Atelier II Précarité et psychiatrie : Frontières des soins

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Atelier II Précarité et psychiatrie :
Frontières des soins psychiatriques
Personne ressource : Monsieur Thierry BASSO, IHP-MONS
Animateur : Madame Pascale JAQUET - AIGS
Rapporteur : Madame Nathalie BOSMANS – Chef de division - ISoSL
Direction du secteur
Santé Mentale
Introduction par Mr BASSO : Historique du SPAD du Borrinage
Les HP sont en train d’évoluer vers des logements individuels supervisés pour répondre plus au
désir de certains patients de vivre et non en communauté.
Le SPAD a été créé en 2002, avec 2.5 ETP.
De suite, l’importance d’une vision globale de la situation du patient est apparue. Elle permet :
- de changer le poids de certains éléments de la vie (introduire un peu plus d’activité
sociale, un peu moins de soins, …) tout en maintenant l’équilibre de la personne. De fait,
ces différents domaines de la vie sont articulés entre eux comme des dominos, et c’est
un travail d’équilibriste de jouer petit à petit à ajuster les poids des différents
domaines, sans bousculer la personne.
- de connaître les signes avant-coureurs de rechute et d’anticiper les plans de prise en
charge à mettre en place en cas de rechute. Ceci permet des réhospitalisations plus
courtes et la continuité des soins.
- de connaître le parcours de soins de la personne. Le SPAD met le réseau en place,
sensibilise les intervenants au domaine de la psychiatrie et poursuit un rôle de relais.
Ainsi, très vite, ils vont à la rencontre des personnes en grande précarité et souffrant de
pathologie psychiatrique. Les gens de la rue cumulent souvent des difficultés sociales et
psychiatriques. Le SPAD mobilise les éducateurs de rue et sensibilise les médecins généralistes.
Ils installent également rapidement une collaboration rapprochée avec le Relais Social, les
maisons d’accueil et le relais santé.
Ils effectuent des immersions dans la rue et organisent des rencontres entre les éducateurs de
rue et les professionnels de la santé mentale de manière à créer des liens et du réseau. Ces
réunions permettent aussi le partage de l’expertise des professionnels de l’hôpital psychiatrique
et des intervenants ambulatoires. C’est tout un travail de « maraude », de rendez-vous donnés
sous les ponts, de consultations de psychiatre dans la rue.
Avec le public psychiatrique en grande précarité, il s’agit de travailler par petites touches, à
l’accrochage, à l’amorce de la prise en charge, à l’adhésion progressive de la personne. Ceci est
d’autant plus important que la qualité d’entrée en soins détermine souvent la suite de la prise en
charge.
Dans un second temps, ils approchent les communes rurales où les solidarités naturelles jouent
plus qu’en ville. Là, c’est la déstigmatisation qui est utile afin d’amener l’individu à consulter un
psychiatre.
La grande précarité n’est pas toujours « la rue », elle est aussi de vivre très pauvre dans un
logement. Cela dit, il y a assez de structures d’aide actuellement pour prendre les gens en
charge. Le problème majeur actuel est le logement.
Par rapport à la philosophie de soins du projet 107 se pose la question de savoir si le logement
est un endroit où l’on doit être soigné ou un endroit où l’on vit ?
Par ailleurs, l’équipe mobile du 107 interviendra t’elle dans la rue ?
Face à la volonté de remettre des SDF dans un logement, jusqu’où doit-on aller pour formater
les gens par rapport aux normes sociétales ? Dans la rue, le SDF a une vie sociale parfois
importante. Quid de sa vie sociale si on le remet dans un logement ?
Quand on entend les histoires de vie de certaines personnes de la rue, il paraît « sain »
qu’après avoir enduré de telles expériences de vie, ils soient en souffrance psychologique. Se
pose alors la question fondamentale suivante : faut-il psychiatriser la misère ?
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Le Relais social de Liège partage ces constats et souligne que leurs actions vont dans le même
sens.
Un des problèmes de la perception de la bonne santé mentale (définie par rapport aux
représentations sociales) par rapport aux personnes en situation de précarité, qui sont
justement hors normes. Ce sont les intervenants qui doivent pouvoir s’adapter à elles. Ceci
amène à rassembler le point de vue d’un maximum d’intervenants afin de pouvoir recréer du
lien social.
La grande précarité est liée à 3 éléments fondamentaux :
- des difficultés économiques
- une fragilité psychologique
- la perte de liens sociaux (les solidarités naturelles ne jouent plus)
Ainsi, pour aller de l’urgence à l’insertion, il faut travailler le temps le plus court possible
mais aussi longtemps que nécessaire.
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Siajef : Une des difficultés d’aider les personnes en situation de précarité présentant des
problèmes psychiatriques est la multiplicité des intervenants. Celle-ci complexifie la prise en
charge. Il est dès lors important de multiplier les moments d’échange entre intervenants pour
amener de la cohérence et de l’efficacité.
Par ailleurs, le lien entre ces personnes et les intervenants peut perdurer au-delà de leur
intervention directe. Il est important de maintenir le lien même si on n’est plus intervenant
direct car ça peut faciliter l’accès aux soins.
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Mr Basso : c’est au travers du tissage du lien, que l’histoire de la personne est dévoilée petit à
petit. Or, il reste rare que les intervenants se passent les informations de l’un à l’autre. En 10
ans, l’hôpital psychiatrique nous a transmis une seule fois les informations, et ce il y a peu. Ceci
permet d’espérer l’amorce d’une prise de conscience de l’importance du travail en réseau.
CONCERTO : Ceci relève malheureusement souvent de la méfiance. Le passage d’information est
entravé par les croyances des intervenants sur les différents points de vue de prise en charge.
De même, la précarité est une perception de l’intervenant, la personne elle-même pouvant ne pas
se sentir en situation de précarité. Ce sont les sentiments, les croyances et les peurs des
intervenants qui amènent à une différence entre la perception de l’usager et celle de
l’intervenant.
Eléments participant à la stabilisation du patient ( Mr BASSO)
ƒ Une communication fluide entre les intervenants
ƒ Sans cesse se poser la question de mon objectif dans la situation, de l’objectif de chacun
et de leur articulation ; sinon, la personne se glisse dans les failles.
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IHP de Verviers : Il reste des patients demandeurs d’une vie en collectivité. La question se pose
à leur sortie d’HP, de comment faire pour que ces patients autonomes, participants aux activités
de la vie journalière et aux activités culturelles lors de cette vie communautaire, puissent
transposer ce mode de vie actif et cette structuration du temps, seul dans leur logement
individuel. Ainsi, ils ont ouvert quelques places en logement individuel pour lesquelles les patients
restent stimulés à participer aux activités partagées avec les patients hébergés en HP.
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Il y a une offre de soins phénoménale en Belgique, il s’agit donc plus de rentabiliser ce qui existe
en partant du patient. Sur ce point, l’hôpital doit apprendre à ne pas se comporter comme le
centre du monde. Il faudrait que le personnel hospitalier change de point de vue et s’adapte aux
modalités pratiques d’existence du patient dans son lieu de vie (ex : il s’agit de concentrer les
médicaments en un minimum de prise pour mieux garantir celle-ci alors qu’à l’hôpital, il y a 4 prise
par jour).
C’est un défi pour le personnel hospitalier glissant vers les équipes du 107 que de franchir ce
choc de culture.
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Maison médicale La Passerelle : nous percevons d’un bon œil la possibilité qu’offrira l’équipe
mobile de crise de prendre en charge des personnes dans leur milieu de vie y compris dans la rue.
De fait, actuellement, la porte d’entrée aux soins demande à la personne de se formater aux
conditions d’accès de l’institution. Et, pour le public précarisé, il est parfois difficile d’aligner la
personne et l’institution. Il y a nécessité de s’ajuster aux personnes. Il s’agit de sortir nousmêmes « des normes sociales » avec de la créativité afin de créer du lien.
Par ailleurs, pour certaines personnes précarisées, l’hôpital est un refuge périodique peu onéreux.
Par contre, quand le patient de l’hôpital psychiatrique, ces patients et bien d’autres sont
replongés dans une situation de précarité.
Psytoyens : les patients dénoncent très souvent le manque de transition entre hébergement
institutionnel et vie autonome. Les soignants ne regardent pas depuis la réalité de vie à
l’extérieur, les tuilages, les accroches, les passages de relais sont réduits voire inexistants. Ceci
conduit à des rechutes rapides. La solution est de travailler les liens avec le réseau tout au long
de l’hospitalisation, de veiller au passage des informations et de délimiter les responsabilités,
tâches et les fréquence et délai d’action de chacun.
A la question sur « comment voyez-vous l’articulation entre l’équipe mobile de crise du 107 et
l’équipe mobile « chronique » du 107, le Directeur Médical d’ISoSL secteur A répond que c’est
dans la collaboration entre intervenants qu’on fait du PLUS. Il ajoute qu’il n’y a pas de système
parfait, cependant qu’il est optimiste car il observe la grande qualité des professionnels de
terrain.
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