Agrégation Interne de Mathématiques
Université de La Rochelle
Jean-Philippe Furter
octobre 2010
Quelques points d’algèbre générale
1. Généralités sur les groupes page 1
2. Groupes quotients page 8
3. Groupes diédraux page 10
4. Actions de groupes page 12
5. Généralités sur les anneaux page 15
6. Anneaux quotients page 16
7. Théorème chinois et indicatrice d’Euler page 17
8. Généralités sur les corps page 18
9. Elements algébriques et éléments transcendants page 20
10. Anneaux euclidiens (hors programme) page 22
1 Généralités sur les groupes
1. Groupes
Définition 1. Soit Eun ensemble. On appelle loi de composition (interne) de E, toute
application f:E×EE.
Comme son nom l’indique, une loi de composition interne de Epermet de composer
(ou si l’on préfère "multiplier") les éléments de E. La plupart du temps, on utilisera donc
une notation du style xyou x.y ou xy au lieu de f(x, y).
Exemples. Prenons E=R. Par définition, une loi de composition interne de Rest une
application f:R×R=R2R.
(x, y)7→ f(x, y)
On peut prendre
1) f(x, y) = x; 2) f(x, y) = y; 3) f(x, y) = x+y; 4) f(x, y) = xy ;
5) f(x, y) = x2+y2.
Définition 2. Un groupe est un couple (G, .)Gest un ensemble et .une loi de
composition interne de Gsatisfaisant les 3 axiomes suivants :
G1. Associativité : (g1, g2, g3)G3, g1.(g2.g3)=(g1.g2).g3;
G2. Existence d’un élément neutre : eG, gG, g.e =e.g =g;
G3. Existence d’un inverse : gG, g0G, g.g0=g0.g =e.
1
Remarques. 1. Si Gsatisfait uniquement G1 et G2, on dit que Gest un monoïde ou
semi-groupe.
2. Un groupe est en toute rigueur un couple (G, .). Cependant, quand la loi .est
implicite, nous dirons abusivement que Gest un groupe.
Propriétés. 1. Unicité de l’élément neutre.
En effet, si eet e0sont des éléments neutres, on a e=e.e0=e0.
L’élément neutre d’un groupe est souvent désigné par 1au lieu de e.
2. Unicité de l’inverse. Si g0et g00 sont des inverses de g, on a g0=g0.1 = g0.(g.g00) =
(g0.g).g00 = 1.g00 =g00.
L’inverse de gest usuellement désigné par g1.
3. On a gG, (g1)1=get (g, h)G2,(gh)1=h1g1.
4. Dans un groupe, tout élément est simplifiable.
Cela signifie qu’étant donnés g, x, y G, on a
gx =gy =x=y(gest simplifiable à gauche) et
xg =yg =x=y(gest simplifiable à droite).
En effet, en multipliant l’égalité gx =gy par g1à gauche, on obtient g1gx =g1gy,
i.e. 1x= 1y, i.e. x=y.
On montrerait de même que gest simplifiable à droite.
Exemples. 1. Pour chacune des 5lois de composition interne définies précédemment,
dire si les axiomes G1, G2, G3 sont vérifiés. Dans quel cas obtient-on une structure de
groupe ?
2. Parmi les couples suivants, lesquels sont des groupes ? (R,+) ;(R,×);(R,×);
(R
+,×);(N,+) ;(Z,+) ;(Z,×);(Z,×),({−1,1},×).
3. Si Eest un ensemble quelconque, l’ensemble EEdes applications de Edans E, muni
de la loi de composition est un monoïde (il est connu que la composition est associative,
de plus IdEest élément neutre de (EE,)). Par contre, une application quelconque de E
dans Epossède un inverse pour la composition si et seulement si elle est bijective. Cela
explique que l’ensemble des permutations de E(ie bijections de Edans E) muni de la
loi de composition est un groupe. On le notera (Per(E),)ou Per(E).
Si En={1, . . . , n}, alors le groupe des permutations de Ens’appelle le n-ème groupe
symétrique et on le dénote Sn.
Définition 3. On dit qu’un groupe Gest commutatif (ou abélien) si :
(g, g0)G2, gg0=g0g.
Notation. Si Gest un groupe abélien (et uniquement dans ce cas), on pourra utiliser
des notations additives au lieu de multiplicatives pour G. C’est-à-dire que l’on notera
g1+g2
g
0
au lieu de
g1g2
g1
1
.
L’élément gsera alors souvent appelé l’opposé de gau lieu de son inverse.
2
Deux exemples de construction de groupes. 1. Si Get Hsont deux groupes, alors on
peut définir une structure de groupe sur G×Hen posant (g1, h1).(g2, h2) = (g1g2, h1h2).
2. Si (G, .)est un groupe, alors en munissant Gde la loi définie par gg0=g0g,
on obtient une autre structure de groupe sur G. Ce nouveau groupe s’appelle le groupe
opposé de Get se dénote Gop.
Exercice. Soit (G, .)un ensemble muni d’une loi de composition interne tel que
(G1)(g1, g2, g3)G3, g1(g2g3)=(g1g2)g3;
(G’2)eG, gG , ge =g(existence d’un élément neutre à droite) ;
(G’3)gG, g0G, gg0=e(existence d’un inverse à droite).
Montrer que (G, .)est un groupe.
Si gG, appelons g0un élément tel que gg0=eet g00 un élément tel que g0g00 =e.
On pourra utiliser l’identité eg =ege =egg0g00 pour montrer que eg =g(axiome(G2))
et que g=g00 (axiome (G3)).
Réponse. On a tout d’abord eg =egg0g00 =eeg00 =eg00 =gg0g00 =ge =get ensuite
g00 =eg00 =gg0g00 =ge =g.
2. Sous-groupes
Définition 4. On dit qu’un sous-ensemble Hde Gest un sous-groupe de (G, .)(et on
note H < G) si Hest stable par composition (ie (h, k)H2, hk H) et Hmuni de la
loi induite est un groupe.
Théorème 1. Soit HG, alors Hest un sous-groupe de Gsi et seulement si
(1) : 1H;
(2) : (h, k)H2, hk1H.
De plus, on peut remplacer la condition (1) par la condition
(1’) : H6=
et/ou la condition (2) par la condition
(2’) : (i) (h, k)H2, hk H
(ii) hH, h1H
Preuve. Il suffit de montrer que (Hsous-groupe) 1
=(1)
(2)
2
=(1)
(20)
3
=(10)
(20)
4
=(10)
(2)
5
=(Hsous-groupe).
1ère implication : soit el’élément neutre de H, montrons que e= 1 (où 1est l’élément
neutre de G). Or e.e =e, d’où e= 1 en simplifiant par e, donc 1H. De plus, si hH,
montrons que h1H. Comme Hest un groupe, hadmet un inverse h0dans H. On a
donc hh0= 1, d’où h0=h1, d’où h1H. Finalement, quels que soient h, k H, on a
h, k1H, d’où hk1H.
3
2ème implication : en appliquant (2) avec h= 1, on voit que kH, k1H.
Dès lors, quels que soient h, k H, on a h, k1Het en appliquant (2), il vient
h(k1)1=hk H.
3ème implication : cela provient de l’implication (1) =(1’) qui est évidente.
4ème implication : cela provient de l’implication (2’) =(2) qui est presque évidente.
En effet, si h, k H, alors h, k1Hpar (ii), donc hk1Hpar (i).
5ème implication : on suppose que Hvérifie (1’) et (2) ; on veut tout d’abord montrer
que Hest stable pour la loi de composition, puis que Hmuni de la loi induite est un
groupe.
Par (1’), on sait que Hpossède au moins un élément h0. Dès lors, (2) montre que
h0h1
0= 1 H, donc (1) est vérifié.
L’implication 2 montre que (2’) est vérifié. En particulier, (2’)(i) signifie que Hest
stable par la loi de composition.
Montrons maintenant que (H, .)est un groupe.
L’associativité est évidente car la relation (g1, g2, g3)G3, g1(g2g3) = (g1g2)g3
implique trivialement (g1, g2, g3)H3, g1(g2g3)=(g1g2)g3(car HG!).
Il est clair que 1est élément neutre de (H, .)(car 1est élément neutre de Get l’on a
déjà vu que 1H).
Finalement, si hH, il est clair que h1est un inverse de hdans H.
Exemples. {1}et Gsont des sous-groupes de G. On les qualifie de sous-groupes triviaux.
Exercice. Les sous-groupes de (Z,+) sont de la forme nZnN..
Réponse. Soit H < Z. Montrons qu’il existe nNtel que H=nZ.
Si H={0}, alors H= 0Z.
Sinon, on a HN6=(car Hpossède un élément non nul et quitte à prendre
l’opposé de cet élément, on peut toujours supposer qu’il est strictement positif). Posons
alors n= min HNet montrons que H=nZ.
On a nH, donc <n>=nZH.
Réciproquement, si mH, on peut écrire msous la forme m=qn+r(q, r)Z×Z
et 0r < n. Or r=mqn H, donc r= 0, d’où m=qn nZ.
Exemples de sous-groupes de (C,×):
1. ({1,1},×).
2. Le groupe des racines n-èmes de l’unité : (µn,×)µn=
{zC, zn= 1}.
3. Le groupe des nombres complexes de module 1:(S1,×)S1={zC,|z|= 1}.
Exercice. Tout sous-groupe fini de Cest inclus dans S1.
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Réponse. Soit Hun sous-groupe fini de Cet soit zH. On a nN, znH, donc
il existe des entiers naturels distincts met ntels que zm=zn. Quitte à échanger met
n, on peut supposer que m > n. En prenant les modules, on obtient |z|m=|z|n, d’où
|z|mn= 1, d’où |z|= 1.
On pourrait en fait montrer que tout sous-groupe fini de Cest égal à un certain µn.
3. Morphismes de groupes
Définition 5. Soient Get G0deux groupes et soit ϕ:GG0une application. On dit
que ϕest un morphisme (ou homomorphisme) de groupes si ϕest compatible avec les
structures de groupes de Get G0, i.e.
(g, h)G2, ϕ(gh) = ϕ(g)ϕ(h).
Désignons par 1(resp. 10) l’élément neutre de G(resp. G0)
Définition 6. Si ϕ:GG0est un morphisme de groupes, on pose ker(ϕ) =
ϕ1({10}) = {gG, ϕ(g)=10}et Im(ϕ) = ϕ(G) = {ϕ(g), g G}.
Propriétés. 1. ϕ(1) = 10.
En effet, ϕ(1) = ϕ(1.1) = ϕ(1)ϕ(1), d’où le résultat en simplifiant par ϕ(1).
2. gG, ϕ(g1) = ϕ(g)1.
En effet, ϕ(g)ϕ(g1) = ϕ(gg1) = ϕ(1) = 10.
3. ker ϕ < G.
En effet, 1ker ϕet si g, h ker ϕ, alors ϕ(gh1) = ϕ(g)ϕ(h)1= 10(10)1= 10, donc
gh1ker ϕ.
4. ϕest injective si et seulement si ker ϕ={1}.
Si ϕest injective, on a quel que soit gG,ϕ(g) = 10ϕ(g) = ϕ(1) g= 1, donc
ker ϕ={1}.
Réciproquement, si ker ϕ={1}, alors quels que soient g, h G, on a ϕ(g) = ϕ(h)
ϕ(g)ϕ(h)1= 10ϕ(gh1)=10gh1= 1 g=h.
5. Im(ϕ)< G0.
On a 10=ϕ(1) Im(ϕ). De plus, si g0, h0Im(ϕ)alors il existe g, h Gtels que
ϕ(g) = g0et ϕ(h) = h0. D’où g0h01=ϕ(g)ϕ(h)1=ϕ(gh1)Im(ϕ).
6. ϕest surjective si et seulement si Im(ϕ) = G0.
Définition 7. On dit qu’un morphisme de groupes ϕ:GG0est un isomorphisme
s’il admet un morphisme réciproque, i.e. s’il existe un morphisme de groupe ψ:G0G
tel que ψϕ=IdGet ϕψ=IdG0.
Proposition. Soit ϕ:GG0un morphisme de groupes, alors ϕest un isomorphisme
si et seulement si ϕest bijectif.
Preuve. S’il exsite un morphisme ψtel que ψϕ=IdGet ϕψ=IdG0, l’égalité
ψϕ=IdGmontre que ϕest injectif (car ϕ(g) = ϕ(h) =ψ(ϕ(g)) = ψ(ϕ(h)), i.e. g=h),
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