4IGAS, RAPPORT N°RM2009-098A
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Cette contrainte n’a pas empêché un développement important de la méthode
médicamenteuse qui représentait en 2006 près de 46% des IVG réalisées en France, avec de très
fortes variations entre régions (30% en Aquitaine, 80% en Alsace), et selon les établissements. La
loi a autorisé les IVG médicamenteuses en ville jusqu’à 7 semaines, pour les médecins libéraux, et
récemment pour les centres de planification ou d’éducation familiale et les centres de santé. La
pratique en ville reste encore marginale, estimée par la DREES en 2007 à quelque 20 000
interventions, soit environ 9% du total des IVG. Elle concerne en majorité des gynécologues,
essentiellement dans les régions de forte demande dans lesquelles l’accès en établissement
hospitalier s’avère plus difficile, comme en Ile-de-France ou PACA. Dans l’ensemble, ces
professionnels libéraux sont plus soucieux de rendre service à leurs patientes que de s’engager de
manière volontariste dans une activité qu’ils jugent peu gratifiante, peu rémunératrice et lourde sur
le plan administratif. L’ouverture de l’IVG à la médecine de ville n’en apporte pas moins une
contribution précieuse au développement de l’offre de soins dans les zones de forte tension,
que la récente publication des textes réglementaires relatifs à la prise en charge dans les centres de
planification ou d’éducation familiale et les centres de santé devrait permettre de compléter et
développer.
Pour autant, la place de l’IVG dans le système de soins n’est pas encore normalisée
L’IVG n’est pas encore traitée comme une activité médicale tout à fait comme les autres et
continue à mains égards de faire l’objet d’un traitement à part.
Malgré un dispositif d’information lourd, voire redondant, la réalité de cette activité reste
mal connue, et des zones d’ombre persistent dans la connaissance, tant en termes quantitatifs que
qualitatifs.
Selon la loi de 1975, tout acte d’IVG doit faire l’objet d’une déclaration obligatoire. Ce
dispositif de suivi spécifique, complété par la statistique annuelle d’établissement (SAE) et le
programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) ne permet pourtant pas de
connaître avec certitude le nombre des IVG ni les caractéristiques des patientes. Des données de
base comme la part des mineures procédant à une IVG sans le consentement des parents, sur les
14 000 mineures qui interrompent une grossesse, le nombre des IVG récurrentes, le « vécu » des
femmes notamment en fonction de la méthode utilisée, ne sont pas connues. Les résultats de
l’enquête réalisée en 2007 sous l’égide de la DREES devraient permettre de pallier en partie ce
déficit d’information.
L’IVG mettant en jeu des points de vue personnels de nature philosophique ou religieuse, il
est particulièrement nécessaire de développer un corpus commun de connaissances reposant sur des
données fiables et reconnues. Les lacunes du système d’information mais plus encore la faible
diffusion et appropriation des résultats dans le public favorisent la propagation de discours
radicalement opposés, fondés sur des impressions et des partis pris plus que sur l’ analyse objective
de données de fait : ainsi les uns évoquent-ils des facilités excessives d’accès à l’IVG là où pour les
autres il est de plus en plus compliqué d’interrompre une grossesse.
Les femmes en demande d’IVG ne sont pas non plus toujours traitées en patientes comme
les autres. Prescriptrices de l’intervention, elles restent confrontées à des attitudes culpabilisantes
de la part de certains personnels d’accueil ou soignants. Si les pressions de nature morale n’ont pas
totalement disparu, elles se voient plus souvent reprocher leur incapacité à gérer leur « devoir
contraceptif » et la qualification de « récidivistes » qui leur est couramment appliquée lorsqu’elles
ont recours plus d’une fois à l’IVG en dit long sur la façon dont elles sont considérées. Alors que
les travaux d’étude montrent qu’une méthode choisie par la patiente sera mieux supportée par elle
et que selon les recommandations de la HAS « dans tous les cas où cela est possible, les femmes
doivent pouvoir choisir la technique, médicale ou chirurgicale, ainsi que le mode d’anesthésie,
locale ou générale», les décisions prises en la matière reflètent plus souvent les choix
organisationnels des établissements et l’orientation des équipes soignantes.