renouvellement des problématiques de l’histoire des idées. On retiendra cependant tout
particulièrement les différents textes qui traitent de l’idéologie national-socialiste dans la mesure où,
contrairement à la pensée de Marx et de ses épigones, celle-ci n’a pas longtemps pas fait l’objet
d’études suffisamment attentives de la part de chercheurs qui sous-estimaient son caractère de
système de valeurs cohérent, quoique criminel et radicalement contraire à la modernité démocratique
– les réflexions de Rolf Zimmermann et de Wolfgang Bialas sur la normativité nazie sont à ce titre
remarquablement éclairantes. L’on sait également gré à nombre des contributeurs d’avoir
véritablement tenté l’exercice d’analyser les interactions entre les deux systèmes politiques étudiés et
de les comparer, en tentant de formuler des hypothèses d’une portée générale – tâche qui est loin
d’être aisée compte-tenu de la spécialisation et de la segmentation disciplinaire de la recherche. Si
cette démarche ne se voit pas partout accorder la même attention, l’écueil principal auquel se heurtent
nombre de volumes collectifs aux ambitions comparatistes, qui s’avèrent n’être que la juxtaposition
d’études de cas séparées, est néanmoins le plus souvent évité, ce qui ne peut que renforcer l’intérêt
scientifique du présent recueil.
Cependant, l’ouvrage n’est pas sans présenter quelques défauts importants. Le choix des
thématiques abordées apparaît ainsi critiquable. De fait, les deux dernières contributions – si elles
présentent, en elles-mêmes, un intérêt certain – n’apportent guère d’éclairages sur la problématique
du rapport entre idéologie et crimes, pourtant au cœur du volume. Il paraît a contrario regrettable que
d’autres pistes explorées par la recherche et qui auraient pu s’avérer fructueuses pour la réflexion sur
ce thème – ainsi par exemple la question de l’endoctrinement idéologique de la grande masse des
exécutants des régimes totalitaires et des bourreaux en charge de la mise en œuvre de leurs crimes
(fonctionnaires, policiers, soldats)1 – n’aient pas été exploitées.
L’on ne peut par ailleurs que déplorer le peu de nuance dont font preuve les différents contributeurs
dans l’usage du paradigme totalitaire. L’on conçoit sans difficulté que les auteurs puissent juger celui-
ci éclairant. L’on ne peut en revanche qu’être étonné qu’il soit utilisé tout au long de l’ouvrage sans
qu’aucune place ou presque ne soit faite au débat qu’il continue de susciter dans la recherche
internationale et aux réserves que nombre d’auteurs, notamment parmi les historiens, ont émis et
1 Pour ne citer que quelques-unes des principales contributions récentes à la recherche sur ce sujet dans le
champ de l’historiographie du nazisme: Jürgen Matthäus et al., Ausbildungsziel Judenmord? »Weltanschauliche
Erziehung« von SS, Polizei und Waffen-SS im Rahmen der »Endlösung«, Francfort/Main 2003; Phillip
Wegehaupt, »Wir grüssen den Hass!«. Die ideologische Schulung und Ausrichtung der NSDAP-Funktionäre im
Dritten Reich, Berlin 2012; Hans-Christian Harten, Himmlers Lehrer. Die Weltanschauliche Schulung in der SS
1933–1945, Paderborn, Munich, Vienne et al. 2014; Alexander Hoerkens, Unter Nazis? Die NS-Ideologie in den
abgehörten Gesprächen deutscher Kriegsgefangener in England 1939–1945, Berlin 2014. La question de
l’éducation politique et de la transmission de l’idéologie aux masses au sein des régimes communistes a fait
également l’objet de travaux particulièrement fructueux aux cours des dernières années – bien que ceux-ci soient
moins directement centrés sur les acteurs des politiques criminelles. Cf. entre autres: Emmanuel Droit, Vers un
homme nouveau? L’éducation socialiste en RDA, Rennes 2009; David Brandenberger, Propaganda State in
Crisis. Soviet Ideology, Indoctrination, and Terror under Stalin, 1927–1941, New Haven, Londres 2011; Alexandre
Sumpf, Bolcheviks en campagne. Paysans et éducation politique dans la Russie des années 1920, Paris 2011.
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