en berne. "C'est simple. Il n'y a presque plus d'offres commerciales ni
de stock physique", affirme Guy Nafilyan. "Chez les promoteurs, la
rentrée risque d'être difficile", note pour sa part un expert : la majorité
des nouveaux programmes ne sortiront, au mieux, qu'au deuxième
semestre 2011.
Une reprise d'autant moins franche et durable que la remontée brutale
des prix est en train de stopper net l'élan des acquéreurs. "Ils vont
bientôt être au taquet", prévient Henry Buzy-Cazaux, président de
l'École supérieure des professions immobilières. Et leur capacité d'achat
s'affaiblit à nouveau dangereusement. "Déjà, souligne Christian Rolloy,
PDG de Promogim, la solvabilité des ménages, surtout parmi les plus
modestes, est archi-limite, malgré toutes les mesures de soutien. Si les
prix augmentent encore davantage, acheter leur deviendra impossible",
regrette-t-il. "Pour 100 euros de plus le mètre carré, c'est très simple :
vous ne vendez plus", explique un promoteur. Un sentiment de fragilité
partagé par Claude Sadoun, qui observe déjà des rejets de
remboursement et autres incidents de paiement. La clientèle des
primo-accédants, à l'origine (avec celle des investisseurs) du
redémarrage de l'activité, risque donc de se réduire comme peau de
chagrin. C'est dire que le marché est loin d'être rétabli. "On risque de se
réveiller avec la gueule de bois", craint Henry Buzy-Cazaux.
Les acheteurs sous pression
Sur le terrain, d'ailleurs, des tensions réapparaissent. Certains ont déjà
renoncé à l'achat ou, observe Bernard Cadeau, président du réseau
d'agences immobilières Orpi, "se résolvent à s'éloigner des centres-villes
pour rejoindre, une fois de plus, la périphérie". Ce phénomène concerne
surtout les familles désespérées par la cote des grandes surfaces à Paris,
Lyon ou Strasbourg. Même les acheteurs les plus chevronnés
commencent, eux aussi, à montrer des signes d'extrême nervosité.
Pour les biens de qualité sans défaut - "soit moins de 20% du parc à
Paris", relève Richard Tiberghien, directeur de l'étude Wagram - les
ventes se font toujours aussi facilement. Valeur refuge oblige. Ainsi, ce
120m2 à Montparnasse, parti à 11.000 euros le mètre carré en deux
jours. En revanche, les logements médiocres, présentés souvent à des
prix immérités, commencent à souffrir sérieusement. Notamment pour
les grands appartements, "de plus en plus difficiles à vendre", reconnaît
le directeur de l'étude Caraudray, située dans le Marais. Le marché se
complique donc. "En ce moment, c'est tout ou rien. Soit le logement
est acheté après une seule visite, soit l'affaire devient très complexe",
observe Gilles Ricour de Bougies, président de la Fnaim Paris-Ile-de-
France. Et ce, pour le moindre petit rien. "Une porte de cave de travers
peut faire capoter la vente", raconte Roger Abécassis. Pas étonnant que
ce petit 2-pièces sombre, niché au rez-de-chaussée d'un immeuble de la
rue Saint-Antoine (Paris IVe), ait été, à 9.500 euros le mètre carré,
retiré de la vente, après maintes péripéties. Dans ce contexte difficile,
les rétractations deviennent monnaie courante: les acquéreurs signent
leur contrat sous la pression agressive des autres candidats à l'achat
puis réalisent qu'ils ont peut-être commis une grossière erreur. Et
renoncent.
Alors, que faire dans une situation aussi confuse ? Attendre un retour
au calme ? Acheter en se moquant des surenchérissements successifs ?
Une chose est sûre : "Aujourd'hui, les prix restent surévalués de 10 à
15%", affirme Olivier Eluère, économiste au Crédit agricole. En se
relevant si vite et en faisant fi de la situation économique et financière
globale, le secteur n'a pas suffisamment purgé ses excès. "Nous
n'avons pas retrouvé l'adéquation entre la solvabilité et les prix",
analyse Claude Sadoun. La baisse spectaculaire des taux ne compense
que très partiellement la hausse des prix, qui, rappelons-le, a atteint
130% en dix ans. Difficile donc, même pour les professionnels les plus
optimistes, d'imaginer une poursuite du mouvement. "Il n'existe
aucune raison pour une envolée rapide des prix", estime un expert.
Laquelle ne serait d'ailleurs guère souhaitable. "Cela bloquerait à coup
sûr le marché", assure Laurent Vimont, président de Century 21
France. "Et pour longtemps", ajoute Stéphane Atlan. A l'inverse, cette
"reprise en tôle ondulée" ou "en dents de scie", selon l'expression des
professionnels, exclut tout effondrement des prix. "Les scénarios de
baisse ou de hausse marquées semblent totalement improbables",
conclut Olivier Eluère.
Alors, s'il est évident que, pour les propriétaires, "c'est vraiment le
moment de vendre", selon Me Christian Lefebvre, président de la
chambre des notaires de Paris, le choix est plus discutable pour les
acheteurs. Quoique, à la rentrée, les plus déterminés pourront profiter
une dernière fois des conditions de prêt très avantageuses avant une
hausse prévisible en 2011, ou de la déduction des intérêts d'emprunt,
supprimée à la fin de l'année
Mais attention, la prudence reste de mise et la recherche de la bonne