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Introduction
La crise que nous traversons est un évènement d’une rare gravité, qualifiée de systémique
compte tenu de la diversité de ses manifestations et de l’ampleur de ses conséquences.
Les grandes banques qui incarnaient le succès des principales places financières ont été
confrontées à des difficultés inédites, ayant mené certaines d’entre elles à la faillite. Les
gouvernements et les banques centrales sont intervenus massivement pour restaurer la stabilité
financière et soutenir le financement de l’économie. Malgré la réactivité des pouvoir publics,
le monde a été plongé dans une récession violente, particulièrement sévère dans les
économies développées.
Sous l’impulsion du G20, des chantiers ambitieux de régulation financière ont été lancés afin
de tirer les enseignements de cette crise.
Le Ministre m’a confié une mission sur le risque systémique afin notamment d’examiner
l’idée d’une taxation internationale du secteur financier. Loin d’épuiser le débat engagé sur ce
sujet, ce rapport a pour objectif de nourrir les travaux internationaux en cours.
La première partie du rapport est consacrée à l’analyse du risque systémique. Il semble en
effet indispensable de poser en des termes communs la problématique complexe du risque
systémique, avant d’envisager des réponses de politique publique.
Le risque systémique est un risque de dégradation brutale de la stabilité financière, provoqué
par une rupture dans le fonctionnement des services financiers et répercuté sur l’économie
réelle. On peut identifier les institutions financières susceptibles d’être mises en difficulté par
une crise systémique et de propager ces difficultés vers d’autres acteurs. Mais pour identifier
l’origine du risque systémique, il faut analyser, activité par activité, les différents mécanismes
d’incitation, notamment financières, qui peuvent conduire les acteurs à accumuler de façon
rationnelle, en dehors de toute erreur de gestion, des risques imparfaitement mesurés par la
régulation financière classique. Autrement dit, le risque systémique ne se réduit pas à la
somme des risques individuels pris par les acteurs financiers : dans certaines activités,
notamment les activités de marché au sens large et certaines activités de gestion d’actifs, les
risques pris sont supérieurs aux risques que mesurent les régulateurs micro-prudentiels.
A la demande du ministre, le rapport aborde également le rôle de la concurrence dans la
dynamique du risque systémique. En l’absence de données empiriques et de travaux
académiques récents sur ce sujet, il n’a pas été possible de réaliser dans le cadre de cette
mission un diagnostic approfondi de la concurrence dans le secteur financier. Mais l’analyse
des caractéristiques de certaines activités financières, notamment les activités de marché, met
en évidence une tendance structurelle à la concentration. Les liens entre concurrence et
stabilité financière ne sont toutefois pas univoques : l’existence d’un grand nombre d’acteurs
ne protège pas nécessairement du risque systémique et les marges dégagées sur certaines
activités peuvent a contrario constituer des coussins d’absorption des chocs. Les situations de