52 SCIENCE EXPÉRIMENTALE ET CONNAISSANCE DU VIVANT
considéré comme le premier naturaliste. On lui doit aussi les règles fondamentales
de la logique. Une conception rationalisée de la médecine, connue en tant que
conception hippocratique, représente une autre façon d’appréhender les lois du
monde vivant. A la différence des pratiques médicales des siècles précédents, la
médecine hippocratique, fondée sur l’observation des symptômes chez le patient
et sur leur évolution, se veut dépouillée de tout recours à la magie.
Ignorant tout des lois de la physique et de la chimie, les philosophes grecs des VIe
et Vesiècles avant J.C. avaient osé formuler un ensemble de propositions dont la
logique apparente, en dehors de toute causalité surnaturelle leur semblait apte à
expliquer les phénomènes de la Nature. Ils ne passèrent cependant pas de la
théorie spéculative et du monde des idées à la vérification expérimentale. Ceci
s’explique en partie par une prévention marquée de la pratique manuelle consi-
dérée comme servile et aussi par la crainte d’artefacts liés à l’expérimentation qui
inévitablement modifient l’ordre imposé par la Nature. PLATON et ARISTOTE sont
deux des philosophes et savants de l’Antiquité grecque qui marquèrent pendant
des siècles, d’un sceau indélébile, la pensée occidentale, PLATON recherchant la
réalité derrière les apparences, ARISTOTE prônant l’empirisme et l’observation.
L'école grecque d'Alexandrie marque l'apogée de la culture et de la science du
monde antique. A Alexandrie, d’une façon originale et sans précédent dans l’his-
toire, un Etat s’impliquait dans une politique volontariste et éclairée pour soutenir
des talents issus de différents horizons, les rassemblant dans un même lieu et leur
créant des conditions appropriées pour l’efficacité de leur travail. Du IIIesiècle
avant J.C. jusqu’aux premiers siècles de l’ère chrétienne, Alexandrie produisit des
géographes, des astronomes, des géomètres, des médecins, des anatomistes. Au
début de l'ère chrétienne, GALIEN, malgré des erreurs parfois grossières, donna
à l'anatomie et à la physiologie un élan tel que la doctrine galénique put franchir
pratiquement sans obstacle majeur tout le cours du Moyen Âge. C’est là, l’un
des premiers exemples où concepts abstraits et culture technique se marièrent
et créèrent des conditions pour l’émergence d’une science expérimentale. Des
guerres, des invasions, des vicissitudes d’ordre politique et confessionnel, le
désintéressement progressif vis-à-vis de la science pure de la part des pouvoirs
qui se succédèrent, contribuèrent à étouffer un élan scientifique qui s’annonçait
prometteur.
Les Arabes héritèrent de la culture grecque. Ils la propagèrent. Ils traduisirent
un grand nombre d'ouvrages grecs et y apportèrent des commentaires judicieux.
Dès le XIIesiècle, ces textes traduits de l'arabe en latin pénètrent en France et se
répandent en Europe occidentale. Les propositions philosophiques et scientifiques
qui y sont contenues, tout particulièrement la pensée aristotélicienne, servent à
édifier la scolastique médiévale. Le Moyen Âge est cette période de l’histoire de
l’Occident chrétien où l’on assiste à un long mûrissement, à travers des siècles,
d’une pensée apparemment endormie, sans qu’une contestation intellectuelle
puisse se donner libre cours. Le savoir de cette époque qui était initialement centré