Fractures chez l`enfant : particularités épidémiologiques

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Fractures chez lenfant : particularités épidémiologiques,
diagnostiques et thérapeutiques.
Question ENC n° 237
R Vialle (Hôpital Armand Trousseau Paris)
Daprès le Polycopié National rédigé par J Cottalorda (Saint-Etienne), B De Billy (Besançon),
P Chrestian (Marseille)
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Objectifs de lenseignement :
Létudiant doit connaître :
- Les particularités de los de lenfant (plaque de croissance, maquette cartilagineuse,
noyaux, périoste, caractère mécanique de la diaphyse et de la métaphyse)
- Les principes de consolidation osseuse de lenfant (par rapport à la consolidation de los de
ladulte), la notion de remodelage post-fracturaire.
- Les différents types de fractures spécifiques de lenfant (en bois vert, sous périostée, en
motte de beurre, décollement épiphysaire - avec la classification de Salter et Harris -,
déformation plastique)
- Les principales circonstances de survenue des fractures chez lenfant et leur fréquence.
- Les principaux signes cliniques dune fracture (douleur, attitude antalgique, œdème,
déformation, ecchymose), la prescription rigoureuse des radiographies (comparatives) et leur
interprétation.
- Les bases du traitement orthopédique et chirurgical des fractures (techniques, avantages,
inconvénients, contre-indications, surveillance des plâtres).
- Les durées moyennes de consolidation des fractures les plus fréquentes.
Concernant les fractures les plus fréquentes, létudiant doit connaître
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?Les fractures de clavicule :
Leur notion de fréquence et de bénignité
Leur mécanisme de survenue
Les bases du traitement orthopédique
?Les fractures du coude :
Les principaux types de fracture du coude (articulaires, extra-articulaires) : supra-
condylienne, condyle externe, col du radius.
Pour chaque fracture ci-dessus :
Leur mécanisme de survenue et leur gravité
Les aspects radiographiques
Leurs principales complications (syndrome de Volkmann)
Les risques de séquelle (raideur, cal vicieux)
Les bases du traitement orthopédique et chirurgical
?Les fractures de lavant-bras (diaphyse et métaphyse) :
Leur fréquence et leur gravité variable en fonction du niveau du trait, du déplacement
Leur mécanisme de survenue
Les bases du traitement orthopédique et chirurgical
La lésion de Monteggia
?Les fractures du fémur :
Leur notion de fréquence et de gravité en fonction du site de la fracture (col, diaphyse)
Leur mécanisme de survenue
Les bases et les indications du traitement en fonction de lâge
Les risques de séquelle
?Les fractures de jambe (isolée du tibia) :
Leur mécanisme et leur fréquence
Les bases et les indications du traitement orthopédique et chirurgical
?Les fractures de cheville :
Leur caractère typique en fonction de lâge
- Fracture de la malléole interne (Mac Farland)
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- Fracture épiphysaire (Tillaux, fracture triplane)
Leur traitement
Leurs complications spécifiques
?Les lésions traumatiques obstétricales de lenfant les plus fréquentes :
Paralysie obstétricale du plexus brachial (POPB)
Fracture de clavicule, décollement épiphysaire de lhumérus, fracture du fémur
Lessentiel en 11 points
1 - Les fractures de lenfant sont très fréquentes. Los du petit enfant est constitué dune
maquette cartilagineuse qui va progressivement sossifier au cours de la croissance. Le
périoste joue un rôle essentiel chez lenfant. Il a une résistance mécanique importante et il
participe à la consolidation des fractures (cal périosté). Il permet aussi le remodelage
fracturaire.
2 - Il existe des fractures propres à lenfant : fracture en motte de beurre, fracture en bois vert,
fracture sous périostée, fracture plastique et fractures touchant le cartilage de croissance. La
classification de Salter et Harris permet de classer ces fractures et de donner dès laccident un
pronostic sur la croissance résiduelle.
3 - Le cartilage de croissance peut être lésé par une fracture avec apparition dun pont
dépiphysiodèse avec arrêt de croissance et désaxation. Si le pont est central, il va entraîner un
arrêt de croissance du cartilage de los atteint. Si le pont est périphérique, il va entraîner une
déviation du cartilage de los atteint. Cette complication sera dautant plus importante que
lenfant est jeune (il lui reste donc un fort potentiel de croissance) et que la fracture survient
sur un des cartilage les plus actifs de lorganisme (prés du genou et loin du coude).
4 - Les fractures diaphysaires entraînent une poussée de croissance post-fracturaire qui peut
être à lorigine dinégalités de longueurs.
5 - Le but du traitement est d'assurer la meilleure réduction et la meilleure contention avec le
minimum d'agression chirurgicale. Chaque fois que cela est possible, il faudra préférer un
traitement orthopédique à un traitement chirurgical. Compte tenu des particularités de l'enfant,
il faudra savoir parfois tolérer de petits défauts plutôt que de proposer une technique plus
"invasive".
6 - Il faut respecter les structures propres à lenfant : périoste et cartilage de croissance. Les
ostéosynthèses par plaques ou par clous sont interdites avant la fin de la croissance. Le
traitement orthopédique par plâtres permet parfois déviter un abord chirurgical mais il
nécessite une surveillance particulière. A court terme, il faut surveiller la coloration et la
chaleur cutané, la sensibilité et les points dappui du plâtre (recherche de douleur et
prévention descarres). A plus long terme, tout traitement orthopédique nécessite un suivi
médical en consultation pour sassurer quil nexiste pas de déplacement secondaire
(radiographie systématique de contrôle à J + 8).
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7 - La fracture supracondylienne du coude est la plus fréquente des fractures du coude. Il faut
rechercher des troubles vasculo-nerveux. Le traitement est fonction du déplacement. Il sagit
dune fracture grave pourvoyeuse de nombreuses complications (syndrome de Volkmann,
complications neuro-vasculaires, défauts de réduction).
8 - La lésion de Monteggia associe une fracture de lulna et une luxation de la tête radiale. Se
souvenir de la règle dor : toute fracture isolée de lulna doit faire rechercher une luxation
associée de la tête radiale . Laxe de lulna, quelle que soit lincidence, doit couper le centre
du condyle latéral de lhumérus. En cas de luxation de la tête radiale cette ligne est rompue.
Le traitement consiste à réduire la luxation de la tête radiale et la fracture du lulna en
maintenant sa longueur. Le diagnostic tardif de lésion négligée impose un traitement
chirurgical lourd.
9 - Les fractures diaphysaires du fémur sont très fréquentes et de bon pronostic. Elles se
voient à tout âge, mais surtout chez lenfant jeune. Le traitement sera très différent selon lâge
de lenfant. Lorsque lenfant est jeune, le plâtre pelvi-pédieux est le traitement de référence
après une traction plus ou moins longue qui permet dengluer le foyer de fracture. Lorsque
lenfant est plus grand, au delà de 6-8 ans, la technique dembrochage centro-médullaire
élastique stable est la méthode de choix. Lorsque lenfant est plus grand, on peut discuter la
mise en place dune fixation externe (surtout si la fracture est ouverte) ou d'un clou centro-
médullaire si les cartilages de croissance sont fermés. Les complications des fractures du
fémur sont le raccourcissement et les cals vicieux.
10 - Il n'y a pas de complications thromboemboliques chez l'enfant non pubère: Il est donc
inutile jusquà la puberté de prescrire des anticoagulants.
11 - On constate peu de raideurs d'immobilisation. Lenfant récupère régulièrement une
mobilité complète de ses articulations même après une immobilisation plâtrée prolongée en
position non physiologique. Il ny a donc pas dindication de kinésithérapie en traumatologie
infantile sauf cas exceptionnel.
1. Généralités
1.1. Particularités épidémiologiques
La traumatologie infantile est la première cause de décès, la première cause de séquelle et
dindemnisation du dommage corporel chez lenfant. Cest aussi le premier motif
dhospitalisation de lenfant.
Les garçons présentent plus de fractures que les filles (60% contre 40%).
Le risque de fracture durant lenfance est de 40% pour les garçons et de 27% pour les filles.
La fracture est plus fréquente du côté non dominant.
La fracture du poignet est la fracture la plus fréquente: 20 à 35 % des fractures de lenfant.
Le coude est une localisation fréquente de fractures nécessitant un traitement chirurgical.
1.2. Physiologie et physiopathologie
1.2.1. Particularités de los de lenfant
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1.2.1.1. Structure et résistance mécanique
Los du petit enfant a une structure différente de celui de ladulte, il est plus chargé en eau. Il
est aussi mécaniquement moins résistant que celui de ladulte. Une grande partie est
constituée dune maquette cartilagineuse (non visible sur une radiographie) qui va
progressivement sossifier au cours de la croissance. Au fur et à mesure que lenfant grandit,
apparaissent au sein de cette maquette cartilagineuse des noyaux dossifications. En fin de
croissance, toute la maquette cartilagineuse aura disparu et se sera ossifiée.
La luxation articulaire est exceptionnelle, los étant moins résistant que la capsule articulaire
(pas luxation du coude ou de lépaule mais fracture supra-condylienne du coude ou fracture
du col chirurgical de lhumérus).
1.2.1.2. Rôle du périoste
Cest un allié précieux à respecter :
- Il a une résistance mécanique importante. Il est beaucoup plus épais que chez ladulte.
Il est présent dun cartilage de croissance à lautre collé sur la métaphyse et lépiphyse. Il
fonctionne en hauban. Lors dune fracture, il est souvent incomplètement rompu et permet de
guider une réduction ou une stabilisation positionnelle du foyer de fracture.
1.2.1.3. Le cartilage de croissance
- Il est présent aux deux extrémités des os longs.
- Il est mécaniquement faible. Il est peu résistant aux forces de traction axiale et de torsion.
- Beaucoup de fractures de lenfant passent par ce cartilage de croissance.
La complication la plus grave est la création dun pont dépiphysiodèse (destruction
dune partie ou de la totalité du cartilage) avec arrêt de croissance et perte de longueur
(pouvant aller jusquà plus de 10 cm) et désaxation (jusquà plusieurs dizaines de
degrés).
Cette complication sera dautant plus importante que lenfant est jeune (il lui reste donc un
fort potentiel de croissance) et que la fracture survient sur un des cartilage les plus actifs de
lorganisme (prés du genou et loin du coude).
- Il produit rapidement (en 2-3 semaines) un cal
dorigine périosté (cal externe) qui noie la fracture
dun nuage osseux.
- Il permet de remodeler la fracture en effaçant les
imperfections de la réduction. Le remodelage se
fait par résorption osseuse dans la convexité et
apposition dans la concavité.
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