L’Encéphale (2008) 34, 226—232
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/encep
MÉMOIRE ORIGINAL
Caractérisation des troubles du langage dans la
schizophrénie grâce au bilan orthophonique
Qualifying language disorders of schizophrenia
through the speech therapists’ assessment
C. Boucarda,b,, B. Laffy-Beaufilsa
aService de psychiatrie, hôpital Corentin-Celton, 4, parvis Corentin-Celton, 92130 Issy-les-Moulineaux, France
bSecteur GOS, service de psychiatrie générale, pavillion Pé, centre hospitalier Georges Daumezon,
1, route de Chanteau, 45400 Fleury-Les-Aubrais, France
Rec¸u le 27 avril 2006 ; accepté le 24 avril 2007
Disponible sur Internet le 5 novembre 2007
MOTS CLÉS
Orthophonie ;
Évaluation ;
Schizophrénie ;
Troubles du langage
Résumé L’orthophoniste participe depuis peu à la réhabilitation de patients atteints de schi-
zophrénie, conjointement aux prises en charge s’inscrivant dans un programme global de
réhabilitation psychosociale.
Elle tente de traiter spécifiquement les troubles du langage de ce syndrome, en se basant
sur l’hypothèse qu’ils sont une conséquence d’un fonctionnement cérébral anormal au même
titre que les troubles de mémoire, d’attention et des fonctions exécutives. De ce point de vue,
ces troubles semblent abordables par la rééducation de la même fac¸on que les troubles présen-
tés dans le cadre de lésions cérébrales acquises (traumatismes crâniens, accidents vasculaires
cérébraux).
La prise en charge orthophonique s’opère sur des patients stabilisés cliniquement et doit
débuter par un bilan, préalable nécessaire à la rééducation.
Dans un premier temps, nous ferons part de nos observations cliniques quant aux différents
troubles du langage dans la schizophrénie et tenterons d’envisager succinctement leurs méca-
nismes. Ensuite, nous tenterons de démontrer que le bilan orthophonique est nécessaire dans
un programme de réhabilitation psychosociale du patient atteint de schizophrénie pour plu-
sieurs raisons : il permet de constater le retentissement fonctionnel sur la communication des
troubles du langage, et donc d’estimer l’impact de ces troubles dans la vie quotidienne ; il per-
met ensuite d’établir un protocole de rééducation individualisé, inscrit dans le projet de soins
global du patient. L’intervention orthophonique permettrait de prendre en charge la sémiologie
Auteur correspondant. Secteur G05—service de psychiatrie générale, Pavillon Georges-Pé, centre hospitalier Georges-Daumezon,
1, route de Chanteau, 45400 Fleury-les-Aubrais, France.
Adresse e-mail : [email protected] (C. Boucard).
0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2007.
doi:10.1016/j.encep.2007.04.005
Caractérisation des troubles du langage dans la schizophrénie grâce au bilan orthophonique 227
langagière de la schizophrénie, par des techniques de prise en charge développées en réédu-
cation et réadaptation neurologique. Les troubles du langage, qui affectent la compréhension
et l’expression, sont un enjeu important pour l’insertion sociale du patient, mais également au
sein de la prise en charge, car ils peuvent entraver la bonne intégration d’informations, comme
nous le démontrerons.
Pour créer cette évaluation, nous nous sommes servis de bilans préexistants et couramment
utilisés en neurologie, que nous avons compilés suivant leur pertinence et leur efficacité diag-
nostiques. Ces épreuves, bien qu’elles ne soient pas encore normalisées permettent de définir
un projet de rééducation original et novateur des troubles du langage dans la schizophrénie
et constituent un premier pas dans la prise en charge de ce syndrome. Dans cette voie, de
nouvelles études actuellement menées sur des populations non psychiatriques aux troubles du
langage similaires, permettent d’élargir les possibilités d’évaluation des troubles du langage.
© L’Encéphale, Paris, 2007.
KEYWORDS
Speech therapy;
Assessment;
Schizophrenia;
Language disorders
Summary This study investigates a comprehensive assessment of language disorders in order
to identify impaired and unaffected language abilities of individuals with schizophrenia. Fur-
thermore, the purpose of this study was to demonstrate the importance of the role of speech
therapists in the treatment of schizophrenia.
Speech therapy is especially thought to treat language disorders. However, to date, speech
therapists have not been solicited in the treatment of schizophrenia, despite growing evidence
supporting that schizophrenia is characterized by cognitive disorders such as impairments in
memory, attention, executive functioning and language. In this article, we discuss the fact that
elements of language and cognition are interactively affected and that cognition influences
language. We then demonstrate that language impairments can be treated in the same way as
neurological language impairments (cerebrovascular disease, brain injury), in order to reduce
their functional outcome. Schizophrenia affects the pragmatic component of language with a
major negative outcome in daily living skills [Champagne M, Stip E, Joanette Y. Social cognition
deficit in schizophrenia: accounting for pragmatic deficits in communication abilities ? Curr
Psychiatry Rev:2006;(2):309—315].
The results of our comprehensive assessment also provide a basis for the design of a care
plan.
For this, subjects with schizophrenia were examined for language comprehension and lan-
guage production with a focus on pragmatic abilities. In neurology, standardized tests are
available that have been designed specifically to assess language functions. However, no such
tests are available in psychiatry, so we gathered assessments widely used in neurology and exa-
mined the more relevant skills. In this article, each test we chose is described and particular
attention is paid to the information they provided on impaired language abilities in schizo-
phrenia. In this manner, we provide an accurate characterization of schizophrenia-associated
language impairments and offer a solid foundation for rehabilitation.
Current research makes connections between schizophrenia and other neurological disorders
concerning language. Nevertheless, further studies are needed to explore these connections
to complete our investigations. The strategies we designed are aimed at enabling a sub-
ject with schizophrenia to improve his/her language skills. We support the idea that such
improvement could be reached by speech therapy. We conclude that speech therapists can
play an important role in the non pharmacological treatment of schizophrenia, by selec-
ting appropriate interventions that capitalize on spared abilities to compensate for impaired
abilities.
© L’Encéphale, Paris, 2007.
Introduction et présentation du service
Le présent article s’intéresse à la phase initiale de la prise en
charge orthophonique des patients atteints de schizophrénie
dans un hôpital de jour. Celui-ci est rattaché à un service de
psychiatrie de secteur et prend en charge une quarantaine
de patients.
Dans cette structure, l’orthophoniste participe à la
prise en charge de la schizophrénie. La rééducation
orthophonique s’inscrit dans des programmes de réhabi-
litation psychosociale et concerne des patients stabilisés
cliniquement.
Le bilan orthophonique, démarche initiale de la prise
en charge, fait partie d’une phase d’évaluation de trois
semaines environ, à l’arrivée du patient à l’hôpital de jour.
Durant cette période, le patient rencontre les différents
professionnels (psychiatre, psychologue, neuropsychologue,
infirmiers, orthophoniste).
228 C. Boucard, B. Laffy-Beaufils
La prise en charge sera ensuite globale et concernera les
aspects cliniques, neuropsychologiques et socioprofession-
nels de la maladie.
Les troubles cognitifs caractérisant la
schizophrénie
Les troubles cognitifs dans la schizophrénie découleraient
d’un fonctionnement anormal du cerveau, certainement
acquis au moment du développement cérébral pendant
la grossesse. Plusieurs hypothèses étiopathogéniques sont
avancées et semblent pouvoir coexister pour expliquer les
mécanismes d’une maladie qui est à présent reconnue
comme plurifactorielle [1,11].
Les symptômes cognitifs de la schizophrénie concernent
l’attention, la mémoire, les fonctions exécutives et le
langage. Ces troubles cognitifs ne sont pas spécifiques
à la schizophrénie, ils existent dans d’autres pathologies
(traumatismes crâniens, accidents vasculaires cérébraux,
démences). Ces troubles seraient la résultante d’un fonc-
tionnement cérébral anormal.
Ce fonctionnement n’est pas encore spécifié, malgré la
prévalence actuellement de plusieurs modèles étiopatho-
géniques (affection de l’hippocampe, des lobes frontaux,
temporaux, de certains neurotransmetteurs comme la séro-
tonine, la dopamine, le glutamate), mais il est probable qu’il
résulte d’une somme de facteurs prédisposants (comme
le postule le modèle vulnérabilité—stress) qui entraînent
une souffrance cérébrale précoce avec perturbation des
connexions neuronales. L’expression de ces perturbations ne
se fera pas dès l’enfance, elle sera latente, et se produira
à la fin de l’adolescence, à la fois période de remaniement
des connexions neuronales, et périodes où les facteurs stres-
sants environnementaux auront le plus de poids [11].
Ces troubles cognitifs affectent le fonctionnement quo-
tidien et engendrent une perte d’autonomie [2].
Les troubles du langage dans la schizophrénie :
description et hypothèses étiopathogéniques
Selon les profils cliniques, les déficits langagiers peuvent
se situer au niveau expressif ou réceptif et affectent dans
l’ensemble la pragmatique du discours [6]. Ainsi ce n’est pas
la compétence langagière qui fait défaut, mais le patient
atteint de schizophrénie fait un mauvais usage du langage
[10].
Les troubles expressifs tout d’abord, regroupés sous le
terme de «troubles formels de la pensée »par Andreasen,
sont selon cet auteur les manifestations langagières de la
désorganisation de la pensée, également appelée troubles
du cours de la pensée [3]. Ces troubles sont aisément per-
ceptibles, et entravent suivant leur sévérité, les capacités
communicationnelles du patient. Leur degré de gravité est
variable, allant de quelques incohérences dans le discours
jusqu’à des digressions dans la même phrase.
Les troubles réceptifs sont plus subtils, et parfois ils ne
sont objectivés qu’en situation de bilan. Pourtant, l’impact
de ces troubles n’est pas négligeable, car ils peuvent engen-
drer un handicap au niveau scolaire, professionnel, ou même
social. Au niveau d’un programme de soins également, ils
peuvent gêner l’intégration d’informations au sein des thé-
rapies. Ces troubles de compréhension n’affectent pas la
compétence de décodage du langage, mais les patients
seront en général gênés lorsque la compréhension du mes-
sage mobilise d’importantes ressources cognitives, comme
c’est le cas des messages longs et pouvant comporter des
inférences à résoudre.
Différentes modélisations globales du fonctionnement
cognitif sont proposées pour expliquer la symptomatologie
langagière de la schizophrénie [6,7,10]. Parmi ces modélisa-
tions, l’hypothèse d’un trouble de la théorie de l’esprit [10]
et l’hypothèse de troubles dysexécutifs [7] nous paraissent
pertinentes, même si le propos de cet article n’est pas de
déterminer l’étiologie des troubles du langage. Les troubles
du langage dans la schizophrénie pourraient en effet être la
conséquence à des degrés divers de ces troubles, et l’intérêt
de cette supposition réside dans le fait qu’elle nous four-
nit des pistes par rapport aux techniques de rééducation à
mettre en place. Pour rappel, la théorie de l’esprit peut être
définie comme l’aptitude à prédire ou expliquer le compor-
tement d’autres individus en leur attribuant des croyances,
des souhaits ou des intentions, c’est-à-dire en concevant
qu’ils aient des contenus mentaux différents [6].
Les processus exécutifs sont définis, quant à eux, comme
les processus cognitifs qui vont permettre au sujet de
s’adapter à une situation nouvelle, ou encore de permettre
le bon déroulement d’une action planifiée. On compte parmi
ces fonctions la planification, la flexibilité cognitive et
l’inhibition.
Voici une description globale et non exhaustive des
troubles du langage pouvant être rencontrés.
Expression
Au niveau expressif, les troubles du langage se résument à
un ajustement difficile aux impératifs de la communication.
Au niveau non verbal, cet ajustement difficile peut se
traduire par une pauvreté des mimiques, un trouble de la
prosodie et de la gestuelle accompagnant le discours.
Au niveau verbal on peut observer, par exemple, une
mauvaise utilisation de marqueurs linguistiques permettant
la cohésion de l’énoncé. On peut ainsi assister à une utili-
sation approximative de certains pronoms sans lien évident
avec un référent, ou à l’intrusion d’informations sans rap-
port avec le contenu de la conversation. Un défaut de
planification du discours peut également gêner la cohérence
du discours.
Pour expliquer cette symptomatologie expressive, nous
pouvons donc prendre en considération plusieurs hypo-
thèses, et tout d’abord nous référer au principe de la théorie
de l’esprit [6,10].
En situation de communication, la théorie de l’esprit per-
met au sujet d’émettre des hypothèses sur ce qui relève
du savoir partagé et d’adapter le discours au contexte
de communication. Un discours sous-tendu par un trouble
de la théorie de l’esprit ne tiendrait pas suffisamment
compte du savoir partagé sur le thème de la conversation,
le locuteur utilisant son propre «jargon », sans prendre la
peine d’expliciter des termes obscurs pour son interlocu-
teur, ou évoquant des faits dont son interlocuteur n’a aucune
connaissance.
Ces troubles expressifs pourraient également être sous-
tendus plus directement par des déficits exécutifs et
Caractérisation des troubles du langage dans la schizophrénie grâce au bilan orthophonique 229
des troubles attentionnels, notamment de l’inhibition. Les
troubles dysexécutifs pourraient expliquer le manque de
planification du discours qui revêt un aspect décousu,
manquant de cohésion et de cohérence, avec l’intrusion
d’informations non pertinentes.
Ces deux hypothèses ne sont pas antinomiques, car la
théorie de l’esprit requiert l’intégralité des fonctions cog-
nitives, notamment exécutives. La capacité à effectuer
ces inférences suppose, en effet, une certaine flexibi-
lité cognitive, une bonne capacité de la mémoire de
travail, une aptitude à inhiber des informations non per-
tinentes et des processus de raisonnement logicodéductifs
intacts.
Du point de vue de la sémiologie clinique, pour rejoindre
la classification des troubles du langage d’Andreasen, un
patient présentant des troubles sévères de l’expression ne
pourra pas, par exemple, répondre de fac¸on adaptée à
une question (tangentialité), ou ne pourra maintenir l’idée
qu’il voulait exprimer (relâchement des associations, perte
du but). Des informations sans lien avec la conversation
feront irruption du fait d’un manque d’inhibition (digres-
sions), ou alors son discours manquera d’informativité
[3].
Compréhension
Au niveau réceptif, la mobilisation des ressources cognitives
nécessaire à une compréhension élaborée est inefficace du
fait des troubles attentionnels, mnésiques et dysexécutifs.
D’après nos observations, la compétence de décodage litté-
ral (intégrer ce qui est explicitement dit) n’est pas affectée,
comme elle pourrait l’être après lésion cérébrale hémi-
sphérique gauche chez l’aphasique, et pourtant il existe
objectivement des troubles réceptifs, affectant la compré-
hension «élaborée ».
Par exemple, une mémoire à court terme insuffisante
gênera la compréhension d’un message long. Des proces-
sus logicodéductifs défaillants, un trouble de mémoire de
travail entraveront la résolution d’inférences, permises nor-
malement par le traitement des informations implicites
contenues au niveau linguistique, contextuel et proso-
dique. Les troubles dysexécutifs empêcheront la synthèse
de l’ensemble des informations permettant la compréhen-
sion d’une situation ou un récit dans sa globalité [12].
Enfin, les troubles attentionnels perturberont l’inhibition
d’informations non pertinentes contenues dans le message,
ou encore ayant lieu dans l’environnement (hallucinations,
pensées automatiques, bruit environnant, idée irrépressible
sur laquelle le patient va se concentrer).
Cliniquement, les patients présentant de tels troubles
auront des difficultés à comprendre le langage implicite, le
langage indirect ou figuratif, situations qui sont finalement
les plus fréquentes lors de la communication au quotidien
[6].
Définir l’orthophonie et sa place en
psychiatrie
L’orthophonie est la discipline paramédicale chargée de
prévenir, d’évaluer et de rééduquer, notamment chez
l’adulte, les troubles de la communication et du lan-
gage. Les domaines d’action les plus connus chez l’adulte
sont l’otorhinolaryngologie, la gériatrie et la neurologie.
L’intervention orthophonique à visée rééducative n’est pas
développée en psychiatrie. Ses prémices ont débuté, notam-
ment avec les études d’Andreasen qui s’est particulièrement
intéressée aux troubles du langage dans la schizophrénie.
L’évaluation et la prise en charge des troubles du langage
constituent un enjeu important pour le bon déroulement des
thérapies dispensées, notamment dans la réhabilitation psy-
chosociale et pour l’insertion scolaire, ou professionnelle ; il
est en effet facile d’imaginer les conséquences de troubles
du langage tels que nous les avons recensés précédemment.
L’évaluation, puis la rééducation nécessite une bonne
connaissance du langage et des différents processus patho-
logiques qui l’affectent afin de développer des exercices
de rééducation adaptés. L’orthophoniste est formé à ces
troubles, aux techniques d’évaluation et de rééduca-
tion. Ces troubles, similaires dans une certaine mesure
aux troubles observés dans les pathologies neurologiques,
peuvent être améliorés sur le principe de la plasticité et
des capacités de réorganisation cérébrale.
Le bilan orthophonique
Fonction du bilan orthophonique
Andreasen a établi l’échelle d’évaluation Thought and Lan-
guage Communication qui permet de lister les troubles de
l’expression à partir d’un entretien. Cette échelle, en 18
points, permet une description minutieuse des troubles,
mais le support utilisé pour coter (un entretien) ne consti-
tue pas un reflet des situations de communication de la
vie quotidienne, et peut paraître insuffisant pour mettre
en évidence tous les troubles du langage potentiels, car il
n’explore pas notamment les troubles de compréhension.
Un bilan doit explorer les différentes dimensions du langage,
afin de lister les déficits et d’estimer quel est l’impact fonc-
tionnel de ces troubles sur la communication. Il constitue
surtout une trame pour la rééducation en indiquant quelles
étapes il faudra suivre pour y remédier.
Le bilan orthophonique permet donc de caractériser les
troubles du langage, de comprendre leur fonctionnement
et d’envisager des stratégies de rééducation permettant au
patient de pallier ses difficultés.
Choix des épreuves
Les épreuves constituant le protocole de bilan orthopho-
nique ont été choisies parmi des batteries ou des tests
utilisés en neurologie et chez l’adolescent. Seules les
épreuves pertinentes pour l’examen du langage dans la schi-
zophrénie ont été retenues et seront développées dans cet
article.
Ces différents tests sont les suivants :
les batteries d’examen linguistique de l’aphasie
Montréal—Toulouse 86 et le Boston Diagnostic Aphasia
Examination ;
le test de langage élaboré Test of Language Competence,
Expanded Edition (TLC) ;
le test de gestion de l’implicite ;
l’épreuve de narration orale du Petit Chaperon Rouge ;
l’examen des fluences (normes de Cardébat).
230 C. Boucard, B. Laffy-Beaufils
Description, objectifs de chaque test, résultats observés
dans la schizophrénie. Les batteries d’examen linguistique
de l’aphasie Montréal—Toulouse 86 [18] et Boston Aphasia
Diagnostic Examination [16], normalisées chez l’adulte, per-
mettent l’évaluation des différents aspects du langage lors
de lésions de l’hémisphère dominant. Elles étudient la
compréhension du langage parlé, l’expression orale (à la
recherche de modification du volume verbal, d’une dyspro-
sodie, d’une désintégration phonétique, de troubles de la
dénomination, les troubles du maniement de la grammaire
et de la syntaxe) et le langage écrit (recherche d’une alexie,
d’une agraphie), qui sont autant de troubles que l’on peut
retrouver dans la sémiologie des aphasies.
Nous avons retenu parmi ces deux batteries l’interview
dirigée du MT 86, le récit en images du BDAE et les items de
compréhension orale et écrite du BDAE.
L’interview dirigée consiste en 12 questions demandant,
par exemple, pour le premier stimulus au patient de donner
son nom, ou pour le dernier stimulus de donner son avis sur
un phénomène de société.
L’épreuve de narration orale consiste à décrire oralement
une scène imagée.
L’interview dirigée et l’épreuve de narration orale
permettent une évaluation qualitative du discours dans
deux modalités. La première permet d’observer le dis-
cours conversationnel, avec notamment les capacités
d’ajustement du discours, l’informativité et d’éventuels
troubles formels de la pensée tels qu’ils ont été définis
par Andreasen [1] (par exemple, tangentialité, digressions).
La deuxième permet d’observer le discours narratif, par
exemple, comment le sujet va construire sa description de
l’image, en relatant la scène dans sa globalité, en un tout
cohérent, ou au contraire s’il va faire une description d’une
suite de détails sans «fil conducteur ».
L’épreuve de compréhension orale est cotée en 12 points,
avec quatre questions de logique posées à chaque fois de
deux fac¸ons différentes (un point si les deux réponses sont
correctes) et de quatre textes de longueur croissante avec
des questions de compréhension également posées de deux
fac¸ons.
L’épreuve de compréhension écrite est constituée de
dix textes de longueur croissante (avec deux exemples
non cotés) que le patient doit compléter en choisissant sa
réponse parmi quatre propositions.
Ces substests permettent d’appréhender la compréhen-
sion littérale du langage et de voir s’il existe un effet de
longueur ou de complexité (c’est-à-dire si le trouble de
compréhension est majoré par une surcharge au niveau des
ressources cognitives).
Le Test of Language Competence-Expanded Edition ou
(d’après l’édition de Elisabeth H. Wiig et Wayne Secord, tra-
duction franc¸aise) a été construit pour évaluer les retards
dans le développement des compétences linguistiques et
dans l’utilisation des stratégies sémantiques et pragma-
tiques chez l’enfant et l’adolescent (jusqu’à 18 ans 2 mois)
[4,14].
Ce test examine dans son ensemble les problèmes méta-
linguistiques et pragmatiques. Il se compose de quatre
sections.
Les phrases ambiguës. La première section «phrases
ambiguës »comporte 12 items (et deux items d’exemple
rajoutés dans la version franc¸aise). Chaque item représente
une phrase ambiguë dont le sujet doit reconnaître et don-
ner les deux sens. L’ambiguïté est soit lexicale (cinq items où
l’ambiguïté porte sur un mot qui a deux sens, par exemple,
«j’ai vu un avocat au marché »), soit structurelle (cinq
items où l’ambiguïté est due au fait que des mots adjacents
peuvent être regroupés de plusieurs fac¸ons et ainsi donner
un sens différent à la phrase, ou que plus d’une relation
logique existe entre les mots (par exemple, «Nicolas dit à
Julie qu’il a perdu son classeur »).
La compréhension auditive, déductions. La deuxième
section «compréhension auditive, déductions »comporte
11 items constitués de deux phrases qui décrivent un
script (un enchaînement d’événements) qui ont un rapport
causal que le sujet doit retrouver seul dans un premier
temps, puis parmi quatre réponses donner les deux plus
probables.
L’expression orale, création de phrases. La troisième
section «expression orale, création de phrases »comporte
13 items (et deux items d’exemple non cotés) où le sujet
doit, à partir d’une image illustrant une situation donnée,
construire avec trois mots une phrase syntaxiquement et
pragmatiquement correcte.
Le langage figuratif. La quatrième section «langage
figuratif »comporte dix items (et un item d’exemple) divisé
en deux parties : un court texte dans lequel une personne
emploie une expression figurée que le sujet doit inter-
préter, et un choix multiple de quatre expressions parmi
lesquelles le sujet devra retrouver une expression syno-
nyme. Les quatre propositions sont construites de fac¸on
identique : une phrase de sens contraire, une phrase expri-
mant le sens littéral de l’expression cible, et une phrase
sans rapport mais dans laquelle on retrouve des mots de la
phrase cible.
Le test de gestion de l’implicite. Le test de gestion de
l’implicite [9] permet d’examiner la compréhension «fine »
du langage.Vingt situations sont proposées au sujet qui doit
répondre à chaque fois à trois questions (oui, non, je ne peux
pas répondre).
Cinq types de questions sont ainsi proposés : 18 ques-
tions pragmatiques qui examinent la compréhension de
l’implicite, et des questions complémentaires permettant
d’analyser plus finement les déficits du patient : 11 questions
explicites qui examineront la compréhension littérale, 12
questions logiques, 13 questions «distracteur »et six ques-
tions nécessitant un traitement complexe.
Le récit du conte du Petit Chaperon Rouge. Le récit
du conte du Petit Chaperon Rouge [13] a été proposé par
Lhermitte pour examiner les capacités d’organisation et de
planification du discours. Cette histoire est en effet struc-
turée en une série de séquences et permet donc d’observer
une réduction du nombre de séquences, ou une modifica-
tion de l’ordre de ces séquences. Elle examine donc la
cohérence du discours et également la cohésion (marqueurs
syntaxiques), dimensions qui peuvent être perturbées dans
la schizophrénie.
L’épreuve des fluences. L’épreuve des fluences [5,15]
consiste à demander au patient de produire le plus de mots
possibles en 2 min selon un critère catégoriel (animaux,
fruits et meubles) ou un critère littéral (p, r et v) et ainsi
examiner une éventuelle réduction de la fluidité verbale
(critère quantitatif), mais également les stratégies adoptées
pour récupérer en mémoire ces mots (critère qualitatif).
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