Troisième Reich est passionnante. Se basant sur un corpus restreint d’ordonnances promulguées
sous le IIIe Reich, Fetthauer montre concrètement comment l’exclusion, principalement des musiciens
juifs, s’est exercée, allant jusqu’à une forme de criminalisation avec des conséquences souvent
dramatiques, dans un climat de peur permanente et de dénonciations.
Andreas Domann livre un portrait édifiant de Paul Graener, vice-président de la RMK et dirigeant de
sa section des compositeurs de 1935 à 1941. Membre de la »Ligue de combat pour la culture
allemande« (Kampfbund für deutsche Kultur) d’Alfred Rosenberg dès 1930, Graener figure parmi les
personnalités culturelles sur lesquelles le régime peut compter. Malgré cela, Graener peinera à
imposer sa propre vision culturelle et sera davantage un »homme de main« de Goebbels. Son
sectarisme tout autant que sa cupidité mèneront à son remplacement par le compositeur Werner Egk.
Cette contribution révèle en filigrane le fonctionnement »polycratique« du régime national-socialiste,
où le pouvoir est partagé par de multiples interlocuteurs, au premier plan desquels Joseph Goebbels.
La personnalité et le parcours de Werner Egk sont au centre de la contribution de Friedrich Geiger,
qui livre un éclairage supplémentaire et indispensable sur les luttes au sein de la RMK. Alors que
Goebbels se lasse des prises de position conservatrices de Richard Strauss et de Paul Graener, Egk
saura faire figure de modéré, ce qui lui vaudra sa nomination à la tête de la section des compositeurs
de la RMK en 1941. Il y militera pour la création contemporaine et contre l’amateurisme ambiant.
Geiger aborde également les déboires d’Egk dans son entreprise de »dénazification« après la guerre.
Martin Thrun brosse, quant à lui, un portrait détaillé de Heinz Drewes, dirigeant de la section musique
au sein du ministère de la Propagande de 1937 à 1944. Cette section, aujourd’hui méconnue, a été
créée par Goebbels pour concurrencer la RMK. Son dirigeant, Heinz Drewes, décrit comme un
»fanatique«, exercera en définitive le contrôle véritable sur la création artistique sous le Troisième
Reich. Une fois encore, il est passionnant de constater le fonctionnement pluricéphale du régime en
matière de culture. Thrun fournit en outre des annexes très enrichissantes concernant les
collaborateurs de cette section. La toute-puissance de Goebbels sur la vie musicale est perceptible
dans la création elle-même.
Jürgen May nous en livre un exemple parlant avec un Lied de Richard Strauss aujourd’hui inconnu,
»Das Bächlein«, dédié à Goebbels et composé en 1933 en remerciement pour sa nomination à la
RMK. L’analyse musicale de May montre les influences schubertiennes et l’omniprésence de la figure
tutélaire de Goethe. En retraçant le parcours des créations du Lied de 1933 à 1942, May apporte un
éclairage tout à fait captivant sur les relations entre Strauss et Goebbels et complète en cela la
contribution de Gerhard Splitt. Susanne Schaal-Gotthardt s’intéresse pour sa part à un poème inédit
de Paul Hindemith, intitulé »Die Geflügelzucht« (»L’élevage de volailles«). Écrit en 1935 et envoyé à
son éditeur Willy Strecker, ce poème acerbe est inspiré par les personnages de la RMK. En nous
livrant ce poème – reproduit intégralement en annexe –, Schaal-Gotthardt montre la clairvoyance du
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