Lecture du social – Fiche de lecture n°2 La soumission librement consentie Comment amener les gens à faire librement ce qu’ils doivent faire. De Robert-Vincent JOULE et Jean Léon BEAUVOIS 1 – Eléments de catalogage L’ouvrage étudié pour la réalisation de cette deuxième fiche de lecture s’intitule : « La soumission librement consentie, comment amener les gens à faire librement ce qu’ils doivent faire ». Il a été écrit par Robert-Vincent JOULE et Jean Léon BEAUVOIS et est paru aux éditions Presses Universitaires de France. Cette édition est la 6ème et date de décembre 2009. 2 – Présentations synthétique de l’œuvre 2-1 Introduction Robert-Vincent JOULE et Jean-Léon BEAUVOIS sont chercheurs en psychologie sociale et professeurs des Universités, le premier à Aix-en-Provence, le second à Nice. Ils publient régulièrement les résultats de leurs travaux dans des revues nationales et internationales. Ils ont rédigé ensemble : • Soumission et idéologies (1981), • A radical dissonance theory (1996), • la Soumission librement consentie (1998) • et surtout le petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens (2002), best-seller vendu en France à plus de 250000 exemplaires. Leurs productions scientifiques les placent parmi les personnalités les plus actives de la psychologie sociale française. 2-2 Développement L’ouvrage est constitué en 8 chapitres, eux même composés de sous chapitres et d’intertitres. Avant d'entrer dans la structure de l'ouvrage, vous devez faire ressortir son objectif principal. Ici, il s'agit de présenter la théorie de l'engagement et ses applications pratiques. La psychologie de l'engagement repose sur une inversion des liens traditionnels entre les pensées et les actes : ces stratégies n'ont pas pour objectif d'influer sur les idées des participants mais de « créer des conditions dans lesquelles de nouveaux comportements pourraient apparaître [...], comportements susceptibles d'en appeler d'autres correspondant aux objectifs de l'intervention. » P. 28 Dans le premier chapitre intitulé : trouver un emploi, les auteurs s’appuient sur deux expériences, l’une menée dans le cadre d’une formation pour la réinsertion de chômeurs de longue durée et l’autre dans le cadre d’une formation qualifiante pour des jeunes de plus de 16 ans en échec scolaire. Au travers de ces deux exemples, les auteurs nous expliquent comment en modifiant l’énoncé d’une règle ou le mode de rapport aux stagiaires, et ce sans toucher au contenu entre le groupe de contrôle et le groupe expérimental, les effets sont probants tant sur la motivation, que sur les résultats de réussite. Il est précisé page 17 : « Quand une personne est déclarée libre de faire ou de ne pas faire quelque chose, et qu’elle le fait, elle va se reconnaitre dans cet acte et en assumer la signification ». Ils ajoutent page 26 : « Ce principe qui consiste à rapprocher le plus possible la personne des comportements qui ont pu être les siens fonde les bases d’une pédagogie de l’engagement ». Dans le second chapitre : les procédures de soumission librement consentie, les auteurs développent trois principales procédures de soumission librement consentie qui permettent de peser efficacement sur les comportements et les attitudes des gens. Il est écrit page 29 que ces procédures sont : «… susceptibles de conduire les gens à faire de leur plein gré ce qu’on attend d’eux ». Pour décrire le principe de manipulation et d’automanipulation, les auteurs s’appuient sur un concept de Kurt LEWIN ; l’effet de gel. Ils citent deux expériences, l’une menée auprès de ménagères américaines et l’autre qui étudie la réaction d’une personne face au vol d’un objet qui lui a été confié avec son accord durant l’absence de son propriétaire. Au travers de ces expériences les auteurs mettent en avant le lien entre une décision énoncée préalablement à la réalisation de l’acte par l’individu et la réalisation effective de l’acte en lui-même. Ils indiquent page 31 : « La décision relie la motivation à l’action et semble avoir dans le même temps un «effet de gel » qui est dû en partie à la tendance de l’individu à « adhérer à sa décision » et en partie à son « engagement vis-à-vis de groupe ». Puis ils parlent du second principe : « l’amorçage » qu’ils définissent comme le fait de faire prendre à quelqu’un une décision sur une mauvaise information soit on ne disant pas toute la vérité soit en mentant. Une fois la décision prise le principe la vérité est rétablie toute en demandant à la personne si elle maintient son choix. Au travers de deux exemples ils décrivent comment cette technique d’engagement amène un nombre important de personne à maintenir leur choix énoncé malgré le fait de savoir que la tache énoncée est tronquée voire même fausse. Enfin il est évoqué le principe du pied dans la porte qui est défini page 41 comme : « demander peu pour obtenir beaucoup ». Au travers d’un exemple les auteurs nous expliquent que cette technique consiste à entrer en contact avec les personnes avec une première demande peu engageante pour ensuite établir un lien pour demander et obtenir ce qui est recherché. Il est écrit page 43 : « Dans les recherches qui viennent d’être évoquées, on constate qu’un premier comportement peu couteux …. Prédispose la personne, adulte ou enfant, à accepter un nouveau comportement plus couteux ». L’effet de cette technique est d’obtenir ce qui était recherché sans que la personne n’ait le sentiment d’avoir été forcée. Nous pouvons lire page 50 : « …C’est la raison pour laquelle nous parlons de « soumission librement consentie », soumission dans la mesure où le comportement réalisé est bien celui que l’intervenant attendait, librement consentie dans la mesure où les gens n’ont subi aucune pression et qu’ils ont, à juste titre, le sentiment d’avoir agi de leur plein gré ». Le chapitre 3 intitulé : la psychologie de l’engagement, commence par une définition commune pour définir au sens large l’engagement. Page 52 il est écrit : « être engagé ne signifiant pas autre chose qu’être impliqué » et page 55 : « l’engagement est le lien qui unit l’individu et ses actes comportementaux ». Puis il est distingué deux type d’engagement, celui qui est provoqué par des éléments propre à la personne ; qu’ils nomment l’engagement interne, et celui qui est provoqué par un élément ou une personne extérieur à la personne ; ils parlent alors de l’engagement externe. Les auteurs indiquent page 54 : « Tantôt l’individu s’engage en fonction de ses convictions dans des actes importants du point de vue de ses convictions, tantôt la situation engage la personne dans des actes dont l’importance peut être appréhendée en adoptant le point de vue d’un observateur ». Puis ils mettent l’accent sur l’engagement externe, qui les intéresse plus particulièrement. Ils en donnent ainsi une définition plus précise page 60 : « l’engagement correspond aux conditions de réalisation d’un acte qui, dans une situation donnée, permettent à un attributeur [défini par l’auteur comme acteur et/ou observateur] d’opposer cet acte à l’individu qui l’a réalisé ». En se référant à plusieurs expériences, les auteurs mettent l’accent sur des variables de l’engagement comme la visibilité de l’acte et l’importance de l’acte. Page 64 il est écrit : « un acte est d’autant plus engageant qu’il est socialement visible ». Concernant la variable de la visibilité de l’acte, ils insistent sur l’importance du caractère public, clair, définitif et répétitif de l’acte. A ce sujet, page 64 il est développé : « le caractère public (par opposition à anonyme), le caractère explicite (par opposition à ambiguë), l’irrévocabilité et la répétition de l’acte ». Sur l’importance de l’acte, ils précisent également l’importance des conséquences de l’acte et le coût de l’acte comme facteurs du degré de l’engagement. Il est précisé page 68 : « Il en ressort que l’engagement augmente avec le coût de l’acte ». Puis les auteurs décrivent les raisons qui peuvent amener une personne à commettre un acte et s’engager. Des raisons d’ordre externes, comme par exemple les récompenses et les punitions, dont il est dit, page 69 : « … plus elles sont importantes, plus elles désengagent ». A contrario, les raisons d’ordre interne et réalisé dans un contexte de liberté, engagent la personne. Dans la seconde partie de ce chapitre il est décrit les effets de l’engagement, en portant l’attention sur les effets dans les actes non problématiques, définis page 73 comme des actes qui: « ne vont pas à l’encontre d’aucune de vos attitudes ou motivations » et dans les actes problématiques, définis sur cette même page comme des actes: «qui vont à l’encontre de vos convictions ou vos motivations ». Pour les effets de l’engagement concernant des actes problématiques les auteurs, en s’appuyant sur des expériences fort intéressantes, nous expliquent comment sur la base de situations qui sont en lien avec nos idées il est assez courant d’obtenir l’engagement d’une personne. Il est indiqué page 80 : « …il est finalement aisé de créer des circonstances qui engagent les gens dans les actes conformes à leurs convictions, c’est-à-dire dans des actes non problématiques ». Pour les effets de l’engagement dans un acte problématique ils expliquent, sur la base d’expériences menées, que dans certaines conditions il est possible d’obtenir l’engagement d’une personne avec une condition nécessaire voire primordiale ; qu’il ait été laissé à la personne la liberté de faire ou de ne pas faire. Page 83, il est écrit : « Pour peu que son acceptation ait été obtenue dans un contexte de liberté - d’engagement donc – il en vient à trouver son labeur intéressant». Dans cette même idée les auteurs parlent page 85 du processus de rationalisation : « comme d’un processus par lequel une personne ajuste à postériori ce qu’elle pense (ses attitudes) ou ce qu’elle ressent (ses motivations) ». Enfin dans le derniere partie ; indentification de l’action et engagement, il est mis en avant l’importance que l’acte, sur lequel il est demandé à une personne de s’engager, soit bien identifiable au sens qu’il soit bien inscrit dans une réalité. Il est écrit page 93 : « … les gens préfèrent identifier leurs actes à des niveaux élevés, à des niveaux donc n’allant pas sans incertitude ». Identification : processus qui consiste pour un individu à décider à quelle catégorie d'actes il va rattacher un acte particulier. Coller des affiches contre la pollution atmosphérique peut se rattacher à un positionnement écologiste, à un acte militant plus général ou bien à un service rendu à quelqu'un qui nous l'a demandé. Cf. p. 91 Dans le quatrième chapitre intitulé ; Economie d’Energie, les auteurs s’appuient sur une recherche action menée dans un hôpital avec pour but de réduire l’économie d’énergie. Sur la bases de procédures propre à la théorie de l’engagement, telles que définies dans le chapitre 2, ils nous expliquent, au travers des étapes de l’expérience, comment il est possible de faire changer le comportement et l’attitude de professionnels hospitalier concernant la consommation d’énergie. Page 108 il est précisé : « Les techniques utilisée (pied dans la porte, amorçage, engrenage) se sont montrés particulièrement efficaces puisque la quasitotalité des personnes sollicitées a participé à l’intervention jusqu’à son terme et a réalisé les comportements économes attendus en dépit de leur coût ». Le cinquième chapitre, Lutter contre les accidents du travail, les auteurs s’appuient sur deux actions recherches menées sur la sécurité au travail afin d’amener les personnes à utiliser plus souvent les objets mis à leur disposition pour leur sécurité au travail. Page 112 il est indiqué : « rechercher les actes préparatoires les plus à même de les prédisposer à librement consentir à cet usage ». Comme dans le chapitre précèdent les résultats de ces expériences sont concluants. A ce sujet il est indiqué page 115-116: « En somme, sans avoir eu recours à la moindre pression hiérarchique, sans avoir davantage eu recours aux voies traditionnelles de l’argumentation et de la persuasion, nous sommes quasiment parvenus à multiplier par deux la probabilité de voir un ouvrier à son poste de travail, un jour J à une heure H, un casque de protection sur les oreilles ». D’autre part il est mis en avant la force des procédures d’engagement, comme par exemple le principes du pied dans la porte avec des premières questions/demandes peu couteuses. Il est précisé page 121 : « ces résultats sont d’autant plus remarquables qu’il n’a jamais été demandé aux monteurs de mieux respecter les règles de sécurité. On s’est limité à les faire discourir, dans un contexte d’engagement, sur la manière dont s’appliqueraient à leur activité de monteurs les règles générales de la charte ». Dans le chapitre 6 ; combattre le Sida, les auteurs nous décrivent, au travers de deux actions recherches menées auprès de lycéens et étudiants, comment les procédures de la théorie de l’engagement se sont confrontés à l’objectif de modifier le comportement et l’attitude des lycéens et étudiants dans l’utilisation du préservatif et le dépistage. Le postulat de départ des psychosociologues engagés dans l’action est de dire que la prévention est intéressante mais insuffisante pour avoir un effet sur le comportement et l’attitude des personnes. Il est écrit page 125 : « Elle (la prévention) est insuffisante parce que le lien entre attitude et comportement n’est malheureusement pas aussi direct que l’on a coutume de le croire… surtout lorsqu’il s’agit de toucher un comportement précis comme utiliser un préservatif lors d’une prochaine rencontre ». L’action recherche sur l’utilisation du préservatif met en lumière que les procédures de l’engagement ont eu un effet sur le comportement mais également sur l’attitude des lycéens concernant l’utilisation du préservatif. Les auteurs écrivent page 140 : « Il fut ainsi observé que seuls les lycéens soumis à la stratégie d’engagement étaient, après la campagne, plus nombreux à être en mesure de montrer à l’enquêteur un préservatif qu’il avait par-devers eux (13% avant la campagne, 20% après) ». Dans la seconde recherche action qui consistait à amener l’étudiant à accepter de réaliser un dépistage volontaire, les procédures de l’engagement ont été mises à rudes épreuves, avec de nombreux échecs. De nombreuses tentatives ont montré sur cette question du dépistage tout l’écart entre l’intention déclaré et le comportement effectif. Page 146 il est écrit : « Nous attendions, en revanche, une liaison plus étroite entre intention (décision de se faire dépister) et comportement effectif ». Après de multiples expériences sans résultats probants, une nouvelle procédure est expérimentée en introduisant une personne extérieur avec pour fonction de s’opposer fortement à la position dominante. Il est indiqué page 151 : « Il s’agissait, en somme, de faire de ce compère une « brebis galeuse » dont le rejet constituerait le ciment d’une cohésion de groupe valorisante ». Avec cette nouvelle procédure de la théorie de l’engagement les résultats de la recherche action sont beaucoup plus satisfaisants. Page 153 il est écrit : « Il nous semblait important de montrer, chiffres à l’appui, qu’on pouvait légitimement prétendre toucher des comportements aussi sensibles que les comportements de dépistage volontaire par des stratégies relevant de la psychologie de l’engagement ». Dans le chapitre 7, La théorie de l’engagement : champs d’application, principes et règles, l’auteur nous énonce les principes et règles importants inhérents à la théorie de l’engagement selon que l’objectif est d’engager ou de désengager. Dans le cas d’une action recherche à but d’engager le ou les personnes ciblées, l’agent social (au sens de celui qui mène l’expérience) va rechercher à influer le comportement des uns ou des autres sans les forcer. Il est précisé page 155 : « comment amener autrui à faire librement ce qu’il doit faire ». Pour ce faire les procédures de la théorie de l’engagement s’appuie sur les éléments propre à la personne (ou éléments internes). Page 157 il est écrit : « On sait qu’un bon acte préparatoire ne doit pas s’accompagner de justifications extérieurs ». Puis les auteurs nous décrivent les cinq principes d’action importants à la disposition de l’agent social engagé dans une action recherche dont le but est d’engager. Ils indiquent page 165 : … et dont notre expérience d’intervenant nous a montré tout l’intérêt » : • Le principe de naturalisation, consiste à rapprocher l’acte réalisé de la nature même de la personne, • Le principe de dénaturalisation, résulte du fait de dissocier l’acte réalisé, mais non souhaité, de la nature de la personne, • Le principe des attentes confirmées, vise à s’assurer que tout a été fait et que tout est prêt pour que la personne prenne la décision et surtout celle attendue. • Le principe du renforcement du surcroit, consiste à récompenser ou punir, tout en étant vigilant à ce que ce principe ne vienne désengager la personne. • Le principe de la juste identification de l’action, consiste à bien identifier le lien entre l’acte et la personne dont il l’a obtenu. Puis ils traitent du cas des actions recherches menées par un agent social dans le but de désengager la personne. Il est entendu par désengagement l’action d’amener la personne à se sortir d’un acte dans lequel elle n’arrive pas à se défaire et qui provoque des effets négatifs pour la personne elle-même et les autres autour d’elle. Page 166 il est écrit: « si vous vous êtes laissé entrainer dans une escalade d’engagement ou si un piège abscons vient soudain de se refermer sur vous… ». Il est précisé quelques règles en lien avec cette démarche en page 166 et167: • « Se donner a priori des critères clairs permettant de savoir si la décision que l’on est sur le point de prendre aura bien les effets escomptés • Se donner, sur des critères et toujours a priori, des objectifs quantifiables et temporels, • Décider, encore a priori, de l’écart par rapport aux objectifs au dela duquel on renoncera à la décision, • Le jour J, évaluer les effets de la décision et en tirer, sans plus attendre, les conséquences. Dans le 8ème et dernier chapitre ; une conception de la psychologie sociale appliquée, les auteurs opposent deux types de psychologie sociale, l’une scientifique et l’autre pas. Ils définissent le premier type de psychologie sociale, non scientifique, comme une approche essentiellement, voire exclusivement rattachée aux savoirs communs. Il est dit page 177 : « En fait, tout se passe comme si, un problème étant posé, le psychologue social appliqué mobilisait un savoir dont la fonction essentielle n’est pas de permettre la connaissance mais de fournir des suggestions utiles pour l’action et socialement acceptables ». Puis ils précisent que ce type de psychologie sociale axe son action sur une recherche de solutions à un problème, solutions souvent prédéfinies par la logique conceptuelle. Page 179 il est indique : « Il n’est pas déterministe mais causaliste, ces explications n’étant guère que des justifications de solutions préprogrammées ». Puis les auteurs traitent du second type de psychologie sociale, scientifique, qui selon lui se réfère sur un savoir qui se construit et se valide selon des règles particulières, en s’appuyant sur les éléments internes au problème posé. Les auteurs écrivent page 179 : « Il veut simplement mettre ce savoir au service de la réalisation d’objectifs sociaux » et page 180 : « Plutôt que de rechercher des causes, il s’attache à isoler des facteurs qui en déterminent le cours ». Dans le but de donner des éléments de différenciation entre ce type de psychologie sociale et la première, page 182 à 184, les auteurs mettent en avant les atouts spécifiques et notamment la rigueur des outils de l’action recherche en amont avec des grilles de lecture, durant la recherche avec les outils d’analyse et les clés pour la programmation et en aval avec l’évaluation. Ils précisent l’importance dans ce type de psychologie sociale de l’évaluation par les pairs. Il est écrit page 183 : « tout l’intérêt qu’il y avait à faire évaluer les effets d’une décision par une instance différente de celle qui l’a prise, la décision pouvant, plus souvent qu’on ne le pense, fonctionner comme un véritable piège et conduire le décideur à persévérer dans un cours d’action dysfonctionnel ». Ils font également état de l’importance de l’administration de la preuve dans ce type de psychologie sociale dans le sens ou l’agent social qui mène l’action recherche devra comparer les résultats entre deux groupes. Page 184 il est précisé : « …il se livrera à des comparaisons entre des groupes dans lesquels ont été mises en place les procédures testées (groupes expérimentaux) et des groupes des groupes dans lesquels d’autres procédures ont été mises en place (autres groupes expérimentaux) ou encore des groupes dans lesquels aucune procédure n’é été mise en œuvre (groupe contrôles) ». 2-3 Conclusion Dans cet ouvrage les deux auteurs, Robert Vincent JOULE et Jean Léon BEAUVOIS, familiarisent le lecteur avec la théorie de l’engagement en mettant l’accent sur : • les principales procédures, les principes, les règles, les outils et les champs d’application (voir chapitre 2-7), • la définition et le sens de cette théorie (voir chapitre 3-8) • de nombreuses expériences qui attestent des effets positifs et concluants de cette théorie sur des divers problèmes et sujets sociaux (voir chapitre 1-.4-5-6) Dans la conclusion de cet ouvrage il est fait état de la question de l’éthique et de la déontologie concernant la théorie de l’engagement. Les auteurs s’appuient sur les discours critiques sur cette approche, et surtout son côté manipulateur et trompeur, pour par la suite mieux ré affirmer tout le sens et l’intérêt de cette théorie, de ses outils, de ses règles… . Il est écrit page 208 : «…quand une théorie scientifique est disponible, et qu’on pourrait donc l’utiliser pour éviter des atteintes à l’intégrité des gens, tant physique (accidents, maladies, …) que psychologiques (conséquences du chômage, d’une infection par le VIH…) est-il moral de refuser l’usage de cette théorie sous prétexte qu’elle véhicule une autre image de l’homme que celle qui nous est la plus chère ? » 3 – Mes observations personnelles. Ce livre a été une découverte et une surprise. Je dis surprise mais en fait je ne savais presque pas à quoi m’attendre. Le titre m’a questionné et intéressé et cela avait à l’époque de me choix de lecture, à voir avec mes préoccupations de terrain. A savoir mon management. Donc je me suis dit pourquoi ne pas aller y voir du côté de la psychologie sociale et d’un titre, trouvé dans la bibliographie qui a attiré ma curiosité. A la lecture du titre j’ai été partagé entre le sentiment de m’engager dans une lecture ennuyante avec un côté rigide dans la rigueur de la théorie et très éloigné de ma pratique ou m’engager dans une lecture différente, qui éveillerait ma culture et mes connaissances en management. Mon deuxième sentiment s’est donc confirmé au fil de la lecture. Pour autant je ne pense pas qu’il me sera possible de mettre en pratique dans mon quotidien professionnel les principes de la théorie de l’engagement même si je pense que dans certaines situations, que je ne visualise pas pour le moment, elle pourrait avoir des effets positifs. Les nombreux exemples dont les auteurs font état vont dans le sens de l’utilité de cette théorie si elle est bien maitrisée. En lien avec ma pratique et mes préoccupations du moment, je retiendrais tout particulièrement cette phrase page 168 : « Le bon manager est celui qui a su inscrire dans la culture de son entreprise le droit à l’erreur, mais c’est aussi celui qui ne tolère pas que l’on reste sur des décisions qui, pour avoir été bonnes hier, ne le sont plus aujourd’hui et à fortiori sur des décisions qui ne l’ont jamais été. » 4 – Un espace d’indexation Psychologie – action recherche – sida – comportement - l’amorçage - agent social – manipulation – technique de communication – pied dans la porte – leurre – théorie de l’engagement – l’effet de gel – transparence – Changement – liberté. Observations Analyse pertinente de l'ouvrage. Sur la forme, c'est mieux ! Plus synthétique, moins collé au texte. Sur le fond, on peut comprendre votre surprise puisque cet ouvrage joue sur un paradoxe en associant soumission et liberté. Je me suis posé une question : l'analyse des auteurs fait-elle place à toutes les formes de soumission librement consentie ? Non ! Quelqu'un qui pratique le yoga chaque matin se soumet librement à une discipline, à des positions contraignantes mais ce n'est pas ce type de dialogue exclusivement individuel entre la liberté et la contrainte qui est mis en valeur ici. Il s'agit plutôt des fins qu'un groupe considère à un moment donné, dans une situation donnée, comme bénéfiques pour certains de ses membres (trouver un emploi, combattre le sida...) et des stratégies mises en oeuvre pour atteindre ces objectifs. Si les fins sont considérées comme bonnes alors l'action qui les soutient doit être efficace . C'est ce qui ressort du postulat posé par les auteurs. Ils nous proposent donc une morale de l'efficacité Mais, à mon sens, cela n'épuise pas la question de la légitimité des fins. Pour convaincre un groupe de se prêter au dépistage volontaire du sida, les auteurs introduisent un compère qui refuse de se faire dépister. Ils écrivent : « Il s'agissait en somme, de faire de ce compère une « brebis galeuse » dont le rejet constituerait le ciment d'une cohésion de groupe valorisante. Le plus simple était encore de demander au compère contre normatif de se comporter de manière à faire l'unanimité contre lui ». P. 151-152. Ici, l'objectif est louable et l'on n' y trouve rien à redire. Mais prenons un peu de distance : s'y prend-on autrement, en temps de guerre, pour stigmatiser un ennemi ? Ce qui se joue aussi, je crois, c'est l'intégration de l'individu dans le groupe, à travers l'adhésion à un pacte public, coûteux, irrévocable dont la personne n'aurait pas eu elle-même l'idée. Quels sont les rapports entre contrainte et liberté ?S'investir dans la contrainte est aussi une manière de se l'approprier, de poser sa propre empreinte sur le cadre et donc, peut-être, d’affirmer sa liberté...