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RÉSUMÉ
Ce document analyse les données recueillies auprès de 103 femmes nouvellement
incarcérées à l’Établissement de détention Maison Tanguay (Montréal) à l’hiver et au
printemps 2001. Il donne un aperçu de leur situation pour ce qui est (1) des troubles
mentaux et de la problématique suicidaire, (2) de la façon dont cela est pris en charge et
(3) de la complexité reliée à leurs comportements autodestructeurs (incluant
automutilations et tentatives de suicide). Pour ce qui est plus précisément de la
prévalence des troubles mentaux graves et de l’urgence suicidaire, 15% des femmes
étaient identifiées comme nécessitant une certaine prise en charge à leur admission en
établissement. La consultation des dossiers institutionnels nous apprenait que, du moins
pour la problématique suicidaire, elle était très bien identifiée, ne serait que par l’utilisation
d’un formulaire officiel. Pour ce qui est des troubles mentaux, la procédure de filtrage
semble cependant avoir été moins efficace en établissement. Ainsi, la majorité des
femmes identifiées par les chercheurs comme ayant un trouble mental grave (actuel ou
dans le dernier mois) n’avaient pas été évaluées systématiquement par un professionnel
de la santé mentale pendant la période que nous avions ciblée. Uniquement en terme de
dépistage de leur problématique, 50% seulement d’entre elles seraient reconnues comme
telles par les services médicaux de l’établissement. Pour ce qui est des différences entre
les hommes et les femmes incarcérés, le constat le plus clair qui se dégage ici est que, si
les antécédents de comportements autodestructeurs sont plus nombreux chez les
femmes, ils sont relativement semblables lorsque nous retenons une définition plus
pointue de la tentative de suicide (définition basée sur l’utilisation de la Lethality of suicide
attempt rating scale). Même au niveau de la violence exercée contre autrui, les hommes
et les femmes étaient relativement au même niveau lorsque était utilisé le critère de la
violence autodévoilée plutôt que celui de la condamnation (ou accusation) pour un délit
violent. De même, un pourcentage sensiblement égal d’hommes et de femmes souffraient
ou avaient souffert au cours du dernier mois d’un trouble mental grave (trouble
psychotique, dépression majeure ou trouble bipolaire). Pour ce qu’il en est plus
spécifiquement des femmes qui ont eu des comportements autodestructeurs, elles sont
relativement différentes par rapport aux autres femmes incarcérées. En effet, selon les
évaluations réalisées, les premières sont plus à risque suicidaire, plus hostiles, plus
impulsives, plus violentes contre autrui, alors qu’elles ont aussi plus de troubles mentaux.
Leur vulnérabilité est donc évidente et les résultats présentés ici sont relativement
probants. Par contre, il est bien plus difficile de différencier les femmes qui se sont
automutilées et celles qui ont fait des tentatives de suicide. Tout au plus a-t-il été
démontré de façon significative que les femmes qui faisaient des automutilations
obtenaient un certain soulagement de la tension suite à leur comportement
autodestructeur. De plus, elles sont les seules à rapporter des antécédents de
comportements autodestructeurs qui se sont déjà réalisés sous garde institutionnelle.