Les professionnels d`aujourd`hui, 3e partie : Une nouvelle

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Les professionnels d’aujourd’hui,
3e partie : Une nouvelle culture
de travail
Stowe Boyd
16 septembre 2014
Ce rapport a bénéficié du soutien d’Adobe.
SOMMAIRE
Résumé .............................................................................................................................................. 3
Introduction ......................................................................................................................................... 5
Les professionnels 3D ......................................................................................................................... 7
Une collaboration plus mobile et plus contextuelle .......................................................................... 7
Convergence des communications internes et externes .................................................................. 8
Équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ...................................................................... 9
Une main-d’œuvre décentralisée, discontinue et distribuée ........................................................... 11
À nouvelle culture de travail, nouveau style de leadership ................................................................. 14
Encadrement d’effectifs 3D : quelques paradoxes ......................................................................... 16
Un nouveau style de leadership : le « leanership » ........................................................................ 16
Conclusions et recommandations ..................................................................................................... 18
À propos de l’auteur .......................................................................................................................... 20
À propos de Gigaom Research ......................................................................................................... 20
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Résumé
Ce document est le dernier d’une série de trois rapports qui analysent les résultats de deux études
mondiales, dont l’une a été réalisée auprès des nouveaux actifs (âgés de 18 à 34 ans) et l’autre auprès
de décideurs informatiques. Parrainées par Adobe, ces études Gigaom Research doivent permettre
aux acheteurs de produits technologiques et aux cadres informatiques de mieux comprendre :
•
Ce dont la population active d’aujourd’hui pense avoir besoin pour réussir dans un monde
en pleine mutation, dominé par les communications mobiles et les nouvelles technologies
de collaboration.
•
Comment les équipes informatiques gèrent ces besoins et les objectifs de l’entreprise.
•
S’il existe des écarts entre les attentes des employés et les impératifs informatiques, et
comment les acheteurs de technologies peuvent les combler.
Gigaom Research veut offrir aux décideurs technologiques un éclairage plus précis sur la manière
dont le personnel évolue, afin qu’ils puissent aider ce dernier à réussir en alignant les ressources
humaines et technologiques avec les objectifs de l’entreprise. Dans ce rapport, nous nous intéressons
à la nouvelle culture du travail.
Principales conclusions du rapport :
•
Le nombre d’employés nomades augmente très vite, ce qui bouleverse les schémas du travail et
de la communication, ainsi que l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. On voit
ainsi émerger une main-d’œuvre 3D : distribuée, discontinue et décentralisée. Plus d’un tiers
des jeunes actifs travaillent en dehors du bureau (34 %) ou des heures ouvrables (37 %) au
moins une fois par mois, et plus de la moitié (respectivement 62 % et 55 %) des responsables
informatiques interrogés ont su s’adapter à ces nouveaux schémas.
•
Les équipes informatiques et les employés partagent généralement les mêmes objectifs en
termes de communication et de collaboration. La priorité est en effet la hausse de la
productivité, pour 42 % des professionnels de l’informatique et 32 % des employés.
•
Selon les deux études, lorsque les cultures organisationnelles classiques évoluent vers des
modèles plus souples et plus égalitaires, le management change de nature. Une majorité
d’employés (42 %) privilégient la culture entrepreneuriale actuelle, un tiers d’entre eux étant
plutôt des adeptes de l’entreprise agile émergente.
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Face à ces changements de technologies, de pratiques et de personnel, un nouveau style de leadership
— qui obéit au principe des 3D — peut s’avérer nécessaire au fur et à mesure que l’on se rapproche
d’un modèle de travail égalitaire.
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Introduction
Nous avons déjà publié deux rapports dans cette même série. Voici les principales conclusions du
premier rapport intitulé « Les professionnels d’aujourd’hui, 1re partie : Prise en charge des platesformes de productivité — équipements mobiles, personnels et cloud computing » :
•
Les équipes informatiques sont en phase avec les souhaits, les besoins et les attentes des
nouveaux actifs.
•
Face aux nouvelles technologies et pratiques professionnelles, elles doivent jouer un autre rôle,
notamment en plaçant l’utilisateur au centre de leurs préoccupations.
•
L’adoption de modèles plus souples, plus égalitaires et plus ouverts passe par une nouvelle
approche du leadership.
Dans le deuxième rapport intitulé « Les professionnels d’aujourd’hui, 2e partie : les nouveaux outils
transforment l’informatique », nous nous sommes penchés sur le nouveau rôle de l’informatique :
•
L’étonnante montée en puissance du web social a conduit à une consumérisation de
l’informatique qui a un impact considérable sur les méthodes de travail. Nous sommes
notamment entrés dans une ère où nous ne pouvons tout simplement plus accomplir notre
travail sans des outils initialement conçus pour nous assister ; ces outils sont devenus le travail
proprement dit, et non un complément de ce dernier.
•
La nouvelle architecture conceptuelle des technologies professionnelles est orientée utilisateur
et s’articule autour du mobile, du cloud et des connexions entre les individus, entraînant ainsi
une refonte de ces technologies à la base.
•
Les équipes informatiques renoncent progressivement à leur rôle de superviseur pour
endosser celui de prescripteur d’outils et de pratiques, dans le but évident d’aider l’entreprise
à gagner en agilité et en rapidité.
•
Elles sont largement en faveur de ce changement de rôle et savent que la productivité du
personnel revêt une importance cruciale, juste après les impératifs de sécurité.
Le troisième rapport analyse le caractère changeant du travail. Les transformations révélées par les
deux études sont profondes et, au-delà de leur impact sur le lieu de travail, créent de nouveaux modes
d’interaction et de collaboration avec les partenaires et les clients. Dans le même temps, la tendance
au « travail en tout lieu » et à la « disponibilité permanente » va avoir un impact sur l’équilibre entre
vie professionnelle et vie personnelle.
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Les jeunes actifs ne sont pas les seuls à adopter ces nouvelles habitudes. De manière générale, le travail
est de plus en plus décentralisé, discontinu et distribué, au profit d’une productivité accrue. Les équipes
informatiques peuvent soutenir cette évolution en encourageant l’adoption de technologies et d’outils
inédits mais aussi de pratiques et d’environnements nouveaux concernant le mode de collaboration
des différents groupes, les méthodes employées et l’abandon de certaines traditions.
Au final, c’est donc bel et bien une nouvelle charte de management qui se dessine. Les changements
sont tels que les responsables informatiques et autres risquent de se retrouver en mauvaise posture.
Ce qui marchait il y a encore dix ans ou moins peut désormais apparaître comme une incapacité à
aider les nouveaux actifs à instaurer une culture du travail en phase avec l’époque actuelle.
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Les professionnels 3D
Une collaboration plus mobile et plus contextuelle
Nos études confirment l’ampleur du phénomène mobile : jamais les professionnels n’ont été aussi
mobiles et cette tendance se poursuit, ce qui a un impact sur l’employé, l’ensemble du personnel et
le service informatique.
L’expression « la mobilité avant tout, le cloud avant tout et les individus avant tout » révèle sans doute
une situation impossible dans laquelle les trois éléments d’une liste viennent tous en première
position. La métaphore toutefois n’est pas vaine. Après tout, les individus utilisent essentiellement
leurs appareils mobiles pour exécuter des applications. Ces applications se connectent massivement à
des services cloud, et le smartphone sert la plupart du temps à communiquer avec d’autres personnes.
L’expression décrit donc un cercle vertueux, dont les trois éléments agissent ensemble.
Le passage rapide aux connexions mobiles révolutionne très rapidement les modes de collaboration.
Les nombreux échanges au sein des groupes de travail signifient que les individus agissent différemment
lorsqu’ils sont face à face. Cela a des répercussions sur le fonctionnement de l’entreprise, avec notamment
une diminution du nombre des réunions et e-mails destinés à faire le point. Pourquoi réunir tout un tas
de personnes dans une salle alors qu’elles sont déjà au courant de tout grâce aux outils de collaboration,
aux SMS et aux messages instantanés ?
Lorsque les gens se rencontrent, c’est souvent plus pour essayer de régler un problème épineux sur un
projet — autrement dit, pour collaborer, travailler ensemble — que pour faire le bilan de la situation.
C’est une bonne chose, 39 % des employés interrogés ayant affirmé qu’ils n’avaient « pas de temps à
perdre en réunions sans intérêt pour faire le point ».
Du coup, les communications à distance, elles aussi, se déroulent différemment. Les échanges étant
fréquents — les membres des petits groupes de travail communiquent une dizaine de fois par jour —,
les conversations du style « alors, comment ça se passe ? » sont relativement rares. Il s’agit plutôt de
débattre des problèmes.
Les outils sont de plus en plus contextuels : ils font partie intégrante des tâches quotidiennes, comme
les objets d’information que les employés créent et partagent — documents, diagrammes, code source,
maquettes, tickets de support — font partie intégrante des communications. Résultat : le dialogue
contextuel est en train de devenir le pivot central de la nouvelle génération des technologies de travail.
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Convergence des communications internes et externes
Que les contacts soient en interne ou avec l’extérieur, les outils de communication servant à dialoguer
et à coordonner les activités sont de plus en plus souvent les mêmes. Et cette tendance devrait
s’accélérer. Par exemple, à la question « À quelle fréquence faites-vous appel à des indépendants ou
des intérimaires ? », 50 % des personnes interrogées ont répondu occasionnellement et 23 % tous
les jours ou toutes les semaines.
Figure 1.
Source : étude mondiale de Gigaom Research sur la population active, n = 1208 professionnels âgés de 18 à 34 ans
Le premier réflexe est souvent de dire que les communications mobiles marquent la fin des réunions
en face à face. C’est d’ailleurs ce que pensent les participants à l’étude dans une certaine mesure.
Nous estimons au contraire qu’une plus grande partie du temps passé sur le lieu de travail est
consacrée aux échanges en face à face. Il est néanmoins probable que les gens se mettent de plus
en plus à travailler ailleurs et viennent au bureau spécialement pour assister à des réunions.
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Les sociétés s’installent d’ailleurs dans des locaux plus petits pour des raisons financières et par suite
du développement de la mobilité professionnelle.
Équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle
Les nouveaux actifs passent beaucoup de temps au travail mais moins au bureau. C’est aux États-Unis
que le phénomène est le plus marqué, mais cette tendance est également étroitement liée à l’essor des
connexions et communications mobiles.
Question : À quelle fréquence travaillez-vous chez vous en dehors des heures ouvrables ?
Figure 2.
Source : étude mondiale de Gigaom Research sur la population active, n = 1208 professionnels âgés de 18 à 34 ans
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Malgré l’explosion des heures supplémentaires, les conditions de travail sont de plus en plus souples.
Cela serait directement en rapport avec le bonheur au travail et c’est ce qui compte le plus pour les
employés, après la rémunération et les avantages. Certaines études montrent en effet qu’ils préfèrent
bénéficier d’une plus grande flexibilité du temps de travail que d’être augmentés. Un souhait assez
facile à satisfaire grâce aux outils de collaboration à distance. Question : Parmi les modes de travail cidessous, lesquels sont pris en charge par le service informatique de votre société ?
Figure 3.
Source : étude mondiale de Gigaom Research sur les décideurs informatiques, n=611 et
étude mondiale de Gigaom Research sur la population active, n = 1208 professionnels âgés de 18 à 34 ans
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Une main-d’œuvre décentralisée, discontinue et distribuée
Suite à l’adoption de nouveaux outils limitant les tensions et conflits inhérents à la communication,
à la collaboration et à la coordination, les connexions sur le lieu de travail ont atteint des sommets.
Cela correspond à la partie « les individus avant tout » de la trilogie, qui repose sur les appareils
mobiles et les services cloud.
Alors que les employés adoptent ces nouvelles habitudes, on assiste à une profonde mutation des
méthodes de travail, mais aussi — comme le montre le deuxième rapport de la série — à l’apparition
d’une nouvelle charte des services informatiques qui doivent gérer les technologies correspondantes.
Tous ces changements procèdent d’un désir inné d’être plus productif et de collaborer plus
efficacement avec les autres.
Q : Quelle est l’importance des modes de communication et de collaboration suivants dans
votre réussite et vos performances professionnelles ? Quelle est l’importance des objectifs de
communication et de collaboration suivants dans votre entreprise ?
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Figure 4.
Source : étude mondiale de Gigaom Research sur la population active, n = 1208 professionnels âgés de 18 à 34 ans et étude
mondiale de Gigaom Research sur les décideurs informatiques, n=611
Comment ces nouveaux actifs font-ils pour enregistrer les gains de productivité souhaités et mieux
collaborer ? En travaillant différemment.
De nos jours, le travail est de plus en plus réparti entre des employés intervenant dans des zones
géographiques, des sociétés et des services différents. Les équipes informatiques ont alors des défis
intéressants à relever, même si, comme on l’a vu dans le deuxième rapport, elles continuent de placer
la sécurité en tête de leurs priorités, juste après l’augmentation de la productivité.
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Les indépendants, dont le nombre ne cesse d’augmenter, représentent une part de plus en plus
importante de cette main-d’œuvre distribuée. Selon les estimations, ils sont plus de 42 millions,
couvrant ainsi plus d’un tiers des activités professionnelles et de création aux États-Unis, d’après
le syndicat des travailleurs indépendants.
La plupart des employés travaillent par ailleurs par rotation sur différents projets ; c’est le travail
discontinu. Nous avons montré comment les gens prenaient l’habitude de travailler sur des projets
courts et mal coordonnés, où l’accent est mis sur les résultats et où l’infrastructure organisationnelle
et la supervision font de plus en plus défaut. Résultat : les employés sur le terrain gagnent en
autonomie, et le travail est décentralisé.
Si les dirigeants se penchent sur ces trois D, ils leur trouveront un point commun : ils renforcent tous
le parallélisme, en permettant d’exécuter plus de tâches à la fois, avec moins de délais d’attente et de
pertes de temps. Les professionnels 3D sont en cela comparables aux processeurs qu’on ajoute à un
ordinateur. Pendant chaque cycle de calcul, on en fait plus en réduisant les blocages.
Il faut tenir compte d’autres « D » car une telle mutation entraîne des coûts cachés.
Bien que ces tendances conduisent les entreprises sur une voie qu’elles plébiscitent, elles ont un coût.
La démotivation atteint des niveaux record depuis l’après-guerre, quels que soient les chiffres sur
lesquels on se base. Même si ce point ne fait pas vraiment l’objet de nos études, nous savons que c’est
dans les entreprises qui misent sur la transparence, la confiance et l’autonomie que la motivation est la
plus forte. Un sacré défi pour ceux dont l’approche du management est ancrée dans le passé. Nombre
de managers ont encore un long chemin à parcourir pour faire évoluer la dynamique organisationnelle
et s’adapter aux formes de travail rapides et fluides qui ont vu le jour ces dernières années.
Autre « D » qui a son importance : la démocratie. Nous avons pu constater que les excellents éléments
et les équipes agiles et performantes se distinguent par un style de management démocratique. Par
exemple, au lieu d’organiser eux-mêmes le travail, les managers de ce genre d’équipes laissent souvent
le soin au groupe de répartir les tâches et d’évaluer les employés. Il arrive que l’entreprise prive
carrément ces équipes de manager, ou du moins ne donne pas de directives de travail.
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À nouvelle culture de travail, nouveau style
de leadership
Dans le cadre de nos études, nous avons demandé aux participants de nous dire lequel des trois
modèles de travail et de collaboration correspondait le plus à celui de leur entreprise. Nous leur avons
également demandé lequel avait leur préférence.
Nous étions partis du principe que pour la plupart d’entre eux, c’était le modèle entrepreneurial qui
correspondait le mieux à leur société, que quelques-uns retiendraient le modèle égalitaire — qui est a
priori celui vers lequel on s’oriente — et que d’autres évoqueraient le modèle autoritaire, qui est aussi
le plus ancien.
Question : Comment aimeriez-vous que votre société fonctionne ? D’une manière générale, dans
quelle mesure diriez-vous que les modèles suivants correspondent à celui de votre entreprise ?
Figure 5.
Source : étude mondiale de Gigaom Research sur la population active, n = 1208 professionnels âgés de 18 à 34 ans
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Voici comment nous avons orienté les questions sur la culture d’entreprise et les styles décisionnels :
•
Le responsable de l’entreprise, de la division ou du service définit les objectifs et dit aux autres
ce qu’ils doivent faire et comment, de sorte que la prise de décision reste entre les mains d’une
ou de quelques personnes.
•
Les dirigeants officiels et informels développent des objectifs par le biais de communications
continues et de processus d’implication, et favorisent la prise de décision par consensus, même
si le dernier mot revient à la direction.
•
Les dirigeants définissent des objectifs généraux et fournissent les ressources. Le travail est
réalisé par des équipes sans liens formels, les employés établissant des contacts personnels
et informels avec d’autres. La plupart des décisions sont prises chaque jour au niveau des
employés ou des petits groupes de travail.
Un quart des jeunes actifs dans le monde continue de préférer la culture de l’autorité, alors que la
grande majorité cite le modèle entrepreneurial dominant. Les participants américains et allemands
ont généralement plus d’affinités avec le modèle égalitaire, et apprécient moins le modèle autoritaire
que leurs homologues des autres pays.
Il existe un principe de management selon lequel tout changement doit être encadré mais, dans ce cas,
les inévitables interconnexions rendent la tâche compliquée, voire impossible.
Lorsque les anciens modèles de gestion d’entreprise sont abandonnés, les principes de leadership
changent. Et ce changement n’est en rien comparable aux inventions comme l’informatique ou
l’électricité car, en dehors de l’adoption des solutions mobiles et cloud, il est en grande partie culturel.
Le troisième élément de l’équation « mobilité-cloud-individus », ce sont les individus, et la gestion
d’entreprise implique elle aussi des individus.
Il existe une résistance naturelle au changement, qui est considéré comme risqué et peut avoir un
impact sur ceux à qui on demande de changer de manière impromptue. Mais là, le choix d’un mode
de travail agile, transparent et égalitaire exige un changement de comportement radical de la part de
ceux qui ont de l’influence au sein des sociétés basées sur un modèle entrepreneurial ou autoritaire.
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Encadrement d’effectifs 3D : quelques paradoxes
Lorsqu’ils songent à un changement de leadership, les managers seraient bien inspirés de se pencher
sur certains paradoxes fort intéressants.
Exemple : les employés à distance disent se sentir extrêmement motivés et attribuent d’excellentes
notes à leurs managers. On a tendance à penser que les managers n’agissent pas avec les employés
à distance de la même manière qu’avec ceux qu’ils croisent plusieurs fois par jour dans les couloirs.
La communication avec les personnes en télétravail exige en effet une certaine organisation et un
minimum d’anticipation, car on n’a aucune chance de tomber sur eux à la machine à café. Ainsi,
le manager à distance — du point de vue de l’employé — a davantage adopté l’état d’esprit des
professionnels 3D que le manager dans les locaux.
L’autre paradoxe tient au fait que les managers conscients de ne pas avoir réponse à tout aboutissent
à de meilleures décisions. C’est l’un des aspects de la nouvelle approche qui voit dans le management
une activité faisant intervenir différents groupes de personnes, et pas un seul décideur tout puissant.
Les sciences sociales et cognitives ont largement démontré la supériorité de l’expérimentation sur
l’expérience, du débat et des divergences sur le consensus et la pensée unique, et de l’analyse sur le
raisonnement anecdotique.
La connaissance de ces paradoxes permet de porter un regard radicalement différent sur le leadership
— un leadership plus en phase avec les nouvelles formes de travail.
Un nouveau style de leadership : le « leanership »
Nombre d’entreprises performantes misent sur un leadership flexible et agile. Et cela ne vaut pas
uniquement pour les dirigeants : chaque employé doit faire preuve de suffisamment de flexibilité et
d’agilité pour être en mesure de résoudre un problème, gérer une opportunité ou former une équipe
à cet effet. Une fois sa mission accomplie, c’est à d’autres de prendre le relais.
Dans un peloton, tous les cyclistes profitent de la dynamique du groupe (voir « The New Visionaries :
Richard Martin on the Peloton » [Les nouveaux visionnaires : Richard Martin à propos du peloton]).
Mais pour emmener le peloton, les membres de différentes équipes doivent en prendre la tête,
autrement dit faire davantage d’efforts que les autres, puis céder leur place au bout d’un moment.
Il y a certes dans chaque équipe des spécialistes, comme les sprinters, les grimpeurs et autres, mais
ce transfert constant de leadership est garant du bon fonctionnement du peloton.
Il s’agit d’une forme de leadership allégée et plus agile, plus en adéquation avec notre époque et
ses enjeux. Je l’ai d’ailleurs baptisée « leanership », et elle est maintenant d’actualité.
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Google a entièrement revu sa politique de recrutement, supprimant les casse-tête utilisés en guise de
test de QI, du genre « Combien cette pièce peut-elle contenir de ballons de football ? ». Laszlo Bock,
désormais à la tête des ressources humaines chez Google, a découvert que les casse-tête, tests normalisés
et autres qui servaient à évaluer un candidat ne mesuraient en aucun cas les chances de réussite chez
Google (exception faite des tests de programmation pour les programmeurs). Les critères de recrutement
sont désormais la curiosité et le leadership émergent, deux compétences clés à l’heure actuelle (voir
« Laszlo Bock talks about hiring at Google, and why the GPA is irrelevant » [Laszlo Bock parle du
recrutement chez Google et explique pourquoi la moyenne générale n’est pas un critère pertinent]).
Cela ne signifie pas pour autant que la société n’aura pas de PDG ou de responsable des ressources
humaines. La priorité sera peut-être alors d’aider les autres à se gérer eux-mêmes et de lever les
obstacles financiers, organisationnels et culturels au leanership.
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Conclusions et recommandations
•
Faire appel à des effectifs décentralisés, distribués et discontinus. Pour les employés
aujourd’hui, le mot d’ordre est la productivité : ils sont 32 % à reconnaître qu’elle a joué un rôle
très important dans leur performance ou leur réussite (l’objectif prioritaire). Ils sont favorables
à tout ce qui accélère les opérations, réduit le gaspillage et génère des gains d’efficacité. Il faut donc
envisager la décentralisation des décisions, la distribution géographique du travail et le découpage
temporel entre plusieurs produits sur une base hebdomadaire, journalière, voire horaire.
Ces attributs des professionnels 3D ont un point commun : le parallélisme, autrement dit
l’exécution d’un plus grand nombre de tâches au cours d’une même unité de temps.
Le management et l’informatique doivent cerner la nature des effectifs 3D, notamment
l’importance des outils de collaboration et de communication pour améliorer la productivité en
interne et en externe. Les services informatiques ont également placé la hausse de la productivité
en tête des objectifs de communication et de collaboration (42 %), et cela doit demeurer la
priorité. Il est par ailleurs important de comprendre que le besoin d’autonomie exprimé par
les employés 3D passe par un style de coopération plus démocratique, par la confiance et la
transparence. À défaut, la course à la productivité finira par démotiver les employés.
•
À nouvelle éqoque, nouvelle forme de travail et nouvelle approche du leadership.
En étudiant la culture d’entreprise, nous avons découvert que nous étions en train de passer
très lentement d’un modèle autoritaire en déclin à un modèle entrepreneurial prônant le
consensus, certaines entreprises d’avant-garde commençant même à adopter une approche
plus égalitaire, qui offre davantage d’autonomie aux employés et aux petites équipes.
Pour être plus performants, les employés et les équipes doivent jouir d’une plus grande
autonomie, qui est d’ailleurs réclamée par les bons éléments. Le management doit donc
adopter de nouveaux principes de gestion pour satisfaire les professionnels en quête d’une
culture d’entreprise qui privilégie l’agilité et la flexibilité.
•
Il doit d’ailleurs lui-même faire preuve de plus d’agilité et de flexibilité, et le nouveau modèle
organisationnel doit favoriser le leadership émergent, qui permet à tout employé d’assumer
le rôle de leader sur un projet, une campagne ou un lancement de produit. Il est important
qu’ensuite on aide cet employé à quitter ce rôle.
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Ce leadership émergent, ou « leanership », est indissociable d’une culture d’entreprise égalitaire,
basée sur le modèle coopératif en place parmi les effectifs 3D. Étant donné que 33 % des employés
sont favorables au leanership, il est probable que le rôle des cadres supérieurs va évoluer.
Au lieu de gérer des gens, ils devront s’efforcer de lever les obstacles à la performance et à la
productivité, dressés par les employés.
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À propos de l’auteur
Analyste chez Gigaom Research, Stowe Boyd aime à se présenter comme anthropologue du web,
futuriste et analyste. Son domaine de prédilection est l’avenir du travail et les forces tectoniques qui
poussent le monde professionnel vers un avenir flou, en constante accélération.
Stowe Boyd a travaillé plusieurs années comme analyste pour Gigaom Research. Depuis 2012, il organise
tout ce qui a trait à la dimension sociale et à l’avenir du travail. Il suit la révolution sociale en ligne depuis
1999, année où il a inventé le terme « outils sociaux » et écrit son premier blogue. Ancien président
de Corante, l’un des pionniers du blogue dans le milieu des années 2000, il est unanimement reconnu
comme un théoricien du web social sur lequel il a influé. Il a créé le terme « hashtag » en 2007,
au cours d’une conversation en ligne avec Chris Messina, fondateur de la convention.
Il écrit actuellement un livre intitulé Fast-and-Loose: The New Form Factor For Work.
Il a participé à de nombreux événements et conférences dans le monde : Web 2.0, Enterprise 2.0,
Gigaom Net :Work, Reboot, Next, Mesh, Shift, Lift, SIBOS, Defrag, SxSW, TEDx, etc.
À propos de Gigaom Research
Gigaom Research réalise des analyses approfondies sur les marchés émergents. Afin d’être certains de
fournir les études les plus pertinentes, nous faisons appel pour nos analyses, nos rapports et nos études
originales aux plus grands spécialistes du secteur. Que vous veniez de découvrir un nouveau marché ou
que vous disposiez de connaissances approfondies sur votre secteur d’activité, Gigaom Research peut
vous apporter un éclairage déterminant sur les marchés les plus dynamiques du secteur.
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