Colonisation/infection des plaies Dr E. Senneville Service des maladies infectieuses Hôpital de Tourcoing Lille, le 18 06 2009 Plaies • Plaies aiguës – traumatisme – post‐opératoire (ISO) – piqûre, morsure … cocci à Gram positif aérobies +/- BGN, BMR + bactériologie spécifique • Plaies chroniques – ulcères (de jambe) – escarres de décubitus – mal perforant plantaire Bactériologie complexe Bactériologie de la peau • La peau « normale » – SCN, corynébactéries, diphtéroïdes, microcoques, lactobacilles, P. acnes – SCN et Pseudomonas aeruginosa (CAE) – S. aureus (seuil narinaire, périnée, ombilic, peau) • Chez le patient diabétique – S. aureus, streptocoque β hémolytique du groupe A, Candida spp. No Host Reaction Observed …………pas de réaction de l’hôte observée …….. Contaminated/Colonised Critically Colonised Colonisation Contamination/Colonisation critique Infected Infection Bacterial count rising = signs of infection increase Adapted from Flanagan 2003 Nombre de bactéries Bacterial Count Bactériologie du in the wound bed lit de la plaie Bacterial burden Colonisation Normal Peu virulent Flore bactérienne résidente Flore bactérienne transitoire Infection Modification de flore Germes virulents Retard cicatrisation Extension JP Lavigne, Nîmes De la contamination à l’infection Contamination Colonisation Infection présence de microorganismes non-réplicatifs présence de microorganismes réplicatifs dans la plaie en l’absence de réponse de l’hôte présence de microorganismes réplicatifs dans la plaie avec réponse de l’hôte concerne toutes les plaies chroniques très banal plus rare originaires de la flore endogène digestive et/ou de l’environnement flore cutanée commensale: pathogènes usuels impliqués: S. epidermidis, S coag N, Corynebacterium sp., Brevibacterium sp., P. acnes, la plupart ne sont pas capables de se multiplier dans Pityrosporum sp.. la plaie S. aureus, streptocoques, E. coli, Proteus, Klebsiella, anaérobies, Pseudomonas, Acinetobacter Le diagnostic de l’infection ne peut pas être bactériologique+++ Biologie Hyperleucocytose, polynucléose neutrophile : pas de valeur diagnostique Marqueurs inflammatoires circulants • Classiquement, peu d'intérêt • En fait, bonne valeur du couple CRP.PCT • CRP intéressant dans le suivi de l'évolution 30 (0;24.84) 0,16 x CRP + 17.44 x PCT = 4 CRP (mg.L-1) 20 INFECTION A B 10 COLONIZATION (0.229;0) 0 0 0.05 0.10 0.15 PCT (ng.mL-1) 0.20 0.25 Jeandrot A, et al. Diabetologia 2007 Bactériologie des plaies • Entre colonisation et infection : – «colonisation critique» • Bendy, AAC 1964 : charge bactérienne participe au défaut de cicatrisation • 105 cfu/g (Robson, Surg Clin N Am 1997) – synergie de culture • certaines bactéries favorisent le développement d’autres espèces • aérobies anaérobies (Bowler, Int J Dermatol 1999) – synergie de virulence • S. aureus, streptocoques β‐hémolytiques groupe A • effets différents selon le type de lésion (Schmidt, Vasa 2000) • Infection = CB X virulence résistance hôte (équation d’Altemeir) Moyens de défense Flore cutanée résidente ( Propriétés physico-chimiques de l’épiderme: - Turn over cellulaire - Sécrétions sébacées et sudoripares - Kératinocytes ( Facteurs Généraux - Immunité Humorale: Ig - Immunité Cellulaire: cellules de Langherans Résistance de l’hôte • probablement le facteur unique le plus important influençant la progresion vers l’infection. • concerne des facteurs locaux et systémiques. facteurs locaux: • taille de la plaie profondeur de la plaie ancienneté de la plaie corps étranger tissue nécrotique méchanisme lésionnnel (morsures...) ischémie/neuropathie facteurs systémiques : vasculopathie oedème malnutrition diabète alcoolisme irradiation corticostéroïdes déficit neutrophilique (fonction, nombre) facteurs de virulence (Sotto, Diabetes Care 2007‐2008) Quelle microbiologie en cause ? • 1) Escarres de décubitus – Chow, J Infect Dis 1997; 135: 65‐68 – 4 espèces bactériennes par prélèvement (3 aérobies/1 anaérobie) – P. mirabilis, E. coli, Enterococcus spp., S. aureus, P. aeruginosa, Peptostreptococcus spp., B. fragilis, C. perfringens • 2) Ulcères de jambes – Hansson, Acta Chir Scand 1988; 544: 12‐16 – ≥ 2 espèces bactériennes par prélèvement dans 86% des cas – S. aureus, S. epidermidis, Pseudomonas spp., entérobactéries, anaérobies – ≥ 1 anaérobie dans 50% des cas (P. prevoti, P. acnes, V. parvula) – Levures (Candida albicans et autres espèces) dans 11% des cas • Globalement pas de différence dans la bactériologie des escarres de décubitus et des ulcères de jambe (Schmidt, Vasa 2000; 29: 62‐70) Quelle microbiologie en cause ? • 3) Mal perforant plantaire du pied diabétique Staphylococcus aureus 46% Staphylococcus epidermidis 39% Enterococcus sp. 35% Streptococcus bovis 2% streptocoque du groupe B 15% streptocoque du groupe A 3% Streptococcus sp. autres 18% corynébactéries 28% E. coli 17% Klebsiella pneumoniae 8% K. oxytoca Citrobacter freundii C. diversus Proteus mirabilis 7% 6% 2% 24% P. vulgaris Morganella morganii Enterobacter aerogenes E. cloacae Serratia marcescens Pseudomonas aeruginosa Pseudomonas sp. Acinetobacter sp. 7% 15% 7% 4% 1% 19% 5% 10% Peptostreptococcus magnus Peptostreptococcus sp. autres Bacteroides fragilis Bacteroides sp. autres Clostridium sp. 11% 35% 5% 16% 1% L. Wheat , Arch Int Med 1986 - prélèvements superficiels, 94 patients Quelle microbiologie en cause ? – Plaie récente : cocci à Gram positif (staphylocoque doré, streptocoque ß‐hémolytique) – Plaie chronique : idem + bacilles à Gram négatif +/‐ entérocoque et anaérobies – Dermatophytes et levures exceptionnelles – Bactéries à l’origine des “échecs” de couverture antibiotique : • SARM • BGN résistant aux pénicillines de spectre étroit (Pseudomonas spp., Klebsiella spp., …) • Anaérobies – Autre cause d’échec ?: présence de biofilm sur la plaie Microbiologie des plaies du pied diabétique Wagner superficie - 1 cocci à Gram positif aérobies 2 3 bacilles à Gram négatif anaérobies + nombre de germes et diversité 4 5 profondeur van der Meer, Diabet Med 1996 Bactériologie des plaies • Contamination/colonisation des plaies – les prélèvements de surface de la plaie sont généralement positifs – aucune règle utile pour l’interprétation des résultats – les prélèvements ne sont à faire que si une antibiothérapie est envisagée (risque de traitement inadapté) – les résultats ne servent qu’en cas de mauvaise évolution sous un traitement de première intention Photo de JL Richard Photo de T. Berendt flore résidente Germes nososomiaux flore transitaire (bactéries de la flore uro-fécale) effets « délétères » du polymicrobisme flore pathogène INFECTION Les Prélèvements n Superficiels: - écouvillonnage de la plaie o Profonds: - aspiration à l’aiguille - biopsie tissulaire - biopsie osseuse ¤ Les prélèvements bactériologiques ne sont indiqués qu’en cas d’infection établie cliniquement ¤ Ne sont à faire que sur une plaie débridée JP Lavigne L ’Écouvillonnage simple : ) Méthode la plus utilisée car la plus facile ) Peu adapté à la mise en évidence optimale des bactéries réellement responsables de l’infection Recueil de la totalité de la flore aérobie colonisante si la préparation n’est pas optimale ) Difficultés d’isoler les bactéries anaérobies strictes (non recherchées généralement bien que ce soit techniquement possible) $ Cette méthode de prélèvement a un intérêt discuté JP Lavigne Le Curetage-Ecouvillonnage : )Débrider et nettoyer l’ulcère )Prélèvement du tissu par grattage de la base de l’ulcère au moyen d’une curette ou d’un scalpel stériles ) Prélever en frottant avec un écouvillon la périphérie du fond de l’ulcère $ Cette méthode est indiquée pour les prélèvements superficiels et les plaies anfractueuses profondes JP Lavigne L’Aspiration à l’aiguille fine : ) Débrider et nettoyer ) Désinfecter la peau en périphérie (antiseptique) ) Ponctionner avec une seringue et une aiguille pour IM ou SC: La ponction doit être effectuée en passant par une zone saine ) En l’absence d’obtention de liquide, 1 à 2 ml de sérum physiologique stérile peuvent être injectés puis réaspirés immédiatement à l’aide d’une seconde aiguille pour être analysés. La seringue ayant servi au prélèvement est envoyée au laboratoire sans l’aiguille, purgée d’air et bouchée hermétiquement et stérilement. $ indiquée pour les plaies profondes et en particulier lors d’infections collectées JP Lavigne Place des prélèvements superficiels • Fiabilité modeste • Risques : – toujours positifs, donc tentation des antibiotiques – antibiothérapie à spectre injustifié – conséquence : pression de sélection +++ • A ne faire qu’en cas de lésion infectée, après un nettoyage superficiel de la lésion • Si possible, éviter les écouvillons et privilégier les prélèvements tissulaires Conclusions • Physiopathologie complexe encore imparfaitement comprise • Résister au prélèvement automatique et au traitement antibiotique local et systémique • La résistance bactérienne ne concerne plus que l’hôpital • Justifie de préserver les antibiotiques et de veiller à l’isolement de ces patients Classification clinique IWGDF-IDSA, 2007 Grade Définition 1 2 Pas de symptôme ni de signe d'infection Atteinte uniquement cutanée avec au moins 2 des signes suivants • Erythème péri-lésionnel : 0,5 – 2 cm • Chaleur locale • Douleur, sensibilité locale • Tuméfaction, induration • Décharge purulente Erythème > 2 cm et une des constatations ci-dessus OU Atteinte des structures sous la peau (abcès profond, lymphangite, fasciite, ostéo-arthrite) Présence d'au moins 2 des signes systémiques suivants • Tp > 38° ou < 36° • FR > 20 c/mn • RC > 90 bpm • PaCO2 < 32 mmHg • GB > 12 000 ou < 4 000/mm3 • PN immatures > 10% 3 4