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Le Pérou et sa capitale face aux risques telluriques
18 avril au 2 mai 2014
Félix MÉLOU
Antoine MEULEMAN
DEUXIEME ARTICLE, REDIGE APRES NOTRE SEJOUR A LIMA DU 18 AVRIL AU 2 MAI 2014
LE PEROU ET SA CAPITALE FACE
AUX RISQUES TELLURIQUES
Suite à notre séjour au Chili et après un bref passage en Bolivie, nous avons rejoint le Pérou.
Le Pérou est un pays riche et varié sur de nombreux aspects. D'abord de par son histoire : le Pays est le
berceau historique des civilisations Nazca (-200 - 600 ap. J-C) et Inca (1200 - 1530 ap. J-C). Les premiers étaient de
formidables ingénieurs hydrauliques. Leur réseau d’irrigation formé de puits et d'aqueducs souterrains est encore
utilisé de nos jours et leurs mystérieux géoglyphes (les fameuses lignes Nazca) n’ont toujours pas révélés tous
leurs secrets. Les seconds étaient incontestablement un peuple de bâtisseurs. Les temples et palais qu'ils ont
construit en gros blocs de pierre encastrés ont résisté aux nombreux épisodes sismiques qui ont affecté le pays et
sont encore visibles sur les sites archéologiques de Saqsaywaman ou du célèbre Machu Pichu.
La multitude de paysages caractérise aussi le Pérou, 3ème plus grand pays du sous-continent. On y distingue
trois grandes zones naturelles :
 la « costa » (côte) bordée par l'océan Pacifique, 60 % de la population, 10 % de la superficie
 la « sierra » (montagne), 30 % de population, 30 % de superficie
 la « selva » (forêt d'Amazonie péruvienne), 10 % de population, 60 % de superficie
Enfin le pays possède aujourd'hui l'une des économies les plus vigoureuses d’Amérique latine avec une
croissance moyenne de 6,3% sur les 10 dernières années. Cette économie forte a permis de forts investissements
dans les infrastructures notamment d'eau potable, d’électricité, routières ou encore dans les domaines de
l'éducation et de la santé. Comme pour de nombreux pays émergents, cette croissance a aussi renforcé les
inégalités et provoqué un exode rural massif.
Au-delà de ces problématiques sociales et urbaines auxquelles le pays fait face, ce dernier est aussi fortement
exposé aux risques naturels. La récurrence des inondations et glissements de terrain (amplifiés par le phénomène
El Niño) ou encore l’activité volcanique et sismique rendent le pays particulièrement vulnérable.
C'est sur les risques telluriques et principalement sismique que nous avons décidé de focaliser notre étude.
Nous avons passé deux semaines à Lima afin d'interroger des chercheurs, architectes et ingénieurs civiles
travaillant dans des grandes universités ou pour le gouvernement afin de comprendre les défis que le pays doit
relever afin de mieux affronter la prochaine catastrophe sismique majeure. Notre travail s'est donc développé
selon 3 axes. Nous avons déjà voulu connaître la culture constructive et la mentalité du pays sur ce sujet afin
d'avoir une première idée du niveau de vulnérabilité du pays. Nous nous sommes ensuite intéressés aux
différentes recherches réalisées dans le pays, à la fois dans le management des risques (évaluation et
préparation) mais aussi concernant l'aspect technique (renforcement et nouvelles méthodes constructives).
L'article suivant en donne plusieurs exemples et résume les idées qui nous ont été transmises lors de nos divers
entretiens.
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15 février au 15 septembre 2014
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Le Pérou et sa capitale face aux risques telluriques
18 avril au 2 mai 2014
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I) GENERALITES
Le Pérou, est situé sur une zone de subduction entre la plaque tectonique de Nazca et la plaque SudAméricaine, les secousses de magnitude 4 à 5, voire 6, y sont fréquentes. On dénombre même une dizaine de
séismes de magnitude supérieure à 6,5 depuis l’année 2000, notamment celui du 15 aout 2007 dans la ville de
Pisco, de magnitude 8 qui fit plus de 500 morts et détruisit une grande partie de la ville et celui du 23 juin 2001
près d'Arequipa (138 morts, de magnitude 8,4). Au XXème siècle, le séisme le plus meurtrier se produisit le 31 mai
1970 faisant 75 000 morts, 25 000 disparus et 200 000 blessés. Le séisme a affecté les régions d'Ancash et de
Libertad. La secousse créa des glissements de terrains (fréquent au Pérou) augmentant le nombre de victimes : il
s'agit de l'une des plus grandes catastrophes naturelles jamais enregistrée au Pérou.
Zone de subduction entre la plaque de Nazca et la
plaque sud-américaine
Plus particulièrement la ville de Lima, poumon économique et financier du pays, représentant 47 % du PIB (en
2012), est particulièrement vulnérable face au risque sismique. Elle concentre près du tiers de la population
péruvienne dans un désert de sable et de sols meubles. Ces 50 dernières années, deux séismes d'une magnitude
supérieure à 7,5 se sont produits à Lima, respectivement en 1966 (200 morts) et 1974 (252 morts). On parle
toujours à Lima du séisme de 1746 qui marqua la fin de l’Age d’or de la ville de Lima. Ce séisme suivit d’un
tsunami détruisit complètement la ville de Lima : seules 25 maisons restèrent debout et on dénombra entre
15000 et 20000 morts.
A) Aspect général du bâtiment et de l'urbanisme au
Pérou face aux risques naturels
En tant qu’étudiants ingénieurs, notre regard s'est rapidement porté sur l’état et le type de constructions
présents au Pérou. Nous avons voulu en savoir plus sur la culture du bâtiment dans le pays ainsi que sur
le fonctionnement actuel de ce secteur.
Tous d'abord il existe deux formes de constructions :
 Les constructions dites formelles; elles représentantes environs 30 % de l'ensemble des bâtiments. Ce
sont des constructions officielles et légales, qui ont été étudiées par des ingénieurs et mise en œuvre
par des entreprises de construction agrées. Celles-ci sont surtout présentes dans les grandes villes
comme Lima.
 Les constructions informelles qui constituent la majorité des bâtiments (environ 70%). Ce sont des
habitations construites par les habitants eux-mêmes illégalement et qui ne sont soumises à aucun
contrôle.
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ZONA DE SECURIDAD
SISMICA
A l'intérieur de la plupart des
bâtiments, on peut observer des
affiches vertes marquées d'un S
correspondant à une "zone de
sécurité en cas de séisme". Cellesci sont déposées généralement au
niveau des poutres et des poteaux
par des représentants officiels de
la municipalité. Depuis 10 ans, les
nouveaux
projets
doivent
inclurent ces zones dans les
plans dès la conception du
bâtiment pour pouvoir obtenir
un permis de
construire. Pour
les constructions
antérieures
néanmoins des
doutes subsistent
quand à la
véritable sécurité
de ces zones.
En plus de ces "zones de
sécurité", on peut observer des
cercles jaunes peints sur le sol
dans la rue et les cours
de certains
bâtiments.
Ils
constituent
des
zones
de
rassemblement en cas de séisme.
Plusieurs exercices d'évacuation
sont réalisés chaque année par la
sécurité civile Péruvienne. Si ces
exercices permettent de rappeler
à la population qu'elle vit dans
une zone sismique, on peut
s’interroger sur leur réalisme
(annoncés un mois à l'avance, pas
d'obstacle et peu pris au sérieux).
Le rôle de ces zones de
rassemblement reste aussi flou:
que se passera-t-il une fois que
tout le monde sera dans les ronds
jaunes (si la population suit
vraiment les consignes) ?
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Les constructions formelles sont supposées résister à un grand séisme.
Ceci dépend néanmoins du respect des normes établies par le ministère de
l'habitat et de la construction (calcul de structure, résistance des
matériaux, procédés de construction). Concernant les auto-constructions, il
est très peu probable qu'elles résistent à un séisme de forte magnitude.
Au-delà du risque sismique, les risques liés à la nature du terrain sont
très important, notamment à Lima. La ville a connu un développement et
une croissance démographique très forte ces dernières années. Elle
représente aujourd'hui 30% de la population du pays. En 60 ans sa
population a été multipliée par 11 et sa taille par 15. Cette expansion
massive a entraîné un urbanisme anarchique et une mauvaise gestion des
sols et de l’aménagement urbain. Les habitants ont donc installé leur
maison où ils le pouvaient sans aucune prise en compte du terrain. On
trouve donc de nombreuses habitations sur des terrains sableux, dans des
zones à risques d’éboulement et de glissement de terrains, où encore en
bas des vallées au bord des rivières où l'accumulation des déchets entraîne
une liquéfaction des sols.
Lima n'est pas la seule ville affectée par l’inexistence d'une politique
d'urbanisme et d’aménagement du territoire cohérente. 60% des
communes ne posséderaient pas de plan de développement urbain. Cette
lacune pose un problème évident de gestion de la construction face aux
risques naturels. Elle entraîne aussi des problèmes lors de la reconstruction
post-catastrophe. Après le séisme de Pisco en 2007, le bonus de 6000 N.S
(2000 $) donné par l’État, pour la reconstruction de chaque maison, n'a pas
réellement
bénéficié à la
population. En
effet, comme
beaucoup de
constructions
affectées
étaient
informelles, les
habitants
ne
possédaient
aucun titre de
propriété
et
n’étaient
inscrits
sur
aucun registre
municipal.
Croissance Urbaine de Lima de 1940 à 2005
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Pourtant, au Pérou, il y a énormément de normes. La réglementation concernant la construction est bonne et
prend en compte le risque d'un important séisme ou la nature du terrain. Mais le manque de contrôle de
l'application de ces normes (notamment concernant les auto-constructions) pose un sérieux problème de
vulnérabilité des habitations. Légalement, c'est aux municipalités et non à l’État de réaliser ces contrôles. L’État
n'a pas non plus le pouvoir de forcer les municipalités à les réaliser et celles-ci n'ont ni les moyens financiers ni les
moyens techniques pour les réaliser. Les normes de constructions ou les cartes de risques indiquant les zones
inconstructibles ne restent donc que du papier et les mauvaises pratiques continuent. Plusieurs exemples
peuvent être cités concernant les 2 principales méthodes de constructions au Pérou :

Les maisons en maçonnerie confinée : ce sont les habitations
que nous avons le plus observé. Quasiment la totalité des
bâtiments de moins de 5 étages situés dans les villes utilisent
cette technique de briques encadrées par une structure béton
poteaux/poutres classique. Mais le plus souvent, la qualité des
briques ne correspondent pas aux demandes du code de
maçonnerie confinée. La structure en béton armé peut
également être concernée par l'utilisation de mauvais
matériaux. Beaucoup de bâtiments de ce type sont aussi sujet au
problème architectural de poteau raccourci ("short column
effect"). C'est un poteau qui n'est pas entouré par la maçonnerie sur toute sa hauteur, créant un petit
poteau en partie haute très fragile, qui rompt facilement lors des déplacements imposés par un séisme
(cisaillement).
Rupture d'un poteau raccourci après un séisme
Illustrations du "short column effect" : Restriction du déplacement latéral et fissuration typique
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
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Les maisons en adobe : ce sont des constructions traditionnelles faites en briques d'argile séchées au
soleil et mélangés avec de la paille. Ce matériau peu coûteux et facile à mettre en œuvre jouit d'une très
grande popularité dans les zones rurales (et pauvres) du pays. On estime que 30% des habitations au
Pérou sont encore réalisées en adobe. Or si ces constructions ne sont pas renforcées, elles ne résistent
pas aux secousses telluriques. Lors d'un séisme, les murs des maisons d'adobe s'effondrent vers
l'extérieur et le plafond de boue séchée, pouvant peser jusqu'à 10 tonnes, s'écroule sur les occupants. La
gravité des dégâts et des pertes suite au séisme de 1970 (60 000 maisons détruites et plus de 50 000
morts) est largement attribuable à ce mode de construction des maisons
En plus des normes techniques (code de la construction), des normes administratives définissent les règles de
construction. Le principal problème de ces dernières est qu'elles entraînent une lenteur importante pour obtenir
un permis de construire. Le prix de ce permis est aussi élevé. Ces normes administratives poussent donc d'une
certaine manière les constructions informelles à se développer.
Il existe pourtant des solutions que le ministère du logement et de la construction (MVCS) envisage. L’État
pourrait par exemple proposer une assistance technique aux personnes dépourvues de moyen afin d’améliorer la
qualité des constructions. Les normes techniques et administratives peuvent aussi évoluer dans un sens plus
adapté au pays. Concernant l'adobe par exemple, le bureau de normalisation réfléchit à des méthodes de test de
résistance de la terre pouvant être réalisés sur place et facilement. En effet, il existe peu de laboratoires dans le
pays, de plus les constructions traditionnelles en adobe sont construites de façon artisanale et souvent situées
dans des zones reculées. Faciliter l’accès au permis de construire permettrait aussi une meilleure gestion de
l'urbanisme et faciliterait le contrôle sur les auto-constructions.
B) Mentalité et aspect culturel
Lors de nos différents entretiens nous avons essayé de connaître la mentalité des habitants face aux risques
naturels. La réponse a été unanime. Les citoyens ne sont pas préoccupés par ces questions. Malgré les nombreux
épisodes catastrophiques, la population préfère ignorer les problèmes. Plusieurs exemples peuvent être évoqués.
Après le séisme de 2007 dans la région d’Ica et Pisco, seulement 5 maisons d'adobe ont été reconstruites avec des
techniques de renforcement métallique pourtant peu coûteuses, alors même que ces techniques ont fait leurs
preuves. De même, chaque année, des habitations sont emportées par des glissements de terrain après les fortes
pluies saisonnières qui s'abattent sur les hauteurs de Lima. Pourtant les habitants reconstruisent aux mêmes
endroits. Ces pratiques peuvent s'expliquer par les préoccupations prioritaires de la population telles que se
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nourrir, l'accès à l'eau, la sécurité ou encore l'éducation. Pour certains, comme pour l’ingénieur Jose Mesa Quadra
certaines personnes ne veulent tout simplement pas entendre la réalité du problème : les catastrophes naturelles
ne sont que l’œuvre de Dieu. La plupart de nos interlocuteurs sont donc restés très pessimistes sur l’évolution de
la mentalité des populations.
Néanmoins, selon Roberto Prieto (architecte au bureau d’étude et de normalisation du ministère de
l'habitation et du logement) la croissance économique et le développement du pays entraînent progressivement
un changement de mentalité car la population se préoccupe de plus en plus de la qualité de vie et donc de leur
logement. Mais un problème culturel concernant le respect des règles existe au Pérou. Les gens n'ont
simplement pas l'habitude de respecter les règles que ce soit pour la circulation routière ou dans la
construction. Il y a un gros problème d'informalité à tous les niveaux (permis de construire, mise en œuvre, etc.)
et ce problème n'affecte pas seulement la construction. Par exemple 40% de l'eau à Lima est prélevée
clandestinement sur le réseau.
Dans ce contexte, il est difficile de mobiliser les pouvoirs politiques sur les problèmes d'urbanisme et
d'habitat face aux risques naturels. Mêmes si les enjeux sont connus, la question est ignorée. Les municipalités
ne veulent pas non plus s'opposer aux populations pauvres qui peuplent les zones à risques car ces populations
constituent leur principal support électoral.
II) ANALYSE ET GESTION DES RISQUES
Deux exemples d'études
Face à l’importance du risque sismique qui existe dans la ville de Lima et à la catastrophe qu'un tremblement
de terre pourrait engendrer, différents programmes ont été réalisés ou bien sont en cours de réalisation afin
d’aider la ville de Lima à se préparer à un tel événement. Il s’agit de déterminer les raisons de la vulnérabilité de la
ville de Lima, de les analyser et dans la mesure du possible de proposer des solutions pour les endiguer.
A) Le SIRAD
On peut notamment mentionner la réalisation de “el Sistema de Información sobre Recursos para la Atención
de Desastres” : SIRAD (le Système d’information sur les ressources pour les secours en cas de catastrophe). Ce
programme a été en grande partie mené par une équipe de chercheurs de l'Institut de Recherche pour le
Développement (IRD) et de l'Institut Français d'Etudes Andines (IFEA), avec divers soutiens logistiques,
administratifs, techniques et institutionnels. Ce travail a été réalisé entre Avril 2010 et Février 2011 (10 mois au
total). Il a été réalisé à l’échelle des agglomérations de Lima et Callao ce qui représente environ 8,5 millions
d’habitants, soit 30% de la population péruvienne.
Un SIRAD renforce les capacités et les performances de coordination entre les différents niveaux de
gouvernement (national, régional et local). L'objectif principal du SIRAD est d'avoir un système d'information
géographique et d'analyse des ressources essentielles afin de prendre les décisions adéquates suite à la survenue
d'un tremblement de terre et/ou d’un tsunami dans un territoire donné.
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HISTORIQUE
La mise en place d’un SIRAD à Lima, fait suite à une recherche scientifique menée entre 1999 et 2004 par
l'Institut de recherche pour le développement (IRD) en Equateur, en coordination avec le département de la
planification urbaine et du logement de la métropole de Quito. Le but de cette étude était d'améliorer la
prévention des risques de catastrophes naturelles ou causées par l'homme dans la ville de Quito. Pour cela une
étude géo-référencée des éléments essentiels qui permettent le fonctionnement et le développement de la ville a
été faite. À la suite de cette enquête, le "système d’information des risques concernant les éléments essentiels et
la mobilité dans la métropole de Quito" a été conçu.
Cet instrument a particulièrement intéressé la métropole de Lima qui a désiré développer un outil de gestion
de l'information, avec une orientation plus opérationnelle pour l'intervention d'urgence.
Ainsi, le SIRAD adapte le cadre de l'étude réalisée à Quito. L'étude ajoute à l'identification des éléments
essentiels au fonctionnement normal du territoire pour la prévention des risques (ce qui a été réalisé à Quito),
l'identification des ressources essentielles pour la gestion d'une situation de crise, afin de se préparer en cas de
catastrophe à Lima.
Cette approche de la définition du risque, en insistant sur les éléments essentiels d'un territoire, plutôt que
sur les menaces, était et reste encore aujourd'hui, entièrement nouvelle. Ce que le territoire est susceptible de
perdre en cas de catastrophe constitue la réelle vulnérabilité de celui-ci face aux risques. Il faut, pour optimiser la
prévention des risques, d'abord identifier les éléments et ressources essentielles du territoire, afin de protéger en
priorité le fonctionnement et l'intégrité d’une zone. Ainsi, le risque d'un territoire est défini par la possibilité de
perdre des ressources vitales, plutôt que par les risques externes potentiels. Cela confère à l'étude un caractère
plus pratique que les investigations précédentes car elle est principalement fondée sur l'étude des éléments du
territoire.
ELABORATION
A Lima le SIRAD a été conçu comme un instrument pour
analyser les différentes ressources et biens essentiels pour
l'intervention d'urgence et le relèvement précoce liés aux dix
domaines clés suivant :
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
8.
9.
10.
Les centres de décision et d'intervention.
L'approvisionnement en eau.
La nourriture.
Les soins d'urgence.
L'approvisionnement en énergie.
Les transports et les routes.
Les télécommunications.
Les zones potentielles de refuge.
Les domaines potentiels de résidus.
Les zones de concentration des activités économiques.
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Après une étude des ressources disponibles dans ces dix secteurs, SIRAD a créé une base de données géoréférencées qui permet une analyse de la disponibilité, de la fonctionnalité, de la vulnérabilité et de l'accessibilité
de ces ressources, dans le but d'améliorer la préparation aux catastrophes et la gestion de l'urgence. Un serveur
de cartes facile à utiliser permet de visualiser l'ensemble des informations concernant les ressources stratégiques.
La recherche peut être adaptée aux besoins particuliers de chaque situation d'urgence.
L’une des nouveautés de ce système d’information est de partir de l’existant et non pas d’une hypothèse
concernant la catastrophe (magnitude du séisme et/ou hauteur du tsunami). Il présente donc l’avantage d’avoir
toutes les données nécessaires pour sa réalisation. Ce système repose également sur la capacité de la population
à s’organiser seule lorsqu’elle est privée de contact avec l’administration. Il est donc primordial de lui fournir les
éléments clés pouvant lui permettre de survivre et de s’organiser juste après la catastrophe : il s’agit des
dix thèmes qui ont été cités ci-dessus.
On peut identifier plusieurs étapes nécessaires pour le plein développement du SIRAD :
1. Construction d'une base de données géo-référencées des ressources essentielles existantes
avant l’arrivée d’un sinistre majeur.
2. Identification des ressources essentielles dans une situation d'urgence. Huit ateliers sur les ressources
nécessaires à la réponse et au relèvement précoce ont été réalisés. Le but de ces ateliers était de
réunir des spécialistes de chaque secteur afin de réfléchir sur l'identification des ressources
essentielles, à la fois dans une situation normale et dans une situation d'urgence.
3. Analyse de la vulnérabilité des ressources essentielles et système de réponse d’urgence. Les formes de
vulnérabilité considérée sont les suivantes :
o L'exposition des ressources essentielles aux risques envisagés (par exemple, sismiques et
risques de tsunamis)
o Les difficultés potentielles de l'accessibilité de ces ressources.
o La vulnérabilité structurelle de certaines ressources.
o Les problèmes d'accès de la population, en particulier les plus vulnérables, à ces ressources.
4. Préparation d'un serveur de cartes accessible via Internet, permettant aux utilisateurs non spécialisés
en SIG d’interroger la base de données et de pouvoir produire des cartes en fonction de leurs besoins.
5. Formation aux individus et aux institutions liées à la prévention des catastrophes, afin qu'ils sachent
utiliser les informations dans la base de données SIRAD de façon efficace.
6. Préparation du document de synthèse des ressources pour une réponse immédiate et une reprise
rapide suite à la survenance d'un tremblement de terre et/ou d’un tsunami dans la région
métropolitaine de Lima et Callao.
Prenons différents exemples de travaux réalisés :

LES SOINS D’URGENCES :
Il s’agit tout d’abord de recenser l’ensemble des entités pouvant contribuer aux soins d’urgences : hôpitaux,
cliniques, etc. Puis pour chacun de ces éléments, on détermine leur degré d’importance. Plusieurs critères
rentrent en compte :
o
o
la capacité à accueillir un grand nombre de personnes,
la situation géographique (plus un hôpital est esseulé dans sa zone urbaine plus il est important),
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les spécificités médicales (si par exemple une clinique est la seule à présenter un service pour les
grands brûlés, elle sera incontournable)
l’accessibilité (il est préférable de favoriser les lieux facilement accessible)
Une fois déterminée l’importance de chaque lieu de soins, il revient aux autorités de faire des plus importants,
« des places fortes à défendre » en cas de catastrophe.

L’APPROVISIONNEMENT EN EAU POTABLE :
Là aussi le premier travail est un travail de recensement. On comptabilise tous les éléments du
fonctionnement en temps normal de l’approvisionnement en eau. C’est-à-dire : l’usine de production d’eau
potable, le réseau de distribution, les sorties d’eau, les réserves, puits... Puis pour chacun de ces éléments on
détermine son importance et son degré de vulnérabilité. Plus un élément est clé plus il sera important de le
protéger et de diminuer sa vulnérabilité.
Dans un deuxième temps on recense toutes les solutions qui pourraient être utilisées en cas de crise. C’est-àdire par exemple les entreprises privées pouvant mettre à disposition des camions citerne pour distribuer de l’eau
ainsi que les emplacements permettant le remplissage de ces citernes, les réserves d’eau de secours, etc.
La connaissance de ces données, géo localisées, permettra d’organiser une réaction plus rapide et plus efficace
face à la perte d’une partie du réseau de distribution d’eau en cas de catastrophe.

TRANSPORT ET ROUTES :
Les données d’accessibilité sont une nouveauté dans l’étude menée à Lima. Il s’agit de déterminer les axes
importants à maintenir ou bien à rétablir rapidement suite à un séisme et/ou tsunami. En effet il est par
exemple important de pouvoir assurer le lien entre Callao (où se situe le port, l’aéroport et les combustibles) avec
Lima (où se situe tout le reste : ressources, administration, équipements civils) qui sont séparées par le Rio Rimac.
De même les voies d’entrées et de sorties de la ville de Lima (peu nombreuses : 3 au total) présentent un enjeu
primordial pour l’acheminement des secours, des denrées, vers la ville de Lima. Enfin au sein même de la ville
certaines voies de circulations présentes la même importance stratégique.
Un travail de recensement a donc été réalisé pour déterminer les voies à rétablir en priorité en fonction de
leur capacité à desservir et à relier les emplacements stratégiques mais aussi en fonction de la rapidité et de la
facilité avec laquelle ces axes pourront être remis en service. Par exemple un axe majeur ayant recours à des
tunnels ou bien surplombé par de nombreux ponts ne sera pas retenu.
Au-delà de la prévention aux risques naturels, la gestion du trafic urbain est un réel enjeu
pour la ville de Lima
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UTILISATION
Actuellement, les principaux utilisateurs des ressources du système d'information pour les secours en cas de
catastrophe (SIRAD) sont l'Institut National de la Défense Civile (INDECI), la municipalité métropolitaine de Lima
(MML), le gouvernement régional de Callao, et les municipalités des districts qui composent les provinces de Lima
et de Callao.
Alors que, de par sa nature, l'utilisation de SIRAD est particulièrement axée sur la réponse à une situation
d'urgence (en particulier les urgences liées aux tremblements de terre et/ou tsunami), il convient de noter que le
SIRAD est utile dans le domaine de la préparation, pour le développement, la rénovation ou l'amélioration des
instruments et des actions de gestion publique suivantes :
o
o
o
o
Simulations à l'échelle nationale, dont le personnel a reçu une formation préalable à l'utilisation du
SIRAD afin d'utiliser l'outil pour la préparation et le développement de ces simulations.
Préparation du protocole de première réponse de la MML (72 premières heures après l'apparition de
la situation d'urgence)
Mise à jour du plan d’opération d'urgence de la MML.
Organisation de simulations de séisme et/ou tsunami menées par la MML. Notamment pour
coordonner la riposte du secteur de la santé.
En conclusion si une catastrophe majeure venait à toucher le Pérou, les soins d'urgence impliqueront la
participation d'un grand nombre d’entités internationales, nationales, régionales et locales. L’accès à
l'information sur les ressources disponibles, le fonctionnement, la vulnérabilité et l'accessibilité sera certainement
une priorité pour prendre des décisions rapidement, de façon efficace et opportune. En ce sens, le SIRAD se
présente comme un outil fondamental, pour guider le personnel technique et faciliter la gestion des différents
acteurs, dédié aux décisionnaires.
NEANMOINS
Malgré sa volonté de mettre en place ce système d’information sur les ressources pour les secours en cas de
catastrophe, les conclusions sont peu souvent prises en compte par la municipalité de Lima qui peine à investir de
l’argent dans la rénovation des édifices jugés essentiels.
Par ailleurs les organisations de « simulacres » de séismes ou de tsunamis sont trop souvent éloignées de la
réalité : la population est prévenue des semaines à l’avance, les rues sont bouclées, l’effet de panique n’est pas
pris en compte, et le « simulacre » prend fin à la simple évacuation de la population hors des bâtiments : dans la
rue.
De même les simulations de coordinations, de prises de décisions entre les différents acteurs aux niveaux
national, régional et municipal dans les premières heures suivant la catastrophe sont rarement réalistes. Les
acteurs parlent au conditionnel, se plaignent de coupure téléphonique ou bien d'internet…
Finalement, la mairie de Lima a entre ses mains un outil de grande valeur dans la gestion des risques. Il lui
appartient maintenant d'en faire le meilleur usage possible afin de se préparer à l'éventualité d'une catastrophe.
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B) Etude de l'exposition des écoles de Lima face au
risque sismique
Lors de notre visite à La Pontificia Universidad Católica del Perú (PUCP) nous avons pu nous entretenir avec le
Dr Sandra Santa Cruz, spécialiste des risques à la faculté d'ingénierie civil. Elle nous a présenté une étude en cours
de réalisation portant sur l'exposition au risque sismique des collèges et écoles publics de Lima.
L’étude porte sur 1512 collèges et écoles publics de la municipalité et a bénéficié de l'aide de la banque
mondial (utilisation du logiciel CAPRA) et d'une trentaine d’élèves de l’université.
Le but de l’étude est d’évaluer l'exposition aux risques des collèges et écoles publics de la capitale grâce à des
indices quantitatifs (dommages en cas de séisme, nombre d’élèves affectés, coût du renforcement, etc). Pour
pouvoir réaliser cette évaluation, il a d'abord fallu obtenir des informations descriptives sur chacun des
bâtiments. La collecte de ces informations fait forcement appel à des hypothèses qualitatives et reste donc dans
une certaine mesure incertaine.
L’évaluation des bâtiments prend en compte les éventuelles dommages en cas de séisme (de la simple fissure
à la destruction), en fonction du type et de l’âge de la construction (construction récente en béton d’après 1970,
maçonnerie, bâtiment historique, etc.), de l’état de sa structure, de son architecture, etc. L’étude définit donc un
niveau de destruction pour chaque écoles en fonction de l’accélération (faible/moyenne/forte) en décrivant le
nombre d’éléments du bâtiment affectés pour cette accélération (X 1% poteaux, X2% poutres, X3% fenêtres,...). Elle
estime aussi le coût de la réparation de chacun de ses éléments (poteau = Y1N.S., poutre= Y2N.S., fenêtre=Y3N.S.).
On peut ainsi estimer le coût de réparation en fonction de l'accélération (Coût=X1xY1+X2xY2+X3xY3+...).
A partir d'une étude définissant 3000 scénarios de séisme éventuel pouvant affecter Lima, on établit une
courbe de la fréquence (occurrence) en fonction de l'accélération (c'est à dire de l'intensité sismique). Puis
multiplie l'accélération (a) par un facteur F dépendant du sol (mais indépendant de a) afin de prendre en compte
la localisation des écoles (axF).
On obtient de cette façon des données probabilistes sur le risque d'affectation des écoles et collèges de Lima
dans le temps.
On peut aussi extraire de cette étude plusieurs informations intéressantes :
Le premier résultat marquant est qu'en cas de fort séisme 69% des écoles publiques seraient très fortement
affectées (détruites ou à détruire).
D'autres informations sont instructives. On remarque par exemple que les constructions datant d’après 1970
sont peu affectées et sont présentes partout sur le territoire de Lima. Inversement, d'autres types de construction
comme celle en maçonnerie ancienne, aussi répartie sur l'ensemble de Lima seraient durement touchées par un
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séisme important. En fait la nature du sol et donc l'emplacement de l'école n'influe presque pas alors que le bâtis
joue beaucoup.
Cela permet de conclure que le renforcement des bâtiments est une solution efficace et même nécessaire.
L’étude détermine aussi une évaluation des coûts du renforcement des bâtiments le nécessitant. Il apparaît
clairement que le ratio (dépense probable en réparation/reconstruction sur 50 ans par exemple) /(coût de la
mitigation) est largement supérieur à un. Pour le docteur Santa Cruz, il faut donc désormais bâtir une stratégie de
mitigation.
Graphique représentant une évaluation des coûts probables et réelle en fonction du temps
Définir une stratégie de mitigation signifie définir le processus de renforcement à établir dans le temps. Celleci ne doit pas seulement se baser sur des critères d'efficacités financières comme par exemple :
M1=M2=M3=M4=...=M et (Dp1-Dp2) > (Dp2-Dp3) > (Dp3-Dp4) > ...
Ce schéma consisterait à dépenser régulièrement une somme d'argent constante M, en privilégiant d'abord les
dépenses les plus efficaces en termes de mitigation, c'est-à-dire qui font économiser le plus d'argent en cas de
séisme.
En effet, il faut aussi prendre en compte des critères d'urbanismes, des critères sociaux, ou des critères liés à
la politique d’investissement. Il peut être par exemple plus judicieux d'investir en priorité l'argent dans les
collèges des quartiers pauvres où il y a beaucoup moins de zones de refuge car les constructions sont de faible
qualités, ou de porter son attention sur le nombre d’élèves, l’éloignement de l’école, etc... C'est à l'ensemble des
décisionnaires politiques (ministère de l’éducation, des finances, de la construction, municipalité de Lima,...)
d’établir la meilleur stratégie de mitigation possible.
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Conclusion
Bien que la méthodologie, l'échelle et le but de ses 2 études soit différents, elles mettent en évidence
l'importance de prendre des mesures permettant de limiter l'impact d'une catastrophe naturelle (en particulier
un séisme) sur la population de Lima. Lors de nos deux entretiens, la vulnérabilité de la ville a été évoquée. Pour
ces spécialistes, se préparer à un tremblement de terre reste un défi majeur que la municipalité doit s'empresser
de relever.
III) DEVELLOPEMENT DES TECHNIQUES DE
CONSTRUCION
Comme nous l'avons vu précédemment, en cas de séisme majeur, une grande partie de la population risque
d’être affectée. Nous avons aussi constaté qu'il était possible de mieux se préparer à une situation d'urgence et
de limiter l'ampleur d'une catastrophe. Mais il est aussi possible d'envisager des solutions techniques pour agir
avant la catastrophe.
Selon l’ingénieur José Mesa Quadra, il y a deux sujets distincts :
o
o
Les nouvelles constructions : elles sont sujettes à de bonnes normes et il existe un code parasismique
récent (2007). Néanmoins la politique d'habitation n’intègre pas assez la réalité du pays et les normes
techniques ou administratives devraient mieux s'adapter à la culture constructive du pays (cf.
paragraphe I)
les constructions existantes : elles devraient être renforcées. Beaucoup de solutions sont
envisageables. Les évolutions technologiques dans le secteur du bâtiment devraient servir au
renforcement parasismique.
A) Recherche sur le renforcement des constructions
en Adobe à l’université pontificale du Pérou
Au Pérou, les populations les plus pauvres, comme souvent, sont les plus exposées aux risques, notamment
sismique. Les peuples Andins qui construisent leur habitation en adobe lourd et peu résistant risquent d’être très
fortement touchés en cas de secousses. Pourtant ce type de construction représente encore 30% des
constructions péruviennes.
Pour ces raisons, suite au tremblement de terre dévastateur du 31 mai 1970, l'Université Pontifical du Pérou
(PUCP) situé à Lima s'est intéressée au renforcement des constructions en adobe.
RENFORCEMENT INTERNE (CONSTRUCTION NEUVES)
L’analyse de la réponse de bâtiments de terre à des essais statiques est compliquée. En raison de leur grande
masse, de leur faible résistance à la tension et leur fragilité, il est difficile d’appliquer des charges concentrées aux
modèles de terre. Les premiers tests réalisés à l’université catholique utilisaient donc une table à bascule.
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L’inclinaison générée par la table crée une composante horizontale du poids propre qui modélise la force d’inertie
du séisme.
Grâce à cette technique de test, plusieurs méthodes de renforcement utilisant du bois, du bambou ou du
treillis soudé ont pu être testées sur des modèles à grande échelle. A ce stade des recherches, la procédure de
renforcement la plus efficace consistait à appliquer des cannes de bambou verticale sur la face intérieure des
murs avec un espacement d’une demi fois la largeur du mur. L’ensemble était liaisonné par cannes fendues
horizontales placées toutes les quatre couches de briques d’adobe. Les tests de ce renforcement ont en effet
montré une importante augmentation de ductilité du mur.
Dès 1984, des essais de simulation sismique sur des
modèles en adobe grandeur nature sans toit ont pu être
réalisés grâce à une table de vibrations unidirectionnelle. En
soumettant ces modèles à plusieurs mouvements sismiques
d'amplitude croissante (dérivés de la composante
longitudinale du séisme du 31 Mai 1970) avec ou sans
cannes de bambou en guise de renforcement, les recherches
ont pu se développer. Il a été démontré que l'ajout d'une
poutre en bois permettrait d’empêcher la séparation des
murs et donc l'effondrement hors plan de ceux-ci. La
nécessité des renforcements en bambou horizontaux a aussi
été confirmée.
Table de simulation sismique
Modèle de construction avec une armature en bambou en
cours de réalisation
RENFORCEMENT DE L'EXISTANT : 1990-2003
Le travail de recherche expérimental s'est ensuite concentré sur les constructions
existantes, avec comme objectif de réduire la vulnérabilité sismique des bâtiments en
terre. Plusieurs matériaux comme les cordes de fibres naturelles, le bois, des grillages, et
des treillis en acier soudés (voir photo) ont été placés à des points critiques de la
structure afin de réaliser le renforcement. La meilleure solution trouvée a été l'utilisation
de treillis soudés légers appliqués sur les deux faces de la paroi, verticalement dans les
angles et horizontalement au niveau de la partie supérieure des parois à la manière de
poutres et de poteaux. Les tests ont été réalisés sur des murs en U afin d'augmenter le
nombre d'effets directionnels testés à chaque simulation sismique. Comme complément
pratique au programme de recherche expérimentale, certaines maisons traditionnelles
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situées dans plusieurs parties du Pérou ont été renforcées grâce à cette technique. Après le puissant
tremblement de terre de 2003 qui a frappé le sud de Pérou, alors que des milliers de maisons de terre dans le
littoral et dans les régions andines étaient touchées, ces maisons rénovées grâce à des mailles d’acier enduites de
sable et de ciment ont résisté. Cette technique devenait donc un modèle pour la reconstruction de plusieurs
centaines de maison dans la région. Pour corroborer l'efficacité de ce renfort, trois maisons modèles avec une
disposition géométrique similaire à celles bâties lors de reconstruction ont été testées dynamiquement:
o
o
o
le premier modèle (URM- 01) a été construit sans aucun renforcement afin de servir de base pour les
modèles renforcés.
le second modèle a été renforcé sur les deux côtés de la paroi avec des bandes horizontales et
verticales de treillis soudés d'acier fin protégé par un mortier de ciment (RM- SM). Les bandes
verticales ont été placées à tous les angles, et la bande horizontale a été placée sur la partie
supérieure des parois, simulant une poutre courante sur le pourtour du bâtiment.
le troisième modèle (RM- RC) était similaire au précédent, mais une poutre filante en béton armé (en
partie haute de tous les murs) et ancrée aux murs par des connecteurs de cisaillement aux angles a été
ajoutée.
Tous les modèles ont été soumis à plusieurs mouvements sismiques d'intensité croissante. La performance
sismique du modèle non armé a été utilisée afin d'établir une relation entre le déplacement de la table et l'échelle
d'intensité modifiée de Mercalli (MMI). Les résultats ont montré que pour les mouvements importants,
équivalent à une intensité MMI = X, l'effondrement partiel et l'instabilité globale de la structure ne sont pas évités
avec ce renfort. Les bandes de mortier armé sont beaucoup plus rigides que les murs en terre et ont tendance à
absorber la plupart des forces sismiques jusqu'à ce que la résistance élastique soit atteinte et qu'une rupture se
produise.
UTILISATION
2003-2006
DE MAILLE POLYMERE COMME UN MATERIAU COMPATIBLE POUR LA RENFORCEMENT
Depuis 2003, des matériaux polymères ont été utilisés dans le travail expérimental comme une alternative
pour le renforcement des bâtiments en terre. L'avantage de ces matériaux vient de leur compatibilité avec la
déformation de la paroi de terre et de sa capacité à fournir une transmission adéquate de sa résistance à la
traction aux murs.
Lors du premier programme expérimental, des murs d'adobe en I différemment renforcé ont été soumis à des
tests statiques cycliques. Parmi les méthodes de renforcement, des mailles de polymères appliquées sur la partie
interne et externe du mur ont été utilisées. Les résultats ont montré que les mailles de polymère confinent le mur
en adobe jusqu'à des niveaux élevés de déplacement horizontal, ce qui permet à une grande quantité d'énergie
de se dissiper par rapport à la paroi non renforcée ou au renforcement de mailles d'acier rigides enduites de
mortier.
Durant les années suivantes plusieurs études comparatives ont été réalisées afin d'évaluer les qualités
dynamiques des différents types de renforcements externes en maillage naturel ou industriel. Deux maisons
géométriquement identiques ont été construites. L'une d'elle (RM -NM) était renforcée avec à l'aide de cannes de
bambou faisant offices d'armatures verticales et de cordes en fibres naturelle comme brides horizontales. Le
renforcement a été placé des deux côtés de la paroi et relié par un petit fil de cabuya (fibre naturelle) passant à
travers un trou préalablement percé dans le mur. Le deuxième modèle (RM- PM100) a été renforcé par une
maille polymère (géogrille) recouvrant complètement les murs des deux côtés. Le maillage a été relié avec du fil
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plastique à travers des trous forés dans les parois espacées de 40 cm dans les deux directions orthogonales. Sur
les deux modèles, un mortier de boue a été appliqué jusqu'à la moitié de la structure dans le but d'étudier son
effet sur l'efficacité de la technique de maillage.
Les résultats ont montré que placer un maillage externe naturel ou industriel des deux côtés des murs et de les
liaisonnées à travers l’épaisseur du mur est efficaces pour éviter un effondrement partiel ou total du bâtiment en
adobe. Si le maillage n'est pas couvert de stuc de boue, la résistance initiale est la même que le mur non armé, et
le maillage devient effectif une fois que le mur est fissuré. Après la fissuration, le maillage confine les différents
éléments de la paroi cassée, empêchant ainsi l'effondrement partiel ou total. Dans les deux cas, l'enduit de boue
sur le maillage augmente considérablement la résistance au cisaillement initiale et la rigidité de la paroi. Il
contrôle les déplacements latéraux et limite la fissuration de la paroi dans une large mesure. Ceci est
particulièrement notable dans le cas de la maille polymère. Sur la base de ces résultats, le maillage de polymère
placé sur le mur entier peut être considéré comme la limite supérieure de la quantité de renforcement industriel
externe car la maille est déjà très resserrée. L'alternative naturelle, au contraire, peut presque être considérée
comme la limite inférieure de renforcement externe naturelle, du fait de la plus grande distance entre ses
éléments horizontaux et verticaux.
Après ce projet, des tests dynamiques supplémentaires ont été effectués sur des modèles de géométrie
identique mais possédant des quantités et des qualités variables de mailles de polymère, afin d'essayer de réduire
l'ensemble du coût de la technique de confinement. Trois autres modèles ont été testés en utilisant les mêmes
caractéristiques géométriques et les mêmes mouvements sismiques que dans les deux précédents projets. Le
modèle RM-PM75 a été renforcé en couvrant 75% de la paroi de la surface avec une maille de polymère, le
modèle RM-PM50 a été recouvert à 50% de sa surface du mur et le modèle RM-LCM a été renforcé à 100% sur
une paroi longitudinale et à 70% sur le mur parallèle mais avec une maille de polymère bon marché. Les résultats
de ce dernier groupe d'essais dynamiques ont montré que la quantité de mailles placée sur les parois est plus
importante que la résistance de la maille elle mêmes. En effet le mur entièrement renforcé avec une maille bon
marché avait une meilleure performance sismique que les modèles renforcé à 75% avec mailles plus résistante.
Dans tous les cas, le test a également confirmé l'effet bénéfique d'avoir un enduit de boue couvrant la maille.
Celui-ci doit avoir une épaisseur minimale pour assurer l'efficacité du maillage et la protection à l'environnement.
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BILAN ET UTILISATION
L'ensemble de ces tests a pu être résumé dans un tableau indiquant les dommages des différents modèles en
fonction de l’intensité sismique. Plusieurs conclusions générales peuvent être tirées de ces travaux :
o
o
pour éviter la destruction, le renforcement doit être compatible avec la déformation du mur en terre.
Dans ce sens, le maillage de treillis métallique retient la fissuration jusqu’à une intensité importante
mais ne travaille plus conjointement avec l'adobe à partir d'un certain niveau de déplacement.
au contraire le maillage polymère recouvert de mortier de boue travail avec l'adobe jusqu’à
d'importants niveaux d'intensité sismique. De plus elle s'adapte à tous types de configurations
architecturales. Le matériau est aussi plus durable car plus résistant aux agents biologiques et
chimiques.
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Plusieurs études réalisées par l'Université Pontifical ont ainsi permis de faire évoluer le code de construction
concernant l'adobe. Le renforcement interne en bambou est ainsi indiqué. Même l'utilisation de renforcement
extérieur est évoquée. Les réquisitions concernant les dimensions, l'épaisseur des murs et l'emplacement des
ouvertures sont utiles pour les faibles intensités de vibration. D'un autre côté, il a été rapidement démontré que
les matériaux souples et ductiles sont beaucoup plus performants que les matériaux plus rigides et plus solides
lors d'un grand tremblement de terre. Dans ce cas les techniques de renforcement interne et externe sont
nécessaires.
Malheureusement, comme nous l'a signifié le Dr Quiun, malgré le code de l'adobe, ces études restent des
travaux de recherche et les pratiques n'ont pas réellement changées.
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B) El Instituto
Construcción
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Antoine MEULEMAN
de
Vivienda,
Urbanismo
et
Au cours de notre séjour à Lima, afin de mieux comprendre la gestion des risques dans cette métropole, nous
avons eu l’occasion de rencontrer deux architectes français : Yann Barnet et Faouzi Jabrane. Ces deux architectes
installés depuis une dizaine d’années à Lima, ont eu l’occasion de participer à la reconstruction de la ville de Pisco
en août 2007. Ils ont apporté un élément nouveau dans leurs travaux avec la participation de l'Instituto de
Vivienda, Urbanismo y Construcción (l’IVUC) : l’utilisation du bambou.
LE BAMBOU UNE REEL ALTERNATIVE ?
L’utilisation du bambou présente de nombreux avantages tout d’abord au niveau structurel :
Quelques éléments de comparaison des caractéristiques du bambou, avec d'autres matériaux de
construction.
Caractéristiques
Bambou
Chêne
Pin
Béton
Masse volumique
(kg/m3)
580 à 700
700
530
̴ 2400
Contrainte
ultime en Traction
axiale
[MPa]
240
90
100
2à9
Acier de
construction
Commentaires
7500 à
8100
450
Sert à prévoir le
comportement des
zones tendues qui
devront supporter
des efforts
Contrainte
ultime en
Compression axiale
[MPa]
80
58
50
20 à 90
450
Sert à prévoir le
comportement des
zones comprimées
qui devront
supporter des efforts
Energie de
production (MJ/m3)
30
80
80
240
1600
Energie dépensée
pour produire le
matériau
Coefficient de
Fail Safe Exprime la
capacité à
supporter des
contraintes
accidentelles
extérieures très
fortes
50
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20
20
10
Cela se situe par
exemple au niveau
des tremblements de
terre
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Les performances du bambou comme matériau de construction s’expliquent en partie par sa structure
naturelle. Des entre-nœuds pleins, une structure creuse (qui en fait profilé naturel), des fibres longitudinales,
l’absence de nœuds, lui permettent d’avoir des performances mécaniques supérieures au bois, à masse et/ou
volume égaux.
En effet le bambou présente une bonne résistance à la traction (de façon unidirectionnelle, suivant le sens des
fibres), de plus le faible poids du bambou, et sa relative élasticité, en font un excellent matériau de construction
en zone sismique.
Il présente tout de même une faiblesse lorsqu'il est utilisé en flexion (flèche importante) et ne peut être utilisé
tel quel pour de longues portées par exemple. Cependant un agencement particulier ou bien la combinaison du
bambou avec d’autres matériaux peuvent combler cette faiblesse.
Par ailleurs le bambou est un matériau simple d’utilisation sur un chantier. La réalisation de panneaux peut se
faire rapidement en grande quantité : à la chaine. Il permet l’utilisation de grandes pièces jusqu’à six mètres
limitant le nombre de coupes, et enfin s’assemble rapidement.
Cependant les jonctions constituent les points faibles d’une construction en bambou et doivent être soumis à
une attention particulière. En effet, il ne faut pas dissocier les fibres les une des autre afin de préserver les bonnes
caractéristiques du bambou. Il faut donc éviter tout pincement ou encore de créer une fissure dans la longueur du
bambou. Ainsi les jonctions qui permettent les transferts de forces demandent un assemblage particulier
permettant de conserver les qualités du bambou. Des compétences spécifiques (et du bon sens) sont donc
requises pour entreprendre une construction en bambou.
D’autres aspects font du bambou un matériau intéressant.
En effet, c’est un matériau dont l’emprunte énergétique est faible. De plus sa croissance rapide en font une
ressource renouvelable, il faut environ trois ans pour l’obtention d’un bambou près à être utilisé pour la
construction. Le bambou nécessite tout de même un traitement spécifique afin de résister dans le temps
(notamment aux mites). Ce traitement consiste à saturer le bambou en sel, en le plongeant dans une piscine
d’eau salé. Puis il nécessite un entretien attentionné comme toutes constructions en bois.
De plus, d’un point de vue architectural, le bambou permet des constructions très diverses et bien plus
agréables que les mornes constructions en adobe ou en maçonnerie chainée.
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Maison en bambou de deux étages
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Eglise Notre Dame de la Pauvreté en Colombie
Malheureusement, ce type de construction est actuellement difficilement généralisable à l'ensemble du
Pérou. Tout d’abord la réserve en bambou ne le permet pas, et les mentalités ne sont pas encore prêtes à
accepter une construction en bambou en tant que construction résistantes aux séismes.
D'AUTRES PISTES DE RECHERCHES
Après s’être intéressés aux constructions en bambou et conscient de l’importance de l’accès à un logement
peu onéreux, réalisable facilement par la population locale et résistant aux séismes ; ces deux architectes, en
collaboration avec des élèves volontaires de l’Université San Martin de Porres, ont poursuivi leurs recherches
dans ce type d’habitations.
Ainsi est né le projet de réalisation d’une maison présentant toutes ces qualités. Ce projet est encore à l’état
d’étude.
En voici quelques
caractéristiques :
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Finalement c’est avec beaucoup de plaisir que nous avons réalisé cette étape inattendue et un peu forcée à
Lima. Ce fut pour nous l’occasion d’aborder une nouvelle thématique : la gestion des risques. Un enjeu, comme
vous l’aurez compris à la lecture de cet article, qui est primordial pour la ville de Lima.
Au cours de nos rencontres et de nos échanges, nous avons pu constater que nous retrouvions un grand
nombre de problématiques communes avec la première étude que nous avions réalisée à Concepción au Chili,
telles que l’importance d’une ville correctement structurée, l’absence de cadastre, la centralisation du pouvoir.
Cette étape fut aussi l’occasion de découvrir d’autres problématiques comme l’auto-construction ou encore la
gestion des ressources essentielles pour faire face à une catastrophe. Par ailleurs nous avons pu élargir notre
culture du bâtiment à d’autres modes constructifs : adobe, bambou.
Enfin nous tenons à remercier l’ensemble des personnes que nous avons pu rencontrer à Lima, ainsi que celles
qui nous ont aidées dans notre vie quotidienne.
-
Daniel Quiun Wong, Professeur Principal, Coordinateur du Secteur Structure, département
d’ingénierie, section ingénierie civile, Université Pontifical Catholique du Pérou,
Dr Sandra Santa Cruz Hidalgo, Professeur Associé, Département d’ingénierie, section ingénierie
civile, Université Pontifical catholique du Pérou,
José Meza Cuadra Velásquez, Professeur d’ingénierie civile et d'architecture à l’Université San
Martin de Porres, Directeur de l'institut de recherche FIA, Fondateur du magazine Constructivo,
Yann Barnet, Architecte, Instituto de Vivienda Urbanismo y Construcción,
Faouzi Jabrane, Architecte, Instituto de Vivienda Urbanismo y Construcción,
Pascale Metzger, Chercheuse à l'IRD de Lima, spécialiste du Management des risques,
Roberto Prieto Sanchez, Direction d’études et de Normalisation, Direction National de
Construction, Ministerio de Vivienda, Construcción y Saneamiento,
Francisco Obregon Gutierrez pour son accueil et son aide dans notre travail,
Daniel Coronel pour son hospitalité et sa générosité.
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