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1 Introduction
L’une des méthodes fondamentales de la topologie algébrique consiste à
transformer un problème de nature topologique en un problème de nature
algébrique, de telle façon que si le problème de nature topologique a une so-
lution, alors le problème correspondant de nature algébrique en a une aussi.
Dès lors, si on constate (souvent pour des raisons triviales) que le problème
de nature algébrique n’a pas de solution, on en déduit que le problème de
nature topologique n’en n’a pas non plus.
Tout cela a l’air un peu trop général, voire un peu flou, mais on peut facile-
ment l’illustrer par un exemple précis, comme on va le montrer maintenant.
Bien évidemment, une démonstration complète concernant cet exemple né-
cessite d’importants développements qui ne seront donnés que plus loin.
On va donc admettre pour le moment qu’il existe un procédé H, appelé
« foncteur » capable de transformer un espace topologique Xen un groupe
H(X)et une application continue f:X→Yen un morphisme de groupes
H(f) : H(X)→H(Y)de telle façon que l’application identique 1Xde Xsoit
transformée en l’application identique 1H(X)de H(X)et que cette transfor-
mation respecte la composition des applications, c’est-à-dire que H(g◦f) =
H(g)◦H(f), pour toutes applications continues composables fet g.
Ne nous y trompons pas. La construction d’un tel fonteur H, ayant les deux
propriétés que nous allons énoncer plus bas, est loin d’être triviale, et c’est
en fait la seule chose qui ne soit pas triviale( 1) dans ce qui va être dit dans
cette introduction. Voyons maintenant notre exemple de problème de nature
topologique.
Rappelons qu’on désigne par Dn={x∈Rn| kxk ≤ 1}la « boule unité » de
l’espace euclidien Rn(où k k est la norme euclidienne sur Rn), et par Sn−1=
{x∈Rn| kxk= 1}le « bord » de cette boule, qu’on appelle la « sphère unité
de Rn». On note i:Sn−1→Dnl’inclusion canonique de Sn−1dans Dn. C’est
bien sûr une application continue. Nous allons admettre que notre foncteur
Hest tel que le groupe (additif) H(Dn)soit réduit à son élément neutre 0
et que le groupe H(Sn−1)soit isomorphe à Z. Le problème est le suivant :
Existe-t-il une rétraction continue de Dnsur Sn−1? Autrement-dit, existe-t-il
une application continue r:Dn→Sn−1telle que r◦i= 1Sn−1?
Remarquons tout de suite que dans le cas n= 1, ce problème reçoit faci-
lement une réponse négative par une application du théorème des valeurs
intermédiaires (auquel il est d’ailleurs équivalent). Pour n= 2, il est en-
1. Au niveau du Master 1.