Questions – Réponses - SISD

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Questions restées en suspens :
Peut-on nommer deux enfants comme administrateurs de biens pour qu’ils gèrent conjointement
les biens du parent ?
Mme M. Mosselmans et Me S. Valvekens :
« Impossible. La loi ne prévoit pas de confier un mandat judiciaire à un collège de personnes. Très
souvent un des enfants est désigné Administrateur Provisoire de Biens et l’autre personne de
confiance »
Le médecin requérant peut-il être le médecin traitant, oui ou non ?
Ne doit-il pas être neutre ?
Mme M. Mosselmans :
« Tout intéressé peut demander la désignation d’un Administrateur Provisoire de Biens à quelqu’un,
donc également le médecin traitant. Mais selon une certaine jurisprudence (surtout en Flandre), le
médecin viole ainsi son secret professionnel.
Il est dès lors discutable en effet que si le médecin traitant est requérant, et donc partie à la cause, il
puisse aussi être l’auteur du certificat circonstancié. »
Me S. Valvekens :
« Oui cela peut être le médecin traitant.
Exclusion concerne uniquement le médecin attaché à l’institution où se trouve la personne à
protégée. »
Mme F. Reusens :
Voici ce que j’écrivais dans F. REUSENS, « La maltraitance financière et ses conséquences
judiciaires », in Personnes âgées et biens matériels – Entre rapacité et libre disposition, Presses
universitaires de Louvain, 2011, pp. 182-183 : « La question est à présent de savoir qui peut
provoquer la nomination d’un administrateur provisoire. En vertu de l’article 488bis, b), § 1 er, alinéa
1er, du Code civil, l’initiative de la demande1 revient à la personne à protéger elle-même, au procureur
du Roi ou, plus généralement, à toute personne intéressée2.
1
Demande qui prendra la forme d’une requête, signée par le requérant ou son avocat (article 488bis, b), § 5, du
Code civil).
2
Notons également que l’alinéa 2 du même article permet au juge de paix de prendre cette mesure d’office
lorsqu’il est saisi d’une demande de mise en observation de la personne à protéger, de soins en milieu familial ou
de maintien d’une de ces deux mesures, en application de la loi du 26 juin 1990 relative à la protection de la
personne des malades mentaux.
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On enseigne traditionnellement que peut être considéré comme « personne intéressée », le médecin
traitant de la personne à protéger3. Si cette acception ne pose pas de souci majeur sur le plan du droit
civil4, des nuances méritent d’être apportées sur les plans pénal et déontologique, au regard du secret
professionnel auquel les médecins sont tenus5. Il convient en la matière de mettre en évidence
plusieurs dispositions du Code de déontologie médicale qui, dans un langage clair, applique les
principes légaux à la pratique médicale. (…)
L’article 61, § 2, dudit Code mérite une attention particulière de la part du médecin qui jugerait utile
de prendre l’initiative de mesures – judiciaires ou autres – nécessaires à la protection patrimoniale de
son patient. Celui-ci instaure en effet une sorte de système de protection en cascade lorsqu’un
médecin soupçonne qu'un patient incapable de se défendre en raison d'une maladie, d'un handicap,
ou de son âge, est maltraité, exploité ou subit des effets graves d'une négligence.
Dans cette hypothèse, il devra dans un premier temps, si les capacités de discernement de son patient
le permettent, lui parler de ses constatations et l’inciter à prendre lui-même les initiatives
nécessaires6. Si cette discussion ne s’avère pas possible, l’article prévoit que le médecin traitant peut
se concerter avec un confrère compétent en la matière, à propos du diagnostic et de la suite à
réserver à la situation. Ce n’est que si le patient est en danger grave et qu’il n’y a pas d’autre moyen
pour le protéger que le médecin peut avertir le procureur du Roi de ses constatations7. Enfin, le texte
poursuit en précisant que si cela ne nuit pas aux intérêts du patient, le médecin informera ses proches
de ses constations et des initiatives qu’il compte prendre pour le protéger.
Le contenu de cet article incite dès lors le médecin traitant de la personne âgée à la plus grande
prudence et l’on ne peut à cet égard que lui déconseiller d’être l’initiateur de la procédure en
nomination d’un administrateur provisoire, ce en dépit de la portée large que le législateur a entendu
conférer à l’article 488bis, b), § 1er, alinéa 1er, du Code civil. Il n’est du reste pas inutile de rappeler
qu’en vertu de l’article 64 du Code de déontologie médicale – qui confirme le caractère d’ordre public
du secret professionnel – la déclaration du malade relevant son médecin du secret professionnel ne
suffit pas à le libérer de son obligation ».
3
Th. DELAHAYE, « L’administrateur provisoire (article 488bis du Code civil). Loi du 3 mai 2003 », Les
dossiers du Journal des tribunaux, n° 45, Bruxelles, Larcier, 2004, n° 45, p. 40 ; Y.-H. LELEU, Droit des
personnes et des familles, Bruxelles, Larcier, 2005, n° 173, p. 168 ; P. MARCHAL, « Les incapables majeurs »,
Rép.not., t. 1, livre VIII, Larcier, Bruxelles, 2007, n° 278, p. 236 ; F.-J. WARLET, L’administration provisoire
des biens – Manuel pratique de l’administration provisoire des biens des personnes vulnérables, Waterloo,
Kluwer, 2008, n° 36, p. 32. Voy. également J.P. Roulers, 20 septembre 1996, R.W., 1997-1998, p. 1026 et note,
ainsi que J.P. Bruxelles, 21 janvier 1999, J.L.M.B., 1999, p. 432 : selon cette jurisprudence, le médecin traitant
ne peut dans ce cas être le rédacteur du certificat médical circonstancié qui doit être joint à la requête (cfr infra).
4
Quoique pourrait se poser la question de l’intérêt à agir sur le strict plan du droit judiciaire …
5
Et dont la transgression est de nature à impliquer des sanctions sur les plans civil (article 1382 du Code civil),
pénal (article 458 du Code pénal) et disciplinaire (articles 55 et suivants du Code de déontologie médicale).
6
Pour rappel, la personne protégée peut prendre elle-même l’initiative de la demande en nomination d’un
administrateur provisoire de ses biens.
7
Procureur du Roi qui, outre ses compétences en matière répressive, peut, pour rappel, être également à l’origine
de l’intentement de la procédure en désignation d’un administrateur provisoire.
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Comment résoudre le problème lié au nombre restreint de médecins acceptant de se rendre dans
l’une ou l’autre institution pour remplir ces documents ?
Dr Ch. Hoornaert :
« Pourquoi ne pas envisager une sensibilisation des médecins par l’intermédiaire du CUMG (Centre
Universitaire de Médecine Générale), de la SSMG (Société Scientifique de Médecine Générale), …
Comment faire réagir un administrateur de biens lorsque la personne protégée souhaite savoir où
en est l’apurement de ses dettes ? Sachant qu’il ne répond qu’aux sollicitations d’assistants sociaux
mais pas de la personne elle-même (Téléphone ? Recommandé ? …).
Me S. Valvekens :
« Prendre rendez-vous avec son administrateur provisoire, avec l’assistant social pour une meilleur
compréhension. Demander son bilan annuel. La personne protégée a le droit d’avoir son bilan
annuel. A défaut contacter le Juge de Paix. »
Mme M. Mosselmans :
« Adresser un courrier au Juge de Paix qui gère le dossier d’Administrateur Provisoire de Biens en
question pour lui faire part du fait que celui-ci ne remplit pas correctement sa mission. Le Juge de
Paix l’interpellera et souvent ça fait bouger les choses. A défaut le juge fixera la cause « pour
remplacement de l’Administrateur Provisoire de Biens ». »
Comment faire/avoir droit à augmenter sa paie hebdomadaire quand les dépenses vitales sont
plus élevées que le montant perçu ? (L’administrateur est un avocat).
Me S. Valvekens :
« Il faut en parler avec l’administrateur provisoire, voir le budget et donc la possibilité oui ou non
d’augmenter le disponible hebdomadaire.
Tout dépend de la situation financière de la personne et de ce que doit payer l’administrateur de
bien pour cette dernière. »
Mme M. Mosselmans :
« Très (trop) souvent les revenus de la personne protégée sont à tel point faibles qu’elle ne peut faire
face à ses dépenses vitales. L’Administrateur Provisoire de Biens ne peut donner ce qu’il n’a pas.
Le mieux est de faire une réunion avec l’Administrateur Provisoire de Biens pour conférer du budget
qu’il a établi et qu’il respecte. A défaut de réponse ou en cas de désaccord sur ce budget, il y a lieu
d’adresser un courrier au Juge de Paix expliquant le problème et demandant éventuellement le
remplacement de l’Administrateur Provisoire de Biens. »
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des factures chez les personnes âgées sous administration de biens. Ces retards sont sanctionnés
par des intérêts de retards parfois assez important.
Quelle est la responsabilité de l’administrateur de biens face à ce problème lorsqu’il est causé par
une négligence ?
Mme M. Mosselmans :
« Si le retard de paiement est dû à une négligence (faute) de l’Administrateur Provisoire de Biens, il
en est responsable et il tenu des personnellement à réparer, c’est-à-dire au paiement des intérêts.
Très souvent cependant le retard n’est pas dû à une faute de l’Administrateur Provisoire de Biens. »
Me S. Valvekens :
« L’administrateur de bien est responsable et commet une faute professionnelle.
Cependant, vérifier qu’il reçoit bien les factures à heure et à temps (certaines résidences envoient les
factures en retard), vérifier également que l’administrateur de bien n’est pas tributaire de l’arrivée
de la pension qui peut être le 15 du mois pour les paiements et enfin pour autant que
l’administrateur de bien ne doit pas demander une autorisation spéciale au Juge de Paix pour
prélever chaque mois sur le compte épargne de la personne un montant complémentaire pour payer
les factures. Dans ces cas de figure l’administrateur n’est pas responsable du retard. »
Une personne sous administration décède. Qu’en est-il des factures (relatives à la période qui
précède le décès) qui restent impayées ?
Et quand la famille a refusé la succession, l’administrateur (avocat) désigné n’a plus accès aux
comptes.
Me S. Valvekens :
« Gros problème, le mandat d’administrateur de bien se termine par le décès et donc il ne peut plus
effectuer aucun paiement sauf frais funéraires.
Il y a effectivement une carence dans la loi. »
Mme M. Mosselmans :
« Dès le décès de la personne protégée, la mission de l’Administrateur Provisoire de Biens prend
automatiquement fin.
Les factures à payer dépendent du passif de la succession qui est à gérer par les héritiers. Si la
succession est vacante à défaut d’héritiers, il y lieu de demander au tribunal de première instance du
lieu du décès la désignation d’un curateur à la succession vacante, éventuellement également un
Administrateur Provisoire à la succession vacante. Dans certains cas, le Juge de Paix peut désigner un
curateur aux meubles qui, dans certains cas, peut solutionner. »
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En effet, ce blocage est souvent un moment délicat à gérer tant pour la personne protégée que
pour la personne requérante ou encore les services psycho-médico-sociaux.
Si l’administrateur n’est pas derrière pour réactiver les comptes, la situation peut vite devenir
ingérable. Ne faudrait-il pas prévoir d’autres dispositions ou des mesures transitoires le temps de
régulariser la situation ?
Me S. Valvekens :
« Je réponds en partie.
Une désignation d’administrateur provisoire est publiée au Moniteur Belge, et les banques vérifient
chaque jour le Moniteur, donc dès qu’elles constatent qu’une personne est sous administration
provisoire les banquent bloquent les comptes et attendent les instructions de l’administrateur.
Il est donc indispensable d’avoir rapidement un contact avec la personne protégée pour savoir où les
comptes sont tenus et faire le nécessaire car les banques bloquent mais l’administrateur provisoire
ne sera averti par la banque de l’existence de compte souvent que 15 jours après (ils ont trop de
boulot). »
Pourquoi ne pas avoir parfois des procédures simplifiées quand, par exemple,
le (la) patient(e) est dans une maison de repos qui gère déjà beaucoup ou que la personne est bien
entourée à domicile ?
Mme M. Mosselmans :
« La loi est heureusement la même pour tout le monde : dès qu’une personne n’est plus apte de
gérer elle-même, elle a le droit à ce que ce soit fait par quelqu’un de compétent et qui est tenu de
rendre des comptes.
Quels seront les critères pour déterminer qu’une maison de repos/personne est fiable et l’autre
pas ? »
Que faire si l’administrateur de biens reste dans sa tour d’ivoire et ne répond jamais aux
intervenants de terrain ?
Mme M. Mosselmans et Me S. Valvekens :
« Ecrire au Juge de Paix et l’informer de la situation.
Le Juge de Paix est là pour intervenir en cas de conflit. »
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L’organisation des soins et la gestion administrative est accomplie par deux de ses enfants qui se
consultent. Le troisième enfant remet tout en question, perturbe la personne par ses visites qui se
prolongent tard le soir (cris, tapage, apport de nourriture non adaptée,…).
Les voisins se plaignent du bruit, des discutions à voix haute : la maman est sourde.
Quel recours ?
Une médiation est-elle possible ? Existe-t-elle ?
Mme M. Mosselmans :
« Le plus souvent dans des cas pareils, de l’intérêt et des enfant et de la personne protégée, le Juge
désigne un Administrateur Provisoire de Biens professionnel ou au moins étranger à la famille.
La gestion du conflit entre les enfants ne fait en soi pas partie de la gestion des biens de la personne
protégée. Pour qu’il puisse y avoir médiation, les enfants concernés doivent au moins avoir
l’intention de mettre fin à leur conflit moyennant médiation… »
Les enfants d’une personne démente (Alzheimer) sont en désaccord entre eux. L’une d’entre elles
est l’administrateur provisoire depuis plusieurs années (nommée par consensus à l’époque).
Certains de la fratrie veulent la « destituer » de ce rôle. Que peuvent-ils faire pour cela ? Est-ce
facile de passer ce rôle d’un enfant vers un autre ? Faut-il un « consensus » entre les enfants ? Une
majorité simple du nombre d’enfants ?
Me S. Valvekens :
« Si un des enfants introduit une procédure en désignation d’administrateur provisoire, il faut un
accord entre tous les enfants, à défaut le Juge nommera un professionnel sauf cas particulier
justifié. »
Mme M. Mosselmans :
« Ils peuvent demander le remplacement de l’Administrateur Provisoire de Biens au Juge. Le Juge
décide n’est pas tenu de respecter le choix des enfants même s’il s’agit d’un « consensus ». Si
l’enfant-Administrateur Provisoire de Biens n’a pas (plus) la confiance des autres enfants, il est de
l’intérêt de la personne protégée, de l’enfant-Administrateur Provisoire de Biens et des autres
enfants, qu’un Administrateur Provisoire de Biens-étranger à la famille soit désigné. Cela évite des
conflits de loyauté pour la personne protégée et les liens affectifs ne sont pas hypothéqués par des
discussions sur un futur héritage… »
Minorité prolongée et minorité sexuelle :
Les deux vont-elles de pair ?
Qu’en est-il si une personne en minorité prolongée souhaite des relations sexuelles ? Cela peut-il
être considéré comme de l’abus d’une personne mineur par le partenaire ?
Mme F. Reusens :
« Je ne suis pas du tout une spécialiste du droit pénal mais je peux indiquer qu’en matière de
minorité prolongée, l’assimilation au mineur de – de 15 ans ne vaut que dans les rapports de droit
civil. Pour le reste, c’est l’âge réel qui compte (l’article 100ter du Code pénal dispose à cet égard que
lorsqu’il est fait usage du terme « mineur » dans le livre II, cette notion désigne la personne n’ayant
pas encore atteint l’âge de 18 ans).
A noter toutefois qu’il existe toute une série de dispositions du Code pénal qui ont récemment été
modifiées par une loi du 26 novembre 2011 modifiant et complétant le Code pénal en vue
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d'incriminer l'abus de la situation de faiblesse des personnes et d'étendre la protection pénale des
personnes vulnérables contre la maltraitance (Mon.b., 23 janvier 2012, p. 4569). Dans cette loi, il est
en réalité question de nouvelles infractions – l’abus de faiblesse notamment, prévu à l’articles
442quater et du Code pénal – , mais également d’un alourdissement de certaines peines pour des
infractions déjà prévues par le Code pénal, lorsque l’acte répréhensible a été commis envers « une
personne dont la situation de vulnérabilité en raison de l'âge, d'un état de grossesse, d'une maladie,
d'une infirmité ou d'une déficience physique ou mentale était apparente ou connue de l'auteur des
faits ». L’article 442quater vise quant à lui comme auteur « quiconque aura, alors qu'il connaissait la
situation de faiblesse physique ou psychique d'une personne, altérant gravement la capacité de
discernement de cette personne, frauduleusement abusé de cette faiblesse pour conduire cette
personne à un acte ou à une abstention portant gravement atteinte à son intégrité physique ou
mentale ou à son patrimoine ».
Concernant le droit civil, l’assimilation du mineur prolongé au mineur de moins de quinze ans vaut
tant pour les relations juridiques ayant trait à sa personne qu’à ses biens. Cette assimilation implique
que le mineur prolongé est soit sous le régime de l’autorité parentale, soit sous le régime de la
tutelle. »
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