Aromatase
Dossier
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Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition (VII), n° 4, juillet/août 2003
Tumeurs féminisantes : aspects diagnostiques,
physiopathogéniques et rôle de l’aromatase
B. Lireux*, Y. Reznik*
L
es tumeurs responsables d’une
féminisation sont rares. Leur
expression clinique traduit tou-
jours un excès de production d’estro-
gènes dont le mécanisme physio-
pathogénique n’est pas univoque.
Les tumeurs féminisantes sont à
l’origine de profils hormonaux dont
certaines spécificités peuvent orienter
le diagnostic. L’exploration de ces
tumeurs, parfois occultes, est fondée
sur les dosages hormonaux, mais éga-
lement sur les investigations radio-
logiques, pour leur localisation.
Expression clinique
des tumeurs féminisantes
Chez l’homme adulte
La gynécomastie est le signe prin-
cipal amenant au diagnostic. Uni-
ou bilatérale, elle peut être recon-
naissable dès l’inspection. L’élargis-
sement et l’hyperpigmentation du
mamelon avec saillie des tubercules
de Montgomery sont en faveur d’une
hyperestrogénie. Elle est confirmée
par la palpation qui perçoit un tissu
glandulaire ferme et parfois sensible.
Cette gynécomastie s’accompagne
exceptionnellement d’une galactor-
rhée. Elle est parfois difficile à dif-
férencier de l’adipomastie et, dans ce
cas, c’est la pratique d’une mammo-
graphie ou d’une échographie qui
permettra de faire la distinction entre
gynécomastie vraie et adipomastie.
Dans près de la moitié des cas, il
existe une altération de la libido,
voire une impuissance. Lorsqu’une
étude du spermogramme est effec-
tuée, l’oligospermie – voire l’azoo-
spermie – sont constantes.
Chez le garçon
en période prépubertaire
Là encore, la gynécomastie apparaît
comme le signe principal amenant
au diagnostic. Ailleurs, une pseudo-
puberté précoce avec augmentation
du volume testiculaire asymétrique
révèle une tumeur. Dans ce dernier
cas, la gynécomastie est plus rare
(10 %). À côté des signes endocri-
niens, on constate une accélération de
la vitesse de croissance avec avance
de l’âge osseux.
Chez la petite fille
La féminisation se traduit par une
précocité isosexuelle avec dévelop-
pement mammaire, une pigmentation
des aréoles et des organes génitaux
externes, l’apparition d’une pilosité
pubienne et des métrorragies par
imprégnation estrogénique de l’endo-
mètre. Une virilisation est possible
en cas de tumeur surrénalienne à
sécrétion mixte. On observe égale-
ment une accélération de la crois-
sance et de la maturation osseuse.
Chez la femme adulte
En période d’activité génitale, le
diagnostic est plus difficile. La symp-
tomatologie est réduite à des cycles
irréguliers, des ménométrorragies
ou une simple mastodynie, ce qui
explique le retard diagnostique.
Chez la femme ménopausée, la
réapparition de cycles menstruels
plus ou moins réguliers, de sécré-
tions vaginales, d’une trophicité de
l’appareil génital (vulve, grandes
lèvres) témoignent de l’imprégna-
tion estrogénique.
Exploration d’un syndrome
de féminisation
(tableau décisionnel)
Le diagnostic d’une tumeur fémini-
sante repose sur les données anam-
nestiques et sur une exploration hor-
monale simple qui permet d’exclure
* Service d’endocrinologie et des maladies méta-
boliques, CHU Côte-de-Nacre, Caen.
L’élévation des estrogènes au cours d’une gynécomastie doit faire
rechercher un processus tumoral.
La prévalence des signes endocriniens au cours des tumeurs testiculaires
est faible. Ils peuvent précéder longtemps les signes tumoraux.
Le leydigome testiculaire de l’adulte est caractérisé par une élévation
de l’estradiolémie et un abaissement modéré de la testostérone.
La sécrétion d’hCG par une tumeur germinale du testicule induit une
cosécrétion d’estradiol et de testostérone. La féminisation est cependant
exceptionnelle.
Les tumeurs surrénaliennes féminisantes sécrètent excessivement
estrone et précurseurs androgéniques.
La féminisation au cours des tumeurs surrénaliennes est secondaire
à une surexpression de l’aromatase sous le contrôle principal du pro-
moteur gonadique PII.
points FORTS
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une masse indurée ou une asymétrie
du volume testiculaire.
Une cause tumorale doit être évoquée
en cas d’élévation des estrogènes :
estradiol d’origine plutôt testiculaire
ou estrone d’origine surrénalienne.
Le dosage de l’estradiol plasmatique
doit comporter une extraction préa-
lable des stéroïdes, et l’utilisation
d’un anticorps fournissant une bonne
sensibilité dans les valeurs basses.
Le dosage des androgènes plasma-
tiques (testostérone, 4 androstène-
dione, DHEA), de l’inhibine B, de
l’hCG, des gonadotrophines de base
et après stimulation par le GnRH
complète l’exploration hormonale.
les causes les plus fréquentes de
féminisation. L’interrogatoire permet
d’éliminer les causes médicamen-
teuses de gynécomastie : par compé-
tition au niveau des récepteurs aux
androgènes (spironolactone, ciméti-
dine), par diminution du métabolisme
des estrogènes (kétoconazole), ou par
aromatisation périphérique (testo-
stérone). Une cause non tumorale est
facilement retrouvée : gynécomastie
pubertaire, cirrhose hépatique, insuf-
fisance rénale ou thyrotoxicose.
La palpation testiculaire doit être
systématique et minutieuse, à la
recherche d’une atrophie ou d’une
hypotrophie. Elle peut aussi détecter
Les explorations morphologiques
font appel au scanner, qui identifiera
un syndrome de masse surrénalien ou
ovarien. L’échographie des gonades
ne permet pas toujours de détecter
une petite tumeur qui sera recherchée
dans ce cas par le cathétérisme des
veines gonadiques, à la recherche
d’un gradient de sécrétion qui indique
la latéralité de la tumeur.
Tumeurs surrénaliennes
(tableau I)
Profil hormonal (tableau II)
Il se caractérise par une élévation
considérable des estrogènes plasma-
tiques (estrone surtout et estradiol).
Les taux des androgènes surrénaliens
(4 androstènedione, DHEA) et de
leurs précurseurs sont élevés, alors
que la testostérone est souvent dans
les valeurs basses de la normale, voire
effondrée (1). Cet abaissement de la
testostérone s’explique par le rétro-
contrôle négatif exercé par l’estradiol
sur l’axe hypothalamo-hypophysaire,
traduit par l’effondrement des gona-
dotrophines dosées à l’état basal ou
après stimulation par GnRH (1, 2) et
la disparition de la pulsatilité spon-
tanée de la LH (1-3). Une action
directe des estrogènes sur la cellule de
Leydig est aussi évoquée (4). Le frei-
nage complet de la FSH dans cer-
taines tumeurs peut être causé par une
cosécrétion tumorale d’inhibine B et
d’estradiol (3). Les tests dynamiques
utilisant le Synacthène®ou l’hCG
ont peu d’intérêt dans la localisation
des tumeurs surrénaliennes. Une
cosécrétion de stéroïdes surrénaliens
non estrogéniques – cortisol, andro-
gènes ou minéralocorticoïdes – est
possible et évoque un processus néo-
plasique.
Mécanismes
de l’hyperestrogénie
L’hyperestrogénie des tumeurs fémi-
nisantes de la surrénale résulte d’une
expression aberrante de l’aromatase
par la tumeur. La synthèse intra-
tumorale des estrogènes circulants
Diagnostic d’une tumeur féminisante
Interrogatoire, examen clinique
Biologie : HCG, testostérone, E2, LH, TSH
Prolactine, créatinine, enzymes hépatiques
Échographie testiculaire
Iatrogène Bilan normal : gynécomastie
idiopathique
Thyrotoxicose
I. hépatique
I. rénale
HCG
E2
T
LH N ou
Échographie testiculaire Échographie testiculaire
Masse Normale Masse Normale
Germinome TDM Leydigome
testiculaire thoraco-abdominale Tumeur sertolienne
Germinome TDM
extratesticulaire thoraco-abdominal
Masse Masse
surrénalienne hépatique
Tumeur féminisante Carcinome
de la surrénale hépatocellulaire
Tableau décisionnel.
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Type de la tumeur Signes cliniques Signes Estrogènes Autres stéroïdes Aromatase
(en dehors radiologiques plasmatiques et marqueurs intratumorale
de la féminisation) tumoraux
Tumeurs Absents TDM ou IRM : E1  E2 4, DHEA   ± à ++++
surrénaliennes syndrome de masse T , LH, FSH = 0
surrénalien Inhibine β
Tumeurs testiculaires
Germinales
Séminomes Gros testicule échographie : E2  T,
tumeur du testicule LH, FSH = 0 nd
Choriocarcinomes β-hCG  αFP 
LDH 
Tumeurs sertoliennes
Début prépubertaire échographie : E2 N ou T N Activité aromatase
taches pigmentées, hypertrophie E2/T après hCG testiculaire 
polypose rectale des testicules 
(Peutz-Jeghers)
Gonadoblastomes Cryptorchidie nd
bilatérale
risque
de dégénerescence
Leydigomes
Nodule testiculaire échographie : nodule E2 basale N ou T Activité
parfois non perçu parfois non visible E2 après hCG LH, FSH N ou aromatase 
cathétérisme des > 80 pg/ml Inhibine
veines spermatiques : A J3  TeBG N
gradient E2
Carcinome Hépatomégalie TDM ou IRM : E2  T Activité
hépato-cellulaire tumeur hépatique LH, FSH aromatase
Fibro-lamellaire ARNm CYP19
dans le foie
tumoral
Germinome Diabète insipide IRM : tumeur E2 4 Immunomarquage +
hypothalamique Insuffisance hypothalamique hCG  pour l’aromatase
antéhypophysaire des cellules
Pseudo-puberté germinales
E1 : estrone ; E2 : estradiol ; T: testostérone ; A: androstènediose ; αFP : αfœtoprotéine ; LDH : lacticodéshydrogénase ; TeBG :
testosterone estradiol binding protein
.
Tableau II. Caractéristiques cliniques, radiologiques et biochimiques des tumeurs féminisantes chez l’homme.
Activité aromatase Transcrits de l’aromatase
Surrénales normales Surrénales tumorales Surrénales normales Surrénales tumorales
Goto 1996 118,6 nmol/h/g prot
Watanabe 2000 71-104 pmol/mn/mg prot indétectable 18-21,4 µmol/µg ARN
Utilisation
exclusive PI.3 et PII
Kimura 1995 0,14-1,86 pmol/h/mg prot 213,5 pmol/h/mg prot
Young 1996 indétectable Expression exclusive
promoteur PII
Phornphutkul 2001 0,05 pmol/h/mg prot 25,6 pmol/h/mg prot
Bouraïma 2003 105 fmol/h/mg prot 751 fmol/h/mg prot 4,4 µmol/µg ARN total 10 µmol/µg ARN total
Promoteur majeur PII Promoteur principal PII
et promoteurs mineurs et promoteurs
PI.3, PI.4. mineurs PI.4, PI.6 et PI.3
Tableau I. Niveaux de l’activité aromatase et expression de ses transcrits dans les surrénales normales et les surrénales tumorales.
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a été démontrée in vivo par cathé-
térisme des veines surrénaliennes
(1, 5). Les études biochimiques ont
identifié une activité aromatase dans
la tumeur, qui peut atteindre un niveau
élevé proche du tissu placentaire (5-
7), ou être discrètement augmentée
par comparaison avec la surrénale
normale (2). L’étude moléculaire
montre la présence de transcrits de
l’aromatase dans la tumeur, sous le
contrôle prédominant du promoteur
gonadique PII (1, 2, 6). Des transcrits
mineurs issus des promoteurs PI.4,
PI.3, PI.6 ont aussi été identifiés dans
deux tumeurs surrénaliennes ayant un
profil différent de la surrénale nor-
male, suggérant une régulation de
l’activité transcriptionnelle différente
entre tissu normal et tumoral (2, 6).
Tumeurs testiculaires
Les tumeurs testiculaires sont la
deuxième cause de féminisation d’ori-
gine tumorale. L’expression endo-
crinienne n’est pas la règle puisque
30 à 50 % des tumeurs à cellules de
Leydig et seulement 5 % des tumeurs
germinales testiculaires induisent
une féminisation.
Leydigomes
Ils sont rares (1 à 3 % des tumeurs
testiculaires), et sont souvent révélés
par des signes endocriniens. Les
tumeurs à cellules de Leydig ont une
longue latence clinique et les signes de
féminisation sont le mode de décou-
verte de la tumeur. Certaines formes
latentes se traduisent par des signes
d’hypoandrisme avec un morphotype
gynoïde. Les leydigomes s’accom-
pagnent d’une infertilité, qui est rare-
ment la circonstance de découverte
de la tumeur. Le spermogramme
révèle une oligo-asthénospermie
dans 75 % des cas. Ces altérations
seraient liées à l’effet toxique direct
de l’hyperestrogénie intratesticulaire
sur la spermatogenèse, mais égale-
ment à la dysfonction gonadotrope
secondaire. Ces tumeurs, souvent non
perçues à l’examen clinique, sont
découvertes par l’échographie qui
révèle une image arrondie hypo-
échogène et hypervascularisée au
sein du testicule.
Profil hormonal
Il est caractérisé par une élévation
plus ou moins franche de l’estradiol
plasmatique, dont le taux peut varier
d’un jour à l’autre, traduisant un mode
de sécrétion intermittent qui justifie
la répétition des dosages (4). Le test
à l’hCG (5 000 UI i.m.) peut sensi-
biliser la détection de l’hyperestro-
génie lorsqu’il s’accompagne d’une
élévation prolongée de l’estradiol
plasmatique supérieure à 80 pg/ml à
la 96eheure (8). Ce profil de réponse
a une valeur diagnostique lorsque
la tumeur n’est pas visible à l’écho-
graphie, mais la sensibilité de ce test
approche 100 %. L’hyperestradio-
lémie est négativement corrélée à la
testostérone plasmatique qui est sub-
normale, voire franchement abaissée.
Le taux des gonadotrophines, en
particulier celui de FSH, est abaissé
à l’état basal et après stimulation par
GnRH. L’étude de la pulsatilité de
la LH révèle une diminution de l’am-
plitude des pulses, sans altération
de leur fréquence. L’excès d’estradiol
exerce donc un rétrocontrôle négatif
sur l’axe hypothalamo-hypophyso-
gonadique. Le freinage plus marqué
de la FSH par rapport à la LH pour-
rait résulter de la sécrétion conjointe
d’inhibine B par les leydigomes (8).
Mécanismes de l’hyperestrogénie
L’aromatase a été mise en évidence
par immunohistochimie au niveau
des cellules de Leydig du testicule
normal (9) mais également dans
le cas de leydigomes (Merudi G et
Kuhn JM, communication person-
nelle). Chez l’homme, une augmen-
tation de l’activité aromatase a été
mise en évidence dans un cas de
leydigome, expression corrélée à la
prolifération des cellules de Leydig
(4). La survenue de tumeurs leydi-
giennes, chez 50 % des souris trans-
géniques surexprimant l’aromatase
et les récepteurs des estrogènes dans
le testicule, pose la question de
l’implication des estrogènes dans la
tumorigenèse testiculaire (10).
Tumeurs germinales
du testicule
Elles sont les plus fréquentes, puis-
qu’elles représentent 90 à 95 % de
l’ensemble des tumeurs testiculaires.
Elles sont le plus souvent révélées
par une masse testiculaire, rarement
par des signes de féminisation ou
des altérations de la spermatogenèse.
Le séminome est la plus fréquente
des tumeurs testiculaires et s’accom-
pagne d’une production d’hCG dans
40 % des cas. Le choriocarcinome, le
carcinome embryonnaire et le téra-
tome sécrètent plus souvent de l’hCG
(75 %). Outre les conséquences endo-
criniennes d’une sécrétion d’hCG,
cette dernière représente un mar-
queur tumoral de grande valeur dia-
gnostique et pronostique.
Profil hormonal
Les tumeurs germinales sécrétantes
produisent à la fois l’hCG totale
et sa sous-unité β. L’hCG tumorale
induit des anomalies de la stéroïdo-
genèse par un mécanisme à la fois
paracrine sur le testicule tumoral et
endocrine après passage systémique
sur le testicule controlatéral. Le pro-
fil hormonal caractéristique de ces
tumeurs germinales associe une élé-
vation de l’estradiol et de la testo-
stérone plasmatique, qui contraste
avec un effondrement du taux des
gonadotrophines à l’état basal et
après stimulation par GnRH (11).
L’hCG active les voies 4 et 5 de
la stéroïdogenèse, et l’aromatisa-
tion de la testostérone en estradiol.
L’aromatisation a une double loca-
lisation : périphérique – comme le
suggère l’augmentation de l’index
d’aromatisation estradiol/testosté-
rone plasmatique dans les tumeurs
germinales par comparaison aux
contrôles sains (12), – mais égale-
ment testiculaire. En effet, le stroma
et l’interstitium des tumeurs non
séminomateuses sont positifs pour
l’immunoréactivité aromatase. De
plus, l’appareil leydigien du tissu
normal ipsi-latéral à la tumeur et du
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testicule sain controlatéral a aussi
une immunoréactivité aromatase
(13). De façon intéressante, les fortes
concentrations d’hCG plasmatique
(> 3500 UI/l) s’accompagnent d’une
réduction de l’activité des voies 4,
5 et de l’aromatase, expliquant
l’hétérogénéité des profils plasma-
tiques stéroïdiens rapportés dans la
littérature (12).
Gonadoblastomes
Ces tumeurs surviennent exclusive-
ment chez l’enfant et l’adulte jeune
atteint d’un trouble de la différen-
ciation sexuelle. Elles se dévelop-
pent sur des gonades dysgénésiques
à partir de cellules apparentées aux
cellules de Sertoli. Elles peuvent
être à l’origine d’une féminisation
par hypersécrétion d’estradiol dont
l’origine cellulaire exacte n’est pas
élucidée.
Tumeurs à cellules de Sertoli
Elles sont rares et le plus souvent
bénignes. Un syndrome de fémini-
sation est observé dans 25 % des cas
et s’associe fréquemment aux formes
malignes. Les tumeurs sertoliennes
peuvent s’inscrire dans le syndrome
de Peutz-Jeghers, maladie génétique
à transmission autosomique domi-
nante, associant des taches brunes
cutanées, une polypose colique, et
parfois un hypercorticisme ou une
acromégalie. Les tumeurs testicu-
laires se développent surtout chez
l’enfant et sont souvent bilatérales et
multifocales. L’hypersécrétion estro-
génique des tumeurs à cellules de
Sertoli résulte d’une surexpression
majeure du gène de l’aromatase par
les cellules tumorales. L’expression
de l’aromatase est sous le contrôle
du promoteur gonadique PII (14).
Germinomes
extratesticulaires
Les tumeurs germinales sécrétant
de l’hCG peuvent se développer au
niveau de l’espace rétropéritonéal, du
médiastin et de l’encéphale. Comme
les germinomes testiculaires, ces
tumeurs peuvent, quoique rarement,
induire une féminisation. Le méca-
nisme de l’hyperestrogénie a été
précisé par l’étude d’un germinome
hypothalamique féminisant sécré-
tant de l’hCG et trois autres tumeurs
germinales du système nerveux
central, sans sécrétion périphérique
d’hCG. Les auteurs ont identifié,
par immuno-marquage, la présence
d’aromatase dans les cellules ger-
minales tumorales (15).
Tumeurs féminisantes
de l’ovaire
Chez la femme, la fréquence des
tumeurs sécrétantes est faible, de
l’ordre de 1 à 6 % de l’ensemble des
tumeurs de l’ovaire. Les tumeurs
féminisantes sont de loin les plus
fréquentes puisqu’elles représentent
75 % des tumeurs secrétantes.
Expression clinique
Chez la petite fille prépubère, l’hyper-
production d’estrogènes est à l’origine
d’une pseudo-puberté isosexuelle.
Par ailleurs, la survenue d’une puberté
précoce centrale chez des petites filles
opérées d’une tumeur féminisante
suggère un rôle des estrogènes dans
la maturation de l’axe hypothalamo-
hypophysaire.
Profil hormonal
Chez la petite fille comme chez la
femme ménopausée, une hyperestra-
diolémie persistante (> 100 pg/ml)
doit d’abord évoquer une tumeur
secrétante. Le profil hormonal peut
associer une élévation des andro-
gènes plasmatiques, des gonado-
trophines anormalement basses en
période ménopausique, qui contras-
tent avec l’hyperestradiolémie. Pen-
dant la période d’activité génitale,
les taux d’estradiol sont difficiles à
interpréter en raison de l’extrême
variabilité de la sécrétion des estro-
gènes au cours du cycle menstruel
physiologique. Des concentrations
constamment élevées d’estradiol
doivent cependant faire suspecter
une origine tumorale.
Mécanismes
de l’hyperestrogénie
L’étude de tumeurs ovariennes, dont
certaines intègrent le syndrome de
Peutz-Jeghers, a permis de mettre
en évidence une surexpression du
gène de l’aromatase liée à l’utilisa-
tion du promoteur gonadique PII
(14). L’immunoréactivité pour l’aro-
matase est localisée dans les cellules
épithéliales de 79 % des carcinomes,
alors qu’elle est toujours absente des
adénomes bénins de l’ovaire. La sur-
expression du gène de l’aromatase
semble donc corrélée à la malignité
de la tumeur (16).
Carcinomes hépatiques
Expression clinique
Des observations de gynécomastie
associée à une tumeur hépatique ont
été rapportées dans la littérature. La
gynécomastie est sévère et d’instal-
lation rapide, elle s’accompagne
d’une altération de l’état général et
d’une tumeur du flanc droit doulou-
reuse à la palpation.
Profil hormonal et mécanismes
de l’hyperestrogénie
Le profil biologique n’est pas spéci-
fique, puisqu’il associe une éléva-
tion des concentrations circulantes
d’estradiol et d’estrone, un effondre-
ment du taux des gonadotrophines
et une baisse de la testostérone plas-
matique chez le garçon.
Une expression anormale du gène
de l’aromatase est à l’origine de
l’hyperestrogénie, puisque la pro-
téine et l’activité enzymatique ont
été localisées dans les hépatocytes
adjacents à la tumeur. À l’état phy-
siologique, le foie fœtal exprime
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