Le surendettement a fortement aug-
menté depuis 2008 : recours massif au
crédit à la consommation pour com-
penser de faibles revenus, isolement à
la suite d’une rupture familiale, éloigne-
ment de l’emploi (chômage, invalidité ou
maladie). La dernière enquête typolo-
gique publiée en mars 2011 par la Banque
de France confirme une représentation
importante des femmes seules (53 %)
avec ou sans enfant à charge parmi les
surendettés.
La spirale infernale
de la précarité
Si les foyers monoparentaux ne doivent
pas être considérés, de manière générale
et par principe, comme en danger, être
dans cette situation constitue incontes-
tablement un facteur de précarisation
pour les femmes les plus fragiles. La
rupture familiale, quelles qu’en soient les
causes (veuvage, séparation, divorce) et
les compensations apportées (capital
décès, pensions alimentaires) se tra-
duit par une perte de ressources pour
le parent, essentiellement la mère, qui
assume la garde du ou des enfant(s). De
fait, les parents seuls se trouvent depuis
longtemps en première ligne parmi les
allocataires de minima sociaux. Ces
mesures de soutien contribuent certes
à réduire directement le taux de pauvreté
des familles monoparentales mais elles
exposent certains parents (en particulier
les mères isolées jeunes et peu qualifiées)
à de longs retraits du marché du travail
qui fragilisent leur insertion durable dans
l’emploi et leurs revenus futurs.
La santé : un enjeu
crucial
Lutter au quotidien contre la précarité,
liée notamment aux aléas d’une activité
professionnelle marquée par l’instabilité
et l’incertitude du lendemain, engendre
un profond sentiment d’insécurité sus-
ceptible en tant que tel d’affecter l’état de
santé. Par ailleurs, dans nombre de cas,
les conditions de travail elles-mêmes sont
pathogènes mais dans toutes ces situa-
tions, leur faible niveau de ressources
conduit les femmes concernées à hiérar-
chiser les priorités : se nourrir, faire face
aux dépenses de la vie courante, consti-
tuent des préoccupations majeures qui
relèguent au second plan le recours aux
soins, a fortiori s’il nécessite une avance
de frais ou comporte un reste à charge
trop important.
Globalement, en France, l’espérance
de vie des femmes (en 2010) demeure
supérieure d’un peu plus de 6 ans à
celle des hommes (84,8 ans contre 78,1
ans). Elles ont aussi une meilleure espé-
rance de vie en bonne santé même si
l’écart est plus réduit (64,2 ans contre
62,4 ans). Cependant, quelle que soit la
tranche d’âge, les femmes se perçoivent
toujours en moins bon état de santé que
les hommes. Cela dit et en dépit de ce res-
senti, les intéressées recourent moins aux
examens de prévention et elles déclarent
plus souvent que les hommes renoncer
à des soins, essentiellement pour des
raisons financières.
Tout se passe comme si ces expériences
de précarité formaient les rouages d’un
même mécanisme de construction d’une
vulnérabilité de long terme. La précarité
apparaît multifactorielle, toutes ses
dimensions ayant une influence négative
sur l’accès aux soins. Ce cumul de vulné-
rabilités sociales semble bien constituer
un facteur majeur de renoncement aux
soins. Pour les chercheurs de l’IRDES,
ces très fortes corrélations entre renon-
cement et dimensions de la précarité
tendent aussi à montrer que le renonce-
ment pourrait lui-même être interprété et
utilisé comme indicateur de la précarité
en santé.
L’alimentation et
indicateurs de santé
des bénéficiaires de
l’aide alimentaire
Selon l’étude ABENA 2011-2012, une part
importante des usagers de l’aide alimen-
taire mange un nombre restreint de fois
au cours d’une journée : 39.5 % déclarant
moins de 3 prises alimentaires la veille de
l’enquête, au dépend le plus souvent d’un
repas le matin mais également le midi.
Malgré de légères améliorations obser-
vées depuis 2004-2005, il apparaît de
faibles consommations pour certains
groupes d’aliments recommandés pour
leur valeur nutritionnelle. Il s’agit, en par-
ticulier, des fruits et légumes et des pro-
duits laitiers moins consommés que dans
population générale. Ainsi la proportion
de personnes fréquentant les structures
de distribution alimentaire qui déclarent
consommer moins d’un produit laitier par
jour s’élève à 16,2 % tandis que 14.7 %
des usagers déclarent en consommer 3
par jour.
La prévalence de l’obésité a significative-
ment augmenté depuis 2004 et s’avère
particulièrement élevée chez les femmes
(35,1 %). Il en est de même pour le diabète
dont la prévalence est plus forte chez les
femmes que dans la population générale
(8.3 contre 3.3 % dans l’Etude nationale
nutrition santé, ENNNS 2006-2007).
Des pistes d’actions
Les auteurs recommandent de
généraliser :
> l’aide ciblée aux familles en
difficulté et notamment aux mères
auxquelles incombent la charge
principale de l’enfant puis de
l’adolescent,
> une attention particulière
à l’accompagnement des
mères isolées issues de
l’immigration notamment en
matière d’apprentissage de la
langue française, d’aide à la
compréhension du système
éducatif et de sensibilisation à
l’environnement scolaire de leurs
enfants
UNE LUEUR D’ESPOIR
POUR LES JEUNES
GÉNÉRATIONS ?
Des inégalités de genre en faveur des
filles sont toutefois constatées ainsi
que l’ont souligné le rapport et l’avis du
Conseil économique, social et environ-
nemental du 13 septembre 2011. Ainsi,
parmi les élèves en échec scolaire
issus de milieux défavorisés, les filles
sont en moindre proportion que les
garçons : 3,6 % pour les unes et 6,9 %
pour les autres. Elles sont aussi deux
fois plus nombreuses parmi les élèves
« résilients », c’est-à-dire ceux qui,
bien qu’issus de milieux défavorisés,
obtiennent d’excellents résultats sco-
laires : 10,1 % des filles et seulement
5,1 % des garçons sont dans ce cas.