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Crise et psychiatrie
V éritable enjeu de santé publique, la prise en charge des patients présentant des problèmes de santé mentale est multiple et suscite
une perpétuelle réflexion pour une optimisation de la qualité des soins.
Ces conférences sont l’occasion de rencontrer différents partenaires internationaux qui nous font partager leurs recherches et leurs ex-
périences permettant d’enrichir la réflexion et de faire évoluer les représentations sur la prise en charge de la souffrance psychique.
Valérie ABBAS
Olivier BERTRAND
Formateurs IFSI
A u-delà de la maladie mentale la souf-
france psychique peut être réguliè-
rement rencontrée au sein des différentes
structures de soin. Par conséquent il nous
semble important d’élargir nos connais-
sances de façon à faire évoluer notre vi-
sion sur les soins en psychiatrie.
L’intervention de Heikki Ellilä, Maître de
conférences en sciences infirmières à l’Uni-
versité de Turku en Finlande, a été centrée
sur l’influence des évènements traumatiques
pendant l’enfance sur la santé mentale à
l’âge adulte tels que les accidents, la violen-
ce, les abus sexuel ou le deuil. L’équilibre
existant entre le corps et l’esprit peut se
trouver perturbé après la survenue d’un de
ces traumatismes, ce qui peut entraîner des
troubles psychologiques. Cette intervention
a été enrichie lors de la troisième journée par
le visionnage d’un film finlandais « For the
living and the dead », 1989. Tiré d’un fait
réel, il nous montre un évènement traumati-
que survenu dans une famille subissant la
mort accidentelle du cadet. Il illustre les
différentes étapes du deuil et les change-
ments qui ont lieu dans la famille, au niveau
individuel ou collectif entre les différents
membres de celle-ci.
Au travers d’une recherche Suisse présentée
par Krzysztof Skuza, psychosociologue,
Professeur et Gilles Bangerter, Professeur en
soins infirmiers à la Haute Ecole de Santé
Vaudoise de Lausanne, nous avons décou-
vert une pratique assez controversée en
France le « packing ». Le principe repose
sur le concept de « holding » de Winnicott.
Les patients sont enveloppés dans des linges
humides et froids et recouverts d’une cou-
verture dans le but de produire une réaction
thermique entrainant une sensation de bien
être. Cette technique permet chez les pa-
tients adultes psychotiques de favoriser une
prise de conscience de leur corps et de les
aider à maitriser leurs comportements afin
de communiquer sur ce vécu. De ce fait,
nous comprenons que cette technique est
intéressante auprès des patients psychotiques
qui ont une image corporelle morcelée.
Harry Gijbels, Docteur
en sciences infirmières
à l’University College
de Cork en Irlande a
présenté l’expérience
irlandaise des
« entendeurs de voix »
pour lesquels sont
organisés des ateliers
de soutien et d’écoute.
Il affirme que 10 % de
personnes dans le monde
entendent des voix, phé-
nomène qui n’est pas systématiquement
associé à une pathologie mentale. Pour cer-
taines d’entre elles, la voix est plaisante et
pour d’autres, perçue comme une menace. Il
explique que l’objectif des ateliers n’est pas
de se débarrasser des voix, mais de trouver
comment vivre avec. Ces ateliers sont des
espaces d’échanges rassurants pour ces per-
sonnes qui peuvent partager leur expérience,
leurs sensations et leurs perceptions d’hallu-
cinations auditives. Il s’agit pour lui d’un
enjeu de santé important, relevant « d’une
expérience humaine » et « d’un mouvement
social ».
Alexia Stantzos et Gilles
Bangerter, Professeurs
en soins infirmiers à la
Haute Ecole de Santé
Vaudoise de Lausanne
en Suisse, ont présenté
leur projet de recherche
autour de l’utilisation de
la musique et de la
culture pour gérer la
crise en psychiatrie en
faisant référence à Win-
nicott pour qui la « musique est un espace
transitionnel ». Ce projet intitulé
« Amenhotep » est issu d’une collaboration
pluridisciplinaire (soignants, ingénieurs et
professionnels de la musique). Ensemble, ils
ont conçu un dispositif musical permettant
aux patients en chambre de soins intensifs,
de choisir une musique parmi une sélection
prédéfinie.
Heikki Ellilä, Krzysztof Skuza et
Gilles Bangerter
Harry Gijbels
Alexia Stantzos
Ils permettent ainsi une prise en charge glo-
bale et adaptée au patient qui allie bien-être
et respect de la stratégie thérapeutique. D’a-
près Florence Barruel, « Le soin de support
idéal est celui qui convient au moment où
l’on en a besoin ».
Cependant, étant souvent méconnus des
patients et de leur entourage, l’infirmière
doit veiller à présenter tous ces soins et iden-
tifier les besoins du patient afin de l’orienter.
Cela n’est possible que par une écoute du
patient et une collaboration pluridisciplinai-
re.
Anne Guillemain rappelle que les activités
sportives et de bien-être favorisent l’expres-
sion, la communication, l’autonomie et la
« combativité » à l’égard de la maladie et
des risques de récidive.
Au cours de cette semaine internationale
trois intervenants, Sabine Dreyer (coach
sportif), Florence Breuillard (socio-
esthéticienne) et Cyril Lefaure (professeur
de Karaté) ont présenté leur activité et ont
démontré les bienfaits des soins de support
sur la qualité de vie des patients et de leur
famille.
Quelles différences entre la France et la
Roumanie ?
Que ce soit en Roumanie ou en France, les
soins de support visent à améliorer la qualité
de vie des patients atteints d’un cancer.
Néanmoins, leurs démarches sont différen-
tes. Pour la Roumanie, le Dr Popa affirme
qu’ils sont principalement dédiés à limiter
les effets secondaires des traitements. Ils
sont donc ancrés dans la prise en charge
médicale mais relèvent principalement du
rôle infirmier.
En France, les soins de support associent
prise en charge des effets secondaires et bien
-être du patient. Plusieurs ateliers sont acces-
sibles aux patients grâce à la collaboration
d’une équipe pluridisciplinaire.
Que retiendrons-nous ?
Ces témoignages nous on appris que l’objec-
tif des soins de support est globalement
identique en Roumanie comme en France.
Le bien-être du patient reste, en effet, au
centre des préoccupations. Cependant, nous
pouvons constater que le manque de moyens
financiers est une limite en Roumanie mais
que l’investissement des professionnels de
soin permet une qualité de prise en charge
auprès des enfants malades.
Sarah BEN MOUHA
Anicette AMON
Marie Dielette ANILA
Étudiantes infirmières
Promotion 2011-2014
Florence Barruel et Anne Guillemain