Sarkozy a-t-il rompu avec l`écologie ? L`avis des politiques

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Sarkozy a-t-il rompu avec l’écologie ? L’avis des
politiques
mercredi, 20 octobre 2010
Trois ans après, que pensent la secrétaire d’Etat à l’écologie Chantal Jouanno, l’ex-candidate
socialiste à la présidentielle Ségolène Royal et la députée européenne Europe Ecologie Eva Joly de
l’engagement environnemental du Président ?
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CHANTAL JOUANNO
SÉGOLÈNE ROYAL
EVA JOLY
« On a réalisé 90 % de ce qu’on voulait faire »
Chantal Jouanno secrétaire d’Etat chargée de l’Ecologie
« Je me souviens des débuts du Grenelle. On nous disait que tout le monde
claquerait la porte, qu’on accoucherait d’une souris, que personne ne
suivrait… Mais de grandes choses ont été faites. On a globalement réalisé
90% de ce qu’on voulait faire. Même les associations disent que, si elles
n’ont pas tout obtenu, le Grenelle reste un grand pas en avant. Et les
choses n’ont pas traîné. On a lancé les opérations en juin 2007, en octobre
on avait validé l’ensemble des grands objectifs. Fin 2008, le premier projet
de loi avait été mis sur la table et voté en août 2009. La loi Grenelle II,
l’une des plus grandes lois de la législature, a connu une mise en place très
rapide. Il le fallait. Aujourd’hui, nous sommes en deuxième partie de
mandat et dans un contexte politique plus tendu. Passer ce genre de
réforme qui doit dépasser les clivages politiques serait beaucoup plus difficile.
Dans le Grenelle, je me sens particulièrement fière du volet agriculture. Le plan de réduction des
phytosanitaires est, à mon sens, extrêmement important. Je suis fière aussi des mesures pour
protéger la santé des plus fragiles, notamment celle des enfants : l’interdiction du bisphénol A, les
restrictions sur les téléphones portables, l’encadrement de la publicité… Enfin, je suis très contente
de cette réflexion qu’on a lancé sur le PIB et les indicateurs de richesse. Je regrette évidemment
que la contribution carbone ait été reportée. Ceci dit le débat n’est pas terminé. N’abandonnons
pas cette idée de changer profondément notre fiscalité ! Je regrette aussi la politisation globale du
débat, le fait qu’on assimile le Grenelle a une dépense et non à un investissement. Pour moi, le
Grenelle c’est « comment dépenser moins en prévenant les dégâts sur la nature plutôt que de les
réparer ». C’est aussi « comment on se passe des énergies fossiles pour devenir moins dépendant
de l’extérieur. » C’est un investissement !
Aujourd’hui, c’est vrai, le contexte politique est tel qu’on parle beaucoup moins d’environnement.
Mais je n’ai aucune raison de douter de l’engagement du Président. Parmi les arbitrages
budgétaires, les financements spécifiques du Grenelle sont stabilisés. Certes à court terme, la
crise a peut-être réduit notre marge de manœuvre budgétaire. Mais à moyen terme, les
fondements de cette crise remettent en question l’ensemble du système économique. Elle prouve
l’intérêt de changer de modèle et d’ouvrir un débat sur la révision du PIB. A moyen terme, la crise
conforte au contraire le Grenelle !
Globalement le bilan du Grenelle me semble plutôt positif mais nous ne sommes qu’à mi-chemin.
Tous les éléments les plus structurants – la réforme du PIB, de la fiscalité, des modèles de
décision – sont encore devant nous. C’est pour cela que je parle aujourd’hui de Grenelle III. Ça ne
veut pas forcément dire adopter une nouvelle loi. Les modèles de décision de l’Etat et de
l’administration, ça ne nécessite pas forcément une loi. La publication par la France d’un PIB vert,
non plus. Evidemment, la réforme de la fiscalité suppose une loi. Mais avant tout, elle demande un
grand débat. Le changement de fiscalité pose des problèmes de transfert de charge entre les
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27/10/2010
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acteurs : particuliers ou entreprises. In fine, tout le monde est d’accord avec le principe qui
consiste à imposer moins de taxes sur le travail et plus sur la pollution. Mais c’est la gestion de la
transition qui n’est pas simple. » —
« Un Grenelle vidé de sa substance »
Ségolène Royal ancienne candidate à la présidentielle, signataire du Pacte
écologique. aujourd’hui présidente socialiste du conseil régional de PoitouCharentes
« Depuis plusieurs mois, de nombreuses décisions du Gouvernement en
matière environnementale ont totalement vidé de son sens le Grenelle de
l’environnement. Le Gouvernement a reculé sur ses engagements dans
tous les domaines : l’éolien, en durcissant les règles applicables aux lieux
d’implantation ; le photovoltaïque, en portant un coup très dur à la filière
industrielle par une remise en cause de tous les leviers de développement ;
l’isolation des bâtiments, en remettant en cause les aides aux particuliers
qui commençaient à se mobiliser ; mais aussi en matière de réduction des
pesticides, des transports par la route, sur la fiscalité écologique,
l’étiquetage écologique des produits, etc. Le vote de la loi Grenelle II en mai dernier a bien illustré
ces reculs.
Ces décisions mettent gravement en péril le développement des filières vertes et l’action pour la
préservation du climat. Les filières vertes en émergence, qu’il s’agisse des énergies renouvelables,
de l’efficacité énergétique dans l’habitat ou encore des procédés industriels ont avant tout besoin
d’un cadre politique stable et cohérent afin de poursuivre leur développement, générer des
activités industrielles et des emplois durables. Les citoyens ont également besoin d’un discours
politique clair pour consolider leur souci de protection de la planète.
A titre d’illustration, dans la filière photovoltaïque, les acteurs de la filière sont totalement
désorientés. Les justifications énoncées par le Gouvernement sont hypocrites et erronées : les
tarifs de rachat pratiqués profiteraient aux fabricants de panneaux chinois majoritaires
actuellement. Mais c’est justement l’instabilité de l’intervention publique et le plafonnement du
marché qui vont mettre à mal la dizaine de projets industriels de fabrication de panneaux solaires
lancés en France. Alors même que ces projets doivent générer plusieurs centaines d’emplois.
Actuellement, ce sont deux projets industriels qui sont ainsi menacés dans la région que je
préside, soit plus de 150 emplois. Cette menace intervient après deux années d’efforts et de
travail concerté avec les territoires et les acteurs économiques pour accueillir ces nouvelles
activités. Pour une véritable conversion écologique de l’économie, il faut combiner
l’accompagnement des citoyens et un cadre stable pour donner de la visibilité aux filières qui
créent de l’emploi et de nouvelles activités industrielles.
Même en période de rigueur budgétaire des solutions existent, mais elles ne pourront voir le jour
que si la croissance verte devient réellement une priorité, et non un faire-valoir politique, variable
en fonction de l’actualité du moment.
Enfin, le Grenelle avait été présenté comme une méthode innovante de faire de la politique en
associant l’ensemble des citoyens. Je constate aujourd’hui que les reculs sont annoncés au fil des
interviews ministérielles ou des projets de loi, sans concertation, sans mesurer réellement l’impact
des remises en cause décidées. Nicolas Sarkozy et le gouvernement prennent une responsabilité
majeure devant l’histoire. L’exigence environnementale et les attentes des citoyens sont
immenses. Il est encore temps de ne pas les décevoir et d’engager enfin la France dans le cercle
vertueux de la croissance verte et de la sociale-écologie. » —
« La fin du super héros écolo »
Eva Joly députée européenne Europe Ecologie
« “L’environnement ça suffit !” De toutes les petites phrases et autres grandes déclarations
assorties de coups de menton volontaires de Nicolas Sarkozy, c’est – au grand dam des
écologistes – celle qui fut mise en œuvre avec le plus de rapidité et la plus grande efficacité. A
peine les mauvais résultats de la majorité parlementaire aux élections régionales se profilaient-ils,
que déjà Nicolas Sarkozy tombait ce costume de super héros écolo, bien trop grand pour lui, et
revenait sur les engagements les plus emblématiques du Grenelle de l’environnement. Ce fut tout
d’abord l’abandon de la taxe carbone. Certes, la proposition de Nicolas Sarkozy, en négligeant
sciemment les indispensables éléments d’efficacité énergétique et de justice sociale, était loin de
répondre aux attentes des écologistes. Elle avait toutefois le mérite d’amorcer une fiscalité
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écologique absolument nécessaire à la transition énergétique que nous
appelons de tous nos vœux. Une transition énergétique vitale si nous
souhaitons lutter efficacement contre les changements climatiques déjà
subis de plein fouet par les pays en développement.
Ce fut ensuite le coup de rabot sur les niches fiscales écolos pourtant
porteuses de milliers d’emplois, d’économie d’énergie, de transformation
écologique de la France. Plutôt que de supprimer un bouclier fiscal
socialement injuste mais fort profitable à ses électeurs les plus aisés,
Nicolas Sarkozy s’attaque aux avantages fiscaux accordés pour la pose de
panneaux solaires ou l’isolation des bâtiments.
En s’attaquant à l’économie verte, Sarkozy ne pénalise pas seulement les
ménages les plus modestes qui profiteraient les premiers de la réduction des factures
énergétiques. Il pénalise également la France en empêchant ses industries de s’adapter à un
nouveau modèle économique plus performant. C’est enfin, l’inutile projet d’aéroport de NotreDame-des-Landes dans lequel le gouvernement s’est récemment engagé à injecter 138,5 millions
d’euros sans même prendre la peine de concerter une population locale pourtant largement
hostile.
Les exemples d’atteinte à l’esprit du Grenelle de l’environnement – tant dans sa forme de
gouvernance pluri-acteurs que dans ses conclusions – par un président qui ne voit dans l’écologie
qu’un concept à la mode plus ou moins utile selon les échéances électorales sont légions. Nicolas
Sarkozy peut continuer à faire du “greenwashing” pour rendre ses politiques socialement et
écologiquement injustes plus vertes, plus personne n’est dupe. »
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