Allocution de René Wittmer, résident en médecine de famille

Allocution de René Wittmer, résident en médecine de famille, Collation des grades de diplômes de médecine
spécialisée, 18 juin 2015
Mesdames et messieurs les dignitaires, chers professeurs, chers parent et amis, chers diplômés,
Il me fait immensément plaisir de pouvoir vous adresser ces quelques mots au nom des diplômés en
médecine de famille aujourd'hui.
Comme vous le savez probablement tous, ce jour marque la fin de la formation médicale postdoctorale
pour la majorité d'entre nous - il est vrai qu'un certain nombre d'entre nous entreprendront une
formation complémentaire durant les mois qui suivront.
Pour souligner notre transition vers la pratique médicale, j'ai pensépondre à une question qu'on
nous pose souvent durant la résidence : 'qu'est-ce que ça veut dire, être résident?'
La résidence est une période bien particulière durant la formation médicale, où nous sommes appelés
à porter plusieurs chapeaux. D'une part, les résidents ont un rôle bien actif au sein de l'équipe des
soins, d'où l'appellation 'médecin résident'. S'ajoute ensuite à ce rôle celui d'un apprenant, avec toutes
la tâches qui s'y rattachent - lecture d'articles scientifiques, présentations de cas, évaluations répétées,
et j'en passe. Finalement, le rôle d'enseignant puisque les résidents consacrent également une partie
de leur temps à l'enseignement aux étudiants dits ‘externes en médecine.
Assez facile d'imaginer que les années résidence peuvent être remplies de défis et plutôt
tumultueuses.
Au-delà de relever des défis, la résidence nous aura également permis de développer un lien de
confiance avec de nombreux patients. Alors qu'une proportion importante de la formation médicale
est consacrée au diagnostic des pathologies et à leur traitement, la résidence en médecine de famille
nous aura appris à nous centrer sur les êtres humains que nous traitons. En plus de pouvoir constater
le nombre élevé de traitements pharmacologiques disponibles, chacun d'entre nous a pu constater la
puissance de l'écoute et des interventions de soutien.
À ce propos, j'aimerais partager avec vous un extrait du livre La Maladie de Sachsde Martin Winckler.
Je tordais déjà mon mouchoir trempé, en voyant les flots de larmes, tu t’es
levé, tu as traversé la pièce, tu as rapporté une grande boîte de mouchoirs en
papier et tu l’as déposée sur le plateau de bois peint, près de moi.
Pendant un long moment, je n’ai rien dit. Tu m’as regardée, tu n’as rien dit
non plus. Mes larmes ont fini par se tarir.
Enfin, j’ai soupiré, j’ai fait un effort pour sourire, je me suis redressée, j’ai dit :
- Je ne vais pas vous embêter plus longtemps, il faut que je rentre. Mon petit
Allocution de René Wittmer, résident en médecine de famille, Collation des grades de diplômes de médecine
spécialisée, 18 juin 2015
garçon est chez la voisine… Son fils et le mien sont dans la même classe… Je…
Je voulais vous remercier de m’avoir écoutée, mais je… je suis un peu gênée…
- Gênée ? Pourquoi ?
- Je… Je suis venue vous prendre votre temps… Alors que je ne suis pas
malade…
- Non, mais vous souffrez.
Quand je sors dans la cour, je me rends compte que ma main est crispée
autour de la feuille de sécurité sociale, et je réalise que tu n’as pas fait de
dossier, que tu n’as pas pris de notes [...]
C'est ainsi que la résidence en médecine de famille nous a appris comment parfois, un simple silence
bien placé peut en dire beaucoup plus que bien des paroles.
Chacun d'entre nous ici présent est en mesure de penser à l'histoire d'un patient ou d'une patiente qui
nous a interpellés. Un patient qui nous a rappelé, dans les moments les plus difficiles, la raison pour
laquelle nous gardons le cap. Un patient qui nous a rappelé pourquoi nous donnons le meilleur de nous
au travail.
J'aimerais prendre un moment pour souligner la contribution des malades que nous soignons au cours
de notre formation. Ils ont façonné la façon que nous questionnons certains symptômes. La façon que
nous examinons un foie. La façon que nous auscultons des poumons. La façon que nous annonçons des
mauvaises nouvelles. La façon que nous prodiguons des soins. Ils ont façonné les médecins que nous
sommes devenus.
Finalement, une allocution comme celle-ci ne serait pas complète sans prendre un moment pour
remercier tous ceux qui nous ont accompagnés dans cette aventure. Ceux qui ont été à nos côtés pour
célébrer lors de nos victoires, ceux qui étaient à nos côtés lors des moments difficiles. Nos professeurs,
nos mentors, nos parents, nos amis, nos conjoints et conjointes. Nous ne serions pas où nous sommes
sans leur aide.
Chers collègues, ce fut un privilège de vous côtoyer durant toutes ces années.
Félicitations encore une fois!
René Wittmer, M.D.
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