Actes du séminaire - PRINCEPS - Université Sorbonne Paris Cité

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ACTES
SÉMINAIRE SCIENTIFIQUE ANNUEL
PRINCEPS
« Actualité de la recherche en sécurité sanitaire »
Le 15 octobre 2015 – Maison de la Chimie, Paris
Actes du Séminaire scientifique Princeps
1ère édition, le 15 octobre 2015
Université Sorbonne Paris Cité
Programmes de recherche interdisciplinaires
Actes du Séminaire scientifique annuel du programme PRINCEPS
« Actualité de la recherche en sécurité sanitaire »
Sommaire
1. Ouverture
Le mot du Président de l’Université Sorbonne Paris Cité
2. Présentation du programme : objectifs et enjeux de la journée
Pascal Astagneau, coordonnateur du programme PRINCEPS
3. Actualités de la recherche en sécurité sanitaire : présentations et discussions
3.1 Conférence de Louis Laurent : « De l’évaluation à l’anticipation des risques »
3.2 Conférence de Daniel Benamouzig : « Les enjeux sociétaux de la sécurité sanitaire. Rôle de la recherche »
3.3 Robert Barouki : « Actualité : changement climatique et impact sur la santé »
3.4 Yann Le Strat : « Binge Drinking et adolescence »
3.5 Pascal Astagneau : « Risques infectieux émergents : actualités »
3.6 Hervé Le Louët : Etat des lieux de la gestion du risque médicamenteux en Europe »
4. Présentation des travaux étudiants
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1. Ouverture
Cette première édition du Séminaire scientifique annuel du programme Princeps a réuni une quarantaine de chercheurs,
représentants des agences, professionnels de santé et étudiants.
Le séminaire scientifique a pour objectif de développer l’animation scientifique du réseau en présentant les résultats de
l’année écoulée et les perspectives de recherche à venir. Ce rendez-vous est l’occasion pour les groupes de travail de
rendre compte de leur état d’avancement et d’élargir le réseau en favorisant la rencontre avec le public et des intervenants
extérieurs.
Le séminaire, ouvert par une allocution du Président de l’Université Sorbonne Paris Cité, Jean-Yves Mérindol, et animé
par les membres du Comité de pilotage Princeps, a souhaité mettre l’accent sur le rôle de la recherche en sécurité
sanitaire en présentant l’avancée des travaux dans les différents domaines couverts par le programme : la toxicologie
environnementale, les addictions, les maladies infectieuses émergentes et la pharmacovigilance. L’après-midi de cette
journée a été consacrée aux présentations des travaux des étudiants recrutés sur le programme.
Le mot du Président de l’USPC
Jean-Yves Mérindol préside le regroupement universitaire Sorbonne Paris Cité. Il rappelle que ce regroupement encore
récent réunit 4 universités (Paris Diderot, Paris Descartes, Sorbonne Nouvelle et Paris 13), 4 établissements
d’enseignement supérieur (Sciences Po, l’Institut du Globe, l’Inalco et l’EHESP) et 5 organismes de recherche (CNRS,
INSERM, INED, IRD et l’INRIA) ; il a pour objectif de faciliter les collaborations inter-établissements, en France et à
l’étranger, autour de 4 grands axes d’activités : l’interdsiciplinarité, les pédagogies innovantes, l’international et la vie de
campus.
En 2013, l’USPC a lancé un appel d’offre pour faire émerger des propositions de programmes interdisciplinaires. 9
programmes ont été retenus et sont aujourd’hui financés, dont 4 s’inscrivent dans le champ de la santé. Le programme
PRINCEPS qui en fait partie, bénéficie d’un financement de 800K € pour quatre ans.
J-Y Mérindol se réjouit de constater que la formation des étudiants occupe une part importante de l’activité du programme
Princeps puisqu’il précise que certains de ces programmes interdisciplinaires pourront déboucher sur des offres de
formation que les établissements concernés auront à mettre en place. La santé est un domaine où les approches
interdisciplinaires sont très importantes. J-Y Mérindol espère ainsi que des initiatives comme Princeps permettront de
définir des évolutions positives en matière de santé publique (de manière générale) et plus spécifiquement sur les
questions de sécurité sanitaire que traite le programme.
2. Présentation du programme : objectifs et enjeux de la journée
Présentation de Pascal Astagneau, coordonnateur du programme
Pascal Astagneau rappelle que la sécurité sanitaire est un enjeu international qui recouvre différentes problématiques
comme les maladies infectieuses, les produits de santé ou encore les questions environnementales. Elle est née en
France dans les années 80 avec l’affaire du sang contaminé dont les conséquences sanitaires ont soulevé d’importants
questionnements, et conduit à la mise en place d’un dispositif complexe de veille et de sécurité, s’appuyant sur des
agences spécialisées.
En France, le principe de précaution s’est imposé dans les politiques de santé, et avec lui, la nécessité pour les autorités
sanitaires d’organiser la surveillance des risques, mais ce dispositif de veille souffre d’une absence de réflexion à plus
long terme. Pascal Astagneau précise à ce titre que l’un des objectifs du programme Princeps repose sur la création d’un
réseau de chercheurs au sein de la Comue SPC, sur lequel les agences, qui n’ont pas ou peu d’activité de recherche à
proprement parlé, pourront s’appuyer. Cette initiative inspirée du concept anglo-saxon de « Regulatory sciences », traduit
en français par « sciences de la réglementation sanitaire », permet de faire le lien entre la production de connaissances et
son utilisation à des fins décisionnelles ou réglementaires. Si les questions de sécurité sanitaire sont au cœur des
préoccupations des politiques de santé, il souligne le paradoxe existant entre les efforts fournis par les pouvoirs publics
pour répondre aux crises sanitaires, et le faible investissement de la recherche académique dans ce domaine. Le
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programme couvre quatre grands domaines : la toxicologie environnementale, les addictions, l’organisation des soins et
des pratiques médicales, les maladies infectieuses émergentes. Chacun de ces champs, prioritaire sur le plan national et
international, sera alimenté par des projets transversaux tenant compte des aspects de prédictibilités, de vulnérabilité,
d’acceptabilité et de cumulativité / résilience vis-à-vis des risques sanitaires considérés. De manière plus précise, il s’agit
de développer ici la connaissance sur les processus politiques, organisationnels, économiques et sociaux à l’œuvre dans
ces domaines, en privilégiant la collaboration entre les disciplines.
Plusieurs intervenants ont salué l’initiative. Hervé Le Louët pour la Fédération des Centres Régionaux de
Pharmacovigilance et d’information sur les médicaments d’Ile-de-France (FCRPV IdF) fait remarquer que la recherche
dans les domaines évoqués, et plus précisément dans celui de la pharmacovigilance, est très morcelée. Il souligne
l’intérêt de la démarche et propose des pistes de collaboration. Les équipes de recherche en pharmaco-épidémiologie et
pharmacovigilance sont peu nombreuses. Certaines, comme le Centre de pharmaco-épidémio (Bichat) sont bien
référencées mais la plupart demeurent peu visibles et gagneraient à être davantage mises en réseau. En conclusion, il est
souligné que Princeps pourrait favoriser l’émergence d’un consortium de chercheurs intéressés par ces questions en
prenant appui sur les compétences déjà présentes au sein du réseau. Daniel Benamouzig rappelle que le Centre de
Sociologie des Organisations (CSO) de Sciences Po possède des équipes dont les travaux s’intéressent aux procédures
d’évaluation des médicaments, sous l’angle de la sociologie des risques et qu’il y a là, la possibilité de croiser les
approches.
3. Actualité de la recherche en sécurité sanitaire : présentations et discussions
3.1 Conférence de Louis Laurent : « De l’évaluation à l’anticipation des risques »
Louis Laurent est Directeur Recherche et Veille de l’ANSES. Il revient ici sur les caractéristiques de l’activité d’évaluation
et d’anticipation des risques assurée par l’agence.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), créée en 2010, est
un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle de cinq ministères. Elle assure une activité
d’évaluation des risques, d’expertise et de recherche sur un large champ couvrant la santé humaine, la santé, le bien-être
animal et la santé végétale. Cette approche intégrative unique lui permet d’évaluer les risques de manière globale.
Le métier d’évaluation des risques représente environ 300 personnes au sein de l’agence et se distingue familièrement en
deux grandes familles :
les risques sur saisine ; Il s’agit le plus souvent d’un agent bien identifié dont l’impact sur la santé est avéré, impliquant
des cas d’expositions humaines jusqu’alors non connus. Le cas le plus emblématique est celui du Diméthyl Fumarate
(DMFu). L’utilisation de cette substance comme antifongique sur des produits d’ameublement et d’habillement a été
interdite en Europe en 2009, après que des cas d’allergies cutanées graves aient été détectés. Il peut également s’agir de
maladies dont l’incidence est en hausse mais dont l’origine n’a pas encore été identifiée (cancers, maladies
neurodégénératives, allergies). Cette dernière catégorie reste cependant peu étudiée par l’agence.
L’autre volet concerne les produits réglementés ; la législation impose que l’agence délivre un avis sur différents produits
(médicaments vétérinaires, produits phytosanitaires). Environ 2 000 dossiers par an sont traités dans le cadre de cette
activité.
Louis laurent rappelle les différentes étapes du processus d’évaluation des risques sanitaires ; de la caractérisation du
danger (l’agent est-il pathogène ? La substance est-elle toxique ? À quelles doses ?) à l’estimation de l’exposition puis à
l’évaluation du risque lui-même (expression qualitative ou quantitative de la probabilité d’une l’altération de la santé de
l’Homme).
La pratique de l’évaluation au sein de l’agence repose sur un modèle d’expertise collective. Elle est fondée sur des
comités d’experts spécialisés dont les travaux intègrent une dimension pluridisciplinaire ; mais d’autres groupes de travail
peuvent être parfois sollicités en fonction de l’urgence de la question à traiter (Groupes d’Expertise Collective d’Urgence).
L’ANSES compte 18 comités d’experts permanents et recense 842 experts issus de secteurs aussi variés que le secteur
public (30%), des organismes étrangers (9%) ou l’ensemble d’établissements R31 (39%). Louis Laurent précise ici que si
l’évaluation du risque est importante elle n’est efficace que si les signaux qui l’accompagnent sont correctement remontés.
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Il revient ainsi sur les nuances du mot « vigilance » dont les formes varient suivant les domaines dans lesquels elle
s’exerce (on parle de nutrivigilance, phyto-pharmaco vigilance, toxicoviligance ou de réseau de signalement des
pathologies professionnelles dans le monde du travail). Par ailleurs, de nouvelles sources de signalement ont fait leur
apparition dans la loi (registre des alertes).
L’évaluation des risques n’est pas la seule activité de l’agence. L’anticipation des risques occupe elle aussi une part de
ses activités. Pour répondre aux besoins de connaissance l’ANSES s’appuie sur une politique d’appels à projet dont les
résultats lui permettent d’envisager de nouvelles questions de recherche, de formuler de nouvelles hypothèses ou encore
de définir de nouveaux concepts (l’exposome). Louis Laurent souligne ici que les compétences au sein de la communauté
scientifique sont un atout important pour l’agence, car elles représentent un vivier d’experts capables d’apporter une
réponse sur des sujets précis.
Il est rappelé que l’activité d’anticipation des risques passe aussi par la veille (scientifique, technologique, sociétale,
sanitaire) ; il s’agit là d’un dispositif ayant vocation à déclencher des alertes. Elle repose sur un système de filtrage des
signaux et s’applique autant à des situations, que des produits ou des pratiques.
Il a été souligné ici l’importance de développer l’association entre les structures de recherche et les agences sanitaires. En
dépit d’avancées perceptibles, la France peine à mettre en place cette collaboration. Elle s’impose pourtant comme une
évidence dans d’autres pays. Comme c’est le cas aux Etats-Unis (Tox21, EPA, NIHS, etc.).
3.2
Conférence de Daniel Benamouzig : « Les enjeux sociétaux de la sécurité sanitaire : rôle de la
recherche »
Daniel Benamouzig est sociologue. Il dirige l’axe Santé du laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques
publiques de Sciences Po (LIEPP) et fait partie du Directoire de l’Alliance ATHENA, chargée d’animer la recherche en
sciences sociales.
Le recours aux sciences sociales est croissant au sein des agences mais ses modalités d’intervention interrogent parfois
les relations entre le monde de la recherche d’une part, et certains processus de décision. C’est sous l’angle de l’étude
des organisations que Daniel Benamouzig propose d’éclairer ici la question du recours à l’expertise et de ses
transformations sociales. Il pose trois questions : l’expert en Sciences Humaines et Sociales (SHS) est-il (forcément) un
mercenaire ? Quels types de savoirs les experts en SHS partagent-ils ? Et comment ces savoirs sont-ils mobilisés en
pratique ?
D.B rappelle ici les caractéristiques de l’expertise en sciences sociales : « on assiste depuis peu au passage d’une forme
de recours traditionnel de l’expertise à dominante individuelle, à des formes aujourd’hui plus organisées de ce travail
d’expertise en matière de sciences sociales ». L’expert en SHS intervient souvent seul (un expert en SHS par groupe de
travail) y compris vis-à-vis de ses pairs avec qui il ne partage pas toujours son expérience ; Ses formes d’activité sont
« professionnellement » peu valorisées par les institutions académiques qui privilégient d’autres fypes de travaux
scientifiques ; par ailleurs, l’activité d’expertise elle-même reste relativement marginale et ponctuelle au regard de
l’ensemble de ses activités. D.B rappelle qu’il existe néanmoins certaines formes de sociabilisation de l’expert en SHS.
Elles tiennent d’abord à de nouveaux contextes d’intervention (les agences se sont progressivement ouvertes aux
sciences sociales), mais surtout à des formes de « sociabilisation par les disciplines » et l’amorce d’une organisation
professionnelle plutôt construite sur des bases académiques qu’en référence à l’expertise elle-même.
Si l’expert en sciences sociales reste encore relativement isolé dans ses formes d’intervention, on voit émerger au sein
des agences et dans certains espaces de recherche le recours à de nouvelles formes d’expertise collective. Cette dualité
pose la question de l’organisation sociale de l’expert. Pour y répondre, D. Benamouzig revient sur la définition des savoirs
en sciences sociales (de quels savoirs en SHS parle-t-on ici ?) et la question de leurs mobilisations (diversification des
formes d’intervention, usages pratiques et formalisation).
Les SHS, quels savoirs ? Plusieurs travaux de référencement ont déjà été entrepris (au niveau de la Haute Autorité de
Santé il y a quelques années et plus récemment de l’ANSES) pour déterminer les types de savoirs académiques
susceptibles d’être utilisés par ces agences ; l’une des premières approches évoquées concerne l’analyse des saisines
institutionnelles ou la construction des problèmes publics (pour lesquels il existe une littérature abondante en France) ; un
autre domaine d’expertise des sciences sociales assez facile à mobliser dans des contextes liés aux crises sanitaires
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concerne les enjeux liés aux dynamiques professionnelles, et la question des rapports entre experts patentés et profanes ;
plus récemment, la vigilance portée aux zones d’ignorance est devenue un terrain d’étude investi par les sciences
sociales dont les nouvelles approches ont permi à la fois d’instruire la diversité des formes de savoirs mobilisés et la
diversité de ces formes d’ignorance ; dernier point, l’analyse des publics (profanes et concernés) et des dynamiques
associatives fait l’objet d’une vigilance mportante pour laquelle les savoirs en SHS sont facilement mobilisables.
Quelle mobilisation des savoirs ? On observe une diversification des formes d’intervention : participation d’experts en SHS
à différentes instances (commissions spécialisées, conseils scientifiques) ou à des groupes de travail (sur des sujets
précis comme c’est la cas à l’ANSES ou à la HAS) ; recourt à des travaux ponctuels d’expertise ou constitution de
groupes spécifiquement organisés autour des sciences sociales (des lieux se sont créés au sein des agences où les
différents types d’experts en sciences sociales ont la possibilité d’échanger sur l’organisation de tel ou tel type de travail
ou type d’expertise).
Les résultats d’une enquête réalisée au sein de l’ANSES ont permi d’observer différentes tendances : une forme
d’acculturation aux sciences sociales assez bien engagée mais des usages (des SHS) assez différents au sein des
groupes de travail observés, variant de l’expertse isolée à l’expertise intégrée, encadrée ou flottante.
D.Benamouzig conclut son intervention par quelques exemples d’orientations à prendre pour améliorer le dialogue entre
agences et formes d’expertise en sciences sociales. Il observe que des progrès importants ont été faits au sein des
agences qui entretiennent désormais une certaine forme de familiarité avec les SHS. Certaines comme l’ANSES se sont
dotées de services ayant une compétence spécifique pour entretenir ce dialogue avec les sciences sociales
(« traducteurs » internes). Mais un travail conséquent doit encore être fourni pour clarifier les attentes vis-à-vis des
sciences sociales (définition des mandats). Du côté de la recherche, des évolutions doivent être engagées en faveur de
l’expertise (qui reste encore peu encouragée voire même évitée). Mais on peut d’ores et déjà noté quelques avancées
perceptibles comme l’apparition de formes élargies de collégialité souvent structurées autour de programmes de
recherche (ex. : programme IndEx, PRINCEPS). Enfin, la possibilité de favoriser la création de lieux de recherche
académique orientés vers l’expertise pourrait être envisagée.
La dimension réflexive de l’expertise en SHS a été peu évoquée ici mais il est rappelé l’importance qu’elle revêt. L’expert
en SHS n’est pas toujours sollicité pour apporter une réponse, il l’est parfois aussi pour poser les bonnes questions,
recadrer un problème ou mieux définir les sensibilités des acteurs en présence. La réflexivité renvoie à la question des
savoirs-faire. L’expert en sciences sociales n’est pas qu’un facilitateur, il intervient avec un corps de connaissances bien
définies et un panel de savoirs-faire qui lui sont propres (capacité d’écriture).
3.3
Robert Barouki : « Actualité : changement climatique et impact sur la santé humaine »
Robert Barouki est PU-PH de biochimie. Il dirige l’unité INSERM Pharmacologie, toxicologie et signalisation cellulaire à
l’Université Paris Descartes.
Modératrice : Soraya Boudia, Université Paris Descartes
La question de l’impact du changement climatique sur la santé fait l’objet de plusieurs travaux coordonnés par l’alliance
Aviesan mais la structuration de la recherche dans ce domaine n’est pas toujours évidente. C’est sous l’angle de la notion
d’exposome que Robert Barouki propose d’éclairer le sujet en revenant sur les différents concepts présents dans la
littérature et les nombreux rapports déjà publiés (« exposure sciences », Rapport du National Research Council).
La notion d’exposome a été développée pour la première fois en 2005 par Christopher Wild, directeur du Centre
international de Recherche sur le Cancer (CIRC), pour caractériser la totalité des expositions (génétiques mais aussi
environnementales au sens large) que subit l’organisme au cours de sa vie. Depuis les travaux de Wild, d’autres auteurs
sont venus enrichir le concept [Rappaport et Smith, Buck Louis, Miller]. L’ensemble de leurs contributions ont permis de
mieux étudier les sources d’expositions et de mieux définir la multiplicité des agents stressants (physique, chimique,
biologique mais aussi psychosociaux) auxquels un individu peut être exposé. Mais il reste encore très difficile d’analyser la
question de la temporalité : à partir de quand et pendant combien de temps un individu a-t-il été exposé à un agent
stressant ?
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En s’appuyant sur différents exemples d’exposition (réitération / persistance / programmation) pouvant expliquer des effets
à long terme, Robert Barouki montre en quoi le concept d’exposome peut être pertinent pour comprendre le changement
climatique et ses effets sur la santé ; l’effet du changement climatique pouvant être ici intégré à d’autres facteurs
stressants comme l’environnement ou certains comportements (tabagisme). Ses effets sur la santé sont multiples
(asthme, allergies, maladies cardiovasculaire et respiratoire, agents infectieux, malnutrition, etc.) ; ils correspondent
souvent à des pathologies fréquentes (type allergies) qui interagissent entre elles et affectent des populations subissant
généralement d’autres stress environnementaux ; ils peuvent être directs et indirects [Watts et al, Lancet 2015].
L’exemple de la qualité de l’air est une bonne illustration de l’interaction entre changement climatique et facteurs de stress
environnementaux. La qualité de l’air est influencée par différents facteurs dont certains sont liés au changement
climatique (ozone) mais d’autres, comme les particules, proviennent des transports ou de l’industrie ; la qualité de l’air, qui
a des effets sur le système respiratoire et cardiovasculaire, est donc elle-même une composante de différents facteurs de
stress.
Pour finir, Robert Barouki précise qu’il est possible d’agir de façon immédiate sur certains de ces effets et souligne
l’importance qui doit être accordée à la notion de cobénéfices pour susciter l’intérêt des populations pour ces questions. Il
conclut sur la nécessité de clarifier les messages de santé publique en conservant une vision intégrée de ces questions.
3.4
Yann Le Strat : « Binge drinking et adolescence »
Yann Le Strat est psychiatre. Il est membre de l’unité INSERM U894 Centre de Psychiatrie et Neurosciences.
Le Binge drinking est un phénomène très présent dans l’actualité médiatique et scientifique. En augmentation croissante
chez les adolescents français depuis 2003, les séances « d’alcoolisation massive » ou « biture express » sont devenues
un mode de consommation d’un nouveau genre, dont la pratique en plein essor a récemment incité les pouvoirs publics à
mettre en place des mesures inédites pour lutter contre le phénomène [Loi santé, 2014].
Si le Binge drinking est classiquement reconnu comme « un mode de consommation massive et rapide d’alcool », il
n’existe pas de consensus critériologiques sur la définition proprement dite des quantités et des effets psychotropes
recherchés par les sujets qui s’y exposent.. En s’appuyant sur la comparaison entre les modes de consommation d’alcool
en France et aux Etats-Unis, Yann Le Strat revient ici sur la question des seuils réglementaires ; il montre que même si la
consommation quotidienne d’alcool a nettement diminué depuis 50 ans, on assiste surtout aujourd’hui à un changement
des modalités de consommation avec une augmentation croissante du taux d’Alcoolisation Ponctuelle Importante (API). Il
s’agit là d’un phénomène nouveau qui interroge : le Binge drinking représente t-il un marqueur psychopathologique ?
Les résultats d’une enquête récente menée auprès d’un public étudiant [Ph. Gorwood, A. Dereux] ont montré que le
simple fait de déclarer un épisode unique de binge était déjà associé à des scores plus importants de troubles liés à
l’usage d’alcool, mais aussi à l’usage du tabac ou de la cocaïne.
Yann Le Strat conclut sur la question de la réglementation et des moyens à mettre en œuvre pour diminuer la
consommation excessive d’alcool chez les jeunes. Il précise que des mesures existent, qui ont déjà montré la preuve de
leur efficacité : l’augmentation du prix de vente, l’application des interdits de vente aux mineurs ou encore le dépistage
des troubles et la mise en place d’une offre de soins adaptée. Mais leur application plus stricte permettrait d’obtenir une
diminution significative des conduites de binge.
3.5
Pascal Astagneau : « Risques infectieux émergents : actualités »
Pascal Astagneau est PU-PH de santé publique. Il dirige le Centre de Coordination de Lutte contre les infections
Nosocomiales (CCLIN Paris Nord).
Une maladie infectieuse émergente (MIE) est une maladie infectieuse (MI) nouvelle ou connue dont l’incidence se modifie
et correspond à des réalités variant de quelques cas isolés jusqu’à des phénomènes de très grande ampleur (pandémie),
les uns rapidement résolutifs, d’autres pouvant s’étendre sur plusieurs années. Parmi les plus connues, on peut citer
Ebola, les infections à virus West Nile et chikungunya ou encore les infections à entérocoques résistants aux
glycopeptides. Si la plupart d’entre elles ont été découvertes dans la seconde moitié du XXe siècle, leur émergence et leur
évolution demeurent difficiles à prédire. Les zones d’émergence sont surtout situées dans le Sud mais l’incidence
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croissante des MIE dans les pays du Nord depuis ces quinze dernières années ont conduit certains spécialistes à
s’intérroger sur le délai d’intervention et les moyens à mette en œuvre pour combattre l’épidémie là ou elle se trouve [edito
du New England Journal of Medicine] ; Le cas d’Ebola est révélateur de la difficulté que l’on a à mesurer les
conséquences indirectes de la prise en charge des malades, qui suppose des mesures de confinement et d’isolement très
contraignantes, difficiles à mettre en œuvre, et pouvant représenter une perte de chance pour les populations à risques
souvent directement impactées [« Prevention of HIV spread during the Ebola outbreak in Guinea », Lancet 2015]. Cette
question des répercussions de la prise en charge constitue un objet de recherche en soi, sur lequel il serait intéressant de
développer davantage de travaux. Le dernier point abordé concerne l’appartion de phénomènes de résistances des
pathogènes aux antibiotiques. Les données européennes de ces dix dernières années (EARS-Net ; 2003-2013) montrent
une augmentation croissante de la résistance aux entérobactéries dans tous les pays européens (à quelques exceptions
près) ; les recommandations formulées par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) sont de plus en plus écoutées
par les équipes même si elles ne permettent pas encore d’éviter la survenue de nouveaux cas. Mais la recherche
consacrée aux antibiotiques reste limitée ; aucune nouvelle classe d’antibiotique n’a été découverte depuis trente ans.
En conclusion, Pascal Astagneau évoque la question des facteurs favorisant l’émergence des MI. Il remarque que peu
d’études se sont intéressées aux risques liés aux déplacements des populations humaines (carte du trafic aérien) ; il
précise qu’il s’agit pourtant d’une question centrale qui pourrait faire l’objet de travaux à venir.
3.6
Hervé Le Louët : « Etat des lieux de la gestion du risque médicamenteux en Europe »
Hervé Le Louët est coordonnateur de la Fédération des Centres Régionaux de Pharmacovigilance et d’information sur les
médicaments d’Ile-de-France (FCRPV IdF).
« Il est rare que la pharmacovigilance soit invitée dans des instances de recherche interdiscipliaire ». Le système de
pharmacovigilance a été mis en place en France au début des années 70, après l’affaire du thalidomide et l’observation
d’encéphalopathies au bismuth. La pharmacovigilance a pour objet l’étude des effets indésirables des médicaments ;
Hervé Le Louët rappelle que ces effets sont fréquents (ils représentent 5% des hospitalisations et sont responsables
d’environ 200 000 décès chaque année en Europe) ; et que leur coût moyen s’élève à 2 550 €, soit un coût sciétal de 80
milliards d’euros par an pour l’Union Européenne (UE). On comprend donc qu’une amélioration même partielle du
système puisse avoir un impact économique considérable ; mais comment construire un système de gestion des risques
efficace ? Trois mesures sont ici avancées : le recours à la sciences (learning societies, programmes de recherche
universitaires), l’augmentation des moyens consacrés au suivi de la pharmacovigilance au niveau local, régional mais
aussi national et européen (avec un renforcement de la surveillance des patients exposés aux médicaments), et enfin, des
mesures de réglementation strictes (modèles américain, chinois et japonais). Ces mesures pour être appliquées doivent
s’inscrire dans le cadre d’une stratégie claire et proactive : évaluation du risque et du bénéfice en situation réelle ;
application du principe de proportionnalité ; et mesure de l’impact des systèmes de minimisation des risques (encore
lacunaire en France).
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit la pharmacovigilance comme « une science ou un ensemble d’activités
relatives à la détection, l’évaluation, à la compréhension et à la prévention des risques d’effets indésirables (ou de tout
autre problème) liés aux médicaments mis sur le marché ». H. Le Louët fait remarquer que cette définition n’intègre pas la
notion de management ni celle de gestion des bénéfices-risques des médicaments. Il explique comment les
conséquences d’un système de Risk Management Activities basé sur le principe des notifications spontanées (notification
par les professionnels de santé des effets indésirables médicamenteux aux Centres régionaux de pharmacovigilance), a
pu conduire à des abérations en termes de décision. La notification spontanée présente un certain nombre d’avantages
(elle est simple et peu coûteuse) mais elle se heurte souvent à la faible informativité des observations ainsi qu’à la sousnotification. On sait aujourd’hui que les actions de retrait et de délai de commercialisation des médicaments doivent être
prises uniquement lorsque l’on est sûr que le rapport bénéfice-risque du produit n’est pas acceptable. Par ailleurs, d’autres
actions permettent de minimiser les risques lorsqu’un risque médicamenteux important a été identifié, mais ces techniques
sont souvent très lourdes à mettre en place et leur usage se porte plutôt sur un petit nombre de produits, dont on essaie
de limiter l’accès aux patients ; différents outils sont utilisés pour mettre en pratique l’UE Risk Management Plan, mais leur
application au niveau local n’est pas toujours évidente puisqu’elle dépend de la législation du pays considéré. Or,
lorsqu’un Plan de gestion de risque sort au niveau européen, il doit être applicable dans les 28 pays de l’UE (avec des
adaptations possibles en fonction des réalités nationales). La plupart de ces outils sortent avec du matériel éducatif (pour
le médecin ou le patient) ; Hervé Le Louët souligne ici l’importance qui doit être accordée au maniement de la
communication entourant leur usage. Il y a là beaucoup à apprendre des autres sciences.
8
S’il existe déjà un historique important des vigilances sur les effets secondaires, les participants ont souligné la pertinence
qu’il y aurait à étendre la réflexion aux questions de prédiction et d’efficacité ; il est rappelé que les industriels sont très
peu incités à définir - avant l’enregistrement d’un médicament - des profils de patients répondeurs. Certaines classes
thérapeutiques enregistrent des taux de non-réponse très préoccupants (les psychotropes par exemple), qui
nécessiteraient de mettre en place des techniques de prédiction efficaces pour déterminer leur efficacité réelle et limiter
l’exposition des patients à leurs effets. À cet égard, le Plan de gestion de risque européen oblige en principe les industriels
à préciser le taux de non-réponse de leur traitement ; la réglementation européenne prévoit même d’aller plus loin en
remplaçant à terme les essais cliniques de phase 3 par des essais « en vie réelle » extrémement encadrés.
L’analyse du système de pharmacovigilance et des modes de régulation en France et en Europe s’est principalement
construite sur la question des liens entre régulateurs, industriels et hospitaliers. La question de l’implication des
associations de patients dans l’évaluation d’un médicament avant sa mise sur le marché fait l’objet de nombreux travaux
en France, aux Etats-Unis et en Chine, mais ces recherche affichent pour l’heure peu de résultats.
4. Présentation des travaux étudiants et discussions
Les projets de thèse
4.1
Narimane Nekkab : « Control of emerging multi-drug resistant enterobacteriaceae in healthcare
natworks: modeling spread and cost effectiveness”
Infection control of hospital-acquired infections (HAIs), especially which of antibiotic resistance bacteria (ARB), has been
an important public health concern in France for the past thirty years. The spread of carbapenem-producing
Enterobacteriaceae (CPE) is now a global problem associated with patient transfer between healthcare facilities within the
same country as well as across national borders. This project aims to explore the dynamics of the patient flow patterns on
the spread of HAIs in the French healthcare network. In addition, infection control strategies to contain Multi-drug
enterobacteriaceae (MDROs) spread and cost-effectiveness to control CPE spread would be assessed.
To address the need to strengthen the healthcare system against CPE and other emerging healthcare-associated
Enterobacteriacae, the project will be organized around the following objectives:




To identify the vulnerable factors in the healthcare network associated with healthcare facilities, patient, and staff
characteristics that could explain geographical or temporal variations of HAIs ;
To assess the influence of patient flow patterns on incidence rates and potential spread of MDROs ;
To evaluate how different infection control scenarios can contain potential CPE spread ;
To assess the impact of potential outbreak and the cost-effectiveness of introducing novel infection control
strategies to contain CPE spread.
The doctoral project will entail network theory and mathematical modeling techniques to inform decision makers on better
coordinated regional and national approaches to infection control strategies of multi-drug resistant organisms in France.
4.2
Paula Rios: « Facteurs de risque environnementaux, périnataux et génétiques des
neuroblastomes de l’enfant »
Le neuroblastome est une tumeur du système nerveux embryonnaire qui naît des cellules précurseur dérivant de la crête
neurale, avec une localisation fréquemment para-spinale au niveau de l’abdomen ou de la cavité thoracique. Il s’agit du
cancer le plus fréquemment diagnostiqué durant la première année de vie de l’enfant. En dépit des nombreuses
recherches réalisées sur le sujet, l'étiologie du neuroblastome reste à ce jour inconnue. La littérature portant sur les
facteurs périnataux associés au neuroblastome est relativement limitée et les résultats publiés sur ce sujet sont
fréquemment inconsistants. Différentes études ont par exemple associé la survenue d’un neuroblastome avec les
malformations à la naissance mais aucun syndrome constitutionnel n’a été clairement identifié comme prédisposant. De la
même façon, l’impact des facteurs environnementaux reste sujet à controverse bien que des associations significatives
aient été récemment décrites concernant l’exposition maternelle pendant la grossesse aux hydrocarbures polycycliques et
au tétrachlorure de carbone [Heck et all, 2013]. Pour mieux comprendre l’étiologie du neuroblastome et orienter de
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manière plus efficace les mesures de prévention et de prise en charge médicale et thérapeutique de ce cancer de l’enfant,
le projet de thèse s’articulera autour des objectifs suivants : étudier les facteurs de risque périnataux, environnementaux et
génétiques.
Les projets de Master 2
4.3
Olga Gilbert : Parcours de chimicosensibles »
A l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), l’apparition de maladies dites environnementales a suscité de nombreuses
controverses. Pourtant, la chimicosensibilité (CIM-10 T78.4) y est reconnue depuis 2000 comme « autre allergie, non
précisé ». L’absence de symptômes visibles ou d’altérations physiques dues à la maladie explique les incertitudes qui
entourent la reconnaissance de ce syndrome et ses origines (physique ou psychologique). Certains peuvent pourtant
nécessiter jusqu’à une réclusion totale dans un environnement aseptisé. Le Conseil de l’Europe milite à ce titre pour la
création de zones blanches, « chemical free » mais le débat reste largement polarisé entre les partisans d’une
reconnaissance de la maladie et ceux qui en nient la réalité. Qui sont les militants, qu’ils soient pour ou contre la
reconnaissance de la MCS (Multiple Chemical Sensitivity) et quels sont leurs intérêts et points de vue ? Comment un
syndrome entre-t-il dans l’espace public et devient un problème de santé publique ?
Ce projet entend contribuer au débat sur la réglementation sanitaire en France en étudiant une réalité discrète et
dérangeante. Un enjeu d’autant plus marqué que de nombreux scientifiques reconnaissent la chimicosensibilité comme
une maladie (qui résulterait de la perturbation du cycle NO/ONOO), et que rien n’est toutefois mis en place en France pour
prévenir ou guérir ce syndrome.
Les enjeux scientifiques d’une reconnaissance de la chimicosensibilité s’inscrivent dans une pluridisciplinarité où la
médecine rejoint les domaines de la psychologie et de la sociologie. L’aspect novateur de ce travail tient à la façon dont il
étudie ici le rapport à la maladie (rapport du malade lui-même, rapport du corps médical et de la société dans son
ensemble), mais également sa construction publique.
4.4
Clément Vansteene : « Facteurs de risque cliniques, cognitifs et génétiques du risque suicidaire
dans l’alcoolo-dépendance »
Le trouble de l’usage d’alcool représente en France un coût annuel majeur. D’abord médical, de l’ordre de 14 à 20
milliards d’euros, et social, de l’ordre de 90 à 115 milliards d’euros (Lebrun & Selker, 2004). La notion du nombre d’années
de vie gâchées (DALY) prend ici tout son sens puisque cette pathologie explique 12% des morts prématurées et des
années de mauvaise santé chez les hommes, pour 2% chez les femmes en Europe (Anderson & Baumberg, Rapport sur
l’alcool en Europe, 2006) ; la place de l’alcool dans les conduites suicidaires reste pourtant difficile à déterminer tant les
co-variables sont nombreuses : dépression associée, comorbidités psychiatriques, types de prise en charge, anomalie des
fonctions neurocognitives, les spécificités homme/femme, etc.
Ce projet s’appuie sur l’étude d’une cohorte de 800 patients alcoolo-dépendants hospitalisés pour sevrage et suivis
pendant deux ans1, dont les résultats permettront d’offrir une lecture intégrée de la maladie alcoolique et de son facteur
pronostic le plus sévère, le risque suicidaire.
Les données épidémiologiques actuelles montrent que les symptômes de dépression et d’alcoolo-dépendance président
au risque suicidaire mais la comorbidité psychiatrique n’élimine pas le poids des facteurs génétiques impliqués. Les
études de jumeaux ont par exemple montré que les scores de passage à l’acte suicidaire étaient plus importants chez les
jumelles monozygotes que chez les jumelles dizygotes.
Enfin, les sujets alcoolo-dépendants ont une trajectoire de soins souvent chaotique et marquée par la non-compliance
(Martin et al., 2004). Le développement des traitements pharmacologiques de l'aide au maintien de l'abstinence, les
interventions brèves, les psychothérapies (thérapie motivationnelle, cognitivo-comportementale) ou les associations
d'anciens buveurs peuvent améliorer le pronostic du trouble et du risque suicidaire, mais restent à ce jour peu prescrits
et/ou utilisés par les patients. Les résultats tirés de cette première analyse serviront de support à la mise en place d’une
étude consacrée à l’évaluation de la prise en charge de l’alcoolo-dépendance.
1
Cohorte ECSA.
10
4.4
Alix De Prémorel : « Evaluation des consommations d’alcool pendant la grossesse et de leurs
conséquences sur l’enfant exposé »
Les conséquences sur l’enfant à naitre de consommations ponctuelles et limitées d’alcool pendant la grossesse restent
mal connues. Seuls les troubles du spectre de l’alcoolisation fœtale, survenant classiquement après des consommations
importantes (binge drinking) et/ou régulières sont bien décrits. Ce projet pilote s’appuie sur la collaboration de plusieurs
expertises (psychiatrie adulte, pédiatres et pédopsychiatres), pour réaliser une étude de faisabilité permettant de quantifier
de façon plus précise la consommation d’alcool et d’autres substances d’abus (cannabis, tabac, cocaïne, etc.), au cours
des neuf mois de grossesse.
L’équipe coordonne le suivi d’une cohorte (IGE-DEPP) de 3 000 femmes enceintes recrutées dans 8 maternités
parisiennes. Pendant un an, 400 femmes seront évaluées sur leurs consommations d’alcool puis en rappel téléphonique à
8 semaines. Cette évaluation addictologique portera sur la durée totale de la grossesse (+ 3 mois antérieurs) et
comprendra une évaluation standardisée de la totalité des consommations d’alcool et autres substances d’abus, en
utilisant la méthode du Timeline Follow back (fréquence, quantité, consommation moyenne et maximale, moment précis
des consommations durant la grossesse).
Les résultats permettront d’identifier les femmes présentant un abus, une dépendance à l’alcool ou une consommation à
risque pendant la grossesse et de repérer le moment exact de ces consommations (1er, 2nd ou 3e trimestre).
Par ailleurs, le projet intègre la mise en place d’un projet d’évaluation neuropédiatrique des enfants exposés. Ce protocole
de suivi systématique des nouveaux nés considérés comme à risque - ouvert à toutes les femmes enceintes en population
générale exposées à des toxiques -, interviendrait comme une offre de soin inédite dont les résultats pourraient avoir des
retombées immédiates en matière de prévention des risques et contribueraient à renforcer les messages d’information en
population générale.
4.5
Margo Palmer : “Processing and managing homeless drug users: The role of health
professionals and social workers in London and Paris”
Homelessness amongst drug users is a serious cause for concern and a significant multi-faceted social issue in modern
French and British society.
The objective of the project is to offer a new sociological understanding of the interaction between public health and social
care professionnals who are working with homeless drug addicts. This dissertation adresses the research questions: Are
public drug policies and treatment in France and England successful and adapted to the work of social workers and health
professionals with homeless substance users? Do social workers and health professionals have the same understanding
and ways to reach out and support homeless drug addicts? Through the use of quantitative methods and data in both
countries, this study will attempt to analyse the success of various public drug policies delivered by professionals of public
health towards homeless drug addicts in hospitals.
4.6
Adrien Allorant: “La résistance microbienne aux antibiotiques”
La résistance aux antibiotiques reste un objet d’étude peu investi par la sociologie. Elle constitue pourtant un problème de
santé publique majeur auquel les pouvoirs publics s’efforcent de sensibiliser les médecins et la population.
Ce projet de recherche a pour objectif de déterminer la « séquence » de prise de conscience d’abord scientifique, puis
médicale et politique, du risque d’ineffectivité totale des antibiotiques. Car cette question impose désormais de repenser
les normes en matière de régulation et de prescription médicale.
Dans la continuité des travaux réalisés sur l’obésité, la vaccination ou encore le virus du sida, cette approche sociologique
de l’antibiorésistance entend porter un éclairage sur les relations entre chercheurs, agences, professionnels de santé et
laboratoires pharmaceutiques, autour d’un problème de santé publique qui dépasse à l’évidence le seul champ de
l’épidémiologie.
11
4.7
Maïté Bouchez : « Conseiller et choisir en situation d’incertitude. Le rôle du médecin dans les
choix médicaux : le cas du vaccin anti-HPV »
Le Gardasil a été conçu pour lutter contre l'un des cancers les plus meurtriers chez la femme: le cancer du col de l'utérus.
Controversé, il fait l'objet d'une pharmacovigilance renforcée de la part des Agences sanitaires. Son usage reste à ce jour
limité ; alors qu’en 2010, 27% des jeunes filles de 16 ans ont reçu les trois injections préconisées, elles ne sont plus que
20% en 2012 et 18% en 2013.
Ce projet a pour objectif: d’étudier le rôle des médecins (généralistes / gynécologues) dans la vaccination contre le
Papillomavirus par le Gardasil.
Le rapport des médecins à la vaccination anti-HPV reste peu étudié à ce jour ; la littérature s’étant plus intéressée à la
perception des patients eux-mêmes qu’à celle de leur médecin.
Il existe déjà de nombreuses études quantitatives sur le rapport qu’entretiennent les médecins avec le principe vaccinal
mais peu d’entre elles ont tenté de le mesurer d’un point de vue qualitatif. Dans quelle mesure peut-on dire qu’il existe ou
pas un « consensus médical » ? Comment le principe de responsabilité est-il vécu en contexte d’incertitude ? Quelle
influence exerce-t-il sur les modes de recommandation choisis ?
L'objet de cette enquête qualitative est ici de caractériser les représentations partagées par les médecins autour d’un
vaccin fortement discuté.
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