LA RESPONSABILITE CONTRACTUELLE Sont successivement envisagés les conditions de la responsabilité contractuelle (section 1), sa mise en œuvre ( section 2) et les aménagements conventionnels qui peuvent lui être apportés (section 3) SECTION 1 CONDITIONS La trilogie classique en matière de responsabilité se retrouve ici : une faute, un dommage, et un lien de causalité entre cette faute et ce dommage §1UNE FAUTE Une fois la faute établie (A), peu importe en principe sa gravité (B), seule l’existence d’une cause d’exonération pouvant libérer le débiteur (C) A) Etablissement de la faute Principe : distinction obligation de moyens/ obligation de résultat La faute du débiteur consiste-t-elle dans la seule inexécution de son obligation ou ne peut-elle découler que d’une imprudence ou d’une négligence ? On distingue entre obligation de résultat et obligation de moyens Dans l’obligation de résultat, le débiteur est obligé de fournir un résultat au créancier : l’inexécution suffit à engager la responsabilité du débiteur Le débiteur d’une obligation de moyen s’engage à mettre en œuvre tous les moyens pour remplir ses engagements, mais il ne promet pas un résultat : sa responsabilité ne peut être engagée que si le créancier prouve sa négligence ou son imprudence Applications : Si l’on tente d’appliquer cette distinction aux différentes catégories d’obligations, deux ne font pas difficulté. L’obligation de donner est avec certitude une obligation de résultat, le vendeur s’engageant à transférer la propriété d’un bien et pas seulement à tout mettre en œuvre pour assurer ce transfert ; l’obligation de ne pas faire également de résultat, le débiteur s’engageant à un fait précis B Gravité de la faute L’Ancien Droit développait une classification des fautes en fonction de leur gravité. La plus grave était la faute intentionnelle la faute lourde (cupa lata), la faute légère ( cupa levis) et la faute très légère (cupa levis- sima) La responsabilité du débiteur dépendait du type de contrat et du type de faute commise Cette théorie a été critiquée car elle était difficile à mettre en œuvre, en pratique. Le Code civil l’a abandonnée, l’article 1137 engageant la responsabilité du débiteur sans distinguer le degré de gravité de la faute, mais des distinctions jouent un rôle qui n’est pourtant pas négligeable. Dans certains contrats, la gravité de la faute influe sur la réparation : par exemple, un salarié qui commet une faute légère ne peut être licencié, une faute sérieuse peut l’être , une faute grave perd droit à son indemnité de licenciement, une faute lourde perd en plus l’indemnité compensatrice de congés payés. §2 UN DOMMAGE Le dommage subi par le créancier est une condition essentielle de la responsabilité contractuelle : pas d’indemnisation sans préjudice subi §3 UN LIEN DE CAUSALITE ENTRE LA FAUTE ET LE DOMMAGE La difficile question de la causalité se pose également dans la responsabilité délictuelle En matière contractuelle, l’article 1151 du Code civil dispose que « les dommages et intérêts ne doivent comprendre, à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été privé, que ce qui est une suite immédiate et directe de l’inexécution de la convention » Séance 6 Les règles spécifiques à l’inexécution d’un contrat synallagmatique L’interdépendance des obligations nées d’un contrat synallagmatique explique deux règles spécifiques en cas d’inexécution 1) Une partie peut suspendre l’exécution de ses obligations tant que son partenaire n’exécute pas luimême : c’est l’exception d’inexécution 2) Si l’un des contractants n’exécute pas son obligation, l’autre peut demander en justice la résolution du contrat : c’est la résolution pour inexécution. Section 1 L’exception d’inexécution L’exception d’inexécution est le droit d’une partie à un contrat synallagmatique de suspendre l’exécution de ses obligations tant que son partenaire n’a pas exécuté les siennes §1 Conditions l’exception d’inexécution n’est soumise à aucune condition de forme particulière Trois conditions de fond sont en revanche imposées : 1° L’exception d’inexécution ne peut jouer que pour des obligations interdépendantes Son domaine de prédilection est donc le contrat synallagmatique, mais la jurisprudence l’a étendu à des obligations réciproques ne naissant pas directement d’un contrat synallagmatiques 2° L’exception d’inexécution suppose des obligations à exécution simultanée, telles celles nées de la vente, le vendeur devant en principe livrer la chose au moment où l’acheteur paie le prix. L’exception d’inexécution ne peut jouer si l’un des contractants a accordé un délai pour exécuter à son partenaire 3° L’exception d’inexécution suppose une inexécution. Peu importe que cette inexécution soit totale ou partielle ; peu importe que l’inexécution soit fautive ou provienne d’un évènement de force majeure § 2 LES EFFETS L’exception d’inexécution suspend l’exécution de la prestation de celui qui l’invoque L’exception d’inexécution est opposable aux tiers Section 2 La résolution pour inexécution Victime de l’inexécution de ses obligations par son partenaire, un contractant peut préférer demander la résolution du contrat, éventuellement accompagnée de dommages-intérêts, plutôt que l’exécution forcée § 1 Conditions Trois conditions sont exigées : 1) Une première condition tient aux contrats susceptibles d’être résolus. L’article 1184 du code civil vise les contrats synallagmatiques 2) Il faut ensuite une inexécution Il n’est pas nécessaire que cette inexécution soit fautive 3)La résolution ne peut en principe qu’être prononcée en justice, comme l’exige l’article 1184 du Code civil. Appelé à se prononcer, le juge dispose d’un important pouvoir d’appréciation Il doit d’abord vérifier si les conditions de la résolution sont remplies Par exception, une décision de justice n’est pas nécessaire si les parties ont stipulé une clause résolutoire, qui entraîne la résolution automatique du contrat en cas d’inexécution § 2 LES EFFETS Il faut distinguer les effets entre les parties et vis-à-vis des tiers A Entre les parties La résolution opère rétroactivement à la manière d’une condition résolutoire expresse qu’évoque l’article 1184 du Code civil. Si le contrat n’a encore reçu aucune exécution, le créancier est libéré de sa propre obligation. Si le créancier avait exécutée sa prestation, se pose alors la délicate question des restitutions, dans les mêmes termes qu’en cas de nullité B Vis-à-vis des tiers La rétroactivité de la résolution peut produire de graves effets sur la situation des tiers, qui peuvent être protégés par les mêmes règles qu’en matière de nullité. Séance 7 La Responsabilité Contractuelle I La mise en œuvre En principe, la réparation est subordonnée à une mise en demeure préalable § 1 La mise en demeure Définition : La mise en demeure est l’acte par lequel un créancier demande à son débiteur d’exécuter son obligation. A Domaine Si la mise en demeure est en principe indispensable, il existe plusieurs exceptions à ce principe : « si l’obligation est de ne pas faire, celui qui y contrevient doit des dommages et intérêts par le seul fait de la contravention » Si le créancier a attaché une importance particulière à l’exécution d’une obligation dans un temps déterminé, la mise en demeure n’est plus nécessaire B Formes La jurisprudence a assoupli l’exigence d’une sommation et la loi du 9 juillet 1991 l’a confirmé en autorisant la mise en demeure par lettre simple C Effets L’effet principal de la mise en demeure est de permettre au créancier de demander au débiteur des dommages et intérêts compensatoires au débiteur Enfin, la mise en demeure de livrer une chose constituant un corps certain opère un transfert des risques sur la tête du débiteur, qui devient ainsi responsable de la perte ou de la destruction de la chose, même non fautive II La réparation La réparation peut intervenir en nature La réparation peut intervenir par équivalent, l’octroi de dommages et intérêts Tout le préjudice doit être réparé, mais rien que le préjudice Lorsque l’obligation inexécutée est une obligation de somme d’argent, le créancier ne peut recevoir que des dommages et intérêts moratoires Ces dommages et intérêts peuvent être fixés par les parties § 1 Les clauses exclusives ou limitatives de responsabilité Les clauses exclusives de responsabilité permettent à une partie d’exclure complètement sa responsabilité contractuelle en prévoyant qu’elle ne devra aucuns dommages-intérêts en cas d’inexécution. Les clauses limitatives de responsabilité fixent le montant maximum des dommages et intérêts qui pourront être versés A. Exceptions : Les clauses exclusives ou limitatives de responsabilité sont nulles dans plusieurs hypothèses : en cas de dol du débiteur ou de ses préposés Lorsqu’une disposition légale le prévoit Les clauses exclusives de responsabilité sont nulles dans plusieurs contrats : le dépôt hôtelier, le contrat de travail, le transport terrestre de marchandises.