable à partir de matières premières renouvelables. Références [1] Info Chimie Magazine 2000, 414, 55 (2) M. Guisnet, J. Barrault, C. Bouchoule, D. Duprez, C. Montassier and G. Perot, Stud. Surf. Sci. Catal. « heterogeneous catalysis and fine chemicals », 41, 1988, Elsevier ed. (3) J.M. Basset, J.P. Candy, A. Choplin, P. Dufour, P. Louessard, C. Santini, Stud. Surf. Sci. Catal., Elsevier ed, 41, 1-18, 1988,. (4). Basset, J.M., Candy, J.P., Copéret, C., Lefebvre, F. and Quadrelli, A. “Design, building, characterization and performances at the nanometric scale of heterogeneous catalysts” Nanotechnology in Catalysis, B. Zhou, S. Hermans, G. A. 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