Les abstracts du congrès

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en partenariat et avec le soutien
Les abstracts
du congrès
de la profession
de la justice
MERCI
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
10 ANS !!!
au service
- 59 -
Le 16 octobre 2010, la Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts (C.N.K.E.) a
organisé son neuvième Congrès à l’Ecole nationale de la Magistrature à Paris. A cette occasion,
la CNKE a fêté ses dix ans et le soir a soufflé ses dix bougies à la Maison de la Chasse et de la
Nature. La veille, nous avons découvert l’Opéra Garnier et visité quelques passages parisiens
avant d’être reçus au Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes.
« Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. »
Guillaume d’Orange
Nous remercions...
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Monsieur Jean-Louis NADAL, Procureur Général près la Cour de Cassation
Monsieur VUELTA-SIMON, Adjoint au Directeur de l’ENM et tous ses collaborateurs,
Monsieur Michel PECONDON-LACROIX, Avocat Général,
Maitre Catherine COULON, Présidente d’honneur de la CNKE
Madame Catherine BONHOMME, Trésorière adjointe de la CNKE
Madame Solène BERGER, secrétaire du Congrès
Monsieur Laurent CAMBOURIEUX, premier Trésorier de la CNKE
Monsieur Pierre CLERMONT, Vice-Président de la CNKE
Madame Béatrice DECODTS, pour les prises de vues
Monsieur Claude-Henri DUBOIS, Trésorier de la CNKE,
Madame Marie-Françoise DUFFRIN, Présidente de la CNKE
Monsieur Christian LACOMERE, Expert Judiciaire, Président d’honneur de la CNKE
Monsieur Michel LEDUC, créateur du site « kinélegis »
Madame Christine PELCA-POIVRE, Vice-présidente de la CNKE
Monsieur Roland ROCTON, Expert Judiciaire, Vice-Président de la CNKE, responsable de la formation
Monsieur Olivier SALTARELLI, webmaster de la CNKE
…et tous ceux qui nous ont soutenus sans oublier tous les adhérents de la CNKE
Nos partenaires :
HSBC « Votre Banque partout dans le Monde » représentée par Madame Paula LE GOFF
GPM-AGMK, représenté par Monsieur Michel BAUDELET
Compte-rendu
IXème Congrès de la Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts (CNKE)
Samedi 16 octobre 2010
Ecole Nationale de la Magistrature – Paris
« LE TOUCHER, SOURCES D’AMBIGUÏTÉ »
Tous droits réservés - Toute reproduction, par quelque moyen que ce soit, même partielle, interdite sans l’accord expresse et écrit de la
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts
Juin 2011
- 58 -
-3-
MOT
SOMMAIRE
•
DIX
ANS... DÉJÀ
!
5
Marie-Françoise DUFFRIN, Présidente de la CNKE
•
REMUE-MÉNINGES
6
•
TOUCHÉ !
7
•
PEUT-ON
Gaëlle BOURIC, MKDE, spécialisée en rééducation respiratoire et éducation thérapeutique
Michel DUFOUR, MKDE, Cadre de santé, Praticien et enseignant
INSCRIRE SUR LA LISTE DES EXPERTS JUDICIAIRES, UN TECHNICIEN EXERÇANT UNE
PROFESSION NE FIGURANT PAS DANS LA NOMENCLATURE
?
9
Raoul CARBONARO, Magistrat
•
QUESTIONS / RÉACTIONS
•
US ,
DE L’ASSEMBLÉE
COUTUMES ET TRADITIONS
DISPOSITIFS
AMIABLES D’INDEMNISATION DANS LES ACCIDENTS MÉDICAUX
UN
La journée s’achève. Il est temps de repenser déjà à ce que nous avons appris et déjà oublié ?
La formation continue est pour nous fondamentale car elle permet de progresser, de se remettre en
question. Les décrets concernant l’éducation thérapeutique du patient sont parus très récemment ; il
est primordial que les masseurs-kinésithérapeutes s’approprient ce sujet et ne le laissent s’échapper.
Ce thème concerne plusieurs professions de santé et il est fondamental de s’y attacher pour éviter que
d’autres prennent la place.
J’espère dans 10 ans vous retrouver tous avec autant d’enthousiasme et toujours avide de
connaissances.
14
L’an prochain, Dijon accueille la CNKE pour son dixième Congrès. Encore des bougies à souffler.
17
Je remercie les membres de la CNKE de leur soutien et de la confiance qu’ils m’ont témoignée au cours
des années écoulées ; ils peuvent compter sur moi pour que vive la CNKE !
Michel PECONDON-LACROIX, Avocat général
•
Marie-Françoise DUFFRIN
Présidente de la CNKE
12
Claude DEBIARD, MKDE, Cadre de Santé
•
DE CLÔTURE
20
TOUCHER SI INTIME
LAURE MOURICHON, MKDE, spécialisée en uro-gynécologie, sexologue
•
QUESTIONS / RÉACTIONS
•
INCIDENCES
DE L’ASSEMBLÉE
23
DE L’INTRODUCTION DU CONTRADICTOIRE LORS DE LA PROCÉDURE PÉNALE, ASPECTS
PRATIQUES POUR L’EXPERTISE PÉNALE
24
Claire CARBONARO, Magistrat
QUESTIONS / RÉACTIONS
HISTOIRES D’UN JOUR
DE L’ASSEMBLÉE
JEAN-MAURICE BOURIC, MKDE, CADRE
DE
32
33
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
•
•
SANTÉ
•
BIENTRAITANCE - MALTRAITANCE
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•
VIOLENCE
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VÉRONIQUE DESJARDINS, Directrice APHP
ET ROUTINE, L’EXPERT ET LES ORGANISATIONS HOSPITALIÈRES
MARYLÈNE GUINGOUAIN, Infirmière, Directrice de soins, Expert judiciaire
•
TOUCHER
EN KINÉSITHÉRAPIE RESPIRATOIRE, TECHNIQUES SOURCES DE LITIGES
40
Dominique PELCA, MKDE, Président du CIROMK d’Ile-de-France et de La Réunion
•
QUESTIONS / RÉACTIONS
•
L’ART
•
POINT
•
AUX
DE L’ASSEMBLÉE
44
45
DÉLICAT DU TOUCHER MÉDICAL
Philippe TREGUIER, Avocat de formation, Responsable au titre IARD au Groupe Pasteur Mutualité
DE VUE DE L’ORDRE
47
ANTIPODES DU TOUCHER
50
JEAN-PAUL DAVID, Vice-président du Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes
Laurence NIVET, Directrice APHP
•
REMUE-MÉNINGES … CONCLUSION
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Gaëlle BOURIC, MKDE, spécialisée en rééducation respiratoire et éducation thérapeutique
•
TOUCHER :
•
UNE
LE SON SCULPTÉ
Dominique DRON, Pianiste, Commissaire Générale au Développement Durable
TOUCHE DE
MUSIQUE
55
56
Claire DE MONTEIL, Chanteuse lyrique et Sophie DE MONTEIL, Flûtiste
•
MOT
DE CLÔTURE
Marie-Françoise DUFFRIN, Présidente de la CNKE
-4-
57
- 57 -
attraper la fumée. Ah, c’est tout ce que nos mains sauraient saisir maintenant ! ». Le toucher, plus que
le souffle ou la vue, comme signature de l’existence.
Ainsi, à quoi le toucher ouvre-t-il ?
Pour un Chinois, dit François Jullien (3), philosophe établi entre Orient et Occident, la pulsion qui meut
l’univers et ses habitants n’est pas le Temps, invention grecque, mais un processus permanent de
transformation interne aux éléments et aux phénomènes, « qui vient de la polarité du Ciel et de la Terre
et encadre toute réalité ». Ce processus se calligraphie en deux termes : l’un signifie « renverser » («
hua »), il est représenté par le pictogramme de l’homme tracé une fois à l’endroit et une fois à l’envers.
Le second signifie « modifier » (« bian ») ; il désigne la transposition d’un demi-ton d’un morceau de
musique, et correspond en calligraphie au remplacement d’un trait « yin » par un trait « yang ».
Le rythme interne du monde, jamais figé, en perpétuelle transformation, réunirait donc dans la sagesse
chinoise l’homme et la musique, dans leur double polarité. Ainsi, pour l’instrumentiste, le toucher est la
source charnelle d’un univers immatériel en perpétuelle renaissance.
Prenez-en soin !
(1)
(2)
Acide, Arc-en-ciel, Erri de Luca
Les Amis Inconnus, Jules Supervielle
(3)
Les transformations silencieuses, F Jullien
DIX
ANS... DÉJÀ
!
Marie-Françoise DUFFRIN
Présidente de la CNKE
Monsieur le Directeur de l’Ecole Nationale de la Magistrature (ENM),
Monsieur l’Avocat général,
Mesdames et Messieurs les Magistrats,
Mesdames et Messieurs les Directeurs d’hôpitaux,
Maîtres,
Mesdames et Messieurs les Experts judiciaires,
Monsieur le Président du Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes,
Madame la Présidente du Conseil National des Pédicures-podologues
Monsieur le Président du Conseil interrégional de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes d’Ile de France
et de La Réunion,
Mesdames, Messieurs, les Présidents, Vice-présidents et conseillers de l’Ordre des masseurskinésithérapeutes,
Chères Consœurs, Chers Confrères,
Chers membres de la CNKE,
Mesdames, Messieurs,
Chers Amis,
C’est avec grand plaisir, un peu d’émotion et beaucoup de fierté que je vous accueille aujourd’hui pour
notre neuvième Congrès.
L’Association Française des Kinésithérapeutes Experts (A.F.K.E.) est née avec le siècle.
Depuis l’eau de la Seine a coulé « sous le pont Mirabeau », pardon Apollinaire car je te pille. Nous
avons un nouveau patronyme depuis 2004 : Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts
: C.N.K.E. ; nous avons grandi, nous avons mûri. Deux experts judiciaires nommés en 2000, une
vingtaine aujourd’hui. Notre présence, en ce 16 octobre 2010, à l’Ecole Nationale de la Magistrature,
est un signe fort de reconnaissance pour notre Compagnie et notre profession. Plusieurs évènements
ont jalonné ces dix années. La formation, pierre angulaire de toute profession si elle veut conserver un
haut degré de compétence est montée en puissance. La création du Conseil de l’Ordre des MasseursKinésithérapeutes a permis à un grand nombre d’entre nous, élus qu’ils soient libéraux ou salariés,
d’apporter leur concours à cette jeune institution.
UNE
TOUCHE DE MUSIQUE
Claire DE MONTEIL
Chanteuse lyrique
Sophie DE MONTEIL
Flûtiste
Parole laissée à la musique : une autre façon de toucher …
Interprétations et chants de musique lyrique :
• Johann Sebastian Bach : « Passion selon Saint-Jean »
• PUCCINI Giacomo : « Air de Lauretta »
• Berceuse : Musique folklorique iranienne
• Vivaldi : « Domini Deus »
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Il ne faut pas oublier le travail de fourmi de certains d’entre nous pour ouvrir les portes du monde de la
Justice, s’adapter à ses us et coutumes…..donner du temps au temps.
Cette reconnaissance a été rendu possible par l’organisation de nos Congrès, aux quatre coins de
France. Ces derniers ont assuré une formation continue de grande qualité grâce à la participation de
magistrats, d’avocats, de médecins, d’experts judiciaires et d’intervenants ayant une expertise connue
et reconnue; ils ont permis de faire découvrir l’expertise juridique en Kinésithérapie. Les institutions,
les organismes sociaux, les compagnies d’Assurances, les professions de Santé et, bien entendu, nos
confrères connaissent notre existence et notre spécificité. Nous sommes devenus incontournables. Nos
compétences et notre unité font notre force.
Avant de conclure, j’aimerais que nous ayons une pensée pour nos proches qui nous ont quittés et pour
ceux qui affrontent courageusement la maladie.
Je vous remercie encore pour votre présence et, du fond du cœur je vous souhaite à tous une journée
riche d’enseignements et remplie du bonheur d’être ensemble.
-5-
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Sur un bateau mouche, au fil de l’eau, à l’automne 2000, plusieurs d’entre nous ont voulu se réunir pour
assurer « la promotion de l’expertise juridique en masso-kinésithérapie. »
« REMUE-MÉNINGES »
« TOUCHÉ :
LE SON SCULPTÉ
»
Gaëlle BOURIC
MKDE, spécialisée en rééducation respiratoire et éducation thérapeutique
Dominique DRON
Pianiste, Commissaire Générale au Développement Durable (Ministère chargé de l’écologie)
Un congrès est un moment où sont confrontées des informations nouvelles avec des connaissances
antérieures, des représentations acquises sur différentes thématiques.
Vous qui parfois êtes interpellés par un musicien aux mains abîmées, immobilisées, angoissées,
handicapées du mouvement ou de la sensation, sachez que vous avez entre les vôtres des mains de
sculpteur. Mais les objets que celles-ci créent, appellent, colorent, interrogent, s’évanouissent seconde
après seconde comme s’écoule une rivière.
Aujourd’hui les deux thématiques sont le « toucher » et l’« ambiguïté ».
Proposition : quelles sont les représentations des participants sur ces deux thématiques ? il s’agit là
d’exprimer de façon spontanée les images, classiques ou plus originales, les conceptions, les représentations
auxquelles renvoient ces deux thèmes.
Regardez un pianiste découvrir un nouvel instrument.
Il l’ausculte des doigts comme vous le feriez d’un nouveau corps humain.
Comment répond, sous la peau d’ivoire ou de plastique, le clavier et son arrière-cour de marteaux, de
cordes, de feutres et de bois ?
Est-il nerveux, lourd, superficiel, profond, gras, moelleux, sec ?
Est-il égal ou inégal ?
Les harmoniques en vibrent-elles avec richesse ou timidité ?
Ouvre-t-il la subtilité du double enfoncement, qui fait résonner deux fois la corde ainsi frappée ?
Permet-il rapidement de sentir, comprendre et anticiper la pâte sonore levée par chacune de ces savantes
articulations qui vont du doigt à la corde, ou plutôt du toucher à l’ouïe ?
A quelles figures pianistiques sera-t-il propice, à quelles autres rétifs ?
Arturo Benedetti MICHEMANGELI tenait sa dizaine de pianos en un lieu de température, de lumière et
d’hygrométrie rigoureusement constantes, afin que seule y intervienne la subtilité du toucher.
Pour jouer, rien à voir ou presque ; tout à toucher et à entendre. Jouer les yeux fermés n’est pas pour
le musicien du registre d’une performance supérieure, mais de celui d’une joie plus accomplie. Que le
toucher défaille, et pour lui la vie s’étiole.
Classement :
Articulation et toucher constituent à chaque doigt une sorte de couple « yang-yin » dont l’alchimie,
l’équilibre et le contrôle sont la clef du son. Chaque touche est frappée et caressée, explorée et inventée
; dans l’idéal, jamais atteint ou presque, chaque note est elle-même, et le résultat des précédentes, et
la source des suivantes. Le geste juste ouvre la forêt de la musique derrière l’arbre de la note. Le geste
faux n’est pas moins irrémédiable sur le cours évanescent de la musique que l’erreur sur le tour du potier,
ou la fêlure dans le cristal.
Le toucher naît du bassin, comme le chant. Il passe par la colonne profonde du ventre et du dos : c’est
elle qui libère les épaules, celles qui permettent aux bras de s’ouvrir et de transmettre aux poignets et
aux mains, à la touche, au marteau, aux cordes et aux bois la vibration que le musicien a en tête. Le
toucher est une affaire totale. Le Catalogue des Oiseaux de Messiaen en déploie toutes les libertés :
entre le roulement des vagues, le ricanement de la mouette, l’appel montant du courlis, le flûteau du
chevalier, le pépiement du gravelot..., rien de commun dans les gestes qui les produisent, du bassin à la
pulpe des doigts.
En introduction de cette journée on peut voir que le toucher est représenté et vécu de façon manuelle,
mais au fil de la journée, on s’apercevra que le toucher est divers : toucher du regard, toucher de ce que
l’on entend, toucher dans la façon d’entendre l’autre et de lui répondre.
Dans le cadre professionnel, de l’horizon professionnel, l’ambiguïté est reliée à tout ce qui est de la
sensualité et aussi de l’infraction.
La journée va permettre de voir les évolutions des uns et des autres sur ces deux thématiques, selon les
différentes interventions.
A cette lumière, les œuvres plus classiques ouvrent ensuite d’autres voix –d’autres voies- aux
interprètes.
Le son est vibration et matière, onde et pâte. Pour Erri de Luca (1), Dieu est un potier qui a besoin
d’inscrire l’idée qu’il se fait de l’univers dans la matérialité de l’incarnation, comme dans les contraintes et
limites d’une terre glaise, pour se réaliser. En fait, Dieu a besoin de sa création pour exister, tout comme
la musique a besoin des mains pour être. L’idée a besoin de la main, la plus subtile mélodie instrumentale
n’existe que par le toucher qui la réalise.
Instrumentistes, n’ayez pas honte de vos essais maladroits et sincères : sans vous, même Mozart
n’enchanterait personne…
Le toucher comme caractéristique de nos vies. C’est ce qu’écrit le poète Jules Supervielle (2), faisant
parler les disparus dans sa poésie d’entre deux mondes. Les morts y sont omniprésents, omniscients,
délivrés des souffrances physiques ; mais ils regrettent leur vie incarnée, « ce temps où nous ne pouvions
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Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Le piano-forte et ses successeurs ont fait du piano moderne une palette infinie de sons et d’intimités
possibles entre le corps et la mécanique. Au-delà des indications des compositeurs, du pianissimo au
fortissimo, du legato au staccato, le toucher de chaque doigt, diversement accompagné par le bras et
l’épaule, crée mille manières de sons indéfiniment réinventés. Le lieu de rencontre de l’instrument et du
pianiste s’appelle justement la touche…
« REMUE-MÉNINGES … CONCLUSION »
« TOUCHÉ »
Gaëlle BOURIC
MKDE, spécialisée en rééducation respiratoire et éducation thérapeutique
Michel DUFOUR
MKDE, Cadre de santé, Praticien et enseignant
Après les remarques de la matinée quant aux perceptions / définitions des termes « toucher » et «
ambiguïté », voici la question posée :
N’a pas de conclusion à apporter sur le « toucher » mais une simple analyse.
En effet quand on parle du « toucher », il faut distinguer deux choses :
Quelles sont les représentations de l’assemblée sur ces deux thématiques, suite à l’ensemble des
interventions de la journée ?
- Il s’agit d’une pénétration :
Quand on est touché, au sens propre ou figuré, cela signifie qu’il y a une intégration chez celui qui est
touché de quelque chose de particulier. On entre dans son intimité et dans sa bulle. Ce n’est pas un
contact anodin et anonyme. Des contacts, il y en a des milliers dans la journée, auxquels on ne prête pas
attention. Mais le toucher est quelque chose qui s’individualise, et qui va provoquer chez la personne un
sentiment.
- Est-ce que ce touché est racontable ?
Quand on est touché par la présence sympathique de personnes, quand on est touché par le fait de
serrer la main de quelqu’un, tout cela est socialement parfaitement admis. Ce toucher qui repose sur des
évidences ne pose pas de problème.
Celui qui pose problème est celui qui éventuellement est ambigu. Un toucher non prévu pose un certain
questionnement. Et c’est à partir de là qu’il y a des risques de mauvaises interprétations.
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Il est nécessaire de dire ce que l’on fait, et faire ce que l’on dit. En dehors de cela il y a danger. Il faut
également prendre en compte le vécu antérieur des patients.
Exemple : un MK travaille avec des patients qui ont été torturés, donc les touchés se doivent d’être
obligatoirement différents car ils peuvent réveiller des sensations que le praticien ne peut contrôler.
Donc il faut faire attention car ce vécu antérieur n’est pas connu.
Les époques ont vu se succéder des tendances puritaines ou, inversement, des avancées « naturistes »,
avec parfois le couvert d’activités plus ou moins licencieuses. La civilisation orientale accepte la nudité
au quotidien, mais habille les démonstrations artistiques (mis à part les bas-reliefs érotiques indiens),
alors que la civilisation occidentale n’admet pas la nudité publique, mais l’accepte fort bien dans les arts
(statuaire, peinture, spectacles).
À l’heure des mixités culturelles, il est nécessaire d’envisager tous ces aspects pour éviter les erreurs
comportementales.
Exemple : une patiente se présente complètement voilée, le praticien lui explique qu’elle doit un minimum
se dévêtir pour qu’il puisse manipuler/toucher la hanche. Au grand étonnement du praticien, la patiente
se décide de se déshabiller entièrement expliquant que le praticien c’est comme Dieu.
Situation à l’inverse de ce qu’aurait pu penser le professionnel, qui s’attendait à un toucher difficile, à
cause d’un contexte culturel ignoré.
De plus, les idées reçues pèsent lourdement dans l’appréciation des choses.
Exemple : les masseurs-kinésithérapeutes sont considérés comme des dragueurs, qui touchent, plutôt
beaux, sportifs, sympathiques...
De plus, à la différence d’un acte chirurgical, invariable dans son contexte (évolution technologique mise
à part), l’acte du toucher connaît de grandes variables, non d’évolution technologique, mais du simple
contexte psychologique et sociologique. D’une société à l’autre, d’un âge à l’autre, d’un sexe à l’autre,
d’une personnalité à l’autre, le même geste prend des significations différentes, glisse des non-dits
émotionnels dont nul ne peut prévoir la portée.
Il faut informer le patient et voir comment il perçoit l’information.
Mais le vécu qui résulte du toucher est-il imputable au seul « émetteur », en l’occurrence le praticien
? Ce serait oublier le rôle tout aussi déterminant du patient. Est-on sûr de ce que la personne touchée
cherche, consciemment et inconsciemment ? Sûrement pas.
Exemple : lorsqu’une vache se frotte contre un arbre, ce dernier n’y est pour rien : c’est la vache qui
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Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Quand les sujets sont banalisés, comme le touché en uro-gynécologie, il y a proportionnellement moins
de risque d’ambigüité car l’on sait qu’il faut faire attention.
Là où on ne fait pas attention c’est lorsque le touché est anodin, que cela touche une zone non sexuel,
le fait de regarder quelqu’un juste une petite seconde de trop, par exemple.
Ce qui n’est pas dangereux, ne signifie pas aucun risque.
recherche et obtient ce dont elle a besoin.
•
Des patients sont à ce niveau là sur le plan comportemental : en effet, le patient ne prévoit pas l’échange,
reste passif, alors que le toucher en kinésithérapie est relationnel.
Mais le relationnel est dangereux, car le côté sympathique du masseur-kinésithérapeute peut entraîner
des déviances terribles, pas intentionnées au départ.
Exemple : 62% des kinésithérapeutes ont déjà eu une expérience sexuelle avec un patient.
Ce taux est très important.
Il ne faut donc pas banaliser cet aspect sympa, plus on est près physiquement, plus il faut être loin dans
sa tête. Il faut se dégager de ces émotions difficilement contrôlables par définition.
•
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Pour d’autres enfin, le problème reste posé. Il faut l’affronter, car il est incontournable, en raison de
l’apport technologique qu’il représente : on ne touche pas « pour toucher », mais pour obtenir quelque
chose. Soit obtenir une information, dans le cas de la palpation lors d’un examen clinique, soit obtenir
une réaction, dans le cas d’un soin masso- kinésithérapique.
Le bien fondé d’un geste requiert une redondance qui seule peut confirmer son explicitation, l’évidence
d’un fait bien cadré, assurant sa signification, valorisant le résultat escompté. Laisser les individus en
proie à l’innocence de celui qui ne sait pas ou à l’incertitude de celui qui situe mal les perceptions
interpersonnelles est un risque majeur qu’on doit s’interdire. Malgré cela, on le sait, le risque « zéro »
n’existe pas. Il vaut mieux être un peu plus sur la réserve que pas assez, car dans ce cas, il est encore
possible de rattraper le coup.
Le toucher doit être provoquant.
Exemple : la main qui glisse sur le dos d’un chat « provoque » un mouvement vertébral…
La rééducation par le toucher doit créer un bouger sain, le fait d’être bien dans sa peau.
Cette provocation peut être mal perçue par le patient car il s’enferme dans un état de « flegme », de
« handicap » car dans toute la médecine les gens sont passifs, mais chez le « kiné », les gens doivent
payer et participer et bouger.
Le toucher du masseur-kinésithérapeute est dérangeant. Il faut déterminer au coup par coup jusqu’où il
est possible d’aller à chaque fois, le patient doit adhérer.
On peut même passer par la vexation pour obtenir du patient des résultats et des efforts de
participation.
En conclusion, nous ne pouvons qu’inciter à la pleine reconnaissance d’un acte qui est tout sauf anodin.
Sa teneur lui permet de jouer en catalyseur pour déclencher des réactions personnelles salutaires,
parfois d’une portée salvatrice impressionnante. Le toucher prend donc un sens.
Le Docteur Boris DOLTO disait : « Si vous ne prenez pas le patient au niveau émotionnel (« aux tripes
»), vous n’obtiendrez rien ».
L’émotion est très dangereuse, donc le dilemme est de rentrer dans le plaisir du patient d’être en bonne
santé, de le conduire jusque là. Le risque est à la hauteur du projet et c’est à chacun de ne pas préjuger
de ses forces (et de sa formation).
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b) Besoins liés au développement des maladies chroniques
• La prise en charge des maladies chroniques par la télésurveillance à domicile :
- Notamment les pathologies suivantes : insuffisance cardiaque chronique, hypertension
artérielle, diabète, syndrome d’apnée du sommeil ou une insuffisance respiratoire chronique,
insuffisance rénale traitée par dialyse, les grossesses à risques,
- Les maisons et centres de santé pourraient devenir des lieux de premiers recours pour
la surveillance de ces malades,
- La plupart des patients en hospitalisation à domicile (HAD) qui sont porteurs de
maladies chroniques relevant de la mise en place d’une télésurveillance.
• La télé-expertise pluridisciplinaire autour du dossier médical du patient :
Il s’agit de favoriser et de développer la mutualisation de savoirs complémentaires (réunions
pluridisciplinaires grâce à la visioconférence) visant à faire un diagnostic ou à prendre une
décision thérapeutique.
c) Besoins dans les territoires isolés
La télémédecine a toute sa place dans les zones du territoire français isolées et dépourvues de médecins
: il s’agit de certaines zones rurales et urbaines, les zones montagneuses notamment les stations de
sports d’hiver, les îles métropolitaines et celles des DOM …
La télémédecine peut notamment concerner la prise en charge pré-hospitalière des urgences : l’équipement
en télémédecine des maisons de retraite, des EHPAD, des hôpitaux ruraux, des établissements
pénitentiaires.
d) La télémédecine comme lien entre les champs sanitaire et médico-social
La télémédecine doit permettre d’améliorer la prise en charge médicalisée des pensionnaires de maisons
de retraite, d’EHPAD, ou d’établissements accueillant des personnes handicapées, dont les patients sont
de plus en plus médicalisés et qui manquent aujourd’hui de plus en plus d’accompagnement médical.
e) La télé-chirurgie
La télé-chirurgie est en développement dans la chirurgie du cancer de la prostate, en chirurgie cardiaque
(pontages à cœur battant), en chirurgie digestive oncologique.
Son coût d’utilisation reste aujourd’hui très élevé, ce qui est un frein à son développement
opérationnel.
Elle ouvre d’importantes perspectives de progrès dans les principaux domaines de la chirurgie, en rendant
l’acte opératoire le moins invasif possible.
Perspectives :
•
•
•
•
•
•
En attente d’une annonce du Premier Ministre,
Création d’une structure interministérielle pour le développement de la télémédecine ?
Publication à venir du projet de décret ?
Appels à projets de l’Agence des Systèmes d’Informations Partagées (ASIP) en région orientés
sur le déploiement de la télémédecine
La formation des professionnels, les bonnes pratiques
Le financement
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Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
La solution qui peut être trouvée : ne plus rien faire. Mais cela est inconcevable.
Certains agissent par abstention. Ainsi, on ne masse pas les enfants sous la pensée inavouée de la portée
érotisante. À l’heure des affaires pédophiles, un frisson de crainte risque de favoriser cette attitude,
pourtant regrettable. D’autres agissent en dépersonnalisant le toucher, devenu celui d’une machine
à masser, fauteuil vibrant, table massante et autres artifices sans intérêt, autre que l’exploitation
mercantile (qui trouve là une opportunité inespérée, jouant sur le quantitatif à défaut du qualitatif).
Cette tendance est d’autant plus dangereuse que, niant complètement le toucher, elle prétend se justifier
par un scientisme qui voudrait n’accepter que les vérités mesurables, les paramètres modulables et
démontrables scientifiquement, ce qui est difficile en matière de sciences humaines.
La téléconsultation et la télé-expertise radiologiques qui s’exercent en appui des services
d’urgences et de manière programmée,
La téléconsultation spécialisée programmée qui peut se mettre en place en substitution de
consultations avancées spécialisées,
« PEUT-ON
EXERÇANT UNE PROFESSION NE FIGURANT PAS DANS LA NOMENCLATURE
?»
Ces trois axes vont permettre de clarifier les organisations, d’établir les rôles de chacun et de placer le
patient au centre de ce dispositif.
Raoul CARBONARO
Magistrat
4. Conditions de mise en œuvre ?
Il est des questions paradoxales dont la réponse sans nuance pourrait étonner voir fâcher plus d’un. Le
sujet sur lequel il m’est demandé d’intervenir en fait sans aucun doute partie et j’y vois un redoutable
privilège ainsi qu’une certaine facétie de la part des organisateurs de ce colloque qui confient à un
magistrat le soin d’expliquer devant votre auguste assemblée la décision d’autres collègues relative
à l’inscription sur la liste des experts judiciaires de profession dont la spécialité ne figure pas dans la
nomenclature.
Sur ce point, le texte est beaucoup plus précis et encadré juridiquement. Le décret prévoit :
• Le recueil du consentement du patient à ce mode d’exercice : libre et éclairé,
• L’authentification des professionnels de santé intervenants,
• L’identification du patient,
• L’accès aux données nécessaires à la réalisation de l’acte de télémédecine : il faut avoir
connaissance et conscience du dossier médical du patient pour que l’on puisse parler d’activité
médicale,
• Le cas échéant, la formation du patient à l’utilisation du dispositif de télémédecine : tous les
dispositifs qui concernent notamment la télésurveillance,
• L’inscription des actes de télémédecine dans le dossier du patient :
- L’identité des professionnels de santé intervenants,
- La date et l’heure de l’acte,
- Eventuels incidents techniques.
5. Conditions organisationnelles ?
L’objectif est de répondre aux freins relatifs aux conditions d’application de la télémédecine, afin de
garantir et s’assurer que le cadre est suffisamment sécurisé pour chaque acte réalisé, pour le patient et
le professionnel.
•
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
INSCRIRE SUR LA LISTE DES EXPERTS JUDICIAIRES, UN TECHNICIEN
L’activité de télémédecine est inscrite dans :
- le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens
(CPOM : dispositif existant depuis 1996 et toujours inséré dans la Loi HPST. Ce sont les contrats signés
entre les Agences Régionales de Santé et les structures de santé)
- le contrat ayant pour objet d’améliorer la qualité et la coordination des soins des
établissements, structures et professionnels de santé. Ce contrat est apparu avec la Loi HPST, et
permet à l’ARS de signer un contrat avec un établissement de santé mais aussi directement avec un
professionnel.
• Les organismes et les professionnels libéraux de santé participant à l’activité de télémédecine
signent une convention organisant leurs relations et les conditions dans lesquelles ils mettent
en œuvre cette activité,
• Ils s’assurent que les professionnels de santé participants ont la formation et les compétences
techniques requises,
• Ils s’assurent également du respect des dispositions prévues au 4eme alinéa de l’article L.
1111-8 du Code de la santé publique, relatif aux modalités d’hébergement des données de santé
à caractère personnel.
Cette question fait référence à l’inscription d’un ostéopathe exclusif sur la liste des experts près la cour
d’appel de Paris dans la rubrique F. 8 – 2 relative aux professions de santé réglementées. Vérification
faite, l’expert en question, qui a été désigné, est titulaire du diplôme d’État de masseur-kinésithérapeute
et est diplômé en ostéopathie.
D’aucun pourraient donc affirmer que la question est close et que l’émotion suscitée par une telle
inscription n’a pas lieu d’être. Mais comme les juristes aiment les difficultés et que l’occasion m’est
donnée de jouer les poils à gratter, nous n’allons pas nous arrêter en si bon chemin et nous allons
tenter, à travers cet exemple, d’expliquer comment est défini l’expert judiciaire (1) avant de traiter la
nomenclature et les conditions d’inscription (2).
1. La définition de l’expert :
La solution d’un litige porté devant les juridictions ou non, dépend de plusieurs facteurs. Certains
relèvent de la science propre du juriste, d’autres lui échappent en raison de leur nature technique.
Ainsi, le recours à l’expert est une nécessité, voire même un préalable dans certains litiges, puisque ce
dernier communiquera aux parties et à la juridiction un rapport synthétisant les données techniques du
problème. Il appartiendra ensuite aux avocats et aux juges de respectivement proposer et donner les
règles de droit applicable, son interprétation aux faits de la cause et d’analyser en termes de preuves
se rapportant aux textes à appliquer, les données scientifiques contenues dans le rapport.
Le code de procédure civile qualifie l’expert de technicien, l’expertise n’étant qu’une des modalités de
son intervention technique devant les juridictions.
Le choix de l’expert ainsi que l’étendue de sa mission relève de la compétence exclusive du juge. Dès
lors, la liste des experts judiciaires n’a qu’un caractère incitatif, le technicien qui y est inscrit disposant
du fait de la reconnaissance de ses capacités professionnelles, du privilège d’avoir prêté serment pour
la durée de son inscription et de la publicité qui s’y attache.
Les articles 1ers et 6 de la Loi n° 71-498 du 29 juin 1971, issus de la Loi n°2004-130 du 11 février
2004, rappellent ce principe.
6. Conditions de financement ?
La Cour de Cassation a ainsi rappelé dans un arrêt de la 3ème Chambre civile du 12 avril 1983
que le technicien désigné par le juge exécute un mandat de justice et n’exerce pas, ce faisant, une
profession.
Le financement rentre dans le cadre du droit commun des établissements, structures et professionnels
de santé ainsi que le droit commun des structures et services médico-sociaux.
Les actes de télémédecine relèvent du financement « Assurance Maladie » de droit commun, selon la
nature de celui qui réalise l’acte. Ils peuvent être financés au titre des articles L. 221-1-1 et L. 162-22-13
du Code de la sécurité sociale, ainsi que dans les conditions prévues aux articles L. 314-1 et 2 du Code
de l’action sociale et des familles.
Cet arrêt n’a rien de révolutionnaire. Il ne fait que reprendre, en les synthétisant, les articles 233 et
suivants du Code de procédure civile. Ces textes rappellent que le technicien est investi de ses pouvoirs
par le juge en raison de sa qualification. De ce fait, le statut juridique de l’expert est calqué sur celui du
juge, puisqu’il doit être récusé pour les mêmes causes que les juges et qu’il est soumis au respect des
règles de procédure du Code de procédure civile ou du Code de procédure pénale. L’essentiel tient donc
à la qualification professionnelle du technicien.
7. Axes de développement ?
Il y a des priorités dans le développement de la télémédecine, certaines listées.
En termes de besoins, le rapport LABORDES ou d’autres rapports parus sur le thème de la télémédecine,
distinguent plusieurs soutiens :
a) Besoins liés à la restructuration de l’offre de soins hospitalière
• La téléconsultation spécialisée dans les services d’urgences des établissements de santé de
proximité, notamment en neurologie, cardiologie, néphrologie,
- 52 -
Dès lors, sous l’empire des textes actuels il est déjà loisible à tout magistrat de désigner comme technicien
une personne présentant les qualifications requises dans des domaines qui ne figureraient pas dans la
nomenclature des experts judiciaires. En ce cas, le technicien non inscrit en qualité d’expert, doit prêter
préalablement serment avant d’exécuter des opérations d’expertise demandées par le juge.
Selon cette règle donc, il est tout à fait loisible d’ores et déjà, de désigner un ostéopathe comme expert
judiciaire dans les domaines relevant de l’exercice de sa sphère d’activité professionnelle telle que
définie par la Loi et les règlements.
En apportant cette première réponse, nous n’avons pas automatiquement répondu à la question posée.
Cependant, le simple fait que l’expert inscrit sur la liste de la Cour d’Appel de Paris soit titulaire du
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programme de travail, ce chantier que constitue la télémédecine.
diplôme de masseur-kinésithérapeute permet à première vue de justifier de sa qualification et de son
inscription à ce titre dans la liste selon la nomenclature. Certains m’objecteront que ce technicien n’exerce
plus la profession réglementée figurant dans la rubrique dont il relève.
Nous devons ainsi nous interroger sur le caractère normatif de la nomenclature des experts et sur la
possibilité qu’auraient les Cours d’Appel d’inscrire sur cette liste des techniciens relevant d’une profession
non inscrite à la nomenclature.
2. La nomenclature et les conditions d’inscription des experts :
Le décret n°2004-1463 du 23 décembre 2004 a réglementé la question de l’inscription des candidats
experts dans les listes établies par les Cours d’Appel et la Cour de Cassation.
•
•
entre professionnels de santé (article 51 de la Loi HPST),
Cet exercice s’inscrit dans le droit commun des échanges informatisés de données de santé (Loi
n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés modifiée),
Le financement de la télémédecine est intégré au droit commun du financement des structures
et professionnels de santé et médico-sociaux.
2. Que dit ce projet ?
Présentation ci-dessous d’un tableau simplifiant la lecture du projet de décret, et qui permet de distinguer
4 actes de télémédecine :
Téléconsultation
Télé-expertise
Télésurveillance médicale
Téléassistance médicale
L’article 1er, alinéa 2, de ce décret, énonce une limite au pouvoir l’inscription sur la liste. En effet, ce
texte énonce que ces listes sont dressées conformément à une nomenclature établie par arrêté du Garde
des Sceaux, Ministre de la justice. Cette nomenclature a été établie par arrêté du 10 juin 2005 publié au
journal officiel du 28 juin de cette même année. Effectivement, le titre d’ostéopathe ne figure pas dans
la liste. Dès lors la réponse pourrait être claire : il est interdit d’inscrire sur la liste, un professionnel qui
ne figure pas dans la nomenclature et qui n’aurait pas les diplômes permettant d’y être rattaché.
Alors, les collègues de la Cour d’Appel de Paris se seraient-ils grossièrement trompés puisque le technicien
inscrit n’exerce plus en cette qualité de masseur-kinésithérapeute. Ce serait aller un peu vite en besogne
et procéder par une lecture tronquée de l’article 2 du décret du 23 décembre 2004.
•
Le quatrièmement : qui précise que le technicien doit exercer ou avoir exercé pendant un temps
suffisant une profession ou une activité en rapport avec sa spécialité ;
•
Le cinquièmement : qui énonce que le technicien doit exercer ou avoir exercé cette profession ou
cette activité dans des conditions conférant une qualification suffisante.
Dès lors, légalement, le technicien inscrit peut être une personne qui n’exerce plus la profession pour
laquelle il a demandé son inscription. La Cour qui recevra la candidature devra analyser la pertinence des
qualifications du technicien et la validation par l’expérience de ses acquis professionnels.
Ainsi, un masseur-kinésithérapeute qui aurait cessé son activité professionnelle induite par son diplôme
peut-il être inscrit s’il ressort de son dossier qu’il dispose de toute l’expérience professionnelle requise
?
Cette inscription litigieuse, de prime abord étonnante, est-en conséquence justifiée en l’état actuel des
textes qui régissent les règles d’inscription des experts.
Cependant, il faut aller un peu plus loin dans la lecture de la liste des experts de Cour d’Appel de Paris
qui ne doit pas vous laisser dupes. En effet, le premier diplôme mentionné, à la suite du nom de l’expert,
est bien celui d’ostéopathe. Il est donc clair que les magistrats de la Cour d’Appel ont souhaité que
l’ostéopathie trouve sa place d’une manière ou d’une autre dans la nomenclature. Cette décision, aussi
choquante puisse t’elle vous paraître, me paraît justifiée.
La reconnaissance par l’État du titre d’ostéopathe et la définition d’une habilitation d’exercice en première
intention par Loi n°2002-303 du 4 mars 2002 et le décret d’application n°2007-435 du 25 mars 2007
ont introduit dans notre ordre juridique, une nouvelle profession non réglementée dont l’exercice est
susceptible de conséquences dommageables sur les personnes, nécessitant en tout état de cause
l’appréciation par les juridictions des règles de responsabilité professionnelle.
Précision : en l’état actuel des recherches, deux procès en Cour d’Appel ont existé mettant en cause un
ostéopathe dans l’exercice de son activité, et d’autres litiges sont en cours.
Il est donc nécessaire de disposer d’un corps d’experts capables de discuter des champs de compétences
respectifs des ostéopathes et des professionnels de la santé, d’une part, et d’apprécier les critères du
bon exercice de chaque profession, d’autre part, d’autant que des litiges mettent en cause les conditions
actuelles d’exercice, que ce soit sur les questions du diagnostic, ou celles des gestes pratiqués.
- 10 -
3. L’exercice de la télémédecine par les professionnels de santé ?
Des principes vont ressortir à la lecture du texte :
•
Les professionnels médicaux participants à un acte de télémédecine respectent les conditions
d’exercice prévues aux articles L. 4111-1 et L. 4111-7 ; ils doivent satisfaire à l’obligation
d’assurance prévue à l’article L. 1142-2,
•
Les professionnels de santé non médicaux peuvent participer à une activité de télémédecine
en application des dispositions relatives aux actes professionnels qui les concernent ou dans le
cadre des coopérations prévues aux articles L. 4011-1 à L. 4011-3 du Code de la santé publique
(article 51 de la Loi HPST),
•
L’activité de télémédecine demande aux professionnels de santé un nouveau regard sur leur
pratique (hors cadre juridique) ce qui est, au-delà du texte, est un enjeu majeur. Les règles de
pratiques ne sont pas explicitement mentionnées dans le décret mais les nombreux visas amènent
le professionnel à modifier ou adapter ses pratiques au déploiement de la télémédecine
En effet, les questions qui se poseront :
- Qu’est-ce que l’activité de télémédecine va modifier quant à l’approche du patient ?
- Qui va faire quoi ?
- Quel est le professionnel en face ?
- Que partageons-nous ?
- Que savons-nous des uns des autres ?
Tout ce dispositif va donc engendrer un enjeu majeur en termes de formation et de protocoles. C’est
dans ces conditions que la Haute Autorité de Santé a été interpelée et intègre maintenant dans son
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En effet, ce texte énonce les huit conditions nécessaires à l’inscription sur la liste. Au-delà des conditions
liées à la moralité de l’impétrant, deux alinéas doivent nous intéresser :
« AUX
ANTIPODES DU TOUCHER
»
Laurence NIVET
Directrice APHP
Le thème du congrès est très ciblé, dans un spectre très large ; il est intéressant d’aller jusqu’aux antipodes
du toucher en présentant les premières orientations sur cette organisation de la télémédecine.
La télémédecine est un sujet d’actualité dont on parle beaucoup et qui existe déjà depuis 10 ou 20 ans
dans certains pays, mais en France cela reste un sujet non développé et perplexe.
Le premier ministre a confié au député LABORDES une mission qui est actuellement le socle de la
réflexion et qui montre qu’il y a eu des freins et qu’il y a aussi des enjeux.
1er enjeu : Technique
Cet enjeu existe toujours, mais ce n’est plus un frein au dispositif.
Par contre les enjeux ci-dessous restent des freins :
Cette inscription répond donc, certainement, aux vœux de l’institution judiciaire de pouvoir répondre
de manière efficace et pertinente à l’émergence de professions nouvelles et ne fait que rappeler que la
nomenclature est une décision juridique révisable. Loin de vouloir choquer, cette décision doit interpeler
chacun d’entre nous afin que nous nous saisissions de ce champ de compétence et que nous nous
interrogions sur le champ d’intervention des expertises.
Pour isolée qu’elle soit, cette décision d’inscription peut constituée la prémisse d’autres inscriptions
concernant d’autres professions techniques ne figurant pas aujourd’hui dans la nomenclature et qui
apparaissent à raison de l’évolution de nos sociétés.
Ne nous arrêtons donc pas à la réponse négative qu’en l’état actuel des textes un professionnel non
mentionné dans la nomenclature ne peut être inscrit sur les listes d’experts, et réfléchissons sur le fait
que cette nomenclature est évolutive et susceptible de bouger dans les prochaines années.
2ème enjeu : Organisationnel
3ème enjeu : Accès aux soins
4ème enjeu : Pratiques professionnelles et Organisation entre professionnels
5ème enjeu : Industriel
Le rapport LABORDES présente donc ces freins et surtout met l’accent sur la nécessité d’avoir une
démarche très nationale et structurée du déploiement de la télémédecine, en répondant à un certain
nombre de préalables, notamment ceux relatifs au dispositif juridique, au dispositif financier et au
dispositif de déploiement.
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6ème enjeu : Financier
Le décret n’étant encore qu’au stade de projet et n’étant pas paru, il sera fait état ici des orientations
pour le moment décidées.
Ce décret se base sur un socle : la Loi HPST, qui a repris les anciennes conditions de la Loi sur l’assurance
maladie de 2004, en complétant et précisant la définition de la télémédecine, et en positionnant la
télémédecine par rapport à la télésanté.
1. Définition de la télémédecine :
« La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information
et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels
de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d’autres
professionnels apportant leurs soins au patient.
Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou
un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique,
de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes ou d’effectuer une
surveillance de l’état des patients.
La définition des actes de télémédecine ainsi que leurs conditions de mise en œuvre et de prise en charge
financière sont fixées par décret, en tenant compte des déficiences de l’offre de soins dues à l’insularité
et l’enclavement géographique. »
La télémédecine n’est pas un dispositif juridique spécifique, mais simplement un dispositif s’inscrivant sous
quelques conditions particulières dans le droit commun de l’exercice et des pratiques professionnels.
Le texte est juridiquement sobre pour servir de socle au déploiement de la télémédecine mais n’y sont
écrits que les éléments indispensables à l’exercice de la télémédecine.
C’est dans ces conditions que :
•
•
La télémédecine est un acte de nature médicale et son exercice s’inscrit dans le droit commun
de l’exercice médical et du droit des patients (Loi n° 1577-2002 du 30 décembre 2002 relative
à la responsabilité civile médicale et Loi n°2004-810 du 13 août 2004 relative à l’assurance
maladie),
L’exercice de la télémédecine respecte le droit commun des règles de compétences et coopérations
- 50 -
- 11 -
DE L’ASSEMBLÉE
kinésithérapeute traitant d’un même patient.
Le masseur-kinésithérapeute ne doit pas accepter une mission d’expertise dans laquelle sont en
jeu ses propres intérêts, ceux d’un de ses patients, d’un de ses proches, d’un de ses amis ou
d’un groupement qui fait habituellement appel à ses services. »
a) L’ostéopathie n’est qu’un titre, et n’est pas une profession de santé. L’emploi des termes « d’autres
professions de santé » impliquent que l’ostéopathie en est une.
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Réponse du magistrat : à partir du moment où un titre donne une sphère de compétences d’exercice,
cela induit nécessairement, même non réglementée, le terme de « profession », qui signifie « personne
exerçant une activité légale, reconnue par les textes ».
Interdire l’ostéopathie du terme « profession », car ce n’est qu’un titre protégé, lui semble relever d’une
querelle sémantique.
Quant à la reconnaissance de l’ostéopathie comme profession de santé, Monsieur CARBONARO reconnaît
l’existence de l’ambiguïté des textes, tout en confirmant que juridiquement, en France, l’ostéopathie
n’est pas une profession de santé.
La question posée au-delà des circonstances actuelles, repose sur le fait que l’organisation mondiale de
la santé a une définition beaucoup plus large de ce qu’est une profession de santé, comparé au droit
français.
b) Monsieur Jean-Paul DAVID, Vice-président du Conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes
: La justice reconnait l’exercice, et de fait, le professionnalisme des ostéopathes.
Cependant, le Conseil de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes, s’emploie de manière stricte à distinguer
les compétences réglementaires acquises en ce qui concerne un professionnel masseur-kinésithérapeute
ayant le titre d’ostéopathe, et un ostéopathe qui n’est pas profession de santé mais pouvant exercer les
compétences qui lui sont données par la Loi.
Il faut néanmoins rester alerté sur l’existence d’une distinction de compétences très importante qui
repose sur le fait qu’un médecin ou masseur-kinésithérapeute qui exerce l’ostéopathie peut pratiquer
des touchers extrêmement délicats, notamment des touchers thérapeutiques qui peuvent être sujets à
ambiguïté.
De manière récurrente, L’Ordre est destinataire de litiges reposant sur des actes réalisés par des
ostéopathes non titulaire du diplôme de masseur-kinésithérapeute, ou titulaire du diplôme de masseurkinésithérapeute mais non inscrit au tableau de l’Ordre, utilisant les compétences des professions de
santé.
L’expert que choisira le juge, devra, dans certains cas, posséder les compétences d’une ou des profession(s)
de santé.
« Lorsqu’il est investi d’une mission, le masseur-kinésithérapeute expert doit se récuser s’il
estime que les questions qui lui sont posées sont étrangères à l’art de la masso-kinésithérapie,
à ses connaissances, à ses possibilités ou qu’elles l’exposeraient à contrevenir aux dispositions
du présent code de déontologie. »
« Le masseur-kinésithérapeute expert, avant d’entreprendre toute opération d’expertise, informe
la personne en cause de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé. »
« Le masseur-kinésithérapeute expert, avant d’entreprendre toute opération d’expertise, informe
la personne en cause de sa mission et du cadre juridique dans lequel son avis est demandé. »
Pour terminer, quelques réflexions :
•
La réglementation et la déontologie ne doivent pas être vues comme un carcan, mais plutôt
comme un gage de confiance pour le patient et une responsabilité permettant une autonomie
au praticien.
•
Grâce à ces nouvelles règles, l’indépendance et l’autonomie de la profession sont reconnues et
valorisées.
« Il y a une morale humaine supérieure même à la morale légale, là où celle-ci ferait défaut. »
Charles-Augustin Sainte-Beuve
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QUESTIONS / RÉACTIONS
Réponse du magistrat : sur le plan légal, un ostéopathe exclusif qui n’aurait pas le diplôme d’état et
l’expérience professionnelle de masseur-kinésithérapeute, ne peut pas être inscrit sur la liste. Néanmoins,
la liberté du choix du magistrat est totale.
La loi de 2002 et les décrets de 2007, en habilitant les ostéopathes sur un titre, ont énoncé un certain
nombre d’actes de leurs compétences dont on sait l’ambiguïté des termes, avec ceux relevant des
professions de santé, dont celle de la masso-kinésithérapie.
A terme, il sera probablement nécessaire que chaque profession définisse sa sphère technique de
compétences, les actes, les limites, les éventuels chevauchements de compétences entre professions,
car les juridictions se posent une première question « est-ce que cet ostéopathe pouvait pratiquer cet
acte ? » (diagnostic d’exclusion).
A terme, il pourrait être envisagé des collèges externes qui interviendront pour croiser de manière
transversale et en relief, les regards sur un diagnostic.
Le juge doit vraisemblablement penser qu’un ostéopathe inscrit sur les listes et possédant le diplôme de
masseur-kinésithérapeute est capable de faire cette double expertise, ce double diagnostic.
c) Articulation du raisonnement : l’ostéopathe ayant le titre de masseur-kinésithérapeute peut donc
figurer sur la liste d’experts parce qu’il est titulaire du diplôme d’état de masseur-kinésithérapeute et
d’une expérience professionnelle reconnue.
Ainsi, si l’ostéopathe n’était pas masseur-kinésithérapeute, il n’aurait pu être inscrit sur les listes ?
Réponse du magistrat : en effet, le titre de masseur-kinésithérapeute lui confère la possibilité d’être
inscrit sur les listes.
d) L’inversion des mots, en plaçant le terme « ostéopathe » devant « masseur-kinésithérapeute »
n’est-elle pas un abus de langage ? N’existe-t-il pas un risque sur l’évolution des choses ? Sur une
interprétation exponentielle ?
Réponse du magistrat : La décision de la Cour d’Appel de Paris n’est pas neutre car elle considère que
l’ostéopathie mérite d’avoir un expert inscrit sur les listes.
- 12 -
- 49 -
3. Informer la personne, le patient
Le fait d’avoir mis en premier le terme « ostéopathe » n’a aucune neutralité.
Le point de vue de l’Ordre porte aussi sur un impératif qui est le besoin d’informer le patient.
e) Il existe une gêne car les ostéopathes inscrits sur les listes sont catégorisés sous la rubrique «
auxiliaire de santé », car masseur-kinésithérapeute, mais ce dernier n’es pas inscrit au tableau de
l’Ordre ; cependant, pour exercer légalement, le masseur-kinésithérapeute doit être inscrit au tableau
de l’Ordre.
Or dans le cas actuel, comment est-il possible qu’une personne soit désignée expert, dans de telles
conditions ?
L’article 1111-2 du Code de la santé publique précise clairement cette problématique de l’information qui
évite bien souvent les problèmes de plainte et dispose que :
« Toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les
différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur
urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils
comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.
Lorsque, postérieurement à l’exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des
risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d’impossibilité
de la retrouver.
Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le
respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l’urgence ou l’impossibilité d’informer
peuvent l’en dispenser. »
Réponse du magistrat : l’expert n’intervient pas en tant que professionnel, ni dans le cadre de sa
profession.
Cela couvre entièrement tous les gestes et diagnostics qui peuvent être réalisés.
Actuellement, la recommandation de bonne pratique sur la délivrance de l’information, est en cours
d’élaboration par la Haute Autorité de Santé, et s’adressera à toutes les professions de santé, et le
Conseil National de l’Ordre fait partie du groupe de travail.
•
La moralité : articles R. 4321-54 et R. 4321-79
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Les Commissions de Conciliation et les Chambres Disciplinaires de Première Instance et d’Appel fondent
principalement leurs décisions sur le Code de Déontologie. Dans ce Code, il est intéressant de rappeler
les articles relatifs aux propos de ce congrès :
« Le masseur-kinésithérapeute respecte, en toutes circonstances, les principes de moralité, de
probité et de responsabilité indispensables à l’exercice de la masso-kinésithérapie. »
« Le masseur-kinésithérapeute s’abstient, même en dehors de l’exercice de sa profession, de
tout acte de nature à déconsidérer celle-ci. »
•
L’information : article R. 4321-83
« Le masseur-kinésithérapeute, dans les limites de ses compétences, doit à la personne qu’il
examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son
état, et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité
du patient dans ses explications et veille à leur compréhension. Toutefois, sous réserve des
dispositions de l’article L. 1111-7, lorsque le médecin, appréciant en conscience, tient, pour des
raisons légitimes, le patient dans l’ignorance d’un diagnostic ou pronostic graves, le masseurkinésithérapeute ne doit pas révéler ces derniers. »
•
Le consentement : article R. 4321-84
« Le consentement de la personne examinée ou soignée est recherché dans tous les cas.
Lorsque le patient, en état d’exprimer sa volonté, refuse le traitement proposé, le masseurkinésithérapeute respecte ce refus après avoir informé le patient de ses conséquences et, avec
l’accord de ce dernier, le médecin prescripteur.
Si le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté, le masseur-kinésithérapeute ne peut intervenir
sans que la personne de confiance désignée ou ses proches aient été prévenus et informés,
sauf urgence ou impossibilité. Le masseur-kinésithérapeute appelé à donner des soins à un
mineur ou à un majeur protégé s’efforce de prévenir ses parents ou son représentant légal
et d’obtenir leur consentement. En cas d’urgence, même si ceux-ci ne peuvent être joints, le
masseur-kinésithérapeute donne les soins nécessaires. Si l’avis de l’intéressé peut être recueilli,
le masseur-kinésithérapeute en tient compte dans toute la mesure du possible. »
•
L’expert : R. 4321-138 à R. 4321-141
« Nul ne peut être à la fois masseur-kinésithérapeute expert ou sapiteur et masseur- 48 -
- 13 -
COUTUMES ET TRADITIONS
DE VUE DE L’ORDRE
»
Claude DEBIARD
MKDE, Cadre de Santé
Jean-Paul DAVID
Vice-président du Conseil National de l’Ordre des Masseurs-Kinésithérapeutes
Le but de son intervention est de repositionner le toucher dans notre société.
Le toucher est un sens qui est intéressant de positionner dans une réflexion interculturelle et sociale. Le
toucher joue un rôle fondamental dans le développement des individus et influe sur l’organisation de la
société.
Tout ce qui a été dit au niveau pratique par les professionnels, tout ce qui a été dit au niveau juridique par
les magistrats et avocats, permet de se positionner sur la juridiction professionnelle, qui juge en matière
disciplinaire d’une façon assez catégorique.
Etymologiquement, le toucher vient du latin « toccare » = faire toc, heurter, atteindre, puis toucher.
Dans notre profession de masseur-kinésithérapeute, le massage est une forme de toucher à visée
thérapeutique ou de bien être.
Le toucher fait partie des 5 sens : le goût, l’odorat, la vision, l’ouïe.
Il est à noter que c’est l’organe le plus développé ; en effet, la peau représente une surface d’environ
2m².
Le toucher correspond à la sensibilité cutanée, intervenant dans l’exploration des objets par la palpation.
Le toucher est à la fois perception corporelle et sensation individuelle.
Le toucher est un moyen de communication non verbale intégrant 6 conditions :
La durée du toucher,
Les parties du corps concernées par le toucher,
La progression du toucher,
L’intensité du toucher,
La fréquence du toucher,
La perception du toucher.
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« POINT
»
N’oublions pas que si nous nous référons à l’analyse transactionnelle, « toucher » c’est évoluer dans
l’espace intime de l’individu, et même très intime pour certaines techniques kinésithérapiques. Ce qui
pourra amener nos experts masseurs-kinésithérapeutes à donner leurs avis dans des procès où le geste
thérapeutique pourrait être vécu par le patient comme une violation de son intimité. D’où l’importance
de respecter l’obligation d’information afin d’obtenir le consentement éclairé du patient.
Dans notre société occidentale, le toucher est un des cinq sens le plus dévalorisé, même si à ce jour, une
prise conscience importante est faite pour rééquilibrer ce déficit, que je dirai « tactile ».
En effet, en juin 2009, le Conseil national de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes a fait une campagne
publicitaire où « Alexis fait des merveilles avec ses mains » et « Céline fait un bien fou tous les 15 jours
».
Cette publicité, information ou communication avait pour objectif de mettre en valeur, je cite « les liens
qui unissent les masseurs-kinésithérapeutes à leurs patients et sur l’aspect durable des soins qu’ils
dispensent ». Ce qui est mis en exergue, c’est le toucher thérapeutique via un professionnel du toucher
qu’est le masseur-kinésithérapeute. Ce que beaucoup d’autres professionnels de santé nous envient.
Fort est de constater que le nombre des écrits sur le toucher thérapeutique est minoritairement rédigé
par des masseurs-kinésithérapeutes.
1. Il est bon de faire un retour de plusieurs siècles en arrière :
Le sujet sur le toucher existe peu dans la littérature ancienne. Mes recherches ont porté plus particulièrement
vers une licence de psychologie de Paris Nanterre, d’auteur inconnu, tout en évitant la littérature récente
plus mercantile que philosophique.
Répandu dans le monde entier, le toucher constitue un moyen important de faciliter un attachement
sécurisant entre les êtres et plus particulièrement entre les parents et les enfants. L’utilisation du toucher
à des fins thérapeutiques par les cultures orientales remonte à l’an 3000 avant Jésus-Christ. Le massage
des nouveau-nés est pratiqué depuis des siècles par les mères d’Asie, de l’Europe de l’est, de l’Afrique
et de l’Amérique latine.
Le point de vue de l’Ordre est issu d’une réflexion de plusieurs conseillers nationaux consultés cet été et
notamment ceux qui travaillent à la commission de déontologie.
Le thème choisi par la Compagnie aujourd’hui est très pertinent à plus d’un titre car en effet, d’autres
professions « touchent », mais les masseurs-kinésithérapeutes sont en première ligne et avaient besoin
que ce sujet soit abordé tel qu’il est fait aujourd’hui.
1. La place du toucher dans les actes et l’exercice réglementaire du masseur-kinésithérapeute
français
Le kinésithérapeute, que ce soit réglementaire ou dans l’opinion publique, est celui qui a le droit de
toucher. Il a le droit de palper, masser et son patient le sait, donc la pratique du toucher est basé sur la
confiance, contrairement à d’autres professions.
C’est l’« étiquette » du professionnel.
Par ailleurs, le toucher est un acte manuel, varié et complexe, particulièrement exposé à des interprétations
entraînant plaintes et procédures. C’est pourquoi l’avis d’un expert masseur-kinésithérapeute est
primordial sur le geste effectué mais aussi sur le ressenti attendu par le patient (car le geste implique
une relation entre celui qui touche et celui qui est touché), que ce soit en matière pénale, civile ou
disciplinaire.
2. Le rôle de l’expert
En effet, l’expert est le plus apte à apporter une réponse objective et explicite aux instances de justice
que ce soit pour lever ou révéler l’ambiguïté.
L’expert est donc obligé de se prononcer d’une manière hiérarchique, tout d’abord sur le Code de la santé
publique qui précise les droits et devoirs des masseurs-kinésithérapeutes, sur le décret d’actes qui paraît
tous les 10 ans et qui précise les actes autorisés, et puis sur le Code de déontologie, depuis 2008, qui
prend en compte un certain nombre de situations pour les expliciter et aider les choix du praticien à titre
préventif.
Le Code de déontologie va donc permettre à l’Ordre d’exercer ses missions, et parmi celles-ci, la première
chose est le maintien des principes de moralité et de probité de la profession, ainsi que la veille des
compétences indispensables à l’exercice de la profession.
Ces missions de l’Ordre ne visent pas seulement les obligations et devoirs des professionnels, mais aussi
un droit. Ce droit, dans le cadre du toucher, est lié à une compétence réglementaire et doit être respecté
à la défense du masseur-kinésithérapeute.
Beaucoup de conciliations ou plaintes, trahissent une mauvaise interprétation de la personne des actes
effectués par le professionnel.
Le Code de déontologie est donc un plus, car dans le respect de ce dernier, le praticien a une amplitude
de geste très importante.
En effet, le législateur n’a pas définit l’exercice de la profession comme une technique mais comme un
art, ce qui laisse une dimension prépondérante à l’adresse, à la recherche et au talent du praticien, que
ce soit dans les massages, les thérapies manuelles, les diagnostics palpatoires, les rééducations…
Ce qui rend d’autant plus nécessaire l’avis d’un expert, car il y a une marge de création qui ne rentrera
jamais dans tous les textes réglementaires existants. Donc l’expert, dans cette profession, est plus que
nécessaire, il est indispensable.
En faisant un rappel historique de l’antiquité grecque d’Aristote en passant par Jésus-Christ, de Cicéron
et pour finir par Freud, nous constatons que « Pour les premiers chrétiens ; le toucher est comme un
danger moral » (dixit Michel Perrin).
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« US,
Il ne faut pas nouer de situation d’empathie ou de sympathie dans l’acte, le soin étant un acte technique
qui doit le rester.
Sans aucune vigilance, on rentre très rapidement dans le cadre de l’atteinte sexuelle voire la pénétration
sexuelle qui retient la définition du viol.
La contrainte pouvant en plus, être très facilement démontrée par le patient.
Il est à noter, que les rapports entre les soignants et les soignés se tendent notablement et que de plus en
plus de réclamations sont faites au pénal, ce qui implique que plus il y aura de plaintes, de réclamations
sur des infractions pénales de nature sexuelle, plus le juge les admettra. Il y a une véritable nécessité
de rester prudent.
Ceci étant confirmé par Cicéron, philosophe (45 après Jésus-Christ) parlant des sens ; « ils sont dangereux
car ils font glisser l’homme vers un plaisir où il risque de se perdre. »
Nous pouvons constater que la peur du toucher fait partie des symptômes pathologiques de l’homme.
Freud dans « Totem et tabou », puis la psychanalyse Freudienne applique ce même concept.
« Noli tangere » : jamais le psychanalyste ne touche son patient.
Depuis le XX° siècle la notion de toucher évolue, et la notion de toucher n’apparaît plus comme un pêché
mais comme une source de plaisir, d’enrichissement, d’échange et de bonheur.
C’est pour cela qu’il est indispensable de regarder comment les autres sociétés se positionnent ou ont
évolué par rapport au toucher.
2. Le toucher sollicité
2. D’autres sociétés ont des approches différentes :
Pour des raisons ignorées, mais probablement dues au pouvoir de guérison, le soignant dispose d’un
potentiel de séduction important auprès de ses patients et patientes.
En Afrique, où l’homme est tenu pour identique à la nature, le toucher devient instrument majeur du
quotidien : c’est une action d’immédiate réciprocité ; quand on touche, on est touché aussi (exemple du
taxi-brousse en Afrique). Cet état, réveillé et établi depuis la prime enfance, ne laisse de place ni à la
peur, ni à l’équivoque. « On ne triche pas avec l’authenticité du toucher », selon Louis Vincent Thomas
dans « Mort Africaine ».
Il est toujours à déconseiller d’user de ce pouvoir.
Des réclamations existent sur des relations jugées insatisfaisantes par les patients, dans le cadre d’un
contact physique entre les soignants et les soignés. En cas de dépit, cela donne quasi-systématiquement
lieu à des plaintes soit devant les ordres professionnels, soit devant les juridictions.
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Le toucher dans ce concept doit être vécu comme toucher bien être qui annihile toute notion d’effort,
toucher érotique et auto-toucher.
Sans terroriser, ces réclamations n’aboutissement pas obligatoirement à condamnation, néanmoins il est
extrêmement désagréable d’avoir à se justifier. Dans tous ces dossiers, les professionnels de soins sont
tous traumatisés par ces plaintes.
De plus, le traumatisme est d’autant plus douloureux quand il relève d’une remise en question d’une
attitude, plutôt que d’un acte, car il est connu de tous qu’il est possible de commettre une erreur, que
c’est humain et que l’on cherche à réparer la maladresse technique. Quant à l’erreur comportementale,
c’est un domaine plus symbolique et beaucoup plus marquant pour le soignant.
En Inde, les mamans passent énormément de temps à toucher, masser leurs enfants. Le fait de toucher
les pieds est une marque de respect accordée envers les aînés de la famille ou des chefs religieux.
Les pieds, en contact permanent avec le sol, sont considérés comme sales et impurs. Le fait de se
rabaisser à toucher les pieds de quelqu’un, est un signe d’humilité profond. En retour, la personne attend
la bénédiction de la part de cet aîné. Cette bénédiction se fait en touchant la tête.
D’autre part, il existe des courants de penser issus de croyances ancestrales comme le chamanisme
avec des variances en fonction des lieux et de l‘époque, le Reiki, le Shiatsu, la kinésiologie où le toucher
prend une grande place dans ces différents concepts. Ce toucher aurait des influences thérapeutiques,
vibratoires etc.
Einstein disait que « l’homme n’est que vibration ».
3. Mais ces courants de penser ne seraient-ils pas la porte ouverte à des dérives sectaires ?
Différents rapports de la Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires
(MIVILUDES) pointent ces types de croyance ou de pratiques comme pouvant être sectaires. En effet,
le toucher est un outil fort dans la communication, il diffère suivant les époques et les ethnies, tisse la
trame des relations humaines, perpétue aussi certains schémas aliénants de la communication.
C’est un véritable langage parallèle qui peut être porte ouverte à la manipulation intellectuelle. Cet impact
est constaté chez le particulier. De même, les entreprises sont de plus en plus confrontées à ce problème.
Insidieusement, cette manipulation intellectuelle s’est révélée dans une formation en entreprise sur la
gestion du stress et de l’agressivité. Il a été vérifié, ultérieurement, que le formateur proposait tout au
long de cette formation, des cours où le toucher était mis en exergue pour mieux se connaître (pour la
petite histoire, ce formateur était architecte et faisait partie d’un courant de pensées sectaires).
Concernant la kinésiologie, il est important de rappeler une partie du courrier de la MIVILUDES en date
du 14 septembre 2010, adressé dans les Conseils départementaux et régionaux de l’Ordre des masseurskinésithérapeutes par le Conseil national : « la kinésiologie qui est une pratique non évaluée à ce jour,
de manière indépendante dès lors qu’elle est mise en œuvre à titre exclusif, a donné lieu à des dérives
sectaires caractérisées notamment par une déstabilisation mentale, des coûts de prestations démesurés,
des ruptures familiales et des atteintes à l’intégrité physique des adeptes (…). Ces pratiques peuvent être
d’une efficacité redoutable dans un processus d’emprise pouvant conduire, dans les cas extrêmes, à une
mort prématurée par le refus de protocoles thérapeutiques éprouvés. » dixit Monsieur Hervé MACHI.
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Effectivement, dans ce contexte, le toucher (la palpation), a sûrement été réalisé de manière
professionnelle, mais l’environnement et le fait de tenir de tels propos tendent à faire dévier l’acte de la
thérapeutique simple vers l’application du droit pénal.
4. Quel a été l’intérêt de notre culture occidentale de nier le toucher ?
« L’ART
DÉLICAT DU TOUCHER MÉDICAL
»
Peur des épidémies ou tout simplement réserver le plaisir des sens aux nantis ?
Philippe TREGUIER
Avocat de formation, Responsable au titre IARD au Groupe Pasteur Mutualité
De nos jours « toucher » n’est pas un geste neutre, sans portée. Ci-dessous des images de publicités
étrangères où le toucher est source de destruction :
Quelles problématiques juridiques découlent du toucher médical ?
En fait, le problème du toucher médical, regroupe tous les aspects de la responsabilité médicale, du Droit
médical. Le propre du soin est d’intervenir sur le corps, le propre du Droit est de protéger le corps.
Il y a donc un champ de croisements potentiellement dangereux pour celui qui exerce.
Ce champ de croisements est juridico-médical et est également l’expression d’une certaine symbolique.
Le droit pénal a changé en 1993, et notamment la qualification du viol : ce n’est plus un acte de
conjonction sexuelle, mais tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature qu’il soit, commis sur
autrui, par contrainte, violence, menace ou surprise. Le terme « surprise » peut être caractérisé par le
fait de se présenter sous une fausse qualité.
1. Le toucher professionnel, le toucher médical
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Il paraît important de rappeler ce que sont les « strokes », ou calories psychologiques.
Eric BERNE, dans son livre « L’analyse transactionnelle et psychothérapie » en fait référence.
« Stroke » en anglais signifie « coup » ou « caresse ».
Chaque individu a besoin de façon quotidienne de sa dose de « strokes ». Le stroke est aussi une unité
d’attention envers une personne (un « bonjour », « comment ça va ? », un geste de la main, un sourire,
un compliment, une félicitation, ne sont que des « strokes » positifs).
Le toucher externe ne nécessite pas de gants. Le toucher interne, à l’inverse, le nécessite car le fait de
ne pas mettre de gants, révèle une atteinte sexuelle. Nous ne sommes plus dans la simple préservation
sanitaire, mais comme si le port du gant professionnalisait l’acte. D’une certaine façon, c’est une barrière
symbolique. C’est une protection manuelle pour rendre l’acte exclusivement organique et le déshumaniser,
et donc le faire sortir du champ d’application du droit pénal.
Ce faisant le soignant n’est plus un humain, il est un soignant.
Les « strokes » sont nécessaires pour exister et se développer. Il a été constaté à une époque en
Roumanie, que les enfants « non strokés » dans les orphelinats, présentaient plus de problèmes de santé
et de troubles psychologiques au décours de leur vie.
Outre ces aspects strictement symboliques, la qualification pénale du droit en matière de viol rend
accessible à la punition n’importe quel soignant qui ne respecterait pas les règles. Notamment le recul
que le soignant doit avoir, est la froideur au moment de l’acte du toucher.
Cela n’est pas forcément agréable, certains patients se plaignant du fait que le praticien, au moment de
la réalisation de l’acte change d’attitude et devient très froid. Or, c’est une obligation pour le soignant de
se cristalliser.
Une personne n’ayant pas de « stroke » positif, va inconsciemment rechercher des « strokes » négatifs :
enfant perturbateur en classe ou à la ville, adulte en marge de la société, ne pouvant recevoir du positif
créent des situations de conflits c’est pour eux un moyen d’être reconnus et d’exister.
Globalement, les problématiques relatives au toucher ne sont pas si rares que cela. S’agissant des
dossiers enregistrés par mon groupe, cela représente un peu moins de 1% des plaintes des patients, ce
qui n’est pas négligeable.
Dans ce type de réflexion, nous avons l’explication du syndrome de Stockholm. Les otages finissent par
adhérer aux idées ou avoir de la compassion pour leurs tortionnaires.
Pour les otages, les « strokes » négatifs ne sont que le moyen d’exister dans leur calvaire. Leur thérapie
passera par un débriefing et des thérapies psychocorporelles dont le toucher.
Ces litiges ne concernent pas que le toucher. On pourrait en effet, facilement reprocher au soignant
d’avoir un geste déplacé, mais la problématique du toucher n’est pas qu’une question de geste, puisqu’il
s’agit aussi d’une symbolique dans la façon de délivrer le geste et d’une attitude générale.
Le « stroke » le plus positif après le toucher, est l’acte d’amour physique.
Le toucher est une arme de persuasion massive.
Nicolas GUEGUEN écrit : « le toucher est un des ciments du lien social. Un ciment sous-estimé, peut être
la cause du caractère individualiste et aseptisé des sociétés modernes. »
On n’ose plus toucher, de peur de froisser ou choquer. Pourtant, chacun emploie lorsqu’il entre dans un
rapport intime avec autrui, des mots qui trahissent l’importance du contact (« son geste m’a touché », «
j’ai été touché par son attitude », etc.)
Je laisserai le mot de la fin à Jean-Paul SARTRE :
« La caresse recrée l’être qu’elle caresse »
Exemple :
L’attitude générale et le contexte dans lequel le soignant place le toucher sont très importants.
En effet, une jeune fille qui « passe entre les mains » d’un interne en médecine, lui propose une palpation
des seins, puis un examen endovaginal. Le fait de proposer sans motivation thérapeutique, ce type
d’examen à une patiente s’inscrit comme un viol.
(NB : le viol étant un crime potentiellement puni de 30 ans de réclusion criminelle)
De plus, le fait de faire déshabiller entièrement la patiente et non pas exclusivement les zones auscultées,
tend clairement à faire dériver l’acte vers un toucher inadéquate.
D’autant plus que les propos tenus par le soignant ont été « ça fait du bien d’avoir des jeunes de temps
en temps », « c’est vrai que j’en ai profité un peu, tu ne m’en veux pas ? », « ton copain doit être content
de ta poitrine », « si tu veux revenir te faire palper les seins, il n’y a pas de problème », « c’est les plus
gros seins que j’ai vus de mon stage ».
Ce dossier n’est pas encore traité mais se finira sûrement sur une interdiction temporaire d’exercer et
voire pour cet interne en médecine, de la difficulté à obtenir son titre.
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Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
Il peut construire et détruire l’individu ; dégoût, peur, plaisir, désir sont autant de réactions déterminant la
qualité de la communication entre les individus. Notre concept fait que nous privilégions les stimulations
positives ou « strokes », le toucher étant un des plus bénéfiques.
La symbolique à l’occasion du soin peut être caractérisée par le port de gants : en effet, lors d’un toucher
interne, le port des gants est obligatoire. Evidemment, cette indication peut être considérée comme une
indication purement sanitaire pour éviter la contamination du patient ou du soignant, mais ce n’est pas
que cela. Le droit ne fait pas de différence entre l’interne et l’externe.
DE L’ASSEMBLÉE
a) Beaucoup de fantasmes existent au sein des établissements sur le « contact ». Les professionnels
d’aujourd’hui ne sont pas aptes dans le toucher. Beaucoup de réticences persistent et des travaux doivent
être menés pour abolir les confusions existantes entre « intimité » et « proximité ». Des formations sont
nécessaires sur l’approche du toucher.
Au final, quel est l’opinion des directeurs d’hôpitaux présents au congrès, concernant cette appréhension
du toucher ?
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Réponse de Madame Véronique DESJARDINS : une formation a été organisée dans son établissement
sur le thème « toucher-massage » à destination des aides-soignants afin de réhabiliter l’aspect positif du
toucher, pour faire tomber les peurs par rapport à cela. En effet, il faut que ces sujets soient mis sur la
table pour permettre d’avancer dans les pratiques professionnelles de chacun.
Une réelle prise de conscience existe quant aux difficultés que peuvent rencontrer les praticiens.
« DISPOSITIFS
AMIABLES D’INDEMNISATION DANS LES ACCIDENTS MÉDICAUX
»
Michel PECONDON-LACROIX
Avocat général
Après réflexion sur mon intervention, je souhaite évoquer avec vous un dispositif dont j’ai eu connaissance,
créé en 2002.
C’est un dispositif de règlement amiable des accidents médicaux, qui a été mis en place par la Loi du 4
mars 2002, notamment, suite aux problèmes des infections nosocomiales et de la difficulté de trouver
un responsable qui puisse assurer la réparation du préjudice.
Le législateur a donc mis en place un dispositif qui puisse traiter de ces problèmes, et permettre aux
victimes d’éviter une procédure judiciaire longue et onéreuse.
1. Ce dispositif qui a permis la création de plusieurs institutions :
Réponse de Madame Marylène GUINGOUAIN : en tant qu’infirmière, elle précise que la politique du
toucher est une chose, mais que l’application sur le terrain en est une autre. En effet, la peur du toucher
est venue à l’époque des infections nosocomiales, notamment le VIH ; époque à laquelle le port de gants
est devenu courant, non pas par peur de toucher l’intime mais par peur de ces infections. Une rupture a
eu lieu à ce moment là.
Chapote l’ensemble du dispositif, et transmet au gouvernement et au parlement, une fois par an, un
rapport d’activités pour faire le point.
Vient d’être renouvelée en début d’année et est présidée par un Conseiller d’Etat honoraire.
b) Participant responsable d’un plateau technique : il est confronté à des patients qui refusent les soins
du fait de la fatigue ou autre, et pour lesquels le kinésithérapeute, dans le respect de l’individu, note dans
le dossier du patient que ce dernier a refusé les soins. Cependant, l’établissement est victime et attaqué
de plaintes pour « non pratique de soins ». Des dérives juridiques des familles, notamment, commencent
à pointer dans ce sens et font abstraction de la volonté même du patient de ne pas être soigné.
Cette Commission est composée en outre :
- D’experts professionnels de santé, qui exercent à titre libéral ou salarié,
- De représentants des usagers,
- De personnalités qualifiées (juristes ou professeurs de droit) choisis pour leurs compétences
scientifiques
c) Réflexions à l’attention de Madame Véronique DESJARDINS : l’emploi du terme « usager » pour
parler du patient est choquant. En effet, l’usager est quelqu’un qui bénéficie d’un système, qui est un
utilisateur.
Substituer le mot « patient » par celui de « usager » est gênant.
Cette commission, en plus d’être chargée de transmettre un plan/un rapport chaque année basé sur
les rapports des commissions régionales, doit établir, sur demande du législateur, une liste nationale
d’experts en accidents médicaux.
Le texte prévoit que pour être inscrit sur cette liste des experts en accidents médicaux, le professionnel
doit déjà être inscrit sur une liste des experts judiciaires.
Réponse de Madame Véronique DESJARDINS : en effet, le choix du terme n’est pas simple, car il est dit
que celui de « patient » dérange également car il implique que le patient est celui qui peut attendre. Le
fait de faire attendre serait considéré comme une maltraitance ordinaire. De façon plus neutre, on est
passé de « malade », à « patient » pour arriver maintenant à « usager ».
Le terme « patient » est donc aussi critiqué et critiquable. L’évolution des termes suivent aussi l’évolution
de la société.
d) Le mot « patient » vient du grec « celui qui souffre » et non « celui qui attend ».
Réponse de Madame Véronique DESJARDINS : l’interprétation courante faite de ce mot, est pourtant «
celui qui attend », car cela est réellement ressenti par les personnes.
e) L’utilisation du mot « usager » n’est pas neutre. Les dérives évoquées par Monsieur Claude DEBIARD
ne sont-elles pas représentatives de ce passage d’un terme à l’autre ?
L’usager va s’entendre comme la personne qui attend quelque chose et qui est en droit de revendiquer.
En outre, en parlant de personne en état de faiblesse, il est fait état de vieillards, d’enfants, d’handicapés,
d’infirmes… mais toute personne qui souffre quelque soit sa pathologie, est en état de faiblesse et de
dépendance vis-à-vis du praticien.
a. Commission Nationale des accidents médicaux :
La Loi prévoit que ces experts nommés pour 5 ans, doivent bénéficier d’un processus de formation déjà
mis en place.
b. Commissions Régionales et Interrégionales de conciliation et d’indemnisation des accidents
médicaux :
Font remonter annuellement un rapport d’activités à la commission nationale. Ces commissions régionales,
n’ont pas que fonction et compétence d’indemnisation ou de réparation, mais aussi de conciliation.
Néanmoins, en pratique, depuis 2002, c’est essentiellement la fonction de réparation/d’indemnisation
qui est la plus sollicitée dans les litiges qu’ont à traiter ces commissions. Très peu de demandes de
conciliation sont faites.
Données quantitatives quant au nombre de dossiers enregistrés, par les commissions régionales, selon
le rapport de la commission nationale :
17 931 dossiers enregistrés entre 2003 (année de mise en fonctionnement de ces commissions)
et 2008.
3 954 dossiers enregistrés en 2008,
2 200 dossiers rejetés en 2008,
1 338 dossiers accueillis en 2008 pour indemnisation, et dont certains adressés aux assureurs
lorsqu’une faute d’un professionnel ou d’un établissement a été établie.
c. Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) des infections iatrogènes et
nosocomiales :
Traite tous les cas où une personne subit un préjudice résultant notamment de ce type d’accident, pour
lequel on ne trouve pas d’auteur, de responsable, de fautif, c’est l’office qui est abondé par la solidarité
publique nationale, qui se charge de l’indemnisation en réparation du préjudice.
Au départ, l’ONIAM traitait seulement des infections iatrogènes et infections nosocomiales, mais depuis
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QUESTIONS / RÉACTIONS
En 2008, l’ONIAM a enregistré 813 dossiers.
Pour ces trois institutions :
Le montant moyen des indemnisations = 100.000 €
Le montant le plus important d’indemnisation accordé a dépassé les 3 millions d’euros.
2. Retour sur le dernier rapport de la Commission Nationale des accidents médicaux :
Dans ce rapport, plusieurs problèmes peuvent être soulevés.
Ce rapport commence par le descriptif des activités des Commissions Régionales. Mais un premier
problème apparaît : l’harmonisation des procédures.
En effet, dans un règlement amiable, chaque commission met en place une procédure qui lui semble
pertinente. Mais la Commission Nationale a cherché à harmoniser l’ensemble de la procédure pour qu’elle
soit applicable par toutes les Commissions Régionales :
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- Instruction préalable du dossier :
Les commissions sont saisies par des particuliers qui vont exposer leurs problèmes / leurs handicaps.
La difficulté de ces démarches est que ce particulier n’est pas un professionnel, qu’il n’est assisté de
personne, ce qui engendre très majoritairement des demandes incomplètes, ce qui oblige les commissions
à solliciter les documents manquants.
La constitution du dossier est donc la première difficulté rencontrée.
- Déterminer la recevabilité de la demande :
particulière. Des mains (premier outil) aux spiromètres, en passant par les nébulisateurs et les oxymètres
de pouls, la fréquentation d’un cabinet par des patients porteurs de germes potentiellement contagieux
exige une attention spécifique des praticiens. La responsabilité de ceux-ci peut être engagée (les
règles d’hygiène sont opposables en ville) s’il s’avérait que les conditions de précautions vis-à-vis des
contaminations croisées (infections nosocomiales) ne sont pas anticipées.
Le nettoyage des mains, des surfaces, des sols, du matériel, la protection des patients, la vigilance visà-vis de la transmission interhumaine des virus et bactéries doivent très probablement être parfaitement
maitrisés pour éviter les litiges qui ne manqueront pas de survenir.
Mettre une blouse, des gants et un masque sont-elles des mesures efficientes ? Lavage, nettoyage,
désinfection, stérilisation, jusqu’où aller ? Identification des flores bactériennes, quels moyens ?
Si le principe du matériel à usage unique, pour patient unique semble le modèle actuellement
recommandable, quelle évaluation des pratiques et des comportements est-elle effectuée aujourd’hui ?
Pour terminer le propos de ce jour, une affaire vieille de 3 ans, concernant un nourrisson décédé quelques
jours après une séance de kinésithérapie respiratoire, avait motivé un interrogatoire du professionnel par
un juge d’instruction. Un expert interrogé n’avait pas exclus la possibilité d’une relation entre la séance
de désencombrement bronchique faite à cet enfant, et son décès, sur l’hypothèse d’une hypertension
intracrânienne générée par les manœuvres d’AFE.
Le drame pour ce confrère, au-delà de l’annonce de la mort de cet enfant, résidait dans le fait qu’il avait
effectué cette séance sans prescription médicale, et surtout sans noter quoi que ce soit du bilan pré et
post séance, ni communiqué explicitement aux parents ses préconisations, ni ses observations. Il n’a dû
son salut qu’aux développements ultérieurs de l’enquête…
Quelques recommandations :
Mon propos « touche » à sa fin, et la conclusion de ce propos m’incite à insister sur le caractère à
mes yeux indispensable de la rédaction d’un compte-rendu systématique des séances de kinésithérapie
respiratoire, où sont colligées toutes les informations utiles, qui retracent la démarche de questionnement
effectuée par le praticien.
La Loi prévoit un certain nombre de conditions importantes pour bénéficier de ce dispositif d’indemnisation.
Soit la personne est décédée, dans ce cas il est à prouver que ce décès est dû à un accident d’ordre
médical, soit pour une personne vivante, il faut pouvoir justifier d’une incapacité permanente partielle
égale ou supérieure à 24%, ou une incapacité temporaire de travail égale ou supérieure à 6 mois, ou de
justifier de gênes ou handicaps importants dans la vie courante.
La commission régionale peut donc nommer un expert pour vérifier si l’on rentre bien dans le cadre d’un
dossier pouvant prétendre à indemnisation.
- Rejet du dossier :
Si le requérant ne rentre pas dans les conditions d’indemnisation citées ci-dessus, son dossier sera
rejeté. En effet, plus de la moitié des dossiers ont été rejetés en 2008 en raison notamment du fait que
le requérant n’a pas qualité à agir.
- Poursuite du dossier :
Si les conditions sont respectées, alors les dossiers font l’objet d’une expertise avec comme particularité,
que la Loi pose comme principe la collégialité. Il faut des experts inscrits sur la liste nationale, situés au
même endroit où a eu lieu le sinistre tout en évitant les conflits d’intérêt.
- La désignation de l’expert :
Quel expert désigné ? Pour quel problème ?
A partir des rapports des commissions régionales, la commission nationale a, au travers de dossiers /
litiges comparables, fait des croisements (notamment pour les pathologies suivantes : prothèses, genoux
et infections nosocomiales).
Ces croisements avaient pour but de déterminer et d’étudier les choix faits par les commissions régionales
quant à solutionner le problème et nommer un expert, et constater si une homogénéité existait.
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Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
2008, et une Loi sur la sécurité sociale, l’ONIAM est aussi compétent pour prendre en charge tous les
préjudices résultant des vaccinations obligatoires, des infections par le VIH, par le virus de l’hépatite C, et
aussi tous les préjudices résultant des transfusions de produits sanguins ou d’injections de médicaments
dérivés du sang. Et de façon générale, à tous les dommages provoqués par des décisions sanitaires
prises par l’Etat (exemple : si des effets secondaires apparaitraient suite à la vaccination contre la grippe
A H1N1 en 2009, alors c’est l’ONIAM qui serait compétent pour traiter de l’indemnisation).
passage du train avant et du train arrière sur ces « bandes de bruit » qui vous donne cette impression.
Votre explication sera plus ou moins sophistiquée, en fonction des souvenirs qui vous restent de vos
cours de physique, mais vous ne serez pas totalement dans l’invention de « je ne sais quelle explication…
».
Le kinésithérapeute, praticien réflexif, doit pouvoir s’approprier la phrase de Bachelard (1938) : « la
science doit rompre avec l’opinion ».
L’exemple des parents d’enfants atteints de mucoviscidose, maladie génératrice de nombreux divorces,
qui se rejettent le conflit, la responsabilité, de cette pathologie génétique lourde. Alors comment analyser
la posture spécifique d’un masseur-kinésithérapeute homme, qui s’occupe de l’enfant d’une femme dont
le père porte la responsabilité de la maladie à sa mère ? Des choses se passent sur le plan humain, il faut
savoir s’en interroger et l’exprimer.
C’est à travers des référentiels pluriels mais néanmoins parfaitement identifiés que se construisent les
actes de soins efficients.
3. Toucher et techniques de kinésithérapie respiratoire, sources de litiges
3.1. L’intégrité du gril costal
La commission nationale a mis en place, pour faciliter le travail des commissions régionales, des
indemnisations types dans un processus de démarche cohérente nationale.
En effet, chaque Commission Régionale est présidée par un Magistrat, ce qui entraînait de fortes
divergences dans les décisions rendues pour des pathologies identiques.
3. Les différentes difficultés pour les Experts :
Il est difficile de déterminer :
• L’incapacité permanente partielle,
• L’incapacité temporaire de travail,
• Les troubles graves dans les conditions d’existence,
Il est également difficile de distinguer la faute, de l’aléa thérapeutique.
4. Les Experts auprès de ces commissions :
Pour être recevable en tant qu’Expert, ce dernier doit compléter un dossier, suivre une formation
obligatoire, avoir le sens du respect des délais. Il doit également respecter le principe de collégialité
imposé par la Loi.
En 2009, 306 Experts ont été désignés auprès de ces commissions et sont indemnisés à hauteur de 700€
par dossier traité.
Les articles cités en références aux assertions de la revue « Prescrire » faisaient appel à la « conventional
chest physiotherapy », c’est-à-dire à des techniques que nous avons banni depuis de nombreuses années
en France, utilisant les percussions dans l’espoir de « décoller » le mucus adhérent aux parois des
bronches des patients encombrés. Il est indéniable que le projet de transmettre l’énergie cinétique utile
d’une série de « battades » aux secrétions bronchiques impose une intensité du geste peu compatible
avec le respect de l’intégrité des structures (inversement proportionnel à la masse).
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Mises en exergue dans quelques publications, bruyamment relayé par la revue « prescrire » en 2006,
il est Mises en exergue dans quelques publications, bruyamment relayé par la revue « prescrire » en
2006, il est nécessaire de tordre le cou aux contre-vérités qui ont été proférées à cette époque et qui
faisaient planer un doute sur le risque physique des techniques et manœuvres utilisées en kinésithérapie
respiratoire. Tout cela, car il n’est pas possible aux masseurs-kinésithérapeutes d’apporter la preuve, de
produire des publications scientifiques, la formation n’étant pas au niveau, car peu scientifique.
- Traitement du dossier :
La publication de Martin CHALUMEAU, en bibliographie, s’appuyait sur une série tout à fait particulière et
numériquement très ténue d’enfants hospitalisés qui présentaient des troubles orthopédiques générant
une fragilité osseuse.
Nous avons développé depuis maintenant de nombreuses années (VINCON C., FAUSSER C.), des tests
qui permettent de s’assurer de l’intégrité du gril costal avant et après les séances de kinésithérapie, que
nous recommandons de noter assidument dans les fiches d’observation des nourrissons.
Rien qu’en Ile de France, le réseau ARB génère quelques 65.000 séances de kinésithérapie respiratoire
par an depuis 10 ans, et aucun document ne vient révéler le moindre incident. Nous sommes donc bien
loin du risque de 1 fracture pour 1.000 séances évoqué à l’époque !
Les techniques de désencombrement des voies aériennes actuellement préconisées en France (conférences
de consensus Lyon 1994, Paris 2000), lorsqu’elles sont pratiquées dans le respect de l’anatomie et de
la physiologie, lorsqu’elles sont conduites par une adaptation et une observation attentive, ne peuvent
faire le lit de litige. Nous manquons encore d’un niveau de preuve suffisant pour leur assurer un statut
scientifique, mais nous travaillons à cet effort…sans pour autant encore avoir « touché au but ».
La manipulation intellectuelle consistant à opposer des arguments « scientifiques », basés sur des
études certes méthodologiquement inattaquables, mais dont la limite de signification n’est pas explicite
(population observée trop faible en nombre) est un biais qui semble devoir toujours être pris en compte
par un expert.
3.2.
Toucher qui, toucher à quoi, toucher comment, qui et quoi toucher ?
La kinésithérapie respiratoire s’adresse à une population de patients très particulière, surtout si l’on
envisage les patients atteints de pathologies chroniques.
Le matériel utilisé par les kinésithérapeutes, qui va « toucher » le patient, nécessite une attention
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« UN
TOUCHER SI INTIME
»
Laure MOURICHON
MKDE, spécialisée en uro-gynécologie, sexologue
convenance. Comment oser porter l’oreille sur cette poitrine, comment la « toucher », sans déroger à
la bienséance ? Et c’est ainsi qu’est née l’auscultation médiate, empruntant un « média », et préservant
les bonnes manières, se libérant de la connotation érotique du toucher (caresser) déjà ancienne dans les
esprits (13ème siècle selon A. REY) ...
Les pratiques actuelles en matière d’auscultation pulmonaire, lorsqu’elles sont observées avec un regard
critique, font apparaître que les médecins sont extrêmement peu nombreux à déshabiller leurs patients
adolescents pubères et adultes, a fortiori leurs patientes, pour conduire leur examen, au point de
l’avoir pratiquement relégué au rang d’une routine systématisée, pratiquée dans des conditions souvent
incompatibles avec le recueil de quelque signe sémiologique que ce soit : au dessus d’une chemise ou
d’un pull, fenêtre ouverte ou télévision allumée dans la pièce au domicile.
Les kinésithérapeutes qui se sont approprié l’outil ne semblent malheureusement pas faire beaucoup
mieux : la pudeur engage le plus souvent à la renonciation, au détriment de l’examen, du toucher, tout au
moins au contact direct de la peau. Ce qui peut paraître le plus dommageable, c’est que cette renonciation
se poursuit dans le temps thérapeutique : les patients chroniques jeunes adultes ou adolescents, atteints
de mucoviscidose par exemple, ne sont pratiquement jamais torse nu à l’occasion de leurs séances de
désencombrement.
Travailler l’uro-gynécologie nécessite un toucher particulier : le toucher vaginal, qui place le rééducateur
et la patiente dans une relation extrêmement intime. C’est certainement la spécialité kinésithérapique
aux termes de laquelle il existe la plus grande intimité.
Le toucher vaginal va pouvoir réveiller des émotions, car le praticien va notamment traiter des femmes
ayant été victimes d’attouchements, d’abus sexuels, mais réveiller également d’autres émotions, puisque
l’on sait que le périnée est le muscle du plaisir sexuel.
Emotion oubliée, émotion inconnue parfois.
Le périnée est une région intime et cachée du corps de la femme, un tabou dont on ne parle pas, qui est
souvent méconnu, car les femmes ne se regardent pas, ne se touchent pas.
L’incontinence urinaire féminine est très fréquente puisqu’elle touche environ 1 femme sur 3. Elle va créer
un véritable retentissement sur l’image du corps, impliquant celui-ci dans le vieillissement. Cependant,
cette incontinence apparaît souvent après une grossesse et un accouchement, donc pour des femmes
plutôt jeunes. Cela renvoie à des sentiments de honte et d’humiliation.
Les intérêts et buts de cette intervention sont d’expliquer où est situé le périnée, à quoi il sert, et parler
des différents temps de cette rééducation pour donner des repères et des bases aux experts masseurskinésithérapeutes, car c’est une discipline à haut risque, pour laquelle les patientes n’hésitent pas à
porter plainte, plaçant ainsi le professionnel dans des situations désagréables.
Les patients plus âgés atteints de bronchite chronique non plus. A l’heure où nous engageons la profession
dans la détection précoce des cancers de la peau, nous pouvons remarquer ici une contradiction flagrante
entre les espoirs ou les projets conceptualisés et la réalité de terrain.
Le frein social et psychologique reste ainsi prégnant, et s’impose dans le comportement du praticien,
d’autant plus que les techniques de désencombrement utilisées actuellement font appel à la modulation
du flux expiratoire, et amènent souvent le kinésithérapeute à « enlacer », pour ne pas dire « embrasser
» (prendre dans les bras) son patient.
L’abord de la poitrine féminine, dont le « toucher » était encore interdit aux élèves en masso-kinésithérapie
il n’y a pas si longtemps, continue donc à poser problème, et prend une dimension encore plus évidente
dans certaines communautés.
Nous pouvons conclure sur ce sujet en évoquant le fait que la confusion entre « toucher » et « attoucher »,
sémantiquement proches, induit des comportements ou des pratiques qui mettent en exergue l’ambiguïté
évoquée dans le titre de ce congrès.
Prendre en compte, noter scrupuleusement sur la fiche du patient les difficultés éventuellement rencontrées,
expliciter les décisions et les choix semble aujourd’hui une démarche de précaution indispensable.
2. Toucher pour évaluer, toucher pour décider : ambigüité(s) dans l’interprétation des signes
cliniques
Le toucher est un outil d’exploration usuel du kinésithérapeute. En kinésithérapie respiratoire aussi,
la main se veut à la fois exploratrice, interrogatrice, évaluatrice et « soignante ». Mais la perception,
lorsqu’elle ne croise pas, lorsqu’elle n’interroge pas le savoir, fait prendre le risque de la méprise, de
l’interprétation ésotérique.
Un exemple concret illustre ce propos : il m’arrive fréquemment, au décours de conversations entre
confrères, ou à l’occasion de séquences de formation continue, d’aborder la question de l’interprétation
de signes cliniques. Un patient dont les bronches sont encombrées se présente le plus souvent avec une
respiration bruyante (l’auscultation faisant le tri de ces différents bruits qui évoquent alors des tableaux
cliniques variés). Une main posée sur le thorax, en regard des grosses voies aériennes, détecte souvent
des vibrations transmises à la paroi.
Ce phénomène physique, la résonnance, est bien connu, mais entraîne pourtant la confusion dans l’esprit
de nombreux confrères, qui imaginent percevoir sous leurs doigts la présence d’un encombrement
bronchique sous jacent !
L’effet pervers de cette erreur d’interprétation conduit à une reconstruction imaginaire tant de l’appareil
respiratoire que de la physiopathologie, débouche sur des propositions thérapeutiques dénuées de
fondement, et une évaluation finale elle aussi erronée.
Exemple : imaginez-vous que vous franchissez une montagne lorsque votre voiture roule sur les bandes
de ralentissement qui précèdent une aire de repos sur une autoroute ? Vous savez que c’est la mise en
phase de la fréquence des vibrations de votre véhicule avec la fréquence de l’onde que représente le
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Ce tableau « L’origine du Monde », signé de Gustave COURBET, était la propriété d’un grand psychanalyste
: LACANT, accroché derrière un paravent dans son cabinet de consultation, dans un premier temps, puis
caché par un tableau représentant des fleurs, dans un second temps.
Ce tableau permet, éventuellement, de créer un parallèle entre l’inconscient et la sexualité.
« LE
TOUCHER EN KINÉSITHÉRAPIE RESPIRATOIRE,
TECHNIQUES SOURCES DE LITIGES
»
Dominique PELCA
MKDE, Président du Conseil interrégional de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes d’Ile-deFrance et de La Réunion
Le périnée part du pubis, vient entourer l’urètre, le vagin et l’anus et s’insérer au niveau du coccyx.
Il assure le maintien des organes génitaux, la continence urinaire et anale et participe activement à
l’épanouissement de la sexualité.
Ce thème choisit replace le kinésithérapeute praticien dans son cœur de métier, le renvoie à ce qui
constitue presque une exception comportementale dans notre société moderne : « toucher l’autre ». Ce
qui n’est pas si habituel que cela.
L’évolution de la kinésithérapie, portée par différents courants, pourrait en effet laisser sur le bord de la
route, si l’on n’y prend garde, la question du voir et du toucher, de l’évaluation de l’intrusion dans l’espace
personnel de l’autre. Le kinésithérapeute reste un clinicien de proximité, une ressource de confiance pour
des patients toujours uniques en tant qu’individus, et pourtant souvent si proches les uns des autres,
partageant des ressentis non toujours formalisés, probablement parce qu’ils ne sont pas questionnés.
Cette approche herméneutique le met ainsi souvent en tension avec la médecine d’organes qui regroupe
des symptômes, catégorise des groupes d’individus qu’elle veut croire homogènes, et formalise des
protocoles stéréotypés en termes de réponse aux « pathologies » diagnostiquées.
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Une succincte enquête menée auprès de professionnels particulièrement investis en kinésithérapie
respiratoire a servi de base à ma réflexion d’aujourd’hui, bien que sa forme laconique et la population
répondante restreinte limite l’interprétation des résultats obtenus.
1. Toucher le « touchable ». Les freins sociaux et culturels : Toucher le corps de l’autre,
ambigüité psychosociale
De face, le périnée part du pubis et fait un « 8 » pour s’insérer au niveau du coccyx. Ce muscle a une
fonction importante dans la sexualité car en cas de contraction, il va rapprocher les parois vaginales,
permettre à la femme de sentir et accéder aux sensations vaginales, de repérer son excitation sexuelle et
de la diffuser en variant les rythmes plus au moins rapides et de la canaliser pour atteindre l’orgasme.
Le relâchement quant à lui va permettre l’ouverture de l’orifice vaginal et faciliter la pénétration.
1. L’interrogatoire / L’entretien avec la patiente :
Aux termes d’un interrogatoire, le praticien devra rechercher :
Déshabiller, toucher des parties du corps qui ne sont habituellement accessibles qu’aux stricts intimes
(thorax, abdomen), ne s’improvise pas, ne peut se satisfaire d’une « non prise en compte », d’une «
ignorance ». Que ce soit dans le cadre du strict risque physique, ou que cela rentre dans le domaine du
psychosocial, de l’affectif ou de l’émotionnel, il semble utile pour le praticien de prendre en compte les
indicateurs qui l’autorisent à agir, ou constituent des éléments de preuves de sécurité et d’intégrité des
actes et techniques qu’il met en œuvre.
•
•
•
•
•
La question du rapport à l’intime, si elle n’est pas explicite dans le discours des enseignants, des
formateurs, ou même des professionnels à l’occasion de congrès ou de communications, fût peut être
pourtant à l’origine de modifications déjà anciennes des pratiques professionnelles :
•
•
•
Le motif de la consultation (incontinence urinaire ? douleurs ? …),
Les antécédents obstétricaux (méthodes d’accouchement), médicaux (maladies chroniques…),
chirurgicaux,
La sexualité,
Traitements médicamenteux,
La miction : importante car au-delà du rôle de rééducateur, le masseur-kinésithérapeute à un
rôle d’éducateur,
Circonstances des fuites (fuites d’effort ? instabilité de vessie ? …)
Calendrier mictionnel pour connaître le nombre de mictions journalières,
Examens complémentaires.
L’importance dans cet interrogatoire / entretien réside dans l’intérêt de la patiente d’expliciter son vécu,
son histoire. L’entretien est personnel et personnalisé.
Le praticien doit donc être très à l’écoute des dires de sa patiente afin de repérer les symptômes et la
vraie demande de la patiente. La situation n’est pas simple et évidente pour cette dernière, car elle n’est
pas habituée à ce genre de rééducation.
Enfin, le masseur-kinésithérapeute doit informer sa patiente et lui donner des explications anatomiques
sur : à quoi sert la rééducation, comment elle va se dérouler, qu’est-ce que l’électrostimulation …
2. Le bilan périnéal :
Ces deux images illustrent l’histoire suivante : en 1817, René Théophile Hyacinthe LAENNEC, lorsqu’il
invente ce qui deviendra le symbole identificateur de la profession médicale, le stéthoscope, fût inspiré
par des réflexions quelque peu éloignées du strict champ médical : appelé à consulter une jeune fille de
bonne famille, dotée d’une poitrine généreuse, ce jeune médecin se trouvait confronté à un conflit de
- 40 -
•
Examen de l’abdomen : qui comprend une approche psychologique, la vérification de la qualité de
la paroi abdominale (adiposités, vergetures, cicatrices…), déterminer des zones douloureuses ou
diagnostiquer un diastasis des grands droits.
•
Examen des organes génitaux externes : vérifier si la peau est normale ou porteuse de lésions, s’il
existe une trophicité vulvaire, apprécier la tonicité du noyau fibreux central, déterminer la distance
ano-vulvaire, constater si la vulve est fermée ou ouverte.
•
Mise en évidence d’un prolapsus : après avoir écarté les lèvres on demande à la patiente de pousser
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La kinésithérapie respiratoire offre un terrain particulier d’observation. Du nourrisson « fragile » au
vieillard, aussi fragile, en passant par l’adolescent, l’adulte en difficulté passagère, ou au contraire
confronté à une pathologie chronique, il s’agit de regarder, de toucher, de contraindre un corps, dans une
fonction vitale, qui renvoie à l’intégrité de l’individu, qui est chargée de symbolique.
•
Test de l’incontinence : le praticien demande à la patiente de tousser pour objectiver une incontinence
urinaire d’effort.
•
Examen de la paroi vaginale : vérifier s’il y a une hypertonicité (fibrose cicatricielle, vaginisme) ou
une hypotonicité (béance vulvaire et parfois prolapsus).
•
Testing des releveurs : il est pratiqué sur un périnée relâché afin d’évaluer
la force musculaire lors de la contraction, déterminer les côtés de 0 à 5
(0 = la patiente ne sent rien, 1 = sensation d’une fibrillation musculaire, 2 = légère contraction, 3
= tension du noyau fibreux central, 4 = légère résistance, 5 = bonne résistance et bonne répétition
musculaire)
Il est nécessaire dans la cadre d’un testing des releveurs, de bien informer la patiente que lors de la
contraction, les doigts du masseur-kinésithérapeutes vont être entraînés vers le dedans et le haut.
La patiente doit prendre conscience que ce sont ses contractions qui entrainent les doigts du praticien,
et non ce dernier qui fait des mouvements de va et vient.
3. Travail manuel :
Grâce aux examens ci-dessus, le praticien adaptera le traitement en fonction de la pathologie de la
patiente et de ce qu’elle peut supporter.
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Le travail ne doit pas être douloureux et pour se faire le masseur-kinésithérapeute doit toujours
s’inquiéter.
• L’électrostimulation :
Elle permet une inhibition vésicale, une augmentation de l’activité sphinctérienne, une amélioration de
la contraction périnéale.
La sonde est choisie en fonction de la patiente. Les courants doivent être appropriés en respectant le
seuil de sensibilité de la patiente. Ce traitement ne doit jamais être douloureux.
Ce traitement n’est à utiliser uniquement qu’après une prise de conscience de la contraction des releveurs
en manuel, et ne doit pas réalisé si la patiente ne veut pas d’introduction de sonde.
Chaque patiente possède sa sonde personnelle, remboursée par la sécurité sociale.
L’hygiène de cette sonde est primordiale. Elle doit être nettoyée avec du savon de Marseille, rincée et
emballée dans un mouchoir propre puis placée dans un sac de congélation à usage unique.
à la chaine sur plusieurs patients, manque de douche dans chaque chambre…
•
Facteur d’organisation et de management : hiérarchie laxiste qui ne contrôle rien, ou hiérarchie
sévère, qui n’écoute pas et n’a pas connaissance des dysfonctionnements.
•
Facteur des moyens affectés : en ressources humaines, en matériel… comment gérer cette
situation ?
•
Facteur de gestion des risques : réalisation de procédures valides, faisables, lisibles et
compréhensibles de tous.
•
Facteur du fonctionnement de l’équipe : le leadership, un professionnel peut-il, en réalité, dire
non à un médecin ayant prescrit n’importe quoi ? Quelle liberté d’actes et de prescriptions face
aux médecins ?
•
Facteur de transmission des informations : communication et continuité des soins.
•
Facteur lié à l’individu : professionnel expérimenté, qualifié et bien intégré ? Dans quel état était-il
au moment de l’acte : fatigué, sous l’emprise de la drogue, de l’alcool ?
Il faut donc aller rechercher tous ces facteurs qui ont amené le professionnel à réaliser l’acte final qui
n’est pas forcément le seul responsable de ce qui se passe.
•
Facteur lié au patient : le vécu, les antécédents (démence, violence, refus de soins…) de celui-ci
ont-ils était pris en compte, pour éviter un geste non réfléchit (une claque, le pugilat…) ?
L’expert prendra donc en compte tous ces facteurs ainsi que les règles et les pratiques professionnelles.
Il est important de rappeler que ce qui est vécu comme un acte banal pour le professionnel, ne l’est pas
forcément pour le patient.
L’effraction continue du corps et de la sphère intime, est une des singulières particularités des métiers
de soignants. Ce qui pour l’un est un soin naturel, un acte fait « pour son bien », peut être ressenti par
l’autre comme un acte de violence.
En milieu hospitalier, l’accident est rarement la conséquence d’un seul acte, il s’agit pratiquement toujours
d’un enchainement de dysfonctionnements qui aboutissent à l’acte ou au comportement immédiatement
responsable de l’accident et/ou de la plainte. Des exemples concrets rencontrés au cours d’expertises
judicaires ou d’audits illustrent ce principe « universel ».
Le masseur-kinésithérapeute doit également veiller à l’hygiène de son cabinet et de lui-même lors des
séances en :
•
•
•
•
•
•
Utilisant des draps papier à usage unique,
Utilisant des gants à usage unique,
Utilisant du gel lubrifiant
Désinfectant pour la table
Se lavant les mains après chaque patiente
Recevant la patiente dans une pièce fermée pour respecter son intimité
Conclusion :
La rééducation périnéale est une rééducation différente des autres qui nécessite de l’intimité, de l’écoute,
des compétences et d’adapter le traitement en fonction de chaque patiente en l’accompagnant dans ce
travail.
Expliquer, rassurer, respecter les impossibilités des patientes éviteront des problèmes relationnels et
judiciaires aux masseurs-kinésithérapeutes.
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pour voir si la patiente souffre d’un cystocèle (descente de vessie), d’un hystérocèle (descente
d’utérus), d’un rectocèle (descente du rectum), ou d’un elytrocèle (hernie).
ET ROUTINE, L’EXPERT ET LES ORGANISATIONS HOSPITALIÈRES
»
Marylène GUINGOUAIN
Infirmière, Directrice de soins, Expert judiciaire
Quelle est la méthode utilisée pour essayer d’analyser les organisations hospitalières, voire plutôt les
instituts médico-sociaux ?
Tout masseur-kinésithérapeute peut se retrouver justiciable suite à un acte volontaire ou non, aussi bien
à titre libéral que salarié.
« La maltraitance n’est pas un risque hypothétique et lointain mais bien un risque incontournable
consubstantiel des pratiques pour tous les professionnels au contact de personnes vulnérables, quels
que soit leur métier. »
Cette phrase est en introduction d’un audit pour la prévention de la maltraitance dans les institutions
médico-sociales et sociales.
Par essence, les métiers de soignants entrent dans l’intimité du patient, dans l’effraction de celle-ci aussi
bien au travers du toucher et de la parole. L’exercice, est lui aussi, particulier, il y a de nombreuses
interactions : travail d’équipe, en libéral mais surtout en salariat, car le travail de l’un travail dépend du
travail de l’autre. Cet autre, est lié à l’organisation médicale mais aussi à l’organisation des cuisines, de
la lingerie, des transports…
Une certaine autonomie existe en effet dans le choix des pratiques professionnelles, mais tout en étant
encadré par l’exercice des autres.
Ce sont deux spécificités que les patients ou responsables ont dû mal à entendre et comprendre.
Compagnie Nationale des Kinésithérapeutes Experts - IXème Congrès - PARIS 2010
L’expertise concerne l’acte professionnel dans les organisations.
Pour permettre au juge de statuer sur la réalité de la plainte et sur les responsabilités mises en jeu,
le rôle de l’expert judiciaire sera de rechercher la cause et la responsabilité, et d’éclairer le juge sur les
organisations et pratiques hospitalières, les métiers, leurs règles de fonctionnement et les interactions.
QUESTIONS / RÉACTIONS
a) Dans cette discipline, il existe des contestations du bien-fondé des traitements mais surtout des
résultats.
Quelles recommandations préconisées pour objectiver les résultats et apporter les éléments nécessaires
à une expertise ?
Réponse : il est nécessaire de se fier aux symptômes de la patiente et d’évaluer au moment de l’expertise
si le traitement a permis une amélioration. En cas de non amélioration, il se peut que le traitement choisi
par le praticien n’était pas le bon et ait pu entraîner des douleurs ou autres, objets d’une plainte.
b) En réalité, existe-t-il beaucoup d’affaires ou est-ce simplement une grande crainte ?
Quels types d’experts sont désignés : gynécologues, médecins, ou masseurs-kinésithérapeutes ?
Réponse : pour un masseur-kinésithérapeute expert de l’assemblée, les problèmes de rééducation
périnéale représentent un peu plus de 40 % de son chiffre d’affaire. Le toucher vaginal est effectivement
présent, et la patiente ne se trompe pas lorsqu’elle ressent un va et vient du praticien.
Les explications peuvent être dues à un problème / manque de communication et d’information envers
la patiente. Les masseurs-kinésithérapeutes se doivent de décrire, expliciter les soins.
L’intervention du rééducateur relève d’une obligation de moyens et non de résultats.
En éducation thérapeutique, le praticien doit pouvoir restituer la compréhension de l’information
enregistrée par le patient, et c’est souvent là que résident les problèmes et les ambiguïtés, car entre
l’explication évidente pour le masseur-kinésithérapeute et sa compréhension par le patient, il existe très
souvent des mauvaises interprétations.
Le praticien doit, en cas de doute, se mettre à la portée de son patient.
c) Comment justifier le choix thérapeutique entre stimulation vaginale et stimulation des chevilles ?
Réponse : tout dépendra des symptômes réels de la patiente. Dans un premier temps, le praticien
travaillera avec les stimulations vaginales et s’il n’est constaté aucun résultat, surtout quand il y a des
atteintes neurologiques, le praticien adoptera l’autre traitement.
Il faut faire comprendre au juge le contexte et son influence sur l’acte. Et pour cela, il est nécessaire de
s’appuyer sur une méthode objective : l’analyse systémique.
Cette analyse permet de ne rien oublier et de trier les évènements qui ont ou pas une influence sur
l’acte.
Pour cela, il faut se baser sur les facteurs contributifs : « Qu’est-ce qui fait que … ? »
Celui qui est justiciable est systématiquement celui qui a réalisé l’acte, mais comment se fait-il qu’il ait
fait cet acte, si l’acte n’est pas délictueux ?
Ici, on parle d’erreur, de faute (non intentionnel) et non d’un acte voulu (exemples : viol ou
attouchement).
Voici les contextes et facteurs existant et pouvant expliquer la réalisation d’acte qui rend justiciable un
professionnel :
•
Facteur institutionnel : c’est le contexte économique et financier. Le matériel est-il en bon état ?
•
Facteur réglementaire : la règlementation actuelle impose des injonctions mais des choix financiers
doivent être faits pour les mettre en œuvre, ce qui suppose que ces injonctions sont donc parfois
réalisées tardivement.
•
Facteur politique et social : il n’est pas possible d’effectuer les mêmes soins avec la même qualité,
selon les choix de la direction.
Le directeur d’hôpital, dans ces choix précités, est justiciable dans tous les cas. Il est responsable
de son établissement et de ce qui s’y passe.
•
Facteur environnemental de travail : le matériel, les locaux… non adaptés aux besoins
professionnels.
•
Facteur des conditions de travail : manque de personnel entrainant un choix de réaliser des soins
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DE L’ASSEMBLÉE
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« VIOLENCE
DE L’INTRODUCTION DU CONTRADICTOIRE LORS DE LA PROCÉDURE
PÉNALE, ASPECTS PRATIQUES POUR L’EXPERTISE PÉNALE
»
Claire CARBONARO
Magistrat
Le renforcement du caractère contradictoire de la procédure pénale est l’un des enjeux majeurs des
évolutions législatives procédurales des dernières années. C’est quelque de récent mais les évolutions
annoncées de procédure mettent en exergue la nécessité d’une enquête impartiale dont les actes les
plus graves seront autorisés par le juge après un débat éventuellement contradictoire sur la nécessité
d’actes de contrainte.
Contrairement à l’expertise civile, dont le caractère totalement contradictoire est écrit dans les textes
depuis l’origine du nouveau Code de procédure civile, l’expertise pénale a souvent été critiquée pour son
manque de transparence à l’égard des parties à l’enquête.
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La jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg a sensiblement modifié le
caractère initialement inquisitoire de la procédure pénale pour y introduire, justement, en ses différents
stades, de l’enquête au jugement, des éléments de procédure contradictoires. Les discussions récentes
sur le statut de la Garde à Vue, suite à de nombreux arrêts de la Cour relatifs à la procédure pénale
Turque, et dans lesquels elle esquissait les contours d’une procédure équitable. Toutes ces discussions
démontrent s’il en est la nécessité de faire rentrer ce principe dans notre procédure.
Le droit au procès équitable impose que la personne mise en cause soit, à un moment donné de la
procédure, confronté aux charges et placé à même de les discuter.
L’assistance de l’avocat dans la phase préalable de la procédure, dès lors que la personne suspectée est
privée de sa liberté par mesure de rétention judiciaire ou de police judiciaire, est fortement encouragée
par la Cour qui précise que l’assistance doit s’entendre de toutes les prestations : consultation du dossier,
préparation des interrogatoires et assistance à ces derniers. Le principe du contradictoire doit être analysé
à l’aune de la notion de procès équitable et des conditions matérielles inhérentes à l’enquête pénale, à
savoir la conservation des preuves.
Avant même la réforme complète du Code de procédure pénale, notre droit interne avait déjà commencé
à évoluer, la procédure d’instruction permettant un premier débat complet sur les charges devant le
magistrat. Les évolutions législatives récentes, notamment depuis la Loi n°2004 – 204 du 9 mars 2004,
ont étendu les aspects de la contradiction, notamment devant les techniciens désignés par le juge.
Cependant, seules 5% des procédures, certes les plus graves aux yeux de la Loi (crimes), sont traitées
par les magistrats instructeurs.
Si la phase de contradiction est parfaitement assurée dans la phase de jugement, l’étude doit porter
sur les aspects procéduraux dans le cadre des enquêtes diligentées à l’initiative des officiers de police
judiciaire et sous la direction et le contrôle du Ministère Public (majorité des enquêtes sous le contrôle
du Ministère Public et non du Juge d’instruction).
Il est donc nécessaire d’étudier dans un premier temps les aspects de la procédure dans le cadre de la
phase de l’enquête et ses incidences sur les règles relatives à l’analyse technique avant de regarder les
aspects du contradictoire dans la phase de l’Instruction et du jugement.
1. Les investigations dans le cadre de l’enquête de flagrance et de l’enquête préliminaire :
a. Le cadre d’une enquête peu contradictoire :
Les enquêtes préliminaires et de flagrance sont exécutées par les Officiers de Police Judiciaire sous la
direction et le contrôle du procureur de la République. A cet égard, en cas de crime ou de délit flagrant
: « crime ou délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre ou lorsque, dans un temps
très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée
en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou
au délit », l’enquêteur a le droit de perquisitionner ou de saisir des objets ayant servi à le commettre ou
qui en proviennent.
La durée de l’enquête de flagrance est de huit jours renouvelables une fois lorsque les investigations
nécessaires à la manifestation de la vérité pour un crime ou un délit puni d’une peine supérieure ou égale
à cinq ans d’emprisonnement ne peuvent être différées.
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élément extrêmement important. Parce que certains risques doivent être pris en compte comme le
découragement, le burn-out, le recours à des formes d’actions standardisées à l’extrême (par exemple :
des soins que l’on fait en série et donc qui sont porteurs de maltraitance).
Alors quand on veut recommander que les professionnels soient soutenus au quotidien, cela veut dire
décliner un certain nombre de formes d’encadrement.
Tout d’abord il s’agit de promouvoir l’échange autour de l’observation de proximité et c’est ainsi qu’on pourra
construire une vision plus riche du parcours et des besoins des usagers grâce à des moments d’échanges
réguliers qui vont permettre une approche plus distanciée et une collaboration pluridisciplinaire.
Il s’agit également de sensibiliser régulièrement les professionnels sur le sens de leurs missions, de
favoriser un partage et un enrichissement des compétences autour des observations quotidiennes,
d’accompagner les pratiques professionnelles notamment par la formation et d’inscrire les échanges
entre professionnels dans une démarche d’amélioration continue des pratiques.
Exemple : une option a été mise en place à l’hôpital Charles Foix en lien avec l’institut de formation en
soins infirmiers (IFSI) qui s’est intitulée « la toilette évaluative ».
De quoi s’agissait-il ?
Evaluer régulièrement les soignants pendant le moment de la toilette auprès de patients particulièrement
difficiles. Un formateur de l’IFSI venait assister à une toilette faite par un soignant, avec pour objectif de
trouver des réponses aux situations de soin complexes.
Il ne s’agissait pas de mettre le soignant en difficulté mais d’apporter un regard extérieur à une pratique
qui est souvent effectuée individuellement pour permettre de trouver des solutions, notamment au refus
de soin, parce que le refus de la toilette chez des personnes âgées démentes est fréquent.
En dernier lieu, il faut également mettre en place en cas d’évènements difficiles (s’il y a eu un signalement
de maltraitance), un accompagnement approprié qui soit également collectif et individuel. Une équipe est
très souvent profondément remuée par la découverte d’un acte de maltraitance même s’il est le fait d’un
individu. La personne en question doit être accompagnée d’une manière ou d’une autre, qu’elle quitte le
secteur des soins parce qu’il n’y a pas d’autres alternatives, qu’elle poursuive dans ce secteur mais en
étant davantage épaulée et encadrée.
La Haute Autorité de Santé a introduit dans la certification V10, des exigences relatives à la mise en place
de démarches de promotion de la bientraitance dans les établissements de santé. Elle est donc allée plus
loin que de simplement vérifier si les établissements traitaient les plaintes et réclamations des usagers.
Les établissements hospitaliers ont tous commencé à mettre en place des systèmes de repérage des
suspicions ou actes de maltraitance en sensibilisant les professionnels à ce qu’est la maltraitance et en
mettant en place des systèmes de déclaration.
Mais les établissements ont progressé par rapport à ce qui a été une première étape en mobilisant les
cadres médicaux et non médicaux autour de ces situations.
Le rôle du cadre de proximité et de l’équipe médicale s’avérant essentiel pour donner du sens à la
pratique quotidienne.
Le management est en effet au cœur de la culture de la bientraitance. Il est garant de la qualité du
service rendu, du comportement des professionnels et des réponses apportées aux patients.
Pour repérer les facteurs de maltraitance, le cadre de santé doit être présent, disponible, sécurisant
et faire preuve de beaucoup de vigilance lorsqu’il aborde ce sujet avec les équipes afin de ne pas les
culpabiliser de façon stérile mais de les amener à une réflexion constructive.
Mais il ne faut pas oublier que les cadres de santé sont certes le maillon le plus proche du soin mais
qu’ils ne doivent pas, et c’est incontournable, être les seuls en première ligne dans cette démarche de
bientraitance.
La direction de l’hôpital doit être totalement engagée dans ce domaine, direction au sens large, et
elle a pour responsabilité de structurer les démarches de bientraitance en y impliquant l’ensemble des
professionnels des établissements.
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« INCIDENCES
4. Informer : premier support à l’autonomie
Nous arrivons à une 4ème étape qui est d’informer le patient, élément indispensable, premier support de
son autonomie.
Cette information nécessite d’être faite de manière adaptée et il faut également s’assurer que l’information
ait été bien comprise. Tous ceux qui travaillent dans le domaine du soin savent à quel point une information
peut être mal entendue et mal comprise.
5. Accompagner par la parole
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étape, accompagner par la parole la réflexion et le parcours de l’usager. On s’est aperçu qu’il
était important de permettre à l’usager d’exprimer ses réflexions sur son parcours de soin et sur les
événements douloureux, passés ou à venir, pour qu’ils fassent l’objet d’échanges entre les professionnels
et les usagers.
Cela permet d’instaurer une vraie communication et une vraie prise en compte de l’individu.
ème
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Repère n°2 – La qualité du lien entre professionnels et usagers
Dans le cadre d’une politique de promotion de la bientraitance qui renvoie à la qualité du lien entre les
professionnels et les usagers, il y a un point primordial sur lequel insister : le respect et la singularité qui
sont les fondements de toute intervention auprès d’un patient.
C’est le respect de la personne telle qu’elle est, et c’est aussi la mise en place d’un soin individualisé afin
d’éviter les soins en série réalisés par les équipes soignantes qui causent la déshumanisation complète
du soin.
Cette démarche s’accompagne nécessairement d’une vigilance concernant la sécurité physique et le
sentiment d’ailleurs de sécurité que pourront ressentir les usagers. Pour cela, il y a certes un environnement
matériel, mais il y a également tout ce qui concerne la communication et l’articulation des actions entre
les professionnels. Un soin n’est jamais isolé et s’inscrit dans une chaîne de prises en charge.
Repère n°3 – L’enrichissement des structures et des accompagnements par toutes les
contributions internes et externes pertinentes
La 3ème série concerne tout ce qui peut enrichir les pratiques des professionnels d’une structure venant
de l’extérieur, et tout d’abord tout ce qui concerne le travail avec l’entourage sachant que le respect des
relations de l’usager avec ses proches est fondamental. Parce que les familles et les proches des usagers
ont été très souvent en situation de les accompagner et de répondre à leurs besoins avant l’intervention
des professionnels, ils sont détenteurs d’une analyse sur la situation qui est extrêmement précieuse.
Il est recommandé que cette analyse soit recueillie régulièrement par les professionnels pour compléter
celle qu’exprime l’usager.
Les familles sont présentes à l’hôpital auprès de leurs parents ou de leurs enfants et savent exprimer les
préférences de ceux-ci, c’est incontournable.
Il a fallu du temps pour qu’on puisse laisser la place à l’entourage et cette place est quelquefois difficile
à négocier parce qu’elle peut devenir envahissante.
Elle est néanmoins indispensable.
Exemple : un monsieur atteint de la maladie d’Alzheimer au dernier stade, que sa femme venait voir
tous les jours et que l’équipe soignante n’arrivait plus à nourrir parce qu’il faisait des fausses routes
systématiquement. Il avait été décidé d’arrêter de le nourrir par voie orale et de lui installer une sonde,
ce qui voulait dire à terme relativement rapide, sa mort.
Sa femme s’est insurgée contre cela et a expliqué qu’elle savait le nourrir. Effectivement, elle s’est
arrangée pour venir matin et soir pour l’alimenter, et avec elle, il ne faisait pas de fausses routes.
Repère 4 – Le soutien aux professionnels dans leur démarche de bientraitance
b. La contradiction limitée des perquisitions et saisies :
Le régime des perquisitions et saisies aménage un espace à la contradiction dans l’obtention des preuves
matérielles.
Si, dans le cadre de la flagrance, la personne visée par une perquisition ne peut s’y opposer (article 54
du Code de procédure pénale), les objets saisis, soit qu’ils aient servis à commettre l’infraction, soit qu’ils
en soient le fruit, doivent lui être présentés si elle est présente sur les lieux.
Cependant, si elle n’est pas présente au moment de la perquisition, la présentation ne présente aucun
caractère obligatoire. Les perquisitions domiciliaires sont valables chez un suspect ou toute personne
susceptible de détenir des pièces en rapport avec les faits incriminés et ne nécessitent pas le placement
au préalable en garde à vue.
L’article 56-3 du Code de procédure pénale énonce que les perquisitions dans le cabinet d’un médecin,
d’un notaire, d’un avoué ou d’un huissier sont effectués par un magistrat et en présence de la personne
responsable de l’ordre ou de l’organisation professionnelle à laquelle appartient l’intéressé ou de son
représentant. L’article 56-1 présente un cadre similaire pour les avocats. En ce cas, en cas de discussion
sur les pièces saisies, le juge des libertés et de la détention est saisi et organise un débat contradictoire
sur les pièces.
Ici le cadre, c’est une perquisition au cabinet du professionnel. Dans le cadre d’une perquisition à l’hôpital,
cela peut être délégué sur commission rogatoire.
L’article 76 du Code de procédure pénale aménage dans le cadre de l’enquête préliminaire le cadre
des perquisitions et saisies. L’accord de la personne perquisitionnée est requis (contrairement à la
flagrance).
En cas de crime ou de délit réprimé par une peine de cinq années d’emprisonnement ou plus, le juge
des libertés et de la détention peut donner son autorisation par ordonnance motivée, les qualifications
devant figurer dans la décision.
L’espace propre à la contradiction est limité dans ce cadre par la Loi. Il s’agit de trouver un équilibre entre
les droits individuels des personnes et la nécessité d’éviter le dépérissement des preuves.
La contrainte est inévitable dans le cadre de la flagrance. Elle n’est aménagée que dans le cadre du
respect du secret professionnel, laissant place à l’obligation de présence de la personne perquisitionnée
et d’un représentant de son ordre avec, pour les avocats, discussion des scellés avant versement définitif
en procédure.
De même, dans le cadre de l’enquête préliminaire, la contradiction proviendra du droit de refuser la
perquisition ou du débat sur la nullité de l’acte. Il n’existe aucun débat préalable à la saisine du juge
des libertés et de la détention, ni recours en rétractation, le débat étant renvoyé au juge de la nullité
des enquêtes, devant le Tribunal Correctionnel ou Chambre de l’Instruction, selon l’ouverture ultérieure
d’une information judiciaire.
c. L’absence d’expertise contradictoire :
L’article 55-1 du Code de procédure pénale énonce ainsi que dans le cadre de l’enquête de flagrance,
l’Officier de Police Judiciaire est habilité à réaliser des prélèvements externes pour la réalisation d’examens
techniques. Les réquisitions à ces personnes ne peuvent être exécutées qu’avec leur accord. Toutefois,
le refus par une personne soupçonnée d’avoir commis l’infraction est punissable.
L’article 60 du Code de procédure pénale habilite l’Officier de Police Judiciaire à désigner un technicien
inscrit sur la liste des experts judiciaires ou non inscrit, il devra alors prêter serment, afin de conduire des
mesures de constatations ou d’examens techniques ou scientifiques. Le technicien est habilité à ouvrir
le scellé et le rapport obéit aux règles des articles 163 et 166 du Code précité. C’est-à-dire que l’expert
est tenu de dresser un inventaire des scellés et qu’il doit les reconstituer. Le rapport décrit les opérations
effectuées, précise les personnes qui sont intervenues et les missions à elles confiées, et indique les
conclusions. En cas de pluralité de techniciens, les conclusions divergentes sont écrites au rapport. Le
dernier alinéa relatif à la communication des conclusions est inapplicable car spécifique à l’instruction.
Dès lors, il n’y a aucun caractère contradictoire dans la phase technique de l’enquête de flagrance.
Dans le cadre de l’enquête préliminaire, la désignation d’un technicien est possible, soit par le procureur
de la République lui-même, soit par l’Officier de Police Judiciaire sur autorisation dudit magistrat. Les
autres dispositions sont applicables.
Enfin, dernier repère : le soutien aux professionnels dans leur démarche de bientraitance qui est un
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l’hôpital, que dans tous les secteurs de soins, une réflexion serait menée sur les situations de refus de
soin et la façon d’y faire face le mieux possible pour les professionnels. C’était un aspect de la politique
de lutte contre la maltraitance et promotion de la bientraitance qui avait pour objectif de se décliner
concrètement dans les pratiques professionnelles.
Elle est par essence, et jusqu’au vote de nouvelles dispositions dans le courant de l’année, non
contradictoire.
Elle concerne toute personne à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de
soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction.
En ce sens, le gardé à vue est informé des motifs de sa mise en cause et de ses droits (examen médical,
droit d’informer un proche et à s’entretenir avec un avocat).
Toutefois, l’avocat ne dispose que d’un accès limité à trente minutes à la personne concernée. Dans une
interprétation restrictive, l’avocat n’a pas accès au dossier pénal et ne peut assister son client durant les
interrogatoires. C’est l’actualité du droit français.
La procédure pénale Française hors instruction se présente donc comme une procédure purement
inquisitoire.
e. Les invitations du droit Européen : la discussion contradictoire des charges :
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Le droit Européen a une incidence majeure sur l’évolution du droit interne. En effet, la France a ratifié la
Convention Européenne des Droits de l’Homme. Elle s’est donnée l’obligation de procéder au réexamen
à la demande du ministre de la justice, du procureur général près la Cour de Cassation, d’une personne
condamnée ou de son représentant légal, de ses ayants droits en cas de décès, de toute décision pénale
ayant donné lieu à une condamnation par la Cour de Strasbourg dès lors que la satisfaction équitable
allouée sur le fondement de l’article 41 de la Convention ne pourrait mettre un terme à la violation
retenue (article 626-1 du Code de procédure pénale).
Le droit au procès équitable commande que la personne mise en cause puisse discuter contradictoirement
des charges. La question a focalisé sur la garde à vue dès lors que plusieurs arrêts concernant la Turquie
ont donné l’occasion à la Cour de préciser ses intentions en la matière en définissant quelques grands
principes.
f. L’introduction du débat contradictoire en garde à vue :
• Assistance de l’avocat
Le droit à l’assistance d’un avocat dans la phase préliminaire de l’enquête pénale et dès le placement
en garde à vue existe et n’est pas absolu. Il peut être limité pour des raisons valables, qualifiées
d’impérieuses. Pour la Cour, le droit à l’assistance d’un avocat est une garantie contre les mauvais
traitements. Les déclarations recueillies en garde à vue sans l’assistance d’un avocat ne peuvent servir
seules à fonder la condamnation.
La renonciation au droit de prendre part au procès, ou de demander l’assistance d’un avocat, doit se
trouver établie de manière non équivoque et être entourée d’un minimum de garanties correspondant à
sa gravité.
L’assistance de l’avocat et l’introduction de la contradiction dès la phase initiale de la procédure est un
principe fondamental afin que le gardé à vue puisse discuter de son dossier avec une connaissance des
charges précises contenues dans celui-ci.
L’Arrêt SALDUZ / TURQUIE en date du 27 novembre 2008 dont l’attendu de principe est le suivant :
« Il est en principe porté une atteinte irrémédiable aux droits de la défense lorsque des déclarations
incriminantes faites lors d’un interrogatoire de police subi sans assistance possible d’un avocat sont
utilisées pour fonder une condamnation ».
• Contenu de l’assistance de l’avocat
L’équité de la procédure requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui
sont propres au conseil. A cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche
des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé en détresse
et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la défense que l’avocat
doit librement exercer.
Le toucher qui est indissociable du soin peut se révéler tout à la fois bienfait qui permet la guérison, même
s’il a été douloureux, bienfaisant car procurant apaisement et douceur, et hélas parfois maltraitant.
La mise en œuvre de politiques de bientraitance et de prévention de la maltraitance concerne essentiellement
les établissements accueillant des personnes vulnérables. Mais un certain nombre de repères peuvent se
décliner dans le domaine de l’exercice libéral ou individuel.
On peut les regrouper en quatre catégories :
• Les actions qui rendent l’usager co-auteur de son parcours de soins.
• Les mesures qui garantissent un lien de qualité entre les professionnels et les usagers.
• Les initiatives qui permettent aux professionnels et structures de s’enrichir de toutes les
contributions internes et externes pertinentes pour les soins.
• L’organisation et le positionnement de l’encadrement (au sens large : direct et top management
qu’il soit médical ou administratif) dans la perspective de continuité entre la bientraitance des
usagers et de leurs proches et le soutien apporté aux professionnels dans l’exercice de leur
mission.
Repère n°1 – L’usager co-auteur de son parcours
Quelles sont les actions qui peuvent faire de l’usager un co-auteur de son parcours de soins et en
définitive de sa vie ?
En effet, reconnaître la personne dans ce qu’elle veut être suppose de mettre en place des modalités
précises de recueil et de prise en compte de ses préférences et de ses difficultés. Il s’agit de donner une
réalité à la liberté de choix que la Loi de 2002 a inscrite.
1. Travailler dans le respect des droits et des choix de l’usager
Comment peut-on travailler tout d’abord dans le respect des droits et des choix de l’usager ? C’est
particulièrement difficile lorsque celui-ci n’est pas en mesure d’exprimer ces choix qu’il soit enfant
ou personnes âgé atteint de troubles cognitifs. Alors on peut bien entendu s’appuyer sur la parole et
l’expérience des proches ou du représentant légal, mais dans le cas précis des soins, il est quand même
recommandé que l’usager soit néanmoins directement consulté et entendu.
2. Personnaliser l’accueil
La 2ème étape dans la liberté de choix de l’usager est de personnaliser l’accueil qu’on lui fait que ce soit
un accueil dans une institution, un hôpital, une maison de retraite ou à domicile et d’accompagner son
intégration s’il s’agit d’une structure. Il s’agit effectivement d’une étape capitale.
3. Entendre la parole de l’usager
3ème élément, entendre la parole de l’usager et respecter sa légitimité. En effet, on peut mettre en doute,
parfois, la parole d’un usager notamment s’il s’agit de mineurs ou de personnes atteintes de trouble du
comportement ou du langage.
Il est dans ces cas là, particulièrement recommandé que les professionnels adoptent une démarche
d’attention et d’analyse adaptée et précise pour que les préférences que manifeste l’usager soient
entendues et comprises. On peut citer à cet égard la démarche humanitude dit démarche « GinesteMarescotti» qui émane d’un rééducateur canadien.
Cette démarche recentre les professionnels sur les gestes bienveillants, il s’agit d’apprendre à regarder,
à toucher et à parler à une personne âgée qui présente souvent une communication très perturbée.
Pour cela, l’avocat doit avoir connaissance du dossier pour préparer la défense du gardé à vue, pouvoir
demander des actes d’enquête afin de disculper ce dernier, et préparer les interrogatoires.
Il est important aussi de noter que le ressenti que l’usager a de sa propre situation peut parfois aller à
l’encontre de la représentation que les professionnels se font de ce qui serait bon pour lui, et à cet égard
on peut noter que les situations de refus de soin sont extrêmement nombreuses et porteuses de risque
de maltraitance.
Elles sont très difficiles à vivre pour les professionnels mais sont particulièrement exemplaires de cas
de figure où il faut encourager les professionnels à rechercher une solution qui prenne en compte les
aspirations de l’usager le mieux possible.
L’arrêt DAYANAN / TURQUIE en date du 13 octobre 2009 dont les trois attendus de principes sont les
Exemple : dans l’établissement que je dirigeais précédemment, il avait été déterminé au niveau de tout
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d. La garde à vue :
Véronique DESJARDINS
Directrice APHP
En tant que directeur d’Hôpital, le thème du congrès m’a renvoyée aux thématiques de bientraitancemaltraitance, qui sont deux aspects de l’ambiguïté que peut revêtir le toucher. Ce sont des thématiques
sur lesquelles un important travail est réalisé à l’hôpital depuis plusieurs années, et par rapport auxquelles
des réflexions et politiques d’accompagnement ont été développées.
Comme le développera Marylène GUINGOUAIN, les actes de soins sont très intimement liés au toucher,
même si l’on distingue bien les actes de soins directs, des activités afférentes au soin qui y concourent
indirectement. A l’hôpital, le toucher est indissociable des métiers.
La bientraitance est un concept qui a vu le jour dans les années 90, par le biais de professionnels de la
petite enfance, lors de réflexions sur l’humanisation de l’accueil de très jeunes enfants. Il résultait de la
démarche de professionnels qui souhaitaient rechercher activement des moyens permettant de ne pas se
laisser envahir par le découragement provoqué par la complexité des situations de maltraitance.
La proximité des deux concepts de bientraitance et maltraitance signale une profonde résonnance entre
les deux. Utiliser le terme de bientraitance oblige en effet les professionnels à garder la mémoire, la trace
de la maltraitance.
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Ainsi la bientraitance, démarche volontariste, situe les intentions et les actes des professionnels dans
un horizon d’amélioration continue des pratiques, tout en conservant une empreinte de vigilance
incontournable. La bientraitance est donc à la fois démarche positive et mémoire du risque.
Ce risque, celui de la maltraitance n’est pas un risque hypothétique et lointain mais bien un risque
incontournable, consubstantiel des pratiques pour tous les professionnels qui sont au contact des
personnes vulnérables, quelque soit leur métier. Et sont vulnérables les mineurs, les personnes âgées,
malades, handicapées, dépendant des autres.
Le risque est fréquent et il faut y être vigilent.
La maltraitance se définit comme une violence se caractérisant par tout acte ou omission commis par
une personne, s’il porte atteinte à la vie, à l’intégrité corporelle ou psychique, ou à la liberté d’une
autre personne, ou compromet gravement le développement de sa personnalité et/ou nuit à sa sécurité
financière (Conseil de l’Europe – 1987)
Sept catégories de maltraitance ont été définies :
•
Violences physiques : en général volontaires. Mais peuvent être involontaires lors de soins
brusques réalisés sans information ou préparation.
Ce sont les : coups, brûlures, ligotages, soins brusques, non-satisfaction des demandes pour
des besoins physiologiques, violences sexuelles, meurtres (dont euthanasie)…
•
Violences psychiques ou morales
•
Violences médicales ou médicamenteuses : manque de soins de base, non-information sur les
traitements ou les soins, abus de traitements sédatifs ou neuroleptiques, défaut de soins de
rééducation, non prise en compte de la douleur…
•
Négligences actives : toutes formes de sévices, abus, abandons… avec la conscience de nuire.
•
Négligences passives : inattention.
•
Privation ou violation de droits
•
Violences matérielles et financières
•
Maltraitance ordinaire : la Haute Autorité de Santé a demandé un rapport à un représentant
des usagers pour définir cette maltraitance ordinaire, quotidienne.
suivants :
- « En ce qui concerne l’absence d’avocat lors de la garde à vue, la Cour rappelle que le droit de
tout accusé à être effectivement défendu par un avocat, au besoin commis d’office, figure parmi
les éléments fondamentaux du procès équitable. »
- « L’équité d’une procédure pénale requiert d’une manière générale, aux fins de l’article 6 de
la Convention, que le suspect jouisse de la possibilité de se faire assister par un avocat dès le
moment de son placement en garde à vue ou en détention provisoire. »
- « Un accusé doit, dès qu’il est privé de liberté, pouvoir bénéficier de l’assistance d’un avocat
et cela indépendamment des interrogatoires qu’il subit (pour les textes de droit international
pertinents en la matière, voir Salduz, précité, §§ 37-44). En effet, l’équité de la procédure
requiert que l’accusé puisse obtenir toute la vaste gamme d’interventions qui sont propres
au conseil. A cet égard, la discussion de l’affaire, l’organisation de la défense, la recherche
des preuves favorables à l’accusé, la préparation des interrogatoires, le soutien de l’accusé
en détresse et le contrôle des conditions de détention sont des éléments fondamentaux de la
défense que l’avocat doit librement exercer. »
•
Droit à l’assistance pour tout acte d’enquête réalisé en présence du prévenu susceptible
de l’incriminer
Le gardé à vue a droit à l’assistance d’un conseil pour des phases de transports sur les lieux avec
reconstitution, qui sont incriminantes, ou pour ses dépositions.
L’arrêt en date du 29 juin 2010, KARADAG / TURQUIE : la question reste donc posée lorsque l’intervention
d’un technicien supposerait l’interrogatoire du prévenu, ou sa participation active à la mesure technique.
Dans le cadre d’une enquête menée en dehors de la procédure d’instruction, la participation de la
personne mise en cause à la mesure d’investigation technique pourrait être frappée d’illégalité de même
que la mesure elle-même, dès lors que cette dernière serait susceptible d’être incriminante (un technicien
qui a besoin d’interroger la personne, la présence d’un avocat est obligatoire qui a accès au dossier et qui
peut donc valablement assister son client).
2. Le respect du contradictoire sur citation directe sans enquête préalable :
Un arrêt du 11 mai 2010, Antoine VERSINI / FRANCE, précise le cadre de la discussion dans le cadre de
citations directes sans enquêtes contradictoires.
La Cour rappelle qu’une citation directe sans enquête préalable est compatible avec le caractère
équitable du procès, dès lors que le requérant avait pleinement l’occasion de discuter les accusations
portées contre lui et les éléments à charge. Il doit avoir le droit de demander des mesures d’instruction
complémentaires.
Ce qui est important pour les constatations techniques opérées en cours d’enquêtes et qui ne sont pas
des expertises : le rapport doit pouvoir être débattu contradictoirement à l’audience, le prévenu devant
bénéficier d’un temps suffisant pour apporter ses propres éléments de preuve.
Dès lors, les évolutions à venir du droit interne n’auront pas d’incidences sur les constatations techniques
réalisées dans le cadre des enquêtes de flagrance et préliminaires. A tout le moins, le technicien doit
veiller dans le cadre de ses opérations à ne pas se retrouver à devoir interroger la personne soupçonnée.
En ce cas, le droit à l’assistance d’un avocat et sa présence durant les opérations serait obligatoire et
le régime juridique basculerait dans celui de l’expertise (il faut être vigilent sur ce point, car il n’est pas
mentionné dans les textes français, mais reconnu au niveau européen).
a. Le caractère contradictoire des actes d’expertise dans le cadre de l’instruction ou la phase de
jugement :
Comme on vient de le voir rapidement les notions de bientraitance et maltraitance s’appliquent sans
ambigüité au domaine du toucher, cœur du métier de kinésithérapeute.
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Contrairement à l’expert civil, l’expert pénal n’est pas placé dans la position d’un technicien donnant un
avis librement discuté dans le cadre du procès, mais dans celle d’un technicien qui du fait même de ces
opérations est susceptible d’incriminer ou de mettre hors de cause une personne mise en examen ou
soupçonnée, et participe ainsi directement sous le contrôle du juge à l’élaboration des éléments à charge
ou à décharge du dossier. La délégation qui lui est donc confiée est moins large dès lors que le résultat
de ses recherches peut influer directement sur les droits personnels d’un tiers.
Cependant, les phases d’instruction et de jugement ont renforcé leur caractère contradictoire. L’expertise
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« BIENTRAITANCE - MALTRAITANCE »
b. Le caractère contradictoire de certaines opérations d’expertise :
La Cour de Cassation a rappelé dans un arrêt en date du 2 juin 2010 que les opérations d’expertises en
tant que telles n’étaient pas soumises au contradictoire sauf exceptions prévues par la Loi. Dès lors, et en
dehors des exceptions légales, seules les conclusions de l’expert sont soumises au débat contradictoire.
Toutefois, la même juridiction a rappelé dans un arrêt du 11 mai 2010 que dès lors que l’expert était
entendu en procédure en présence d’une partie comme le Ministère Public, les autres parties devaient être
convoquées à peine de nullité par violation des dispositions de l’article 6 de la Convention Européenne
des Droits de l’Homme. Cette position est logique dès lors que l’audition de l’expert a pour but d’en
discuter les conclusions.
c. Le contradictoire dans la décision d’organiser une mesure d’expertise et dans le libellé de la
mission :
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• Définition de la mission :
Les parties disposent du droit de demander une expertise sous la forme d’une déclaration au greffe
motivée. Le juge d’instruction doit répondre dans le délai d’un mois.
La désignation d’un expert par le juge est soumise partiellement au formalisme du contradictoire.
Cependant, le débat n’a lieu que postérieurement à la prise de décision du juge. L’article 161-1 du Code
de procédure pénale précise à cet égard que l’ordonnance est notifiée sans délai au procureur et aux
avocats des parties qui disposent d’un délai de 10 jours pour demander à compléter les questions posées
à l’expert, ou l’adjonction d’un autre expert.
Le juge d’instruction dispose alors d’un délai de 10 jours pour répondre par ordonnance motivée.
L’ordonnance peut être frappée d’appel si elle ne donne pas satisfaction aux parties. Le refus de répondre
du juge est considéré comme une ordonnance de rejet qui peut être frappé d’appel. Le président de la
chambre de l’instruction est seul compétent pour statuer sur le recours.
« HISTOIRES D’UN
»
Jean-Maurice BOURIC
MKDE, Cadre de santé
Le toucher est un mode de communication. Comme toute communication, il se compose d’un émetteur,
d’un message et d’un récepteur. Ces trois éléments peuvent être source d’ambigüité.
1/ Une patiente d’origine magrébine, porteuse d’une pathologie de l’épaule est adressée au
service de kinésithérapie pour rééducation. A la première séance elle refuse que le kiné la touche. Après
négociation un climat de confiance s’instaure. La réalisation de tous les gestes techniques nécessaires à
sa rééducation est possible y compris les massages. Au fur et à mesure de la prise en charge l’empathie
du thérapeute faisant, la patiente confie ses problèmes familiaux. Elle ressent un manque d’écoute de
par ses proches. En fin de prise en charge, à quelques jours de son départ du centre, elle déclare ses
sentiments au kiné. Celui ci très embarrassé me fait part de la situation qui se règle partiellement grâce
à la sortie de la malade. Mais la patiente téléphone de plus en plus souvent dans le service. Éconduite,
elle réussit à se procurer le numéro de téléphone personnel du kiné.qui n’a plus d’autre solution que de
changer de numéro.
2/ Un stagiaire kiné doit effectuer une posture des adducteurs et fléchisseurs de hanche d’une
jeune patiente de 20 ans IMC, traitée depuis son enfance en centre de rééducation. Le soin démontré,
le stagiaire se positionne .Il est entre les cuisses de la jeune patiente, lui maintient les cuisses écartées
une jambe positionnée en flexion l’autre en extension. Le jeune homme rougit et semble très gêné, pour
lui la situation est ambiguë.
3/ A l’occasion d’une séance d’activité physique adaptée s’adressant à des patients présentant
une surcharge pondérale, une malade atteinte d’une obésité morbide et d’une gonarthrose bilatérale
se propose de participer à la séance. Dans un souci de confort et de faisabilité je l’invite à s’installer
d’une chaise longue pour éviter les relèvements du sol qui étaient irréalisables. Hélas, suite à quelques
mouvements, la chaise longue céda et la patiente sans se faire mal se trouva encastrée dans le siège
!!! Je n’ai pu retenir un sourire, pris dans l’ambiguïté de mon rôle de thérapeute et le cocasse de la
situation.
Cette progression dans le caractère contradictoire de la désignation des experts est cependant tempérée.
L’article précité énumère les exceptions au principe à savoir en cas d’urgence, en cas de risque d’entrave à
l’accomplissement des investigations, ou lorsque l’expertise n’a aucune incidence sur la détermination de
la culpabilité de la personne mise en examen. À cet égard et sur ce dernier point un décret énumère cette
liste : il s’agit des expertises médicales sur les victimes pour apprécier l’importance des dommages.
Le législateur a de même tempéré la règle par la Loi n°2009-526 du 12 mai 2009 qui autorise les parties
à renoncer à ce droit.
La mission de l’expert est définie par le juge d’instruction ou le tribunal. Elle n’est cependant pas figée
dès lors que les parties ont le droit de demander au juge qu’il soit prescrit aux experts d’effectuer des
recherches ou d’entendre toute personne qui serait susceptible de délivrer des renseignements d’ordre
technique. Le refus peut être frappé d’appel des lors que le magistrat doit formaliser sa décision soit par
ordonnance, soit par jugement, selon que ce soit le juge d’instruction ou le tribunal.
• La question de la désignation d’un sapiteur :
En matière civile, l’expert peut s’adjoindre lui-même un sapiteur sous condition que ce dernier ne soit
pas de la même spécialité que lui.
En droit pénal, l’expert ne dispose pas du droit personnel de s’adjoindre un sapiteur. Ce droit appartient
au juge d’instruction à la demande de l’expert qui devra expliquer les raisons pour lesquelles il n’est pas
en mesure de réaliser lui-même l’étude d’un point de sa mission. Ainsi, s’il apparaît lors de la désignation
d’un expert que les champs d’investigation chevauchent plusieurs disciplines techniques, le magistrat
instructeur pourra décider de nommer un collège d’experts. Si les difficultés techniques apparaissent
postérieurement à la désignation, la nomination d’un sapiteur pourra se justifier.
Le rapport du sapiteur doit en principe être annexé au rapport principal de l’expert initialement commis.
Par tempérament, la Cour de Cassation a pu apprécier du caractère contradictoire du dépôt indépendant du
rapport du sapiteur en l’absence de violation des droits de la défense des lors que l’ensemble des rapports
avait été versé en temps voulu à la procédure et que l’expert principal a pu en prendre connaissance
avant de déposer le sien. (Cour de Cassation chambre criminelle du 28 février 1974).
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JOUR
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pénale n’échappe pas à cette règle, même si la contradiction n’est pas totalement assurée de plein droit
comme en matière civile. Deux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de Cassation ont pu préciser
cette année deux aspects des opérations d’expertise pour situer le moment ultime de la discussion
contradictoire.
DE L’ASSEMBLÉE
a) Le débat contradictoire a lieu au moment de l’expertise. Le problème rencontré est que l’interrogatoire
est réalisé en début d’enquête par un Officier de police judiciaire, et il est donc nécessaire de faire
attention à la retranscription du procès-verbal et sa signature.
Réponse du magistrat : c’est bien là l’intérêt de la présence de l’avocat qui aura accès au dossier et qui
veillera au respect de la procédure lors de l’interrogatoire.
Le mis en cause peut ne pas signer le procès-verbal pour se prémunir du contenu, ou alors accepté de
signer le procès-verbal qu’en précisant et faisant rajouter dans celui-ci, « je ne suis pas d’accord avec
telle ou telle phrase », ou « je n’ai pas dit ces mots là », ou « mes propos ont été transformés ». Il est
mieux d’expliciter son geste.
d. La discussion contradictoire des pièces soumises au secret : l’exemple de l’ouverture des
scellés en matière médicale :
Dans le cadre d’une instruction ou d’un supplément d’information ordonné par le tribunal, l’inventaire est
dressé par le juge et mentionné dans un procès-verbal. Dans la pratique, le dossier médical sera placé
sous scellés fermés (obligatoire) qui ne peuvent être ouverts qu’en présence de la personne mise en
examen ainsi que de son avocat et de la personne chez qui le document a été saisi.
Réponse du magistrat : en effet, le juge d’instruction se devrait de le demander, de solliciter de l’expert,
un pré-rapport. Voire même que l’expert doit insister sur l’intérêt du pré-rapport.
Le caractère contradictoire des pièces versées à l’expert est donc établi par l’ouverture des scellés en
présence soit de la personne concernée par la saisie, soit du mis en examen assisté de son avocat,
et l’établissement d’un inventaire. Dans le cadre du débat judiciaire, les parties concernées savent
qu’aucune autre pièce n’a pu être remise à l’expert.
L’expert a le droit d’ouvrir les scellés et d’en confectionner de nouveaux. L’article 163 du Code de
procédure pénale autorise l’expert à dresser un nouvel inventaire des scellés.
Les formalités ainsi énumérés permettent la vérification des pièces reçues par l’expert et exploitées par
ce dernier. Elles assurent à la défense, la garantie de ce qu’aucune autre pièce n’a pu être communiquée
à l’expert et utilisée par ce dernier sans une communication officielle figurant au dossier d’instruction.
c) Dans l’expertise technique liée à la kinésithérapie et au toucher, l’expert a nécessairement besoin
d’interroger le mis en cause et la victime. Cependant, comment ne pas dépasser la mission confiée par
le juge ?
La procédure de saisie des pièces médicales assure donc dans son ensemble aux personnes concernées
par ces documents, la possibilité de faire valoir leur inutilité à la procédure ou leur utilité particulière, leur
traçabilité procédurale dans le cadre d’opérations expertales est donc pleinement assurée.
Réponse du magistrat : dans ce cas précis, il faudrait que dans la mission confiée, il soit indiqué que
les parties peuvent être entendues par l’expert sous réserve du respect de la procédure pénale. Bien
entendu les parties civiles sont aussi assistées par leur avocat.
Donc toutes les convocations doivent respectées les dispositions légales, avec le respect des délais et des
formes. Ces interrogatoires seront réalisés par le juge en présence éventuellement de l’expert.
Les garanties ainsi données sur le caractère contradictoire de telles pièces et sur leur légalité construit
le cadre préalable nécessaire à l’organisation d’une mesure d’investigation technique équilibrée. Cette
garantie procédurale permet à un expert de connaître le champ de son investigation et aux parties
concernées de le vérifier.
Elle fixe l’objet de l’expertise de manière précise et opposable. Elle présente à cet égard, la garantie de
l’égalité des armes dans le procès et assure une modalité du caractère contradictoire de l’enquête.
Elle invite l’expert à la plus grande vigilance quant à la gestion des scellés. L’expert devra donc faire
attention à la régularité des convocations qu’il adressera à la personne chez qui les perquisitions ont eu
lieu. S’il est mis en examen, il devra veiller à convoquer l’avocat en respectant les délais de cinq jours
ouvrables et la forme de lettre recommandée avec accusé de réception, des fax avec accusé de réception
ou de l’émargement. La reconstitution des scellés est ainsi une étape obligatoire afin de garantir l’absence
de mélange des données reçues, la possibilité essentielle de procéder à une contre-expertise, de garantir
la loyauté de la preuve.
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b) En tant qu’expert judiciaire, en matière pénal, il est nécessaire d’insister ou d’imposer dans chaque
procédure, la présentation d’un pré-rapport, contrairement à la matière civile où celui-ci est obligatoire.
Le non-respect des ces procédures peut aboutir à l’annulation de l’expertise voire même à l’annulation du
scellé s’il n’est pas rétabli dans les formes, ce poids pouvant faire grief à la défense qui serait privée du
droit de la contre-expertise. La disparition du scellé dans le cadre d’une instruction signe l’impossibilité
de reconstituer la preuve et paralyse partiellement l’instruction.
e. Le contradictoire dans le pouvoir d’interroger le mis en examen par les experts :
En droit, une personne mise en examen ne peut répondre qu’aux interrogatoires du juge et en présence
de son avocat. Cependant, l’affirmation absolue de ce principe reviendrait à nier la possibilité pour les
mis en examen de participer activement à l’expertise et porterait finalement tout autant atteinte à leurs
droits. Le Code de procédure pénale confère donc à l’expert le droit d’obtenir des renseignements soit
auprès de tiers, soit auprès du mis en examen dans un cadre procédural strict.
En tout premier lieu, les renseignements que peut recevoir l’expert sont strictement limités à ce qui est
nécessaire à l’accomplissement de la mission. Il ne peut donc procéder à un interrogatoire.
L’expert peut demander à un tiers de lui donner les renseignements nécessaires à l’accomplissement de
sa mission.
L’expert a le droit de demander des renseignements à la personne mise en examen. Cette demande
doit respecter les droits de la défense en ce que l’expert doit convoquer dans les délais et forme de
l’article 114 du Code de procédure pénale l’avocat du mise en examen par lettre recommandée avec
demande d’avis de réception, télécopie avec récépissé ou verbalement avec émargements au dossier
de procédure cinq jours ouvrables avant la demande de renseignements. La renonciation à ce droit peut
être faite par écrit. L’expert peut demander au juge de procéder à des interrogatoires et de solliciter les
renseignements qu’il souhaite en sa présence.
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QUESTIONS / RÉACTIONS
f. Le respect du contradictoire dans la gestion du dossier d’expertise : le pré-rapport dans l’expertise
pénale :
La Loi prévoit que l’expertise ne saurait excéder une durée d’un an.
Cependant, s’il est justifié que les opérations ne peuvent se terminer dans les temps, le juge peut
demander le dépôt d’un rapport d’étape qui sera notifié aux parties et qui leur permettra d’adresser à
des experts et au juge des observations. Dans tous les cas, le juge d’instruction peut demander à l’expert
de déposer un pré-rapport permettant aux parties de solliciter de nouvelles mesures ou des mesures
complémentaires.
L’article 167-2 permet au juge de solliciter le dépôt d’un pré-rapport préalablement au dépôt du rapport
définitif. Cette possibilité permet aux parties de former leurs demandes et d’établir des observations. Le
pré-rapport est obligatoire si le Ministère Public le requiert ou si une des parties en fait la demande au
juge d’instruction, selon les modalités de l’article 81 du Code de procédure pénale.
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L’expert peut être autorisé à communiquer par tous moyens et directement aux parties ses conclusions.
La notification des conclusions en cours d’instruction est faite par le juge. Le rapport peut être remis
en intégralité si les parties aux opérations en font la demande. Le respect du contradictoire commande
la possibilité de déposer des dires qui permettront au juge d’ordonner le cas échéant un complément
d’expertise ou une contre expertise.
Le délai pour faire ses demandes court à compter de la notification des conclusions. Le délai est fixé au
minimum à 15 jours et en matière économique et financière à un mois.
Le juge doit adapter le délai de réponse à la complexité de l’expertise. Ce délai est un délai de forclusion
et aucune autre demande ne pourra être reçue sur le même objet sauf preuve d’un élément nouveau
survenu postérieurement au dépôt du rapport. La réponse du juge doit être opérée dans le délai d’un
mois à compter de la réception de la demande. L’appel de la décision du juge est porté devant la chambre
d’instruction. Le refus de réponse du juge dans le délai d’un mois est considéré comme un rejet des
demandes.
Le caractère contradictoire de la notification d’expertise a été renforcé lorsque cette dernière porte sur
la détermination d’un trouble psychique ou neuropsychique conduisant à l’application des dispositions de
l’article 122-1 du Code pénal relatif à l’irresponsabilité ou à l’atténuation de responsabilité. Il est ainsi
prévu que la notification puisse être faite à la partie civile en présence des experts.
Elle est obligatoire en matière criminelle si l’avocat de la partie civile le demande. La partie civile peut
alors formuler des observations et des demandes de complément d’expertise ou de contre-expertise
dans un délai de 15 jours. Cette contre-expertise est obligatoire lorsqu’elle est demandée par la partie
civile. Elle doit être accomplie par deux experts.
Pour les témoins assistés, qui ne sont pas mis en cause, la notification des conclusions est facultative et
le juge n’est pas tenu de répondre à une demande formée par ce dernier par une ordonnance motivée
s’il l’estime non justifiée.
Conclusion :
Le respect du principe du contradictoire par l’expert en matière pénale est une garantie donnée aux
justiciables de la loyauté des débats et de celle de la preuve ainsi obtenue. Il convient de rappeler que
l’article 802 du Code de procédure pénale dispose que la violation des formes prescrites par la loi à peine
de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, toute juridiction qui est saisie d’une demande
d’annulation ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci
a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu’elle concerne.
Le formalisme du contradictoire préalablement exposé protège la personne mise en examen. L’expertise
en matière pénale est un élément de preuve qui sera utilisé dans les débats et qui peut déterminer
une charge au sens pénal du terme qui sera retenue à l’encontre de la personne incriminée. L’expertise
pénale n’est donc pas neutre. Ses conclusions peuvent donc faire grief des lors qu’elles conduisent à
une incrimination. La Cour de Cassation rappelle régulièrement que le formalisme des perquisitions et
saisies, le formalisme préalable aux interrogatoires des mises en examen, notamment relativement à la
convocation de son conseil, sont autant de points retenus qui font grief.
Le souci d’une intégration de la procédure pénale française dans les normes de la Convention Européenne
de sauvegarde des Droits de l’Homme ouvre très progressivement la procédure préalable au procès, au
respect du contradictoire afin que les charges puissent être discutées avant la décision de renvoi devant
un tribunal et permettre aux parties de donner leur avis sur les actes d’instruction nécessaires.
L’égalité des armes est un principe intangible des procès qui doit pouvoir donner aux parties un pouvoir
quasi équivalent.
L’observateur ne peut que se réjouir d’une telle ouverture qui permet aux parties de faire valoir leurs
arguments techniques directement auprès de l’expert et de provoquer immédiatement dans le cadre de
l’instruction un débat utile.
On peut cependant s’interroger sur le poids prépondérant du Ministère Public ou des parties civiles pour
lesquels certaines demandes doivent être impérativement prises en compte par le juge, sans débat.
On peut tout aussi s’interroger, alors que l’obligation du pré-rapport ne se discute plus en matière de
procédure civile, puisqu’est devenu obligatoire, sur le fait que le législateur n’a pas jugé utile d’imposer
cette obligation au juge pénal et à l’expert. En effet, la sauvegarde de l’urgence de la nécessité de
l’enquête est déjà une digue suffisante si l’on donnait à penser que la révélation des conclusions de
l’expertise avant son terme serait susceptible de modifier le cours de l’enquête. Le danger n’est-il pas de
reporter sur le juge pénal l’appréciation d’un problème technique dont il n’a pas totalement la maîtrise en
le laissant juge d’une demande de contre-expertise sans qu’il soit éclairé par des experts sur la validité
des arguments opposés par l’une des parties.
Il convient d’espérer que l’évolution annoncée de la procédure pénale ancrera de manière définitive le
principe du respect contradictoire en matière expertale et que l’éventuelle suppression de la procédure
d’instruction ne s’accompagnera pas d’un remplacement de l’expertise par une simple mesure de
consultation technique non contradictoire et n’aboutisse à une véritable régression.
Le Code de procédure pénale a donc bien pris en compte le nécessaire respect du principe du contradictoire
adapté à l’enquête afin de garantir aux parties au procès l’égalité des armes.
Le législateur est allé plus loin puisqu’il autorise le tribunal saisi, après instruction, d’ordonner une
contre-expertise civile s’il venait aux débats une contradiction technique apportée par un témoin.
L’expert doit donc veiller tout particulièrement lorsqu’il a été demandé de déposer un pré-rapport, de
répondre aux dires des parties de manière complète. Le refus de prendre en considération les dires
mêmes pour les écarter comme non pertinents est une violation du caractère contradictoire de l’expertise
et fait grief à celui qui a demandé à l’expert de corriger ses conclusions.
Il est donc important d’intégrer ces paramètres dès l’origine de la mission, et éventuellement de solliciter
le juge lorsque les opérations sont complexes afin de lui indiquer l’opportunité d’un pré-rapport et que
l’expertise puisse répondre à toutes les interrogations techniques qui seraient posées et notamment
après que l’expert ait rédigé un premier avis technique sur les questions posées.
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Cette procédure permet aux mis en examen d’avoir une connaissance exacte des interrogations de
l’expert et assure à son égard le caractère contradictoire de la phase technique.
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