
www.frontier-economics.com
sur lesquels l’Union européenne s’est engagée à l’OMC puisque le Royaume-Uni hérite de ces
engagements, mais ils pourraient être abaissés ou supprimés.
Les principaux défis pour le Royaume-Uni seraient alors de concilier ce modèle de Brexit soft avec
les promesses faites lors de la campagne pour le référendum.
D’abord, sur le rapatriement des pouvoirs : le Royaume-Uni aurait régulièrement besoin
d’actualiser sa législation et sa réglementation pour que celles-ci restent conformes à l’acquis
communautaire, sur lequel, bien sûr, il n’aurait plus aucune influence.
Ensuite, sur le budget de l’Union européenne : le Royaume-Uni devrait continuer à contribuer
au budget européen (comme le fait la Suisse en application de son propre modèle bilatéral).
Enfin (et c’est le plus difficile), sur l’immigration : l’Union européenne a clairement affirmé
que la libre circulation des personnes est une condition sine qua non de l’accès au marché
unique et d’ailleurs (jusqu’ici) aucun pays n’a eu accès au marché unique sans respecter ce
principe. Des quotas ou un système à base de points comme celui qu’avaient suggéré certains
partisans du Brexit seraient incompatibles avec ce principe.
Le grand défi pour l’Union européenne serait le risque que le modèle norvégien soit vu comme un
« avantage » associé à la sortie de l’Union européenne et qu’il conforte les exigences de nouveaux
référendums dans d’autres États membres. Il faudra peser ce risque à
l’aune des pertes économiques des États membres découlant d’un
modèle de Brexit plus dur ou du retour aux règles de l’OMC. L’issue est
difficile à prévoir à ce stade, mais tout accord nécessitera une majorité
qualifiée des États membres, qui renforcerait la position dans les
négociations de ceux qui préfèrent un modèle de sortie plus radicale ou
les règles de l’OMC.
En fait, le modèle norvégien s’apparente plus à une négociation qu’à
une sortie du Royaume-Uni, mais s’il peut être accepté, des compromis
sont possibles. En matière d’immigration par exemple, la Suisse – qui a
accepté la libre circulation des personnes sans obtenir en contrepartie
l’accès total au marché unique – plaide depuis quelque temps pour un
mécanisme de sauvegarde, suivant un référendum de 2014 exigeant
un contrôle quantitatif de l’immigration.
Le diable est dans les détails
Avec des années de négociations en perspective, les entreprises peinent à appréhender les
répercussions sectorielles et les risques économiques généraux. Puisque l’irritation suscitée par
« Bruxelles » et son zèle réglementaire perçu ont été au cœur d’une partie au moins de la campagne
sur le Brexit, on peut penser que l’issue du référendum offre au gouvernement britannique
l’opportunité d’alléger la charge de la réglementation sectorielle ou tout au moins de la refondre pour
mieux répondre aux besoins des entreprises et des consommateurs britanniques. Dans le même
ordre d’idée, puisque le Royaume-Uni a si souvent dit non à Bruxelles, on peut penser que la
Commission européenne saisira l’opportunité de développer la réglementation dans le sens souhaité
par le reste de l’Union européenne. Mais la tâche est indéniablement complexe de part et d’autre.
Prenons, par exemple, la politique de la concurrence, qui touche tous les secteurs de l’économie : a
priori, on pourrait penser que le Brexit aura peu d’implications sur ces règles au Royaume-Uni et
dans l’Union européenne. On pourrait décrire le régime britannique comme un régime « UE-plus »
couvrant les mêmes domaines que la Commission européenne, mais avec en plus, le pouvoir de
conduire des enquêtes sur les marchés. En outre, les cadres et outils utilisés par la CMA, l’autorité
de la concurrence britannique, pour analyser les fusions et les violations potentielles du droit de la
concurrence présentent de nombreuses similitudes avec ceux de la Commission.
Mais si l’on pousse un peu un loin l’analyse, c’est un autre tableau qui se dessine. Pour les affaires
de fusions, de cartels et d’abus de position dominante, les entreprises qui travaillent dans l’Union
européenne et au Royaume-Uni pourraient faire l’objet d’enquêtes simultanées de la Commission
En fait, le modèle
norvégien
s’apparente plus
à une négociation
qu’à une sortie du
Royaume-Uni.