Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (VII), n° 4, juillet/août 2003
Aromatase
Dossier
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a été démontrée in vivo par cathé-
térisme des veines surrénaliennes
(1, 5). Les études biochimiques ont
identifié une activité aromatase dans
la tumeur, qui peut atteindre un niveau
élevé proche du tissu placentaire (5-
7), ou être discrètement augmentée
par comparaison avec la surrénale
normale (2). L’étude moléculaire
montre la présence de transcrits de
l’aromatase dans la tumeur, sous le
contrôle prédominant du promoteur
gonadique PII (1, 2, 6). Des transcrits
mineurs issus des promoteurs PI.4,
PI.3, PI.6 ont aussi été identifiés dans
deux tumeurs surrénaliennes ayant un
profil différent de la surrénale nor-
male, suggérant une régulation de
l’activité transcriptionnelle différente
entre tissu normal et tumoral (2, 6).
Tumeurs testiculaires
Les tumeurs testiculaires sont la
deuxième cause de féminisation d’ori-
gine tumorale. L’expression endo-
crinienne n’est pas la règle puisque
30 à 50 % des tumeurs à cellules de
Leydig et seulement 5 % des tumeurs
germinales testiculaires induisent
une féminisation.
Leydigomes
Ils sont rares (1 à 3 % des tumeurs
testiculaires), et sont souvent révélés
par des signes endocriniens. Les
tumeurs à cellules de Leydig ont une
longue latence clinique et les signes de
féminisation sont le mode de décou-
verte de la tumeur. Certaines formes
latentes se traduisent par des signes
d’hypoandrisme avec un morphotype
gynoïde. Les leydigomes s’accom-
pagnent d’une infertilité, qui est rare-
ment la circonstance de découverte
de la tumeur. Le spermogramme
révèle une oligo-asthénospermie
dans 75 % des cas. Ces altérations
seraient liées à l’effet toxique direct
de l’hyperestrogénie intratesticulaire
sur la spermatogenèse, mais égale-
ment à la dysfonction gonadotrope
secondaire. Ces tumeurs, souvent non
perçues à l’examen clinique, sont
découvertes par l’échographie qui
révèle une image arrondie hypo-
échogène et hypervascularisée au
sein du testicule.
Profil hormonal
Il est caractérisé par une élévation
plus ou moins franche de l’estradiol
plasmatique, dont le taux peut varier
d’un jour à l’autre, traduisant un mode
de sécrétion intermittent qui justifie
la répétition des dosages (4). Le test
à l’hCG (5 000 UI i.m.) peut sensi-
biliser la détection de l’hyperestro-
génie lorsqu’il s’accompagne d’une
élévation prolongée de l’estradiol
plasmatique supérieure à 80 pg/ml à
la 96eheure (8). Ce profil de réponse
a une valeur diagnostique lorsque
la tumeur n’est pas visible à l’écho-
graphie, mais la sensibilité de ce test
approche 100 %. L’hyperestradio-
lémie est négativement corrélée à la
testostérone plasmatique qui est sub-
normale, voire franchement abaissée.
Le taux des gonadotrophines, en
particulier celui de FSH, est abaissé
à l’état basal et après stimulation par
GnRH. L’étude de la pulsatilité de
la LH révèle une diminution de l’am-
plitude des pulses, sans altération
de leur fréquence. L’excès d’estradiol
exerce donc un rétrocontrôle négatif
sur l’axe hypothalamo-hypophyso-
gonadique. Le freinage plus marqué
de la FSH par rapport à la LH pour-
rait résulter de la sécrétion conjointe
d’inhibine B par les leydigomes (8).
Mécanismes de l’hyperestrogénie
L’aromatase a été mise en évidence
par immunohistochimie au niveau
des cellules de Leydig du testicule
normal (9) mais également dans
le cas de leydigomes (Merudi G et
Kuhn JM, communication person-
nelle). Chez l’homme, une augmen-
tation de l’activité aromatase a été
mise en évidence dans un cas de
leydigome, expression corrélée à la
prolifération des cellules de Leydig
(4). La survenue de tumeurs leydi-
giennes, chez 50 % des souris trans-
géniques surexprimant l’aromatase
et les récepteurs des estrogènes dans
le testicule, pose la question de
l’implication des estrogènes dans la
tumorigenèse testiculaire (10).
Tumeurs germinales
du testicule
Elles sont les plus fréquentes, puis-
qu’elles représentent 90 à 95 % de
l’ensemble des tumeurs testiculaires.
Elles sont le plus souvent révélées
par une masse testiculaire, rarement
par des signes de féminisation ou
des altérations de la spermatogenèse.
Le séminome est la plus fréquente
des tumeurs testiculaires et s’accom-
pagne d’une production d’hCG dans
40 % des cas. Le choriocarcinome, le
carcinome embryonnaire et le téra-
tome sécrètent plus souvent de l’hCG
(75 %). Outre les conséquences endo-
criniennes d’une sécrétion d’hCG,
cette dernière représente un mar-
queur tumoral de grande valeur dia-
gnostique et pronostique.
Profil hormonal
Les tumeurs germinales sécrétantes
produisent à la fois l’hCG totale
et sa sous-unité β. L’hCG tumorale
induit des anomalies de la stéroïdo-
genèse par un mécanisme à la fois
paracrine sur le testicule tumoral et
endocrine après passage systémique
sur le testicule controlatéral. Le pro-
fil hormonal caractéristique de ces
tumeurs germinales associe une élé-
vation de l’estradiol et de la testo-
stérone plasmatique, qui contraste
avec un effondrement du taux des
gonadotrophines à l’état basal et
après stimulation par GnRH (11).
L’hCG active les voies ∆4 et ∆5 de
la stéroïdogenèse, et l’aromatisa-
tion de la testostérone en estradiol.
L’aromatisation a une double loca-
lisation : périphérique – comme le
suggère l’augmentation de l’index
d’aromatisation estradiol/testosté-
rone plasmatique dans les tumeurs
germinales par comparaison aux
contrôles sains (12), – mais égale-
ment testiculaire. En effet, le stroma
et l’interstitium des tumeurs non
séminomateuses sont positifs pour
l’immunoréactivité aromatase. De
plus, l’appareil leydigien du tissu
normal ipsi-latéral à la tumeur et du