Chapitre IV. Matrices. Marc de Crisenoy Convention: K désigne un

publicité
Chapitre IV. Matrices.
Marc de Crisenoy
Convention: K désigne un corps commutatif. (En pratique K = Q, R ou C).
Remarque. Par souci de simplification, certains résultats de ce chapitre ne sont énoncés
que pour des endomorphismes alors qu’ils sont valables pour des applications linéaires quelconques.
Déf. 1. Soient n, p ∈ N∗ . On appelle matrice de type (n, p) à coefficients dans K toute
application de {1, . . . , n} × {1, . . . , p} dans K.
Notations 2. Soient n, p ∈ N∗ . Soit A une matrice de type (n, p) à coefficients dans K.
Pour tout (i, j) ∈ {1, . . . , n} × {1, . . . , p}, notons aij l’image de (i, j) par A. Avec la notation
”familiale” on a donc A = (aij )(i,j)∈{1,...,n}×{1,...,p} . On se contente souvent de noter A = (aij ).
Rq. 3. Soient n, p ∈ N∗ . Alors une matrice de type (n, p) à coefficients dans K est souvent représentée sous forme d’un tableau d’éléments de K ayant n lignes et p colonnes.
Notation 4. Soient n, p ∈ N∗ .
On note Mn,p (K) l’ensemble des matrices de type (n, p) à coefficients dans K.
Notation 5. Soient n, p ∈ N∗ .
On note On,p la matrice de type (n, p) à coefficients dans K dont tous les coefficients sont nuls.
Déf. 6.
a) Soient n, p ∈ N∗ . Une matrice de type (n, p) à coefficients dans K est dite carrée si n = p.
b) Soit n ∈ N∗ . Une matrice carrée d’ordre (ou de taille) n à coefficients dans K est une matrice
de type (n, n) à coefficients dans K.
Notation 7. Soit n ∈ N∗ .
On note Mn (K) l’ensemble des matrices carrées de taille n à coefficients dans K.
Notation 8. Soit n ∈ N∗ .
On note On la matrice carrée de taille n à coefficients dans K dont tous les coefficients sont nuls.
Déf. 9. Soit n ∈ N∗ . Soit A = (aij ) ∈ Mn (K).
On dit que A est triangulaire supérieure si ∀(i, j) ∈ {1, . . . , n}2 (i > j =⇒ aij = 0).
On dit que A est triangulaire inférieure si ∀(i, j) ∈ {1, . . . , n}2 (j > i =⇒ aij = 0).
On dit que A est diagonale si ∀(i, j) ∈ {1, . . . , n}2 (i 6= j =⇒ aij = 0).
Rq. 10. Soit n ∈ N∗ . Soit A ∈ Mn (K).
Alors A est diagonale ssi A est triangulaire supérieure et triangulaire inférieure.
Notation 11. Soit n ∈ N∗ . Soient b1 , . . . , bn ∈ K. A = (aij ) ∈ Mn (K) est définie ainsi:
soit (i, j) ∈ {1, . . . , n}2 ; si i = j alors aii = bi , si i 6= j alors aij = 0.
A est notée diag(b1 , . . . , bn ).
1
Notation 12. Soit n ∈ N∗ . On pose In = diag(1, . . . , 1) ∈ Mn (K).
Déf. 13. Soient n, p ∈ N∗ .
1) Soient A = (aij ) et B = (bij ) des matrices de type (n, p) à coefficients dans K.
On définit C = (cij ) matrice de type (n, p) à coefficients dans K ainsi:
∀(i, j) ∈ {1, . . . , n} × {1, . . . , p} cij = aij + bij .
Par définition, la matrice A + B est la matrice C.
2) Le 1) définit une application + : Mn,p (K) × Mn,p (K) → Mn,p (K).
Ex. 14. Soit n ∈ N∗ . Soient a1 , . . . , an ∈ K. Soient b1 , . . . , bn ∈ K.
Alors diag(a1 , . . . , an ) + diag(b1 , . . . , bn ) = diag(a1 + b1 , . . . , an + bn ).
Déf. 15. Soient n, p ∈ N∗ .
1) Soit A = (aij ) une matrice de type (n, p) à coefficients dans K. Soit α ∈ K.
On définit C = (cij ) matrice de type (n, p) à coefficients dans K ainsi:
∀(i, j) ∈ {1, . . . , n} × {1, . . . , p} cij = αaij .
Par définition, la matrice αA est la matrice C.
2) Le 1) définit une application . : K × Mn,p (K) → Mn,p (K).
Prop. 16. Soient n, p ∈ N∗ . Alors Mn,p (K) est un K-espace vectoriel.
Déf. 17. Soient n, p ∈ N∗ . Soient k ∈ {1, . . . , n} et ` ∈ {1, . . . , p}. On définit Mk` = (mij )
ainsi: si (i, j) 6= (k, `) alors mij = 0 et mk` = 1.
Prop. 18. Soient n, p ∈ N∗ . Alors:
a) (Mk` )(k,`)∈{1,...,n}×{1,...,p} est une base de Mn,p (K).
b) Mn,p (K) est de dimension finie et sa dimension vaut np.
Déf. 19. Soient n, p, q ∈ N∗ .
Soit A = (aij ) une matrice de type (n, p) à coefficients dans K.
Soit B = (bij ) une matrice de type (p, q) à coefficients dans K.
On définit C = (cij ) matrice de type (n, q) à coefficients dans K ainsi:
p
X
∀(i, j) ∈ {1, . . . , n} × {1, . . . , q} cij =
aik bkj .
k=1
Par définition AB est la matrice C.
Prop. 20. Soient n, p, q ∈ N∗ . Alors:
a) ∀A ∈ Mn,p (K) AOp,q = On,q , b) ∀B ∈ Mp,q (K) On,p B = On,q .
Lemme 21. Soit n ∈ N∗ . Soient a1 , . . . , an ∈ K. Soient b1 , . . . , bn ∈ K.
Alors diag(a1 , . . . , an )diag(b1 , . . . , bn ) = diag(a1 b1 , . . . , an bn ).
Exo. 22. Exhiber A, B ∈ M2 (K) vérifiant A, B 6= O2 et AB = O2 .
Lemme 23. Soient n, p ∈ N∗ . Soit A ∈ Mn,p (K). Alors In A = A et AIp = A.
Exo. 24. Soit n ∈ N∗ . Soient i, j, k, ` ∈ {1, . . . , n}. On définit δjk ainsi: δjk = 1 si j = k et
δjk = 0 sinon. Montrer que Mij Mk` = δjk Mi` .
2
Prop. 25.
a) Soient n, p, q, r ∈ N∗ . Soient A ∈ Mn,p (K), B ∈ Mp,q (K) et C ∈ Mq,r (K).
Alors (AB)C = A(BC).
b) Soient n, p, q ∈ N∗ . Soient α ∈ K, A ∈ Mn,p (K) et B ∈ Mp,q (K).
Alors (αA)B = α(AB) = A(αB).
c) Soient n, p, q ∈ N∗ . Soient α, β ∈ K, A ∈ Mn,p (K) et B ∈ Mp,q (K).
Alors (αA)(βB) = (αβ)(AB).
d) Soient n, p, q ∈ N∗ . Soient A ∈ Mn,p (K) et B, C ∈ Mp,q (K). Alors A(B + C) = AB + AC.
e) Soient n, p, q ∈ N∗ . Soient A, B ∈ Mn,p (K) et C ∈ Mp,q (K). Alors (A + B)C = AC + BC.
Déf. et notation 26. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Soit e = (e1 , . . . , en ) une base de E. Soit u ∈ L(E). On appelle matrice de u dans la base e la
n
X
matrice (aij ) carrée de taille n à coefficients dans K où ∀j ∈ {1, . . . , n} u(ej ) =
aij ei . Elle
i=1
est notée Mat(u, e).
Rq. 27. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E. Soit e une base de E.
Alors Mat(IdE , e) = In et Mat(0L(E) , e) = On . Plus généralement ∀α ∈ K Mat(αIdE , e) = αIn .
Prop 28. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E. Soit e une
base de E. Alors l’application de L(E) dans Mn (K) qui à u associe Mat(u, e) est un isomorphisme de K-espaces vectoriels.
Rq. 29. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle.
On note n = dim E. Soit e une base de E. Soit u ∈ L(E). Soit α ∈ K.
Alors Mat(u, e) = αIn ⇐⇒ u = αIdE .
Cor. 30. Soit E un K-ev de dimension finie.
Alors L(E) est de dimension finie et sa dimension vaut (dim E)2 .
Prop. 31. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Soit e une base de E. Soit u ∈ L(E). On note M = Mat(u, e).
Soit x ∈ E. On note X la matrice colonne (appartenant à Mn,1 (K)) formée des coordonnées
de x dans la base e.
On pose y = u(x). On note Y la matrice colonne (appartenant à Mn,1 (K)) formée des coordonnées de y dans la base e.
Alors Y = M X.
Prop. 32. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle.
Soit e une base de E. Soient u, v ∈ L(E).
Alors Mat(v ◦ u, e) = Mat(v, e)Mat(u, e).
Déf. et prop. 33. Soit n ∈ N∗ . Soit A ∈ Mn (K).
On considère l’application ϕA : Mn,1 (K) → Mn,1 (K) définie par ϕA (X) = AX.
Alors ϕA est un endomorphisme de Mn,1 (K). ϕA est appelé endomorphisme canoniquement
associé à A. La matrice de ϕA dans la base canonique de Mn,1 (K) est égale à A.
3
Déf. 34. Soit n ∈ N∗ . Soit A ∈ Mn (K).
On dit que A est inversible s’il existe B ∈ Mn (K) telle que AB = In et BA = In .
Ex. 35. Soit n ∈ N∗ . Alors In est inversible, On ne l’est pas.
Notation 36. Soit n ∈ N∗ . On note GLn (K) = {A ∈ Mn (K) | A est inversible}.
Prop. 37. Soit n ∈ N∗ . Alors:
i) ∀A, A0 ∈ GLn (K) AA0 ∈ GLn (K).
ii) GLn (K) (muni de la loi de multiplication induite) est un groupe. In est son élément neutre.
Rq. 38. Soit n ∈ N∗ . Soient A ∈ GLn (K) et α ∈ K∗ .
Alors αA ∈ GLn (K) et (αA)−1 = α−1 A−1 .
Prop. 39. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E. Soit e
une base de E.
a) Soit u ∈ L(E). Alors u ∈ GL(E) ⇐⇒ Mat(u, e) ∈ GLn (K).
b) L’application de GL(E) dans GLn (K) qui à u associe Mat(u, e) est un isomorphisme de
groupes.
Cor. 40. Soit n ∈ N∗ . Soit A ∈ Mn (K).
a) S’il existe B ∈ Mn (K) telle que AB = In alors A est inversible et A−1 = B.
b) S’il existe B ∈ Mn (K) telle que BA = In alors A est inversible et A−1 = B.
Indications pour a).
On pose E = Kn et l’on note e la base canonique de E.
Justifier qu’il existe u ∈ L(E) tel que Mat(u, e) = A et v ∈ L(E) tel que Mat(v, e) = B.
Justifier que u ◦ v = IdE . En déduire que u est surjectif. Conclure.
Déf. 41. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Soient e = (e1 , . . . , en ) et e0 = (e01 , . . . , e0n ) des bases de E.
n
X
0
On définit P = (aij ) ∈ Mn (K) ainsi: ∀j ∈ {1, . . . , n} ej =
aij ei .
i=1
P est appelée matrice de passage de e (”ancienne base”) à e0 (”nouvelle base”) et est notée Pe→e0 .
Prop. 42. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Soient e, e0 des bases de E. On note P = Pe→e0 .
Soit x ∈ E. On note X (resp. X 0 ) la matrice colonne (appartenant à Mn,1 (K)) formée des
coordonnées de x dans la base e (resp. e0 ). Alors X = P X 0 .
Prop. 43. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Soient e, e0 des bases de E. Alors Pe→e0 ∈ GLn (K) et (Pe→e0 )−1 = Pe0 →e .
Prop. 44. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E. Soit P ∈ GLn (K).
a) Soit e une base de E. Alors il existe une et une seule base e0 de E telle que Pe→e0 = P .
b) Soit e0 une base de E. Alors il existe une et une seule base e de E telle que Pe→e0 = P .
Prop. 45. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
4
Soient e, e0 des bases de E. On pose P = Pe→e0 ∈ GLn (K).
Soit u ∈ L(E). On pose M = Mat(u, e) et M 0 = Mat(u, e0 ). Alors M 0 = P −1 M P .
Rq. 46. Il existe une formule plus générale valable pour des applications linéaires quelconques (pas forcément des endomorphismes) et lorsque l’on change de base dans E et dans F .
Déf. 47. Soit n ∈ N∗ . Soient M, M 0 ∈ Mn (K).
On dit que M 0 est semblable à M s’il existe P ∈ GLn (K) telle que M 0 = P −1 M P .
Prop. 48. Soit n ∈ N∗ . La relation de similitude est une relation d’équivalence sur Mn (K).
Rq. 49. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle.
Soient e, e0 des bases de E. Soit u ∈ L(E). Alors Mat(u, e) et Mat(u, e0 ) sont semblables.
Lemme 50. Soit n ∈ N∗ . Soit M ∈ Mn (K). Alors:
a) M est semblable à In ssi M = In , b) M est semblable à On ssi M = On .
Plus généralement:
Lemme 51. Soit n ∈ N∗ . Soit α ∈ K. Soit M ∈ Mn (K).
Alors M est semblable à αIn ssi M = αIn .
Déf. 52. Soit n ∈ N∗ . Soit A = (aij ) ∈ Mn (K). On appelle trace de A, et l’on note
n
X
tr(A), la somme des coefficients diagonaux de A: tr(A) =
aii . C’est un élément de K.
i=1
∗
Ex. 53. Soit n ∈ N .
a) Soient a1 , . . . , an ∈ K. Alors tr(diag(a1 , . . . , an )) =
n
X
ai .
i=1
b) Soit α ∈ K. Alors tr(αIn ) = nα.
Lemme 54. Soit n ∈ N∗ . L’application trace tr : Mn (K) → K qui à A associe tr(A) est linéaire.
Prop. 55. Soit n ∈ N∗ . Soient A, B ∈ Mn (K). Alors tr(AB) = tr(BA).
Cor. 56. Soit n ∈ N∗ . Soient M, M 0 ∈ Mn (K). On suppose que M et M 0 sont semblables.
Alors tr(M ) = tr(M 0 ).
Exo. 57. Soit n ∈ N∗ . On suppose n ≥ 2.
Exhiber M, M 0 ∈ Mn (K) ayant la même trace et n’étant pas semblables.
Lemme 58. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle.
Soit u ∈ L(E). Soient e et e0 deux bases de E.
Alors tr(Mat(u, e)) = tr(Mat(u, e0 )).
Déf. et notation 59. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. Soit u ∈ L(E).
Alors tr(Mat(u, e)) ne dépend pas du choix de la base e.
Par définition, c’est la trace de u; on la note tr(u). C’est un élément de K.
5
Ex. 60. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. On note n = dim E.
Alors ∀α ∈ K tr(αIdE ) = nα.
Lemme 61. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle.
Alors l’application trace tr : L(E) → K qui à u associe tr(u) est linéaire.
Lemme 62. Soit E un K-ev de dimension finie non nulle. Soient u, v ∈ L(E).
Alors tr(u ◦ v) = tr(v ◦ u).
6
Téléchargement