dienne du nouveau-né doit être contrôlée une fois par semaine
pour certains auteurs. L’apparition d’une idiosyncrasie chez
l’enfant (fièvre, éruption cutanée, agranulocytose) n’est pas
exclue.
Azizi et al. (1) ont étudié les conséquences de l’allaitement sur
les nouveau-nés de mère prenant du methimazole (MMI). Cent
trente-neufpatientes ayant une thyrotoxicose et allaitant leur
enfant ont été étudiées. Cinquante et une mères ont été traitées
pendant la grossesse et pendant l’allaitement. Quatre-vingt-
huit mères ont reçu du MMI quotidiennement pendant un
mois, soit à la dose de 20 mg/jour (n=42), soit à la dose de
10mg/jour (n=46), puis toutes en ont reçu 10mg quotidienne-
ment pendant 1mois et de 5 à 10 mg ensuite. Ces doses se sont
révélées efficaces chez les mères jusqu’à 12mois de traite-
ment. Chez tous les enfants, les concentrations de T4 libre, de
T3 libre et de TSH étaient normales avant et jusqu’à 12 mois
après la naissance, et les concentrations sériques de MMI
étaient inférieures à 0,03mg/ml. Six mères recevant 20mg de
MMI ont présenté une augmentation des taux de TSH au bout
d’un mois de traitement. Dans un sous-groupe d’enfants
(14 enfants du groupe exposé et 17 témoins) étudiés à un âge
variant de 48 à 74 mois, les caractéristiques cliniques, le quo-
tient intellectuel et le test de Wechsler et l’exploration thyroï-
dienne (dosages de T4L, T3L et de TSH) n’étaient pas
différents entre le groupe exposé et le groupe contrôle. Les
auteurs concluent qu’aucun effet délétère n’est apparu sur la
fonction thyroïdienne et sur le développement physique et
intellectuel des enfants nourris au sein, alors que leur mère
prenait jusqu’à 20mg de MMI quotidiennement. Mais les
auteurs concluent aussi qu’il existe un risque potentiel, certai-
nement limité, de dysfonction thyroïdienne chez les enfants et
chez la mère, justifiant de surveiller la fonction thyroïdienne
de l’enfant toutes les 4 semaines.
LE PROPYLTHIOURACILE
Le propylthiouracile (PTU) a une demi-vie plasmatique de 1 à
2 heures. Le rapport des concentrations lait/plasma est de 0,1 à
0,5. Après administration de produit marqué, un taux de
0,077% de la dose administrée a été retrouvé dans le lait
maternel pendant les 24heures qui ont suivi l’administration.
Les doses reçues par l’enfant sont donc très faibles et bien en
deçà des doses efficaces en thérapeutique. Ces premiers résul-
tats sont confirmés par une seconde étude (8), qui montre que
la dose totale de PTU excrétée dans le lait maternel pendant
les 4 heures qui suivent l’ingestion d’une dose unique de
400mg de PTU est de 0,025% (0,007 - 0,07%).
Momotani (11) a suivi la fonction thyroïdienne chez 8 enfants
dont les mères recevaient 50 à 300 mg de PTU par jour, pen-
dant 1 à 9 mois d’allaitement. Les enfants qui étaient hypothy-
roïdiens à la naissance (à la suite d’un traitement par PTU
pendant la grossesse) ont retrouvé une fonction thyroïdienne
normale pendant l’allaitement, malgré le fait que la mère rece-
vait du PTU. Aucun effet secondaire n’a été signalé.
Momotani (12) a ensuite étudié 11 enfants nourris au sein,
dont les mères prenaient quotidiennement plus de 300mg de
PTU. Des prélèvements de T4L, TSH et anticorps antirécep-
teurs à la TSH étaient régulièrement effectués chez l’enfant et
la mère pendant l’allaitement, mais aussi au sang de cordon à
la naissance en cas de traitement prénatal. Trois enfants
avaient des TSH supérieures à la normale: dans le cas du pre-
mier, testé 19semaines après la naissance, la TSH était juste
au-dessus des valeurs normales. Chez les deux autres dont les
mères avaient été traitées par PTU jusqu’à l’accouchement, les
concentrations de TSH déterminées au 7ejour de vie étaient
supérieures aux normes mais se sont normalisées, alors que les
doses de PTU maternelles étaient les mêmes ou supérieures à
celles du traitement anténatal. Les doses de PTU ou les
concentrations maternelles de FT4 n’étaient pas corrélées à la
TSH des enfants. Les auteurs concluent que les mères prenant
des doses allant jusqu’à 750 mg de PTU peuvent allaiter sans
retentissement sur la fonction thyroïdienne de leur enfant.
Ces auteurs insistent par ailleurs sur la fréquence des rechutes
de maladie de Basedow dans le postpartum. En effet, les
11 patientes incluses dans cette étude ont eu une exacerbation
ou une rechute de leur maladie dans le postpartum, et 3 sur
11 des enfants ont eu une hypothyroïdie biologique.
Ainsi, le PTU est l’antithyroïdien de synthèse de premier
choix en cas d’allaitement. Le PTU sera pris de préférence
juste après les tétées. La plupart des auteurs s’accordent pour
recommander un suivi régulier (toutes les 2 à 4 semaines) de la
fonction thyroïdienne du nouveau-né (T3, T4, TSH). La surve-
nue d’une idiosyncrasie chez l’enfant n’est pas exclue.
EN RÉSUMÉ
•
•Les études prénatales insistent sur le caractère délétère d’une
hypothyroïdie, même fruste, sur le développement ultérieur de
l’enfant. À l’inverse, les études postnatales sont en faveur de
l’absence de nocivité des ATS au cours de l’allaitement. Cela
reflète une exposition fœtale aux ATS beaucoup plus impor-
tante par voie transplacentaire que par le lait maternel.
•
•Les études postnatales sont encore limitées, mais aucun tra-
vail récent ou ancien ne rapporte d’incidents chez des nou-
veau-nés allaités, alors que leur mère était traitée avec le PTU
(200 à 300 mg/j) ou le carbimazole (5-15 mg/j). Le suivi bio-
logique de l’enfant est justifié toutes les 2 à 4 semaines pour
confirmer ces premiers résultats.
•
•Il paraît cependant raisonnable de limiter l’allaitement
maternel dans les conditions suivantes:
•
• maladie de Basedow mal équilibrée ou nécessitant des doses
croissantes d’ATS;
•
• maladie de Basedow avec retentissement néonatal (hyperthy-
roïdie par passage d’anticorps antirécepteurs à la TSH, ou
hypo-thyroïdie par action des ATS), l’allaitement maternel
pouvant perturber la prise en charge spécifique du nouveau-né.
•
• En cas de maladie de Basedow (dont les anticorps antithy-
roïdiens se sont négativés) et sous faibles doses d’ATS, l’allai-
tement maternel peut être envisagé, sous couvert d’un suivi
médical de l’enfant, et en ayant prévenu la patiente qu’une
rechute ou une récidive de sa maladie pourra faire discuter
secondairement un arrêt de l’allaitement maternel. ■
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La Lettre du Gynécologue - n° 270 - mars 2002