avait signé un bail commercial l’enga-
geant à payer à son bailleur un loyer pour
une durée minimale de trois ans et que
l’arrêté litigieux faisait obstacle à l’exercice
de l’activité dont elle tirait ses revenus ;
elle soulignait encore qu’aucun impératif
d’ordre public ne commandait l’interdic-
tion de son activité, et qu’aucune circons-
tance locale particulière ne justifiait selon
elle la décision contestée ; elle faisait
observer que les pétitions invoquées par
la commune pour justifier de l’opposition
de la population locale étaient postérieu-
res à l’intervention de l’arrêté, que la déci-
sion du maire ne pouvait pas non plus être
prise sur le fondement des dispositions
de l’article 99 de la loi du 30 juillet 1987 (le
magasin n’est pas situé dans un secteur
particulièrement fréquenté par des
mineurs) ou de l’article 227-24 du Code
pénal, et que dès lors, elle était dépourvue
de base légale.
De l’autre, la commune mettait en avant
plusieurs points : en premier lieu, l’exis-
tence d’une école maternelle et d’une
école primaire situées non loin du com-
merce en question ; en deuxième lieu, à
proximité de celui-ci, l’aménagement en
cours mais très avancé d’un « pôle jeu-
nesse » destiné à abriter des services
d’animation, d’information et de loisirs à
l’intention des jeunes ; et enfin, en troi-
sième et dernier lieu, l’hostilité de la
population à l’égard de l’implantation de
la boutique, hostilité concrétisée par une
pétition signée à la date de l’audience
publique par 1 600 personnes.
En l’espèce, le problème était en somme
de savoir si, indépendamment des dispo-
sitions législatives particulières consti-
tuées par l’article 99 de la loi du 30 juillet
1987 modifiée et l’article 227-24 du Code
pénal, le maire de la commune avait, dans
l’exercice de ses pouvoirs de police admi-
nistrative générale, pris une mesure
d’interdiction grossièrement illégale sus-
ceptible de justifier la mise en œuvre des
dispositions de l’article L. 521-2 du CJA
relatif au référé-liberté.
Rappelons les principales dispositions de
l’article L. 521-2 du CJA :
« Saisi d’une
demande en ce sens justifiée par
l’urgence, le juge des référés peut ordon-
ner toutes mesures nécessaires à la sau-
vegarde d’une liberté fondamentale à
laquelle une personne morale de droit
public (...) aurait porté, dans l’exercice de
l’un de ses pouvoirs, une atteinte grave
et manifestement illégale (...) ».
La mise en
œuvre du référé-liberté requiert donc la
réunion des conditions cumulatives sui-
vantes : il faut une atteinte à une liberté
fondamentale ; il faut que cette atteinte
soit grave et manifestement illégale ; et il
faut enfin que la demande soit justifiée
par l’urgence, laquelle peut résulter de
circonstances particulières (cf. jurispru-
dence
Commune de Pertuis
précitée)
et semble être d’une signification diffé-
rente de celle exigée pour que soit
prononcée une suspension au titre de
l’article L. 521-1 du CJA (cf. même
jurisprudence).
En l’espèce, il apparaît qu’en raison des
circonstances locales particulières ci-des-
sus rapportées, lesquelles doivent
s’apprécier à la date à laquelle le juge des
référés se prononce (apport de la déci-
sion, d’où prise en compte de la pétition
postérieure à l’arrêté attaqué),
« la mesure
prise par le maire de Houilles, qui repose
sur des motifs qui sont au nombre de
ceux que les autorités chargées de la
police municipale peuvent légalement
retenir, apparaît fondée sur des éléments
d’appréciation tirés de la tranquillité de la
population et de la protection de la jeu-
nesse qui ne font pas apparaître
d’atteinte manifestement illégale à la
liberté fondamentale que constitue la
liberté du commerce et de l’industrie » :
dès lors, l’ordonnance de suspension du
premier juge des référés n’était pas justi-
fiée, et est en conséquence annulée.
Dans cette affaire, le juge des référés du
Conseil d’Etat a fait en quelque sorte, au
vu des circonstances locales appréciées à
la date de la décision, la balance entre les
nécessités de l’ordre public et de la tran-
quillité publique et l’objectif de protection
de la jeunesse d’une part, et la défense
d’une liberté fondamentale, à savoir la
liberté du commerce et de l’industrie,
d’autre part, pour estimer qu’en l’espèce,
il n’y avait pas d’atteinte grave et mani-
festement illégale à cette liberté : de ce
point de vue, cette décision apparaît dans
le prolongement de la jurisprudence bien
connue
Société Les films Lutetia
(CE, Sect.,
18 décembre 1959,
Rec.
p. 693 ;
AJDA
1960, p. 21, chr. Combarnous et Galabert ;
S.
1960, p. 94, concL. Mayras).
Commune - Expropriation d’utilité
publique
CE, 22 juin 2005, Association Clermont-Fer-
rand, Transport en commun et Emploi de
l’agglomération, req. nos 264294, 264771 et
274798 (décision mentionnée aux Tables du
Recueil Lebon)
[extraits]
Considérant que, sous le nº 264294, l’Asso-
ciation Clermond-Ferrand, Transport en
commun, M. YX et la société Centre Spécia-
lités pharmaceutiques demandent l’annu-
lation du décret du 4 décembre 2003 décla-
rant d’utilité publique les acquisitions et
travaux nécessaires à la réalisation par le
syndicat mixte des transports en commun
de l’agglomération clermontoise de la pre-
mière ligne de tramway de l’agglomération
clermontoise ; que, sous le nº 264771, la
SA Transpal Auvergne, la Confédération
générale des petites et moyennes entrepri-
ses du Puy-de-Dôme, l’Association
Clermont-Ferrand, Transport en commun,
demandent l’annulation de la délibération
en date du 19 décembre 2003 par laquelle
le syndicat mixte des transports en com-
mun de l’agglomération clermontoise a
décidé, dans le cadre de la réalisation du
projet de création de la première ligne de
tramway, de porter de 1,6 à 1,7 % à comp-
ter du 1er mars 2004 le taux du versement
destiné au financement des transports en
commun, dit versement transport ; que,
sous le nº 274798, M. et Mme Y, M. BY et
Mme Y demandent l’annulation de l’arrêté
du 3 septembre 2004 par lequel le préfet
du Puy-de-Dôme a déclaré cessibles les
immeubles nécessaires à la réalisation de la
première ligne de tramway de l’aggloméra-
tion clermontoise ; que ces dossiers pré-
sentent à juger des questions semblables ;
qu’il y a lieu, de les joindre et de statuer par
une même décision sur l’ensemble des
décisions attaquées ;
En ce qui concerne les conclusions tendant
à l’annulation du décret du 4 décembre
2003 portant déclaration d’utilité publique
du projet :
Sur les interventions :
Considérant que Mmes Y et Y, MM. Y, CY,
MM. et Mmes ZY et BY ont intérêt à deman-
der l’annulation du décret du 4 décembre
2004 déclarant d’utilité publique les acqui-
sitions et travaux nécessaires à la réalisation
par le syndicat mixte des transports en
commun de la première ligne de tramway
de l’agglomération clermontoise en appli-
cation duquel a été pris l’arrêté du 4 août
2004 prononçant la cessibilité des terrains
nécessaires à la réalisation de la ligne de
tramway dont ils demandent par ailleurs
l’annulation ; que leur intervention dans
l’affaire nº 264294 est par suite recevable ;
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la rece-
vabilité des requêtes :
Sur la légalité externe du décret attaqué :
Sur le moyen tiré de l’irrégularité de
l’enquête publique :
Considérant qu’aux termes de l’article 11-8
du Code de l’expropriation pour cause
d’utilité publique :
« (...) les observations sur
l’utilité publique de l’opération peuvent
être consignées par les intéressés directe-
ment sur les registres d’enquête. Elles peu-
vent également être adressées par écrit, au
lieu fixé par le préfet pour l’ouverture de
l’enquête, au commissaire-enquêteur ou
au président de la commission d’enquête,
lequel les annexe au registre mentionné à
l’article précité » ;
qu’il ressort des pièces du
dossier que les observations adressées le
17 juin 2002 à la commission par M. YX ont
été enregistrées et annexées aux registres
ouverts par les commissaires-enquêteurs ;
qu’aucune disposition ne fait obligation
d’annexer ces observations au rapport de
la commission d’enquête ;
Sur les moyens tirés de l’insuffisance du
dossier soumis à l’enquête publique :
En ce qui concerne l’étude d’impact :
Considérant qu’aux termes de l’article 2 du
décret du 12 octobre 1977 pris en applica-
tion de l’article L. 122-1 du Code de l’envi-
ronnement :
« (...) L’étude d’impact pré-
sente successivement : (...) 2º Une analyse
des effets directs et indirects, temporaires
et permanents sur l’environnement (...) et
le cas échéant sur la commodité du voisi-
nage (...) ou sur l’hygiène, la santé, la sécu-
rité et la salubrité publique ; (...) 6º Pour les
infrastructures de transport, l’étude
d’impact comprend en outre une analyse
des coûts collectifs des pollutions et nui-
sances et des avantages induits pour la col-
lectivité ainsi qu’une évaluation des
consommations énergétiques résultant de
l’exploitation du projet, notamment du fait
des déplacements qu’elle entraîne ou per-
met d’éviter ;
que le document soumis à
l’enquête publique contient en particulier
dans sa partie intitulée impacts directs et
indirects permanents et temporaires
l’ensemble des analyses qui en vertu du 2º
de l’article 2 du décret du 12 octobre 1977
doivent obligatoirement figurer dans
l’étude d’impact au titre des effets tempo-
raires et permanents sur l’environnement
urbain et la santé publique ; qu’il comporte
en outre les données prévues au 6º de cet
article en matière d’analyse des coûts de
pollution ainsi que l’évaluation des consom-
mations énergétiques résultant de l’exploi-
tation du nouvel équipement ; qu’il analyse
chronique administrative
153 86eannée - nº 2 - février 2006