ECS1B Carnot Chapitre 1 2013/2014
Chapitre 1 : Logique et raisonnements.
Objectifs :
Comprendre ce qu’est un raisonnement rigoureux, en utilisant le vocabulaire adéquat
et des outils précis. Savoir rédiger de façon claire, précise, concise des raisonne-
ments justes.
Connaître les différents types de raisonnements.
Savoir traduire, de manière précise une phrase « française » en une phrase logique.
Savoir écrire la négation d’une phrase logique.
1 Logique
Le but de cette section est d’introduire quelques notions de logique mais surtout de
mettre en place les bases d’une bonne rédaction.
1.1 Formules logiques : quelques vagues idées
Une formule logique se compose de variables (x, y, z...) de constantes (a, b, c...) de pro-
priétés (P, Q...) que l’on relie entre à l’aide de la négation (NON) de la conjection (ET)
de la disjonction (OU), des connecteurs logiques (,,) et des quantificateurs (,).
Une phrase logique a une valeur de vérité, qui peut se tester à l’aide de table de vérité.
Exemple. Trois exemples de phrases logiques (en anticipant un peu).
1. xRyRx6y
2. yRxRx6y
3. x, y R(x6y) ET (x6=y)(x < y)
Exercice. Parmi les assertions ci-dessus, dire lesquelles sont vraies ou fausses. En déduire
que l’interversion des quantificateurs change la valeur logique d’une phrase.
Quelques précisions :
La négation : NON Pest vraie si et seulement si Pest fausse.
P NON P
V F
F V
La conjonction PET Qest vraie si et seulement si Pet Qsont simultanément
vraies. P Q P ET Q
V V V
V F F
F V F
F F F
La disjonction : POU Qest vraie dès que l’une au moins des proposition P,Qest
vraie. Attention le OU logique est donc inclusif.
P Q P OU Q
V V V
V F V
F V V
F F F
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Exercice. Montrer à l’aide de tables de vérités les lois de De Morgan :
1. Les phrases NON(POU Q) et (NON P) ET (NON Q) ont même valeurs de vérité.
2. Les phrases NON(PET Q) et (NON P) OU (NON Q) ont même valeurs de vérité.
L’implication : PQest fausse uniquement si Pest vraie alors que Qest fausse.
En particulier, PQest vraie si Pest fausse.
Exemple : Essayer de comprendre celà à l’aide des propositions P: Il pleut et Q: Il
y a des nuages.
Exercice. Montrer que la négation de PQest (PET (NON Q)).
Remarque. Pour montrer une implication PQon suppose Ppour montrer Q.
La réciproque : PQ«Pest impliquée par Q» n’est rien d’autre que l’impli-
cation QP.
Définition 1.1.1
Si PQest vraie, on dit que Qest une condition nécessaire à (la réalisation) de P.
Si PQon dit que Qest une condition suffisante àP.
Exercice. Les implications suivantes sont elles vraies ? Exprimer le résultat en terme de
conditions nécessaires et/ou suffisantes.
1. y>0⇒ ∃xRy=x2
2. y>0⇐ ∃xRy=x2
L’équivalence : PQest vraie si et seulement si Pet Qsont simultanément
vraies ou simultanément fausses.
Exercice. Montrer que PQest vraie si et seulement si PQET QP.
Méthode. Pour montrer une équivalence PQ, on procède soit par équivalences inter-
médiaires, soit par doubles implications à l’aide de l’exercice ci-dessus.
Quantificateurs : Le quantificateur universel se lit « Quel que soit » 1, et le
quantificateur existentiel « Il existe ». On écrit parfois !pour dire « il existe un
unique ».
Exemple. Soit f:IRune fonction définie sur un intervalle Ide R.
Dire que fest la fonction nulle sur I:
xI, f(x) = 0
Dire que fs’annule sur I:
x0I, f(x0) = 0
Dire que fn’est pas la fonction nulle sur I:
xI, f(x)6= 0
Dire que fne s’annule pas sur I:
xI, f(x)6= 0
1. ou encore « pour tout »
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Exemple. La différence entre quantificateur universel et existentiel peut être illustrée par
les définitions suivantes. Soit Iun ensemble quelconque et (Ai)iIune famille d’ensembles
indexés par I.xTIAi⇔ ∀iI, x Aiet xSIAi⇔ ∃iI, x Ai.
Méthode. Pour montrer une assertion du type x P (x), on commence par fixer xde
manière quelconque pour essayer de montrer P(x). Au contraire, pour montrer x P (x)
on doit exhiber un xtel que P(x)soit vraie (ou par exemple utiliser un raisonnement
par l’absurde, c.f. ci-dessous). Lorsqu’on a affaire à une assertion !P(x), il faut montrer
existence et unicité.
Exemple. 1. Montrons l’assertion suivante : x, y RzRz > x +y.
Prenons xRet yRquelconques. Il nous faut exhiber un réel qui est supérieur
àx+y. Posons par exemple z=x+y+ 1. On a bien z > x +y, ce qui permet de
conclure.
2. Montrons que !xR+x2= 4.
Tout d’abord l’existence : posons x= 2. On a bien xR+et x2= 4, ce qui montre
l’existence.
Prouvons l’unicité. Supposons qu’il existe x, xR+tels que x2=x2= 4. Montrons
que x=x. Puisque x2=x2, on a x=xou x=x. Mais si x=x, alors xR+
et xR+donc x= 0. Ceci contredit le fait que x2= 4. C’est donc que x=x.
Pour finir et illustrer ces notions, rappelons la définition d’intervalle :
Définition 1.1.2
Soit a, b Ravec a < b. Alors ]a, b[= {xR, a < x < b},[a, b] = {xR, a 6x6b}
[a, +[= {xR, x >a}...
Exercice. De même, donner une définition de ]− ∞, b[,[a, b[etc...
Soit Iun ensemble de réel. On sait que xI, 16x < 2. Que peut-on dire de I? On
sait de plus que yR,16y < 2yI. Que peut-on affirmer sur I?
1.2 Raisonnement par analyse/synthèse
Lorsque l’on veut montrer une propriété d’existence et d’unicité, (phrase du type
!x, P (x)), on peut être amené à raisonner par analyse/synthèse, dans le cas où l’exis-
tence n’est pas évidente. C’est un raisonnement en deux étapes :
1. L’analyse : on suppose l’existence, et on essaie de trouver des conditions nécessaires
que doit vérifier cet objet. Si l’objet en question existe on est donc capable de montrer
qu’il est nécessairement égal à un objet précis et d’unique. On montre donc la partie
unicité
2. La synthèse : on considère l’objet déterminé à l’étape précédente, on vérifie qu’il
satisfait les propriétés cherchées, ce qui montre l’existence.
Exemple. Montrons que toute fonction définie sur Rs’écrit comme somme d’une fonction
paire et d’une fonction impaire (pour un rappel des définitions, c.f. le chapitre de révision
sur les fonctions). Soit donc fune fonction quelconque définie sur R.
Analyse : supposons que fs’écrive g+havec get hdes fonctions définies sur R,g
paire et himpaire. Alors utilisons ces propriétés. Soit xRquelconque. On a
f(x) = g(x) + h(x)
f(x) = g(x) + h(x)
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Donc, par parité de get imparité de h:
f(x) = g(x) + h(x)
f(x) = g(x)h(x)
Ainsi, nécessairement g(x) = f(x) + f(x)
2et h(x) = f(x)f(x)
2. On a déterminé
de manière unique get hen cas d’existence.
Synthèse : Posons g:x7→ f f (x) + f(x)2 et h:x7→ f(x)f(x)
2Alors on
vérifie que gest paire, que hest impaire, et que g+h=f. On a donc montré
l’existence de la décomposition (en l’exhibant !).
1.3 Absurde et contraposée
Deux types de raisonnements sont particulièrement usités :
Le raisonnement par contraposée dont le principe repose sur l’équivalence (à mon-
trer en exercice)
(PQ)(NON QNON P)
Ainsi l’implication « Si il pleut, il ya des nuages » est équivalente à « Si il n’y a pas de
nuage, il ne pleut pas ».
Exemple. Soit nZ. Montrons par contraposition que si n2est pair, alors nest pair.
On va donc montrer que si nest impair, n2est impair. Supposons donc que nest impair :
ns’écrit n= 2k+ 1 avec kZ. Alors n2= 4k2+ 2k+ 1 est manifestement impair. On
voulait montrer
n2est pair nest pair
On a montré la proposition équivalente
nest impair n2est impair
Le raisonnement par l’absurde dont le principe est le suivant : pour montrer que
Pest vraie, on suppose que Pest fausse et on cherche une contradiction. On a déjà
utilisé ce type de raisonnement sans le dire pour montrer !xRx2= 4. Donnons une
autre exemple classique.
Exemple. Montrons par l’absurde que 2est irrationnel. Pour cela, supposons le contraire
c’est-à-dire qu’il existe p, q Ntels que 2 = p
q. On peut supposer de plus que cette frac-
tion est irréductible.
On a p2= (q2)2= 2q2. Ceci montre que p2est pair donc (c.f. l’exemple de raisonne-
ment par contraposition) que pest pair. On peut écrire p= 2kkN.
Ainsi p= 2k=q2, donc en prenant les carrés 2q2= 4k2et q2= 2k2. Ce qui montre
que q2donc qest pair. Soit lNtel que q= 2l.
La fraction p
qs’écrit k
l, ce qui contredit le fait que p
qétait une fraction irréductible !
Finalement 2est irrationnel.
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1.4 Négation d’une phrase logique
Pour utiliser sereinement les deux types de raisonnement ci-dessus, il est bon de savoir
écrire rapidement la négation d’une phrase logique. On peut procéder systématiquement à
l’aide des équivalences
NON(x P (x)) (xNON(P(x)))
NON(x P (x)) (xNON(P(x)))
En pratique, on remplace tous les par des , les par des et on écrit la négation de
l’assertion qui suit.
Exemple. Nous verrons dans un chapitre ultérieur qu’une fonction f:RRdéfinie sur
Radmet une limite Ren aRsi et seulement si
ε > 0,α > 0,xR(|xa|< α ⇒ |f(x)|< ε)
Pour nier cette assertion (i.e. affirmer que fn’admet pas pour limite en a), on écrit :
ε > 0,α > 0,xR(|xa|< α ET |f(x)|>ε)
1.5 Quelques remarques de bonne rédaction
Il est important d’acquérir le plus rapidement possible des réflexes menant à une bonne
rédaction. Pour cela il est conseillé de penser (au moins) à trois choses :
Annoncez ce que vous faites.
Introduisez ce dont vous parlez.
Ne mélangez pas le français et les maths.
En règle générale, toute correction d’exercice, de DM, de DS ou toute preuve du cours
est en principe un exemple de bonne rédaction. Un bon moyen de commencer un travail
efficace dès le début de l’année est de
Travailler régulièrement.
Chercher à dégager une méthode des exercices.
Comprendre la solution : les arguments sont-ils tous présents ? bien choisis ? Est-ce
qu’il manque des arguments ?
Attention à ce que vous écrivez : sin x(ou ln x,ex...) n’est pas une fonction, mais une
expression. x7→ sin xest une fonction... mais sans préciser son domaine de définition.
Exemple. Si a2=b2alors a=b. Ce raisonnement est incomplet il est faux en l’état si
on ne précise pas qui sont aet b: réels ? entiers ? complexes ?
Si ce sont des réels, il faut préciser le signe pour pouvoir conclure !
1.6 De la bonne compréhension d’un théorème
Le but des sections ci-dessus étaient de faire sentir la nécessité d’adopter dès le dé-
but de l’année une rédaction précise et rigoureuse. Mais il est aussi important de bien
comprendre les théorèmes du programme. Prenons l’exemple du théorème de la bijection
rappelé ici, mais qui aura sa place dans le cours sur la continuité des fonctions.
Théorème 1.6.1 (Théorème de la bijection)
Soit Iun intervalle de Ret f:IRune application continue. Si fest strictement
monotone sur I, alors pour tout yf(I)il existe un unique xItel que y=f(x).
Établissons la liste des hypothèses :
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