Journal Identification = ABC Article Identification = 0894 Date: September 30, 2013 Time: 2:24 pm
538 Ann Biol Clin, vol. 71, n◦5, septembre-octobre 2013
Article original
Le cancer de la prostate (CaP) est responsable en Europe
de 50 000 décès par an, ce qui le place en tête de tous
les cancers en termes d’incidence et en seconde position
après le cancer du poumon en termes de mortalité. Le mar-
queur tumoral dans cette indication est l’antigène spécifique
de la prostate (PSA). Il a été identifié et purifié par Wang
et al. en 1979 [1]. Le PSA (prostate specific antigen) est
une sérine protéase qui est produite par les cellules épi-
théliales de la prostate, normales ou tumorales. Marqueur
irremplac¸able dans le suivi de la maladie, sa place dans le
dépistage est remise en question du fait d’une spécificité
faible [2, 3].
Le dépistage par le PSA pose deux problèmes. Le pre-
mier est la faible spécificité du PSA dans les valeurs
entre 4 et 10 ng/mL, due à des élévations modérées du
PSA en l’absence de cancer [4, 5]. Ces faux positifs
conduisent à prescrire en surnombre des recherches de
cancers par biopsie prostatique, intervention qui n’est pas
exempte d’effets iatrogènes [6]. Les risques de complica-
tions péri-opératoires, les problèmes à long terme tels que
l’incontinence urinaire et l’impuissance doivent être pris en
considération. Le deuxième problème est l’incapacité du
PSA à différencier les cancers agressifs des cancers indo-
lents ou à évolution lente [7]. Alors que tous les CaP vont
inévitablement progresser, beaucoup le font à un rythme
relativement lent sans conséquences cliniquement signifi-
catives. Le rapport bénéfice risque de la détection précoce
du CaP doit prendre en compte ces pronostics différents.
Ces deux limitations posent donc la question du surdiagnos-
tic (avec en particulier un risque de biopsies inutiles) et des
risques de surtraitement. Celui-ci pourrait en effet annuler
le bénéfice du diagnostic précoce tel qu’il a été démon-
tré dans l’étude European randomized study of screening
for prostate cancer (ERSPC). Cela a conduit les autorités
sanitaires à ne pas recommander de dépistage de masse
du CaP avec les tests actuels (PSA + toucher rectal [TR]).
En revanche, le diagnostic individuel précoce reste une
option possible à proposer aux patients [8]. La question
de la détection précoce demeure en effet pertinente, parti-
culièrement chez les patients à risque de cancers, dont on
sait qu’elle permet une prise en charge qui serait ineffi-
cace à un stade plus avancé de la maladie. Quoi qu’il en
soit, améliorer la spécificité des tests diagnostiques paraît
indispensable. L’autre enjeu majeur est de développer des
tests à forte valeur pronostique qui permettront de différen-
cier les patients porteurs de cancers à évolution lente des
patients porteurs de cancers agressifs. Il en résultera une
amélioration de la détection, une diminution des biopsies
inutiles et une prise en charge adaptée en fonction du risque
métastatique et du risque mortel du cancer détecté, allant
de la surveillance active à une prise en charge plus radicale
comme la prostatectomie.
De nombreuses approches ont été étudiées afin d’améliorer
le pouvoir discriminant du PSA : % PSA libre (% PSAL),
PSA complexé, densité du PSA, cinétique (vélocité, temps
de doublement). La multiplicité des tests de PSAT (PSAT)
et PSAL sur le marché, la standardisation du PSA, amé-
liorée, mais pas encore achevée, l’équimolarité entre PSAT
et libre indispensable pour le calcul du % de PSAL mais
rarement obtenue avec les kits les plus utilisés, la diversité
des méthodes de calcul de la cinétique du PSA, la difficulté
de mesurer de fac¸on reproductible le volume de la prostate
pour le calcul du PSA densité sont autant de raisons qui
expliquent l’absence de consensus sur l’utilisation de ces
tests dérivés.
D’autres marqueurs ont été ou sont en cours d’évaluation.
Parmi les plus avancés sur le plan de la validation on peut
citer le gène 3 spécifique au cancer de la prostate (PCA3) et
les gènes de fusion [9, 10]. Ces marqueurs moléculaires se
recherchent dans l’urine après un massage prostatique. La
famille des kallikréines, dont le PSA est l’un des membres,
et les précurseurs du PSA [11] offrent une approche intéres-
sante. Retrouvés dans le sang, ces marqueurs sont faciles à
analyser et reproductibles dans le temps.
Le PSA est une protéine issue de l’épissage alternatif d’un
ARN codé par le gène hKLK3. Cet ARN est d’abord tra-
duit en préproPSA de 261 acides aminés qui est clivé en
proPSA de 244 acides aminés dans sa partie N-terminale.
Le proPSA porte en position N-terminale une séquence
de 7 acides aminés (APLILSR) qui peut être clivée par
la trypsine et la kallikréine 2 (hK2) lors de la maturation
en PSA [12]. Lors de ce clivage, des formes tronquées du
PSA peuvent être produites : le (-5)proPSA constitué de la
forme primaire de proPSA avec 5 amino-acides, LILSR, le
(-4)proPSA, contenant ILSR et le (-2)proPSA, contenant
SR attachés à l’extrémité N-terminal du peptide pro-leader.
Les formes tronquées du PSA sont d’autant plus résis-
tantes à l’activation par hK2 ou la trypsine. Les formes
(-5,-7) pro PSA n’ont pas montré d’utilité en clinique [13].
En revanche, la forme (-2)proPSA a été la plus étudiée.
Elle représente la forme tronquée la plus présente dans
les tumeurs et ne pouvant être transformée, elle reste la
forme de proPSA la plus stable. Elle est aussi retrouvée
dans le sang en plus grande quantité lors de cancer [14].
Le (-2)proPSA a montré dans plusieurs études qu’il avait
une meilleure spécificité que le PSA pour la détection des
cellules cancéreuses dans les biopsies de patients présen-
tant un PSA sérique élevé (4-10 ng/mL) [14-17]. Il permet
d’optimiser l’évaluation du risque du CaP et de diminuer le
nombre de biopsies négatives [17-19].
Le PHI (prostate health index) est un index combinant dans
une même équation les valeurs du (-2)proPSA, du PSAL et
du PSAT) :
(-2proPSA/PSAL).√PSAT
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