Décomposition polaire d`une matrice carrée réelle ou complexe

Décomposition polaire
d’une matrice carrée
réelle ou complexe
Ait Lhoussain Mohamed
4 janvier 2013
1 Introduction
Tout nombre complexe non nul zs’écrit de façon unique :
z=su
avec sR
+et uU(ici Udésigne l’ensemble des nombres complexe de modules 1.
Tout nombre réel non nul xs’écrit :
x=|x|x
|x|
donc :
x=su
avec sun réel strictement positif et u∈ {−1,1}
Peut on étendre ces idées aux matrices carrées réelles et complexes ?
La réponse est oui et avant tout remarquons que si n= 1 alors on dispose de M1(R) = R
(pour plus de précision on les confond en identifiant le réel xet la matrice (x), mais de
toute façon ils sont isomorphes) . Alors on a :
M1(R) = R;S(R) = R;S+(R) = R+;S++(R) = R
+;O(R) = {−1,1}
De même pour le cas des complexes :
M1(C) = C;S(C) = C;S+(C) = R+;S++(C) = R
+;O(C) = U
2 Densité de GLn(R)dans Mn(R)
Proposition 1. Gln(R)est dense dans Mn(R).
Démonstration. Rappelons qu’en dimension finies toutes les normes sont équivalentes
donc on munira Mn(R)d’une norme quelconque. Soit Mune matrice quelconque de
Mn(R). L’ensemble
ZM={tR/det(MtIn) = 0}
1
est fini c’est exactement l’ensemble des racines du polynôme caractéristique χMde la
matrice M. Ce polynôme étant de degré n, l’ensemble de ses racines est fini. Alors il
existe a > 0tel que :
t]0, a[ det(MtI)6= 0
En particulier les termes de la suite (Mn=M1
nIn)sont inversibles à partir de N > 1
a
et on voit bien que :
lim
n+Mn=M
Ainsi Gln(R)est dense dans Mn(R).
Remarque :
cette preuve est valable pour K=Cdonc pour K=Rou Con a GLn(K)est dense
dans Mn(K).
3 Racine carrée d’une matrice carrée réelle symétrique
positive
Proposition 2. Pour toute matrice symétrique positive Ail existe une et une seule
matrice symétrique positive Btel que B2=A
Démonstration. Soit A∈ Mn(R)une matrice symétrique positive.On va démontrer
l’existence et l’unicité de Bsymétrique positive tel que B2=A:
Existence :
Soit Aune matrice carrée réelle symétrique positive de taille navec nun entier naturel
non nul. On sait que Aest diagonalisable via une matrice orthogonale. Autrement dit
il existe des nombres réels λ1,··· , λnet une matrice orthogonale Ptel que A=PtP
∆ = diag(λ1,·, λn). Puisque Aest positive le valeurs propres λ1,·, λnsont positive
et on peut considérer la matrice B=P DtPD=diag(µ1,·, µn)et µk=pλkpour
tout k∈ {1,·, n}. On a tB=t(P DtP) = P DtP, donc Best symétrique. Les valeurs
propres de Bsont strictement positives donc Best définie positive. Finalement on a :
B2= (P DtP)(P DtP) = P D2tP=PtP=A
D’où l’existence de B.
Unicité : Supposons que Bet Csont deux matrices carrées réelles symétriques po-
sitives tel que B2=C2=A. Démontrons que B=C. On va démontrer que :
(i) Sp(B) = Sp(C)
(ii) Pour tout λSp(B)on a Eλ(B) = Eλ(C)
Cela suffira pour dire que B=C
Montrons que Sp(B) = Sp(C):
Soit µSp(B)c’est-à-dire, µest une valeur propre de B. Alors µ2est une valeur propre
de B2donc de C2. Donc ker(C2µ2In)6={0}. Comme Best positive, on a µ0. On
traite deux cas :
Premier cas : µ > 0alors en particulier µ6= 0, alors les polynômes Xµet X+µsont
2
premiers entre eux.
Le lemme de décomposition des noyaux permet d’écrire :
ker(CµIn)ker(C+µIn)6={0}.
Or Cétant positive donc µn’est pas une valeur propre de Cpar suite
ker(C+µIn) = {0}
et alors :
ker(CµIn)6={0}.
Donc µest une valeur propre de C.
Deuxième cas µ= 0 alors Best non inversible, donc Caussi car C2=B2est non
inversible. Donc 0Sp(C).
Ainsi on a prouvé que Sp(B)Sp(C). Par symétrie on a l’inclusion inverse donc
Sp(B) = Sp(C)
Pour tout µSpBon a Eµ(B) = Eµ(C).
En effet : Soit µSp(B) = Sp(C). On traite deux cas :
Premier cas : µ > 0alorsµ2est une valeur propre de B2de sous-espace propre
ker(B2µ2In).
Par le lemme de décomposition des noyaux on a :
ker(B2µ2In) = ker(BµIn)ker(B+µIn)
. Or Bétant positive donc µn’est pas une valeur propre de Cpar suite ker(B+µIn) =
{0}et alors :
ker(B2µ2In) = ker(BµIn)
Par symétrie on a :
ker(C2µ2In) = ker(CµIn)
Comme B2=C2on a alors :
ker(BµIn) = ker(CµIn)
Deuxième cas : µ= 0 : Soit dla multiplicité de la valeur propre 0de B. On sait que
d= dim E0(B) = dim ker B.
Si d=n B =Odonc C2= 0, or Cest diagonalisable car symétrique réelle donc
C=O. Ainsi B=C=Odans ce cas trivial.
Si d < n alors Badmet d’autres valeurs propres non nulles de sorte que :
B=POdO
OP1
Pest une matrice orthogonale et une matrice diagonale de taille nddont tous
les termes diagonaux sont non nuls.
Il en résulte que :
B2=POdO
O2P1
3
On en déduit que dest la multiplicité de la valeur propre 0de B2autrement dit
d= dim ker B= dim ker B2
car Bet B2sont diagonalisables. Comme ker Bker B2on a ker B= ker B2et par
symétrie on a ker C= ker C2et comme B2=C2on a finalement ker B= ker C.
Conclusion : Pour toute valeur propre λde B(donc de C) on a : Eλ(B) = Eλ(C).
On conclut que B=C:
En effet : si µ1,··· , µssont les valeurs propres communes de Bet Cdeux à deux
distinctes alors :
E=s
i=1 Eµi
Soit alors XE=Mn,1(R). Alors
X=
s
X
i=1
Xi
avec
XiEµi
pour tout i∈ {1,··· , s}. On a :
BX =
s
X
i=1
BXi=
s
X
i=1
µiXi
et
CX =
s
X
i=1
CXi=
s
X
i=1
µiXi
Donc BX =CX pour tout XEet par suite : B=C.
Definition 1. Soit Aune matrice symétrique positive. L’unique matrice symétrique
positive Btel que B2=As’appelle la racine carrée de A
4 Décomposition polaire
4.1 Matrice inversible
Soit AGLn(R)alors As’écrit de façon unique A=SU avec Ssymétrique positive
et Uorthogonale. En effet AtAest une matrice symétrique définie positive elle admet
une racine carrée Squi est définie donc inversible Posons U=S1Aalors
tUU =tAtS1S1A=tA(S2)1A=tA(AtA)1A=In
Unicité : Si SU =S0U0avec les S, S0symétriques définies positives et Uet U0ortho-
gonales alors on a S2=S02=AtA, donc par unicité de la racines carrée d’une matrice
symétrique positive on a S=S0et par suite U=U0.
4
4.2 Matrice quelconque
Soit Aune matrice carrée réelle quelconque. On sait que GLn(R)est dense dans Mn(R),
donc il existe une suite (An)de matrices inversibles tel que AnA. Or par ce qui pré-
cède An=SnUnSnsymétrique définie positive et Unorthogonale. Par compacité
du groupe orthogonal il existe une extraction ϕtel que la suite Uϕ(n)converge vers U
matrice orthogonale. Alors Sϕ(n)=AtUϕ(n)converge vers la matrice S=AU par conti-
nuité du produit matriciel. On va montrer que Sest symétrique positive. Comme Sϕ(n)
est symétrique et par continuité de la transposition des matrices on a Sest symétrique
et comme Sϕ(n)est positive on a hSϕ(n)X, Xi ≥ 0pour tout X∈ Mn(R)donc par
continuité du produit scalaire on a hSX, Xi ≥ 0d’où Sest positive et finalement on a
A=SU avec Ssymétrique positive et Uorthogonale.
On n’a pas l’unicité forcément dans le cas général.
4.3 Remarque
Si on note S++(n)l’ensemble des matrices carrées réelles définies positives et O(n)celui
des matrices orthogonales réelles, on exprime ce qui précède en disant que l’application :
Φ : S++(n)×O(n)GLn(R)
(S, U)7→ SU
est bijective . Remarquons que si on note Mla racine carrée d’une matrice carrée
symétrique positive Malors pour tout AGLn(R)on a :
Φ1(A) = (AtA, (AtA)1A)
5 Décomposition polaire dans le cas complexe
5.1 Matrices hermitiennes
Soit A∈ Mn(C). La matrice A=tA, transposée de la matrice conjuguée de As’ap-
pelle la matrice adjointe de A; Si A=Aon dit que Aest hermitienne. Si la matrice
Aest réelle alors Aest la transposée de Aet Aest hermitienne si et seulement si A
est symétrique.
5.2 Matrice unitaire
On appelle matrice unitaire dans Mn(C)toute matrice Utel que Uest inversible et
U1=U.
On démontre sans difficulté que Uest hermitienne si et seulement si l’une des assertions
suivantes est vraie :
(i) UU=In
(ii) UU=In
(iii) Les colonnes de Uforment une base orthonormée dans l’espace hermitien Mn,1(C)
(iv) Les lignes de Uforment une base orthonormée dans l’espace hermitien M1,n(C)
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