Réforme de l`assurance maladie

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DOSSIER : LA RÉFORME DE L’ASSURANCE MALADIE
La loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie a été publiée au
Journal officiel du 17 août 2004 après validation par le Conseil constitutionnel.
Intervenant dans un contexte financier extrêmement dégradé, elle procède à une
réforme en profondeur de l’assurance maladie. Ce dossier se propose, dans un premier
temps, d’examiner les dispositions du titre I de la loi qui traitent de l’amélioration de
l’offre de soins. La seconde partie aborde les mesures relatives à la nouvelle
gouvernance de l’assurance maladie ainsi que celles touchant à son financement (titre II
et III de la loi).
La loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie s’est inscrite dans un contexte financier
extrêmement dégradé. Le déficit du compte de la Caisse nationale de l’assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAMTS) s’élevait à 11,9 milliards d’euros fin 2004, soit environ 10%
des dépenses de la branche. La CNAMTS n’a jamais connu de situation d’équilibre au cours
des quinze dernières années et le déficit s’est accru très rapidement au cours de la dernière
période.
La loi du 13 août 2004 a été précédée d’un travail de diagnostic qui a été confié, en octobre
2003, au Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie. Celui-ci a remis un rapport
dégageant un diagnostic largement partagé. Il préconisait essentiellement la conjugaison de
trois actions pour faire face à la gravité de la situation financière et aux perspectives de
croissance des dépenses : améliorer le fonctionnement du système de soins et du système de
protection sociale, ajuster les conditions de prise en charge et agir sur les recettes. La loi du 13
août 2004 s’inspire fortement de ces propositions.
L’impact financier de la réforme est estimé par le gouvernement à 15 milliards d’euros à
l’horizon 2007, dont 10 milliards d’économies sur les dépenses et 5 milliards de recettes
supplémentaires. La réforme comprend à la fois des mesures de rétablissement financier, mais
aussi des mesures dites « structurelles » dont l’objet est de modifier l’organisation du système
de soins et le comportement des acteurs dans le sens d’une prise en charge de meilleure
qualité et plus économe des deniers publics. Pour atteindre cet objectif, la réforme se donne
pour priorité de mieux responsabiliser l’ensemble des acteurs : État, gestionnaires de
l'assurance maladie, professionnels de santé et patients.
I - Amélioration de l'offre de soins et maîtrise médicalisée des dépenses de santé
A - Favoriser une coordination des soins effective
Le dossier médical personnel,
L'outil mis en avant pour assurer et symboliser cette coordination est le dossier médical
personnel (article 3 de la loi), dont chaque bénéficiaire de l’assurance maladie devra disposer
à compter de 2007. Il devrait permettre de suivre le cheminement du malade dans le système
de soins. La loi offre des garanties renforcées afin que le secret de la vie privée des patients
soit strictement respecté. La consultation du dossier médical en dehors de la prise en charge
2
médicale du patient par un professionnel de santé en ville ou dans un établissement de santé et
ce, même avec son consentement, est interdite1. Les conditions d’accès des professionnels de
santé aux informations de l’assurance maladie sur les soins dont ont bénéficié leurs patients
(art. 21) seront précisées par un décret en Conseil d’État (non publié à ce jour) pris après avis
de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Dans l’immédiat, un « groupement de préfiguration du dossier médical personnel » est chargé
de la préparation des dispositions permettant à l’organisme gestionnaire du dossier médical
personnel d’être opérationnel et d’en assurer la mise en œuvre technique. Il a été constitué
sous la forme d’un groupement d’intérêt public dont la convention constitutive a été
approuvée par arrêté des ministres chargés de la santé et du budget en date du 11 avril 2005.
L’État, la CNAMTS et la Caisse des dépôts et consignations sont membres de ce groupement
d’intérêt public.
L’organisation d’un parcours de soins coordonnés,
Le développement de parcours de soins coordonnés autour d'un médecin traitant ou dans le
cadre des réseaux de soins constitue un deuxième moyen de favoriser la coordination (articles
7 et 8). L’entrée en vigueur de ce dispositif devrait intervenir le 1er juillet 2005 pour tous les
assurés de plus de seize ans.
Le médecin traitant aura pour mission d’orienter le patient dans le système de soins et,
bientôt, de gérer son dossier médical. Il prescrira, en tant que de besoin, la consultation d’un
autre médecin (généraliste ou spécialiste). Toutefois, l’accès à certains spécialistes ne
nécessitera pas de prescription du médecin traitant. Ils seront « d’accès direct spécifique ». Il
s’agit des gynécologues, psychiatres et neuropsychiatres. Les patients en affections de longue
durée (ALD) pourront accéder directement à leurs spécialistes sans prescription médicale
préalable lorsqu’ils s’inscriront dans le cadre de leur protocole de soins. Enfin, certaines
situations dispensent d’une consultation du médecin traitant : l’urgence médicale ou le
déplacement hors du lieu de résidence. Les textes réglementaires en préparation prévoiront
d’autres exceptions (soins itératifs, séquences de soins…).
Lorsque le patient n’aura pas recours au médecin traitant ou qu’il refusera l’accès à son
dossier au professionnel qu’il consulte, la loi prévoit que son ticket modérateur pourra être
majoré. Les conditions de cette majoration seront définies par plusieurs textes non publiés à
ce jour. La convention médicale approuvée par un arrêté du 3 février 2005 (Journal officiel du
11 février 2005) autorise, par ailleurs, les spécialistes de secteur I à pratiquer un dépassement
d'honoraires lorsqu'ils sont consultés par des patients sans prescription de leur médecin
traitant. Pour les consultations externes hospitalières, une majoration non remboursable est
applicable en cas de non-respect du parcours de soins.
Le modèle du formulaire « déclaration de choix du médecin traitant » a été fixé par un arrêté
du 20 décembre 2004. Chaque foyer (une par personne et une par enfant de plus de seize ans)
a dû recevoir à ce jour ce formulaire de choix à retourner à sa caisse d’affiliation. Ce
formulaire est accessible sur le site internet www.ameli.fr, mais on peut également se le
procurer auprès de son médecin ou de son pharmacien.
Une meilleure définition des affections de longue durée (ALD),
1
Ce qui interdit, par exemple, l’accès du médecin du travail ou de l’assureur au dossier médical du patient ;
3
Le dispositif de prise en charge coordonné dans le cadre des affections de longue durée
(ALD), déjà réformé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004,
est encore approfondi, le rôle du protocole de soins étant accru (article 6). Les informations
contenues dans ce protocole sont complétées : devront y figurer les éléments de diagnostic de
nature à justifier l’admission en ALD, le projet thérapeutique ainsi que la durée prévisible des
soins et les obligations de l’assuré en matière d’hygiène de vie par exemple (régime
alimentaire compatible avec l’état de santé, pratique d’un sport…).
Le champ du protocole de soins est élargi à l’ensemble des situations mentionnées à l’article
L 324-1 du code de la sécurité sociale, c’est-à-dire ALD et soins continus ou interruption de
travail d’une durée supérieure à six mois. Le protocole est signé par le patient ou son
représentant légal. Pour pouvoir bénéficier de l’exonération du ticket modérateur, le patient
devra communiquer son protocole à tout médecin.
Le protocole de soins est établi sur le fondement de recommandations de la Haute Autorité de
santé, mais est propre à chaque patient.
Une meilleure coordination ville-hôpital ,
La loi promeut également une coordination ville/hôpital à travers la création de missions
régionales de santé (MRS), regroupant les agences régionales de l’hospitalisation (ARH) et
les unions régionales de caisses d’assurance maladie (URCAM) chargées de l’organisation de
l’offre de soins régionales et de la coordination des deux secteurs du système de soins (article
67). Ainsi, les missions régionales de santé (MRS) devront définir les zones rurales ou
urbaines qui peuvent justifier l’institution de dispositifs d’aide visant à favoriser l’installation
des professionnels de santé ou des centres de santé, proposer des dispositifs de permanence
des soins et définir des programmes d’action dont elles assureront la conduite et le suivi,
notamment en matière de développement de réseaux.
Le décret d’application de cet article (n° 2004-1327 du 2 décembre 2004) précise que les
modalités d’organisation et de fonctionnement de la mission sont fixées par une convention.
En outre, la loi ayant prévu une direction alternée de la mission, ce texte prévoit que le
premier directeur de chaque MRS sera nommé sur décision des ministres chargés de la santé
et de la sécurité sociale après avis du directeur général de l’UNCAM. Dans chaque région, les
directeurs ont été désignés. Au-delà de ce cadre, la loi prévoit l’expérimentation d’agences
régionales de santé intégrant complètement ARH et URCAM dans une structure unique
(article 68).
Des mesures d’aide à l’accès aux soins
L’article 56 prévoit des dispositions relatives à l’aide à l’acquisition d’une assurance
complémentaire. Ce dispositif, qui s’adresse aux personnes dont les ressources sont comprises
entre le plafond de la couverture médicale universelle complémentaire (CMUC) et ce plafond
majoré de 15 %, crée une déduction du montant de la prime annuelle versée par les
souscripteurs d’un contrat d’assurance complémentaire. Le montant de cette déduction s’élève
de 75 à 250 euros par an en fonction de l’âge du bénéficiaire. Le décret n° 2004-1450 du 23
décembre 2004 relatif au crédit d’impôt au titre des contrats d’assurance complémentaire de
santé précise qu’il revient à la caisse primaire d’assurance maladie d’examiner le droit au
4
crédit d’impôt et de délivrer à la personne concernée une attestation dont le contenu est fixé
par arrêté du 23 décembre 2004.
B - Généralisation des démarches de qualité
La Haute autorité de santé (HAS)
La loi du 13 août 2004 crée une Haute autorité de santé (article 34), autorité scientifique
indépendante, dirigée par un collège dont les membres sont désignés par les présidents de la
République, de l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique et social. Un
décret du 20 décembre 2004 a procédé à la nomination des membres de ce collège ainsi que
de son président. La HAS se voit confier l'évaluation scientifique des pratiques médicales et
des processus diagnostiques et thérapeutiques. Elle reprend les dispositifs d’évaluation
existants (la commission de la transparence sur les médicaments et le comité économique des
produits de santé pour les dispositifs médicaux) et devra développer une démarche similaire
dans les autres domaines des soins (notamment pour les actes et les ALD). Elle élaborera les
recommandations de bonne pratique et prendra en charge les missions d’évaluation et
d’accréditation de l’actuelle ANAES (agence nationale d’accréditation et d’évaluation en
santé) qui est supprimée par la loi. Ses compétences relèvent exclusivement du domaine de
l’avis et de la recommandation.
Tous les textes nécessaires à la mise en place de la HAS dont trois en Conseil d’État2, ont été
publiés (art. 35 et 36). Le décret n° 2004-1139, paru dès le 27 octobre 2004, définit
précisément ses missions et son organisation. Cette instance d’expertise indépendante a été
installée le 22 décembre 2004. Les moyens dont elle dispose sont par ailleurs à la hauteur de
ses missions, puisque son budget s’élève à 59 millions d’euros pour 2005.
Un nouveau dispositif d’accréditation des professionnels de santé et des équipes
médicales
Tout médecin, libéral ou salarié, doit s’engager dans une démarche d’évaluation individuelle
de sa pratique professionnelle, éventuellement dans le cadre de groupes de pairs, sous peine
de sanctions ordinales. La HAS est responsable de l'organisation de cette évaluation (article
14). Le décret n° 2005-346 du 14 avril 2005 précise cette obligation. L'évaluation sera
réalisée par des médecins habilités ou par des organismes agréés par la HAS.
L’article 16 crée un dispositif d’accréditation des médecins ou équipes médicales d’une même
spécialité exerçant en établissement de santé. La mise en place de ce dispositif nécessite la
publication d’un décret qui devrait intervenir prochainement. Ce décret fixera également les
spécialités et les conditions d’exercice des médecins, soumis à l’obligation d’assurance en
application de l’article L. 1442-2 du code de la santé publique3 et qui ont été accrédités ou
sont engagés dans une procédure de renouvellement de leur accréditation, qui pourront
bénéficier d’une aide à la souscription d’une assurance. Ce dispositif d’aide, à la charge de la
CNAMTS, permettra notamment de contribuer à résoudre les problèmes posés par la hausse
des tarifs d’assurance en responsabilité civile professionnelle.
Diverses mesures visant à garantir la qualité des soins,
2
Décret n°2004-1139 du 27 octobre 2005, Décret n°2004-1398 du 23 décembre 2004 et décret n°2004-1419 du
23 décembre 2004.
3
Obligation instaurée par l’article 98 de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002
5
La promotion pharmaceutique est mieux encadrée par l’instauration du principe d’une charte
de la visite médicale que les laboratoires devront respecter (article 31). Cette charte a été
signée entre les entreprises du médicament (LEEM) et le comité économique des produits de
santé (CEPS) le 22 décembre 2004 et elle vise à mieux encadrer les pratiques commerciales et
promotionnelles qui pourraient nuire à la qualité des soins.
La loi étend à l’hôpital le principe des accords de bon usage des soins déjà en place pour la
médecine de ville (article 13). Le décret d’application de cet article (n° 2004-1399 du 23
décembre 2004) instaure de nouveaux instruments contractuels d'incitation au bon usage des
soins, d'amélioration des pratiques hospitalières, notamment médicales dans un souci
d'optimisation médicalisée des dépenses des établissements de santé. Il organise ce dispositif
contractuel par le biais d'accords cadres nationaux tripartites signés entre l'État, l'union
nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) et les fédérations nationales
représentatives des établissements de santé, d'accords locaux adaptant les conditions de mise
en œuvre des accords cadres et en fixant les modalités de concertation avec les professionnels
de santé et les conditions et la périodicité d'évaluation de ces accords.
C - Maîtrise médicalisée des dépenses de santé
La responsabilisation du patient,
La loi du 13 août 2004 (article 20) instaure une contribution forfaitaire sur les actes médicaux
et les actes de biologie qui est fixée à 1 euro dans la limite d’un plafond annuel de 50 euros
(décret n° 2004-1453 du 23 décembre 2004) afin de responsabiliser les patients dans leur
recours au système de soins. Seuls les enfants, les bénéficiaires de la CMU et les femmes
enceintes sont exonérés de cette contribution. Son rendement est estimé à 640 millions
d’euros.
Une des novations de la loi réside dans la volonté affichée que les incitations financières
créées pour orienter le parcours dans le système de soins (majoration de ticket modérateur et
contribution forfaitaire) ne soient pas neutralisées par les couvertures complémentaires. La loi
n’interdit pas l’intervention des assureurs complémentaires. Cependant seuls les contrats qui
ne prévoiront pas cette couverture pourront bénéficier des avantages sociaux et fiscaux
accordés aux contrats d’assurance maladie complémentaire (article 57).
Un renforcement des contrôles et de la lutte contre les fraudes,
L’article 19 précise que le respect des bonnes pratiques et référentiels médicaux devra être
contrôlé par l’assurance maladie dès le remboursement, les articles 20 et 21 qu’un contrôle
rigoureux des droits ouverts et de la carte Vitale sera mis en place avec notamment
l’apposition d’une photographie sur la carte lors du prochain renouvellement qui devrait avoir
lieu à partir de mi-2006. Le décret en Conseil d’État correspondant doit être publié
prochainement. Pour l’heure, les services administratifs peuvent demander à l’assuré de
produire un titre d’identité comportant une photographie.
Par ailleurs, le contrôle des prescripteurs et bénéficiaires d’indemnités journalières
est renforcé et mieux ciblé (articles 24, 25, 26, 27 et 28) :
- l’article 27 renforce les obligations de l’assuré notamment sur le respect des
horaires de sortie et sur l’envoi des avis d’arrêts de travail qui ne doit pas être tardif. Le décret
n° 2004-1454 du 23 décembre 2004 précise le montant de la sanction lorsque l'assuré envoie
6
deux fois de suite de façon tardive son arrêt de travail. De même, la loi rappelle que les
assurés ont l’obligation de se soumettre aux contrôles du service médical. En cas de nonrespect de ces dispositions, la caisse pourra retenir, à titre de pénalité, tout ou partie des
indemnités journalières dues.
- l’article 28 précise qu’en cas de prolongation d'un arrêt de travail, l'indemnisation
n'est maintenue que si la prolongation est prescrite par le médecin prescripteur initial ou le
médecin traitant. Des dérogations à ce principe sont prévues : médecin remplaçant du
médecin prescripteur initial, arrêt de travail initial prescrit à l'issue d'une hospitalisation.
La loi prévoit également un contrôle accru des médecins grands prescripteurs d’arrêt
de travail, qui peuvent être placés sous le régime d’une procédure d’entente préalable en
application de l’article 25.
L’article 23 met en place un dispositif simple de pénalités financières utilisable à
l’encontre des professionnels de santé, établissements de santé, employeurs et assurés pour
toute inobservation des règles du code de la sécurité sociale ayant abouti à une demande de
remboursement ou de prise en charge ou à un remboursement ou une prise en charge indus.
Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits dans la limite de deux fois
le plafond mensuel de la sécurité sociale. Un décret en Conseil d’État précisera les modalités
de mise en œuvre de cette pénalité et notamment le barème.
Les conditions de mise en œuvre des sanctions applicables aux établissements de santé en cas
de non-respect des règles de tarification (article 46) doivent également être définies par un
décret en Conseil d’État.
7
II.- la nouvelle « gouvernance » de l’assurance maladie (titre II de
la loi) :
Le second volet de la réforme concerne le pilotage de l’assurance maladie. La loi
met en place une délégation de gestion à l'assurance maladie renforcée. Le rôle des
complémentaires est institutionnalisé notamment avec la création de l'union nationale des
organismes d'assurance maladie complémentaire (UNOC) et les instances de l'assurance
maladie sont renouvelées avec un recentrage du conseil, dans lequel le MEDEF rejoint les
autres partenaires sociaux, autour de la stratégie et des orientations et un renforcement des
pouvoirs du directeur général de la CNAMTS dans la mise en œuvre et dans le pilotage du
réseau.Par ailleurs, un union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM),
regroupant les trois principaux régimes, est créée pour gérer les relations conventionnelles
avec les professionnels de santé.
A : Une délégation plus importante à l’assurance maladie :
Dans son domaine principal de compétence, le secteur ambulatoire, les compétences
de l’assurance maladie sont accrues.
Le champ de la convention est élargi, notamment à la définition des avantages
sociaux des professionnels de santé (articles 48 et 49). Ces deux articles ont été mis en
œuvre par la publication de deux décrets n°2004-1318 et n°2004-1319 du 1er décembre 2004
qui d’une part, rénove la procédure conventionnelle, précise les modalités du droit
d'opposition des syndicats majoritaires et celles de la procédure d'arbitrage en cas d'échec
des négociations entre l’UNCAM et les syndicats représentatifs et d’autre part, prévoit le
basculement progressif du dispositif de prise en charge des avantages sociaux des
professions de santé par l'assurance maladie aujourd'hui précisé dans les conventions par
professions de santé. En outre, l’assurance maladie peut désormais signer des conventions
interprofessionnelles (article 11).
L’assurance maladie se voit reconnaître la responsabilité principale de la gestion de
la nomenclature des actes des professionnels de santé (article 42) dans le cadre des
évaluation scientifiques de la haute autorité. Ainsi, les conditions d’inscription d’un acte ou
d’une prestation, leur inscription et leur radiation sont décidées par l’UNCAM, après avis de
la HAS et de l’UNOC. Le décret n° 2004-1368 du 16 décembre 2004 précise les modalités
d'exercice de la compétence confiée à l'UNCAM par la loi. Les actes ou prestations sont
inscrits sur la liste au vu de leur service attendu qui prend en compte l’intérêt diagnostique
ou thérapeutique de cet acte ou de cette prestation et son intérêt de santé publique. Les
ministres compétents peuvent s'opposer aux décisions de l'UNCAM dans un délai de
quarante cinq jours: Cette opposition est motivée et notifiée. Passé ce délai, la décision est
réputée approuvée. Le ministre chargé de la santé garde tout de même la possibilité de
procéder d’office à l’inscription ou à la radiation d’un acte ou d’une prestation pour des
raisons de santé publique.
Ses compétences sont accrues dans les autres domaines. Elle sera ainsi associée à la
définition de la politique hospitalière dans le cadre d’un conseil de l’hospitalisation (article
45) et occupera une place majeure dans le comité économique des produits de santé (article
43). Le conseil de l’hospitalisation, dont la composition, les missions et les modalités de
fonctionnement ont été précisées par un arrêté du 8 octobre 2004, a pour rôle de contribuer à
l’élaboration de la politique de financement des établissements de santé ainsi qu’à la
détermination et au suivi de la réalisation des objectifs de dépenses d’assurance maladie
8
relatives aux frais d’hospitalisation. Ce conseil est composé de représentants de la DHOS, de
la DSS, de la DGS, du Directeur général de la CNAMTS, de l’UNCAM et d’une personne
qualifiée. Le décret n° 2004-1225 du 17 novembre 2004 réorganise le CEPS et opère les
transferts de compétence décidés par la loi assurance maladie du 13 août 2004 concernant la
fixation des prix et tarifs par décision du CEPS en cas d’échec des conventions, et non plus
par arrêté. Siègeront désormais au CEPS trois représentants des organismes nationaux
d'assurance maladie dont l'un est désigné par le directeur général de la Caisse nationale
d'assurance maladie des travailleurs salariés et l'autre est désigné conjointement par le
directeur de la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés
des professions non agricoles et le directeur de la Caisse centrale de la mutualité sociale
agricole. Siègera également un représentant désigné par le conseil de l'Union nationale des
organismes d'assurance maladie complémentaire.
La composition du Comité économique des produits de santé (CEPS) a été modifiée
par le décret n° 2004-1225 du 17 novembre 2004 et ses nouveaux membres nommés par un
arrêté du 1er décembre 2004 afin de renforcer la présence de l’assurance maladie et des
organismes d’assurance maladie complémentaires (art. 43).
L’arrêté du 8 octobre 2004 a précisé les missions et la composition du conseil de
l’hospitalisation, chargé de contribuer à l’élaboration des décisions publiques relatives au
financement des établissements de santé, ce qui permettra d’associer l’assurance maladie à la
politique hospitalière (art. 45).
Enfin l’assurance maladie se voit reconnaître la responsabilité de fixer les différents
niveaux de ticket modérateur dans le cadre des marges de manœuvres définies par le pouvoir
réglementaire (article 41). Le décret n° 2004-1490 du 30 décembre 2004 donne délégation à
l'UNCAM pour fixer le taux de participation de l'assuré applicable aux actes pris en charge
par l'assurance maladie dans la limite d’une fourchette. Le décret fixe aussi la procédure
d'élaboration de la décision de l'UNCAM. Jusqu'à la décision UNCAM précisant le taux
qu’elle retient à l’intérieur de la fourchette, les taux antérieurs s'appliquent.
Ces outils nouveaux doivent permettre à l’assurance maladie d’être davantage en
mesure que par le passé de faire respecter les objectifs de dépenses fixés par le Parlement.
En outre, la loi renforce la responsabilisation de l’assurance maladie en l’associant
davantage à la détermination des objectifs. Les caisses nationales seront ainsi amenées à
présenter chaque année des prévisions de dépenses et recettes et des propositions de mesures
en amont de la préparation par le gouvernement du projet de loi de financement de la
sécurité sociale (article 39). Parallèlement un comité d’alerte composé d’experts est chargé
d’évaluer les risques de dépassement de l’ONDAM et de les rendre publiques, appelant par
la même les mesures de redressement nécessaires (article 40). Le décret n°2004-1077 du 12
octobre 2004 fixe le seuil d’alerte de dépassement de l’ONDAM à 0,75%.
B : Des instances de direction renouvelées : l’Union nationale des caisses
d’assurance maladie (UNCAM), la rénovation de la Caisse nationale d’assurance maladie
des travailleurs salariés et la réorganisation du réseau de l’assurance maladie.
Les principaux pouvoirs de la délégation (convention, ticket modérateur,
nomenclature) sont confiés à une nouvelle structure, l’UNCAM (article 55) formée des
caisses des trois principaux régimes (Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs
salariés - CNAMTS, caisse centrale de la mutualité sociale agricole - MSA, caisse nationale
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d'assurance maladie des professions indépendantes - CANAM). Le décret n° 2004-1075 du
12 octobre 2004 a précisé les conditions de son fonctionnement. Le conseil de l’UNCAM est
formé des représentants des conseils des trois caisses nationales, il a été officiellement
installé le 9 novembre 2004. Son directeur général, qui est également le directeur général de
la CNAMTS, a été nommé le 20 novembre 2004. Il a mandat des directeurs des deux autres
caisses nationales pour négocier les conventions, arrêter les décisions en matières de
nomenclature et proposer au conseil les taux de ticket modérateur. Il signera par ailleurs des
contrats de gestion avec les unions régionales de caisses d’assurance maladie (URCAM)
dont le rôle en matière de gestion du risque au niveau régional sont renforcées par la loi.
La rénovation de l’organisation de la Caisse nationale d’assurance maladie des
travailleurs salariés (CNAMTS) et des caisses primaires d’assurance maladie (article 53),
marque le retour des représentants des employeurs au sein du conseil, organe qu’ils avaient
quitté à l’automne 2001. Un arrêté du 26 octobre 2004 nomme les membres du conseil de la
CNAMTS.
L’article 53 et les décrets n° 2004-1075 du 12 octobre 2004 et n° 2004-1282 du 26
novembre 2004 marque le recentrage du conseil, qui n’est plus d’administration, sur des
activités d’orientation et l’autorité accrue du directeur général de la CNAMTS qui met en
œuvre les orientations fixées par le Conseil, dirige l’établissement et a autorité sur le réseau
des caisses régionales et locales. Les modes de nomination et de cessation de fonctions des
directeurs et agent comptable des caisses locales sont modifiés puisque désormais il
appartient au directeur général, selon les cas, de la CNAMTS (pour les CPAM) ou de
l’UNCAM (pour les URCAM) de nommer le directeur ou agent comptable et de mettre fin à
ses fonctions sous les garanties, notamment de reclassement, prévues par la convention
collective (art. 58 et 66). Le décret du 12 octobre 2004 précise que jusqu’à son
reclassement dans un organisme de sécurité sociale, l’intéressé est rattaché pour sa gestion
pour une période maximale de six mois à la CNAMTS et précise que la décision de cessation
de fonctions ne vaut pas licenciement. Il manque au dispositif la publication du décret en
Conseil d’Etat déterminant les conditions d’établissement des listes d’aptitude permettant de
nommer des praticiens conseils aux postes de directeurs des unions régionales de caisses
d’assurance maladie.
C : Les nouveaux partenaires de l’assurance maladie : l’Union nationale des
professionnels de santé (UNPS), l’Union nationale des organismes d’assurance maladie
complémentaire (UNOC), le CEPS et Les instances de coordination entre médecine de
ville et hôpital.
L’UNCAM pourra développer un partenariat avec une nouvelle institution, l’union
national des organismes d’assurance maladie complémentaire (UNOC) regroupant les
organismes de couverture complémentaire de tout statut , mutuelles, institutions de
prévoyance, compagnies d’assurance et régime d’Alsace Moselle (article 55). Si l’UNCAM
et les professionnels le souhaitent celle-ci pourra être associée aux conventions avec les
professionnels de santé. L’UNOC sera par ailleurs consultée sur un certain nombre de
décisions de l’UNCAM, notamment les choix de ticket modérateur. Le décret définissant
l'organisation et les modalités de fonctionnement de l'UNOC est le décret n° 2005-590 du 27
mai 2005. L'UNOC doit au moins comprendre l’organisme professionnel le plus
représentatif de chacune des catégories qui la constitue. Il appartient au Conseil d’exercer les
compétences conférées à l'UNOC par les dispositions législatives et réglementaires et
encadre les modalités selon lesquelles l’UNOC doit rendre ses avis. Enfin, le texte crée un
10
bureau au sein du conseil de l’UNOC mais précise que dans un certain nombre de matières
définies par les statuts, le bureau ne peut se prononcer en cas d’opposition d’un des trois
collèges composant ce dernier.
L’article 55 de la loi crée également l’Union nationale des professionnels de santé
(UNPS). Le décret relatif à sa composition précise que sur 46 membres, 14 sont des
organisations syndicales représentatives des médecins généralistes et spécialistes (décret n°
2004-1446 du 23 décembre 2004). Elle sera consultée sur un certain nombre de décision de
l’UNCAM et se substitue à l’actuel centre national des professions de santé pour négocier
avec l’UNCAM l’accord cadre interprofessionnel devant fixer un certain nombre de règles
communes à l’ensemble des professions conventionnées.
III. Les mesures relatives au financement de l’assurance maladie
(titre III de la loi) :
Le troisième volet de la réforme est constitué par les différentes mesures visant le
redressement financier de la branche maladie.
A : mesures de majoration des recettes.
L’abattement pour frais professionnel sur l’assiette des salariés soumise à CSG est
diminué de 5 à 3% soit un rendement estimé à 1 milliard d’euros. Le taux de la CSG
applicable aux pensions de retraite, aux pensions d'invalidité et aux allocations de préretraite
est relevé de 0,4 point, pour le porter à 6,6 %. Les allocations de chômage et les indemnités
journalières ne sont pas concernées par cette mesure. Parallèlement, le taux de la cotisation
d'assurance maladie, assise sur les pensions de retraite, les pensions d'invalidité et les
allocations de préretraite, due par les personnes non redevables de la CSG car non
domiciliées en France au sens fiscal, sera augmenté de 0,4 point par décret. Enfin le taux de
la CSG sur les revenus du patrimoine et sur les revenus de placement est relevé de 0,7 point
et le taux de la CSG sur les jeux de 2 points. Le rendement de l’ensemble des mesures sur la
CSG est estimé 2,3 milliards d'euros. La loi créé par ailleurs une contribution additionnelle à
la contribution sociale de solidarité des société assise de 0,03 point sur le chiffre d’affaire
pour un rendement de 780 millions d’euros. La taxe sur la promotion pharmaceutique est
également majorée et la taxe exceptionnelle sur le chiffre d’affaires des laboratoires
pharmaceutique est pérennisée (article 72, 73 et 74).
Les deux textes nécessaires à l’application de la participation forfaitaire (art. 20) au
1er janvier 2005 ont été publiés : le décret n° 2004-1490 du 30 décembre 2004, qui définit les
conditions et limites dans lesquelles son montant sera fixé par l’UNCAM, en précisant
notamment que celui-ci « ne peut excéder un euro », et le décret (n° 2004-1453) du 23
décembre 2004, qui détermine ses modalités de plafonnement annuel et journalier et son
niveau initial. A cet égard, il faut souligner le fait que ceux-ci sont conformes à la décision
du Conseil constitutionnel en date du 12 août 2004 (1).
L’arrêté du 27 décembre 2004 fixe les montants du forfait journalier hospitalier
prévu à l'article L. 174-4 du code de la sécurité sociale pour les années 2005, 2006 et 2007 :
cet arrêté prévoit l'augmentation de 1 euro par an pendant 3 ans du forfait journalier
(1) Le Conseil a en effet souligné que « le montant de cette participation devra être fixé à un niveau tel que ne
soient pas remises en cause les exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 »
11
hospitalier à compter 1er janvier 2005. Le forfait journalier passe donc à 14 euros et le forfait
journalier psychiatrique à 10 euros.
B : mesures relatives à la garantie des recettes de la sécurité sociale.
La loi souhaite clarifier les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.
Elle complète les dispositions de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, issu de la
loi du 25 juillet 1994 et qui a posé le principe de la compensation intégrale par le budget de
l'Etat des dispositifs d'exonération de cotisations sociales institués postérieurement à cette
date. Cette compensation s'appliquera désormais aux réductions de cotisations et
contributions de sécurité sociale, aux exonérations desdites contributions et aux réductions
ou abattements de l'assiette des cotisations et contributions. Un principe général de
compensation, intégrale et réciproque, de tout transfert de charges entre l'Etat et la sécurité
sociale est également posé. Par ailleurs il est prévu que le budget de l’Etat procèdera, à
hauteur de 1 milliard d'euros, à l'affectation à la CNAMTS d'une fraction supplémentaire du
droit de consommation sur les tabacs. Cette mesure permet de réaffecter à l'assurance
maladie une partie des recettes qui lui avaient été retirées au profit du fonds de financement
de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC) afin de financer les
allègements de cotisations sociales liées à la réduction du temps de travail (article 70). Ce
transfert a été concrétisé dans la LFSS pour 2005 (article 13).
Enfin parmi les autres disposition importantes de la loi figure :
-
la reprise par la CADES du déficit accumulé de 35 milliards d'euros fin 2004 ainsi que
des déficit prévisionnels pour 2005 et 2006. dans la limite de 15 milliards d'euros (article
76).
-
la création d’un crédit d’impôt au titre des couvertures complémentaires de santé (article
56) pour les personnes dont les ressources sont inférieur au seuil de la CMU majoré de
15%.
CONCLUSION
En l’espace de quelques mois, la plupart des textes d’application de la loi ont été
publiés. Une nouvelle convention médicale a été signée. Les structures et les institutions
nécessaires à la réforme ont été mises en place, il revient maintenant aux acteurs de les faire
vivre.
Conformément à l’article 38, une mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité
sociale a été créée, en décembre 2004, au sein de la commission des affaires culturelles,
familiales et sociales de l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, le Gouvernement s’est engagé1 à une évaluation périodique, présentée à
l’occasion de points d’étape semestriels, effectuée sur la base de 12 indicateurs déclinés en 8
thèmes couvrant l’ensemble des champs de la réforme. Ces indicateurs , en cours de mise en
œuvre, seront enrichis au fur et à mesure que l’intégralité des dispositifs de la réforme
s’appliqueront.
1
Voir communiqué de presse de X. BERTRAND du 6 avril 2005
12
Toutes ces mesures, prises pour moderniser la sécurité sociale, formeront avec la loi
organique relative au financement de la sécurité sociale dont le parlement achève
actuellement la discussion une architecture largement rénovée de notre système. La loi
organique permettra ainsi au Parlement qui vote les lois de financement de la sécurité sociale
d'être mieux informé sur les enjeux et de se prononcer désormais dans un cadre pluriannuel
sur les finances de la sécurité sociale. C'est désormais en ayant une vision plus fine de
l'utilisation passée, présente et future des finances de la sécurité sociale que les
Parlementaires voteront les financements que la collectivité dédie à la sécurité sociale
collective.
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