Lecture critique © Willie B. Thomas - istock Nous avons lu pour vous Publications récentes Dr Guillaume Leroux Les Jardins* ptérygion Chirurgie du ptérygion avec greffon limbo-conjonctival : colle biologique ou sutures ? 4 Comparison of fibrin glue versus suture for conjunctival autografting in pterygium surgery: a meta-analysis. Pan HW, Zhong JX, Jing CX. Ophthalmology 2011 ; 118(6) : 1049-54. MODE D’ACTION DES COLLES Les colles biologiques à base de fibrine reproduisent la dernière phase de la coagulation. Un mélange de fibrinogène, de facteur XII humains et d’aprotinine bovine est mis en présence de thrombine activée et déclenche la formation d’un caillot de fibrine avec un effet colle et hémostatique. C’est un médicament dérivé du sang (MDS). Ce type de colle est utilisé dans de nombreux types de chirurgie (neurochirurgie, chirurgie cardiothoracique). En ophtalmologie l’usage se développe dans la chirurgie du ptérygion permettant une fixation du greffon conjonctival sans sutures. COLLE BIOLOGIQUE VERSUS SUTURE Cette étude est une méta-analyse des études disponibles qui comparent les deux techniques dans la chirurgie du ptérygion avec autogreffe conjonctivo-limbique. Les critères de jugement sont la durée opératoire, la survenue de complications et le taux de récidive. Parmi 46 études disponibles sur le sujet, 7 études randomisées contrôlées ont été sélectionnées avec un total de 342 personnes et 366 yeux. Dans le groupe colle biologique il est retrouvé une diminution significative du temps opératoire (de -17,61 minutes en moyenne, p < 0, 0001) et du taux de récidive à 12 mois (Odds Ratio = 0,33 ; p = 0,004). Il n’y a pas de différence significative sur l’ensemble des complications locales possibles (déhiscence de greffon, kyste, granulome, hémorragie, réaction al* Groupe hospitalier Cochin-Hôtel Dieu, Paris 162 lergique, p = 0,27). Cependant plus de déhiscences ou pertes du greffon sont retrouvées dans les groupes colle biologique. Il n’était pas noté de transmission infectieuse sur la période du suivi. COLLE BIOLOGIQUE : DE NOMBREUX AVANTAGES En conclusion cette méta-analyse confirme que dans le cadre de la chirurgie du ptérygion l’utilisation de colle biologique à base de fibrine pour la fixation du greffon conjonctivo-limbique permet une chirurgie plus rapide, un taux de récidive inférieur sans augmentation significative du taux de complication. Le surcoût effectif lié à la colle n’est malheureusement pas évoqué. n œdème maculaire Efficacité à 12 mois des injections i­ ntra-vitréennes de ranibizumab dans l’œdème maculaire des occlusions de branches veineuses : étude BRAVO 4 Sustained benefits from ranibizumab for macular edema following central retinal vein occlusion: twelve-month outcomes of a phase III study. Campochiaro PA, Brown DM, Awh CC et al. Ophthalmology 2011 Jun 27, Epub ahead of print. LES PRATIQUES ACTUELLES Lors de la survenue d’une occlusion de branche veineuse rétinienne (OBVR), l’élément déterminant pour le pronostic visuel est la survenue d’un œdème maculaire. Jusqu’à récemment le seul traitement de référence des œdèmes maculaires liés à la survenue d’une OBVR était la photocaogulation (“grid”) maculaire. L’OBVR montrait qu’à 3 ans, 65 % des yeux traités par laser avaient un gain de plus de 2 lignes ETDRS contre seulement 37 % des yeux non traités (1). En pratique, malheureusement, le laser n’est pas réalisable dans tous les cas (hémorragies ou œdème maculaire majeur). L’apparition des anti-VEGF (Vascular endothelial growth factor) a modifié les possibilités thérapeutiques dans cette Pratiques en Ophtalmologie • Septembre 2011 • vol. 5 • numéro 46 Lecture critique indication. En effet le VEGF est surexprimé au cours des occlusions veineuses rétiniennes. Il augmente la perméabilité vasculaire en altérant la formation des jonctions serrées endothéliales des capillaires rétiniens. Son blocage correspond à une des stratégies pour tenter de restituer les barrières hémato-rétiniennes au niveau maculaire (2). ÉTUDE BRAVO : omc sur occlusion de branche veineuse L’étude BRAVO est une étude de phase III multicentrique, prospective, randomisée, double aveugle, contrôlée par injection de placebo qui évalue les injections répétées de ranibizumab pour la prise en charge de l’œdème maculaire dans les occlusions de branches rétiniennes. La publication de la dernière mise à jour (juin 2011) complète les résultats à 6 mois déjà publiés en 2010 (3). En parallèle l’étude CRUISE (Central Retinal Vein Occlusion study) analyse selon une méthodologie comparable les injections mensuelles de ranibizumab dans les OVCR (Occlusion de la Veine Centrale de la Rétine) (4). Ces deux études ont permis l’obtention de l’AMM auprès de la FDA (Food and Drug Administration, USA) et de la Commission européenne dans ces indications. Dans l’étude BRAVO, 397 patients ont été randomisés dans 3 groupes (O,3 mg ou 0,5 mg de ranibizumab ou placebo) pour une injection mensuelle durant 6 mois (période dite de traitement) puis à la demande du 6e au 12e mois (période d’observation). Les critères d’inclusion étaient un œdème maculaire secondaire à une OBVR datant de moins de 12 mois, une meilleure acuité visuelle (AV) corrigée comprise entre 20/40 et 20/400 et une épaisseur centrale maculaire à l’OCT ≥ 250 µm. En cas de réponse insuffisante aux injections, un traitement complémentaire dit de “sauvetage” (rescue therapie) par grid maculaire était possible dans chaque groupe, 1 fois entre le 3e et le 6e mois et 1 fois dans les 6 derniers mois. Après 6 mois les critères de réinjection(s) étaient une acuité visuelle inférieure à 20/40 ou une épaisseur centrale ≥ 250 µm. Le critère de jugement principal de l’étude BRAVO est la moyenne des modifications de l’acuité visuelle à 6 mois et 12 mois (échelle ETDRS). Les critères secondaires correspondent au nombre de patients avec un gain supérieur à 15 lettres et une AV > 20/40 à 12 mois. La survenue d’effets indésirables était également surveillée. Pour mémoire, à 6 mois (3) il était retrouvé un gain moyen de +16,6 et +18,3 lettres dans les groupes 0,3 mg et 0,5 mg de ranibizumab contre 7,3 lettres dans le groupe placebo (p < 0, 0001). A 12 mois le gain d’acuité visuelle persistait avec +16,4 et Pratiques en Ophtalmologie • Septembre 2011 • vol. 5 • numéro 46 +18,3 lettres pour les groupes 0,3 mg et 0,5 mg contre +12,1 lettres dans le groupe placebo (p < 0,01). Le pourcentage de patients avec un gain de plus de 15 lettres était respectivement de 56 % , 60,3 % versus 43,9 % dans le groupe placebo. Il n’existait pas de différence significative entre les 3 groupes pour le pourcentage de patients avec une acuité visuelle supérieure à 20/40 à 12 mois (respectivement 67,9 %, 66,4 % versus 56,8 % pour le placebo). Sur 12 mois le nombre moyen d’injections était de 8,9 et 8,8 dans les groupes traités et 9,8 pour le placebo. Les effets indésirables oculaires étaient principalement la survenue d’une cataracte (4,5 %, 6,2 % et 2,6 % pour le placebo) et d’hémorragies intravitréennes (5,2 %, 1,5 % et 0,9 %). Sur le plan général 1 patient dans le groupe 0,3 mg a présenté un AVC ischémique. Dans chacun des groupes 0,5 mg et placebo, 1 patient a souffert d’un AVC hémorragique et un autre d’un infarctus du myocarde. LE RANIBIZUMAB est EFFICACE, mais… Dans le cadre d’un œdème maculaire secondaire à une OBVR, le ranibizumab 0,5 mg permet à 12 mois un gain moyen de 18,3 lettres à 12 mois contre +12,1 lettres dans le groupe placebo chez les patients avec une AV initiale < à 20/40. Cette efficacité est obtenue au prix d’un nombre important d’injections intra-vitréennes (8,8) démarrées précocement. Les résultats visuels au-delà de 12 mois ne sont pas encore connus. Le poids thérapeutique et le coût global pour un gain de 6 lettres est important surtout si l’on compare avec les résultats visuels obtenus avec le laser seul. Il est indéniable que les anti-VEGF sont une arme thérapeutique supplémentaire dans la prise en charge des occlusions de branche veineuse rétinienne mais on peut toutefois espérer qu’une comparaison directe avec le laser (traitement de référence sur le long terme à 3 ans) et le traitement combiné laser + IVT d’anti-VEGF soit disponible prochainement. n Bibliographie 1. The Branch Vein Occlusion Study Group. Argon laser photocoagulation for macular edema in branch vein occlusion. Am J Ophthalmol 1984 ; 98(3) : 271-82. 2. Nghiem-Buffet S, Cohen SY. Retinal vein occlusion: anti-VEGF treatments. J Fr Ophtalmol 2009 ; 32(9) : 679-86. 3. Campochiaro PA, Heier JS, Feiner L et al., BRAVO Investigators. Ranibizumab for macular edema following branch retinal vein occlusion: six-month primary end point results of a phase III study. Ophthalmology 2010 ; 117(6) : 1102-12. 4. Brown DM, Campochiaro PA, Singh RP et al., CRUISE Investigators. Ranibizumab for macular edema following central retinal vein occlusion: six-month primary end point results of a phase III study. Ophthalmology 2010 ; 117(6) : 1124-33. 163