A l’heure des réseaux sociaux, du Web 2.0 et des blogs, peut-on encore parler
d’anonymat ? Le développement des sites internet proposant de veiller à ce que la
réputation des particuliers sur le Web ne soit pas entachée est à cet égard éclairant
sur les risques de voir sa vie étalée sur internet. L’anonymisation des décisions de
justice se situe au cœur de cette tendance.
Dans une société où le recours à des moteurs de recherche est courant pour obtenir
des informations sur son futur salarié, sur son mari, son patron…, la question de la
publication et de la diffusion de la jurisprudence amène à une réflexion sur les enjeux
en présence.
Le nom des parties doit-il figurer sur un jugement ou un arrêt ? Qu’en est-il de
l’adresse ou de la profession ?
Face à un droit à l’oubli de plus en plus revendiqué et à une demande accrue de droit
au respect de la vie privée, s’érigent les principes de publicité de la justice et d’accès
au droit.
En effet, la diffusion de la jurisprudence participe de tout système démocratique : elle
permet de voir le fonctionnement de la justice, l’application du droit et participe du
procès équitable tel que défini par l’article 6 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’homme.
Toutefois, si la diffusion de la jurisprudence sur support papier résulte d’une longue
tradition française, remontant à l’An II pour la Cour de cassation et à 1806 pour le
Conseil d’Etat, le développement des nouvelles technologies a conduit à une
réflexion sur les modalités de la diffusion et de la publication des décisions de justice.
L’apparition de bases de données jurisprudentielles en ligne publiques et privées,
alliée à la puissance des moteurs de recherche, risque d’entraîner la création de
bases de données sur les individus, sortes de « casiers civils » ou bien de « peines
numériques », au lieu de promouvoir l’accès au droit.
Dans ce cadre, le débat sur l’anonymisation des décisions de justice a vu le jour.
Si certains font valoir que les données nominatives sont utiles à la mémorisation des
arrêts, d’autres soulignent les dangers de ne pas anonymiser les décisions de justice :
le dénigrement d’individus ayant perdu un procès, la remise en cause de l’amnistie en
matière pénale…
Un autre argument tiré de l’utilité des données comme la profession, le lieu à la
compréhension de la décision montre qu’il peut y avoir plusieurs degrés dans
l’anonymisation de la jurisprudence.