IFPS BESANÇON - SOINS INFIRMIERS - PROMOTION 2010-2013 Travail d’initiation à la recherche - Mémoire de fin d’études En quoi les savoir-faire expérientiels de l’IDE facilitent-ils l’adhésion du patient adulte lors de la mise en place d’une ETP en service de diabétologie ? UE 3.4 S6 – UE 5.6 S6 – UE 6.2 S6 COURTE épouse COURTE-QUILLET Claire FAVIER Marylise LESEIGNEUR Héloïse PETITJEAN épouse CHAMPEMONT Carine Sous la direction de Mme BLONDELLE 31/05/2013 IFPS BESANÇON - SOINS INFIRMIERS - PROMOTION 2010-2013 Travail d’initiation à la recherche - Mémoire de fin d’études En quoi les savoir-faire expérientiels de l’IDE facilitent-ils l’adhésion du patient adulte lors de la mise en place d’une ETP en service de diabétologie ? UE 3.4 S6 – UE 5.6 S6 – UE 6.2 S6 COURTE épouse COURTE-QUILLET Claire FAVIER Marylise LESEIGNEUR Héloïse PETITJEAN épouse CHAMPEMONT Carine Sous la direction de Mme BLONDELLE 31/05/2013 REMERCIEMENTS Pour ce travail de recherche, nous tenons à remercier les deux infirmières du service de diabétologie qui nous ont accordé du temps pour répondre à nos questions ; Mme Blondelle, notre professeur de guidance, pour son soutien et ses conseils ; Les différents professionnels rencontrés lors de notre dernier stage qui ont pu nous orienter dans notre réflexion ; Nos proches, pour leur coopération de relecture et d’aide informatique, leur soutien et leurs encouragements lors des moments de doute. 4 Sommaire INTRODUCTION...................................................................................................................... 6 1 2 DE LA SITUATION PROFESSIONNELLE A LA QUESTION DE DÉPART ............................... 8 1.1 La situation ........................................................................................................................ 8 1.2 Le questionnement............................................................................................................ 9 1.3 La question de départ ....................................................................................................... 9 LA PHASE EXPLORATOIRE ................................................................................................... 12 2.1 L’éducation thérapeutique.............................................................................................. 12 2.1.1 Définition ........................................................................................................................ 12 2.1.2 Législation ..................................................................................................................... 13 2.1.3 Guide méthodologique .................................................................................................. 13 2.2 Les savoirs et compétences de l’infirmière .................................................................. 14 2.2.1 Définition du rôle infirmier .............................................................................................. 15 2.2.2 La compétence .............................................................................................................. 16 2.2.3 Le savoir expérientiel..................................................................................................... 17 2.3 L’adhésion du patient ..................................................................................................... 18 2.3.1 Définition ........................................................................................................................ 18 2.3.2 L’adhésion dans un programme thérapeutique ............................................................. 18 2.4 Les entretiens exploratoires .......................................................................................... 19 2.4.1 Les professionnels rencontrés ...................................................................................... 19 2.4.2 Analyse des entretiens .................................................................................................. 19 2.5 2.4.2.1 Environnement posture ......................................................................................... 19 2.4.2.2 Contenu ................................................................................................................. 20 Les concepts dégagés .................................................................................................... 21 2.5.1 2.5.1.1 Définition ................................................................................................................ 21 2.5.1.2 Législation.............................................................................................................. 22 2.5.1.3 L’annonce du diagnostic ........................................................................................ 22 2.5.1.4 Le travail de deuil .................................................................................................. 23 2.5.2 3 L’annonce du diagnostic ................................................................................................ 21 L’écoute ......................................................................................................................... 24 2.5.2.1 Définition ................................................................................................................ 24 2.5.2.2 Objectif................................................................................................................... 24 2.5.2.3 L’écoute et l’éducation thérapeutique .................................................................... 25 LA QUESTION DE RECHERCHE ............................................................................................. 28 3.1 Enseignements issus de la phase exploratoire ........................................................... 28 3.2 La question de recherche ............................................................................................... 29 3.3 Les hypothèses ............................................................................................................... 30 CONCLUSION ....................................................................................................................... 32 BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... 34 ANNEXES ............................................................................................................................. 39 5 INTRODUCTION 6 INTRODUCTION Nous avons décidé de traiter de l’éducation thérapeutique (ETP) dans ce travail de fin d’étude, en raison des difficultés rencontrées lors de séances d’éducation, par chacun de nous, dans nos stages. En effet, la formation infirmière nous a apporté la base théorique de l’éducation thérapeutique, mais celle-ci reste insuffisante pour nous permettre de réaliser, dans un premier temps, des séances éducatives efficaces pour le patient. Nos diverses expériences, nous ont permis d’identifier que la connaissance des pathologies et de leurs traitements mais aussi surtout l’attitude du soignant sont primordiaux dans le déroulement des séances. Notre choix s’est porté sur l’éducation thérapeutique du patient diabétique, en raison de la fréquence de cette pathologie. Elle peut se rencontrer dans toutes les structures ou services de soins. En effet, nous nous destinons à un métier où l’on est de plus en plus susceptible de prendre en charge des patients atteints de maladies chroniques1. De plus, l’Etat soutien l’expansion de l’éducation thérapeutique afin de limiter les complications dues aux maladies chroniques, ce qui permet une diminution des frais alloués à la santé. 1 Annexe 1 7 1 DE LA SITUATION PROFESSIONNELLE A LA QUESTION DE DÉPART 8 1 1.1 DE LA SITUATION PROFESSIONNELLE A LA QUESTION DE DÉPART La situation Mme Thérèse, 81 ans, est hospitalisée pour réduction de sa fracture du col du fémur par pose de prothèse intermédiaire de hanche le 14 août 2012. Mme Thérèse est mariée depuis 56 ans et a 4 enfants. C’est une personne vive et curieuse, qui paraît 10 ans de moins que son âge. Elle ne présente pas de surpoids, 1,65 pour 55kg, et a mesuré jusqu’à 1,70 avant de se tasser avec l’âge et l’ostéoporose. En juillet 2012, il lui a été diagnostiqué un cancer du sein hormono-dépendant, de bon pronostic. Elle reste pour cela plus longtemps à l’hôpital (les patients bénéficiant d’une pose de PIH, sans complications, sortent en général au bout de 8 jours), afin de poursuivre ses séances de radiothérapie pendant encore une semaine, car elle habite à plus de 60km. En effet, il est moins fatigant pour elle de rester sur place plutôt que de faire chaque jour 120km en ambulance en position allongée, la position assise en voiture étant déconseillée pendant plus de 2 mois. Le 23 août 2012, à J+9 de l’opération, je reprends avec elle les consignes permettant de limiter, si elle les respecte, le risque de luxation de la hanche dans les semaines qui suivent. Ces dernières ont déjà été données par l’équipe soignante (médecins, kinésithérapeute, IDE) et concernent spécifiquement l’entrée et la sortie du lit, la marche sur terrain plat, la descente et la montée des escaliers. Je me suis assurée la veille que Mme Thérèse serait disponible le lendemain matin pour réaliser une séance d’éducation thérapeutique, notamment concernant ses soins et la visite de ses proches. Lors de cette séance, j’ai pris connaissance dans un premier temps de la disponibilité de Mme Thérèse (état d’esprit, préoccupations, inquiétudes, fatigue, douleur…), par des questions simples. Dans un second temps, j’ai évalué ses connaissances relatives à la pose de la prothèse de hanche et les précautions à prendre pour éviter la luxation, en reprenant avec elle les explications et les consignes données dans un livret fourni par le service. A l’issue de la séance (environ une demi-heure), j’ai interrogé Mme Thérèse : pour chacune des situations (sortir et entrer dans le lit, marche en terrain plat, montée et descente d’escalier), elle répondait correctement. Elle semblait avoir bien compris pourquoi il était important d’avoir un pied d’appel différent. Afin d’évaluer la portée de mon intervention, je suis revenue le lendemain matin et je l’ai questionnée sur les différentes situations auxquelles elle devrait faire face prochainement. Il s’est avéré que ce n’était pas très clair dans son esprit. 9 1.2 Le questionnement Mme Thérèse s’est cassé récemment le col du fémur (10 jours). A-t-elle eu suffisamment de temps pour accepter son changement de situation et comprendre la nécessité de modifier son comportement ? Mme Thérèse a appris un mois et demi auparavant qu’elle était atteinte d’un cancer du sein. Malgré le bon pronostic des médecins, son état psychologique/émotionnel est-il favorable à une séance d’apprentissage ? Quels sont les moyens du soignant pour évaluer l’état psychologique/émotionnel du patient ? En quoi le vieillissement physiologique, tant cognitif que physique (baisse de la mémoire, assimilation plus lente, difficultés dans l’organisation et l’utilisation des données, difficultés à utiliser des stratégies nouvelles, fatigue, raideurs articulaire, diminution de la masse musculaire au dépend de la masse adipeuse, diminution de la proprioception…) peutil avoir un impact sur les capacités d’apprentissage ? En quoi le vécu, le mode de vie, le niveau socio-éducatif, la personnalité, l‘état psychologique (étapes du deuil, émotions, ressentis, mécanisme de défense, stratégies d’adaptations…), peuvent-ils influencer l’apprentissage de nouveaux comportements ? Comment peut-on faire pour évaluer au mieux la disponibilité d’une personne pour la mise en place d’une séance d’éducation thérapeutique ? Comment l’infirmière priorise-t-elle les soins dans sa journée afin de planifier des temps d’éducation thérapeutique suffisants ? En quoi l’existence d’un protocole au sein d’un service peut-il faciliter la mise en place d’une éducation thérapeutique (organisation, réglementation, législation de l’ETP, financement) ? Comment les connaissances du soignant au regard des pathologies favorisent-elles l’adhésion du patient à l’ETP ? En tant qu’étudiantes, nous recevons une formation théorique en cours que nous mettons en pratique en stage. Comment le manque d’expérience peut-il être limitant dans l’évaluation des ressources ou freins de la patiente, dans l’organisation et la réalisation des séances d’éducation ? 1.3 La question de départ De ce questionnement découle notre question de départ : En quoi les savoir-faire expérientiels de l’infirmière (IDE) facilitent-ils l’adhésion du patient adulte lors de la mise en place d’une ETP en service de diabétologie ? 10 Dans ce travail nous allons nous concentrer plus précisément sur le côté soignant. En effet, nous cherchons à savoir si l’expérience personnelle du soignant et les acquis de celuici peuvent influencer l’adhésion du patient au programme thérapeutique. Il nous semblait difficile d’effectuer des recherches concernant le côté patient, en effet, il ne nous était pas possible d’en interroger. Notre travail de recherche sur ce thème s’arrêtera à l’élaboration de la question de recherche et à la formulation d’hypothèses. Nous serons au préalable dans une démarche exploratoire basée sur la clarification d’un cadre théorique puis sur quelques entretiens. 11 2 LA PHASE EXPLORATOIRE 12 2 LA PHASE EXPLORATOIRE Nous allons tout d’abord définir l’éducation thérapeutique, décrire le cadre législatif et définir les modalités de sa mise en place. Ensuite, nous aborderons les compétences et savoirs propres à l’infirmière. Enfin, nous définirons en quoi consiste l’adhésion du patient. 2.1 2.1.1 L’éducation thérapeutique Définition L’éducation thérapeutique est une notion jeune. En effet, ce terme découle de l’éducation à la santé. L’éducation à la santé concerne la population en bonne santé de manière générale, il n’y a donc pas de conséquences immédiates et néfastes, mais des objectifs généraux qui ont pour but d’éviter des problèmes de santé (prévention des drogues, tabagisme, sida, alimentation équilibrée…). Elle peut être dispensée par des professionnels de la santé ou non. A contrario, l’éducation thérapeutique des patients, officialisée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en tant que « éducation thérapeutique du malade », ne peut être mise en œuvre que par des professionnels de santé formés. Cette éducation thérapeutique vise à éduquer une personne atteinte de maladie chronique ou présentant de réels facteurs de risques, dans le but d’avoir un meilleur contrôle sur la maladie et de mieux réagir face à des crises aiguës, tout en augmentant la qualité de vie. L’urgence de l’apprentissage va donc se confronter aux besoins des réaménagements psychologiques induits par la maladie chronique. Définition selon l’OMS : l’éducation thérapeutique vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique. Elle s’adapte à chaque patient et leur permet de mieux gérer leur maladie à travers un processus d’acceptation accompagné par un infirmier. Celui-ci a alors un rôle de soignant éducateur. Elle a pour finalité de les aider à comprendre leur maladie et leurs traitements, et à prendre conscience des responsabilités de leur prise en charge, par l’autogestion des soins et la mise en avant de leur capacité d’adaptation. 13 2.1.2 Législation L’éducation thérapeutique a été définie par l’OMS en 1998, et reprise par la Haute Autorité à la Santé (HAS) et l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES). Ce n’est qu’en 2001 qu’elle est instituée en France dans le Plan National d’Education à la Santé (PNES). Elle visait l’amélioration de la qualité de vie des personnes atteintes de maladies chroniques. La loi du 4 mars 2002 affirme le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à sa situation de santé [...] et d'être reconnue comme un acteur partenaire de sa santé avec les professionnels. En 2007 l’éducation thérapeutique s’intéresse moins à la maladie mais plus aux personnes malades. Par la suite, en 2009, on assiste à une vraie reconnaissance de l’éducation thérapeutique. La loi Hôpital Patient Santé Territoire (HPST) a fait de l'éducation thérapeutique une composante à part entière du Code de la santé publique aux articles L.1161-1 à L.1161-42, reconnaissant ainsi toute l'importance de cette approche. Tout en recommandant de s'appuyer sur l'existant, cette loi propose plusieurs mesures. Elle préconise notamment de développer la recherche sur l'éducation thérapeutique et considère qu'il est "primordial" de renforcer la formation des professionnels de santé en la matière. Celle-ci doit être introduite dans le cursus de formation de tous les personnels médicaux et paramédicaux. De plus, un guide méthodologique, publié par la HAS en lien avec l’INPES, sert de référentiel aux modalités de mise en œuvre de tels programmes qui s’appliquent à l’hôpital ou hors du milieu hospitalier. 2.1.3 Guide méthodologique L’élaboration des programmes d’éducation thérapeutique peut se faire par l’intermédiaire des professionnels médicaux et paramédicaux, mais aussi par les associations de patients. L’HAS encourage le partenariat entre les professionnels de santé et les associations de patients. Cette collaboration permet un partage d’expériences de la maladie et des traitements, un échange sur les préoccupations quotidiennes, la résolution de problèmes et les ressources disponibles. 2 Annexe 2 14 L’HAS est à l’origine de recommandations en trois items sur l’éducation thérapeutique du patient : « Définition, finalités et organisation » ; « Comment proposer et réaliser l’éducation thérapeutique » ; « Comment élaborer un programme spécifique d’une maladie chronique ». Cela dans le but de guider les professionnels de santé et assurer une qualité de prise en charge des patients. L’éducation thérapeutique fait réellement partie de la prise en soins car elle est complémentaire et indissociable des traitements et de la prévention des complications. Les différentes étapes de l’éducation thérapeutique sont clairement définies par la HAS.3 Cette dernière définit par ailleurs les compétences à acquérir par le patient qui peuvent être regroupées sous 2 items : compétences d’autosoins et compétences d’adaptation.4 Elle définit également en partenariat avec l’INPES les compétences nécessaires aux professionnels de santé pour mettre en œuvre l’éducation thérapeutique et les repartit en 4 groupes : Compétences relationnelles : Communiquer de manière empathique, recourir à l’écoute active, choisir des mots adaptés, reconnaître les ressources et les difficultés d’apprentissage, permettre au patient de prendre une place plus active au niveau des décisions qui concernent sa santé, ses soins personnels et ses apprentissages. Soutenir la motivation du patient, tout au long de la prise en charge de la maladie chronique. Compétences pédagogiques et d’animation : Choisir et utiliser de manière adéquate des techniques et des outils pédagogiques qui facilitent et soutiennent l’acquisition de compétences d’autosoins et d’adaptation, prendre en compte les besoins et la diversité des patients lors des séances d’ETP. Compétences méthodologiques et organisationnelles : Planifier les étapes de la démarche d’ETP (conception et organisation d’un programme individuel d’ETP négocié avec le patient, mise en œuvre et évaluation), recourir à des modalités de coordination des actions entre les services et les professionnels de santé, de manière continue et dans la durée. Compétences biomédicales et de soins : Avoir une connaissance de la maladie chronique et de la stratégie de prise en charge thérapeutique concernées par le programme d’ETP, reconnaître les troubles psychiques, les situations de vulnérabilité psychologique et sociale. 2.2 3 4 Les savoirs et compétences de l’infirmière Annexe 2 Annexe 3 15 2.2.1 Définition du rôle infirmier Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS) : "La mission des soins infirmiers dans la société est d'aider les individus, les familles et les groupes à déterminer et réaliser leur plein potentiel physique, mental et social et à y parvenir dans le contexte de l'environnement dans lequel ils vivent et travaillent, tout cela en respectant un code de déontologie très stricte. Ceci exige que les infirmières apprennent et assurent des fonctions ayant trait au maintien et à la promotion de la santé aussi bien qu'à la prévention de la maladie. Les soins infirmiers englobent également la planification et la mise en œuvre des soins curatifs et de réadaptation, et concernent les aspects physiques, mentaux et sociaux de la vie en ce qu'ils affectent la santé, la maladie, le handicap et la mort. Les infirmières permettent la participation active de l'individu, de sa famille et de ses amis, du groupe social et de la communauté, de façon appropriée dans tous les aspects des soins de santé, et encouragent ainsi l'indépendance et l'autodétermination. Les infirmières travaillent aussi comme partenaires des membres des autres professions impliquées dans la prestation des services de santé. Le rôle et les compétences sont mentionnés dans le code de la santé public.5 Le groupe de travail du Comité d’entente des formations infirmières et cadres, Association française des directeurs de soins, validé par Guy Le Boterf (2005) a défini les compétences infirmières comme il suit : - élaborer et mettre en œuvre un projet de soins individualisé, - gérer les activités de soins, - réaliser les soins techniques, - réaliser les coins éducatifs individualisées ou collectifs, - conduire des soins relationnels, notamment une relation d’aide et/ou de soutien psychologique avec le bénéficiaire, - former les stagiaires et les nouveaux arrivants, - contribuer à la valorisation et à l’évolution de l’exercice professionnel. Patricia Benner, en 1995, définit les compétences de l’Infirmière Diplômée d’Etat, plus spécifiquement dans le cadre de la relation avec le patient en tant que : dimensions cognitives, intuitives et affectives, se développant par le temps et les expériences rencontrées. L’acquisition des compétences suppose un élément de maturation, ainsi qu’un apport de connaissances peut favoriser mais ne peut pas court-circuiter. Description de 5 stades à travers lesquels l’infirmière doit passer : la novice, la débutante, l’infirmière compétente (2 à 3 ans d’expérience), la soignante performante (le 5 Annexe 3 16 savoir acquis lors d’expériences antérieures devient transférable à de nouvelles situations), l’experte (5 ans d’expériences qui permettent de prendre des décisions rapides et sûres). 2.2.2 La compétence D’après Guy Le Boterf 6 , être compétent, c’est être capable de gérer des situations complexes et instables. En effet, une compétence n’est pas seulement une somme de savoirs, savoir faire et savoir être7. Ce n’est pas un état mais un processus, un lien reliant une combinaison de ressources (connaissances, savoir-faire), une action, une contribution à un résultat (soins, services) pour un bénéficiaire (patient). Il n’est plus attendu aujourd’hui d’un professionnel qu’il réalise une succession de tâches scrupuleusement décrites, lui laissant peu de place à la réflexion et à la prise de décision comme c’était le cas dans la taylorisation. La prescription est un point de repère, un cadre pour une tâche à effectuer. L’opérateur ne sait pas d’avance quelle situation il va rencontrer et doit s’adapter au cas par cas. Le savoir faire n’est alors que le degré le plus élémentaire de la compétence. La prescription est plus un objectif à atteindre. Face aux aléas, le professionnel prend des initiatives et des responsabilités. L’application des procédures n’est pas toujours efficace car incomplète. Agir avec compétence c’est également savoir interagir avec autrui : une compétence prend appui sur des corps de savoirs élaborés socialement, souvent en dehors du travail. La motivation, le contexte sont aussi importants que la disposition à un savoir agir. Il est nécessaire de pouvoir se référer à une norme collective. La disposition à agir est également un processus, la compétence n’est pas que des ressources. Avoir des compétences et agir avec des compétences sont deux choses différentes : on attend d’un professionnel qu’il propose et mette en œuvre une démarche mais également qu’il construise la méthode de travail appropriée à la singularité du cas à traiter. Il doit sélectionner les éléments pertinents dans un répertoire de ressources et les organiser. Les compétences requises sont différentes des compétences réelles. Si la compétence requise est la partition, la compétence réelle est l’interprétation : il n’y a pas une façon de faire mais autant de façons que d’interprètes. Il y a finalement trois facteurs composant une compétence : le savoir agir (combiner et mobiliser les ressources) ; le vouloir agir (motivation et contexte) ; le pouvoir agir (organisation le permettant). 6 7 Construire les compétences individuelles et collectives, pp49-111. Annexe 1 17 2.2.3 Le savoir expérientiel Le savoir expérientiel est un processus mis en place lors d’expériences similaires qui se répètent. Cela consiste à « utiliser » les expériences vécues, en faisant ressortir des éléments ou des objets qui ont été consciemment analysés comme étant favorables ou non adaptés dans les expériences passées, et à intégrer ces données au cours des expériences à venir. En effet, le savoir ainsi accumulé permet d’améliorer l’activité réalisée et de mener ainsi au mieux l’expérience future. Ce processus d’apprentissage expérientiel permet de donner un sens au vécu et de construire des connaissances utiles par la suite. Pour Kolb, l’apprentissage expérientiel a une double relation : d’une part il tire son savoir des expériences vécues, et d’autre part, il se confirme dans les expériences en cours. Kolb conçoit le processus d’apprentissage expérientiel en quatre phases : phase d’expérience concrète, phase d’observation réfléchie (prise de recul de l’expérience vécue), phase de conceptualisation abstraite (réflexion sur l’expérience vécue, amenant à modifier des principes ou des règles), et phase d’expérimentation active (utilisation du nouveau savoir dans une nouvelle expérience). Ces phases sont cycliques et se répètent à chaque expérience. A travers ces quatre phases, nous adoptons des attitudes8 et des conduites propres à chacun. En effet, nous analysons différemment chaque expérience vécue, selon nos capacités cognitives ainsi que nos conduites de gestion. Les capacités cognitives correspondent aux attitudes et conduites cognitives. Les attitudes cognitives se traduisent par la tendance à agir d’une certaine façon face à la situation d’apprentissage expérientiel. Les conduites cognitives sont les manières d’agir de l’apprenant face à sa situation d’apprentissage expérientiel. Enfin, les conduites de gestion correspondent à la prise de recul et à la manière d’analyser les conduites et les attitudes cognitives lors de la situation d’apprentissage expérientiel. Ces trois éléments sont propres à chacun et à chaque situation. Selon Kolb, l’application efficace des attitudes cognitives et des conduites propres à chacun permettent d’optimiser le processus du savoir expérientiel. Nous avons donc recherché à travers ce travail si l’expérience acquise de l’infirmière pratiquant de l’éducation thérapeutique en service avait pu l’aider au fil de sa pratique. Et ainsi, comment elle avait pu l’identifier comme aidante ou non dans ses nouvelles expériences de mise en place d’éducation thérapeutique. 8 Annexe 1 18 2.3 2.3.1 L’adhésion du patient Définition L’adhésion du patient « fait référence à une implication active du patient, à un traitement mutuellement acceptable » (Haynes, 1978, in Deccache, 1994). L’adhésion propose une approche centrée sur l’interaction soignant/soigné dans une perspective de négociation autour du traitement. En effet, l’adhésion évoque des processus intrinsèques tels que les attitudes et la motivation des patients à suivre leur traitement. De plus, l’adhésion thérapeutique est un comportement soumis à des facteurs psychologiques et environnementaux fluctuants. C’est un processus progressif et changeant qui nécessite une équipe formée à l‘éducation thérapeutique, une coordination des soins optimale et un suivi régulier par les différents acteurs de santé, accepté et respecté par le patient. Quelle que soit la modalité de prise en charge, l’adhésion thérapeutique repose sur la qualité de la relation thérapeutique, sur les compétences de soignants en termes de connaissances et d’organisation des soins ainsi que sur la nécessité d’une cohésion et d’une cohérence entre professionnels de santé. De plus, selon Carl Rogers « l’apprentissage est conditionné par la présence d’un certain nombre d’attitudes positives dans la relation qui s’instaure entre celui qui facilite l’apprentissage et celui qui apprend». Les étapes de l’adhésion ont été modélisées par J. Prochaska et Di Clemente (autour de 1985) et sont reprises lors de l’étude du cycle motivationnel. 9 2.3.2 L’adhésion dans un programme thérapeutique L’HAS, dans "la structuration d’un programme d’éducation thérapeutique du patient dans le champ des maladies chroniques", met en avant que pour « favoriser l’implication du patient et soutenir sa motivation, il faut rechercher avec le patient, les modalités de gestion personnelle de la maladie, adaptées à sa situation ». C’est à dire « tenir compte de ses demandes de son et/ou ses projets, permettre au patient de s’approprier le programme d’ETP, l’aider à hiérarchiser ses priorités d’apprentissage et de changements en tenant compte du temps nécessaire au patient pour réaliser ses changements, soutenir les pratiques d’auto-évaluation gratifiantes pour le patient ». Le soignant va donc accompagner le patient à définir les compétences à acquérir et au préalable élaborer le diagnostic éducatif. 9 Annexe 4 19 Celui-ci permet de formaliser un partenariat entre le patient et le ou les professionnels de santé, sous la forme d’un engagement oral ou écrit, qui renforcera l’alliance thérapeutique. Enfin, il permet d’identifier les besoins et attentes du patient, d’appréhender les différents aspects de la vie et de la personnalité du patient, d’évaluer ses potentialités, de reconnaitre la manière de réagir du patient, d’identifier ses freins et ressources personnelles et sociales ainsi que la réceptivité du patient et de ses proches à l’ETP. Ainsi, l’expression des attentes et avis du patient va favoriser sa participation aux décisions, qui doit être encouragée en utilisant une démarche d’aide au choix ou de révélation de ses préférences. Nous avons donc essayé de comprendre comment lors d’une éducation thérapeutique, les infirmières trouvent les moyens de favoriser l’adhésion du patient au programme thérapeutique à travers leurs expériences et leurs acquis. 2.4 Les entretiens exploratoires 2.4.1 Les professionnels rencontrés Ayant choisi de traiter l’adhésion du patient dans le cadre de l’éducation thérapeutique, nous avons interrogé des infirmières dans un service de diabétologie. En effet, c’est dans ce service que l’éducation thérapeutique est mise en place depuis de nombreuses années. Ainsi nous avons pu rencontrer une infirmière débutante sur cette pratique et une infirmière ayant de longues années d’expériences, notre objectif de départ étant d’identifier ce que le savoir expérientiel pouvait avoir comme influence sur l’adhésion du patient lors de la mise en place de l’éducation thérapeutique. Dans le cadre de notre recherche, nous avons entrepris des entretiens10 directifs ouverts, avec des questions ouvertes afin de laisser la liberté aux personnels soignants de s’exprimer sur le sujet. 2.4.2 2.4.2.1 10 Analyse des entretiens Environnement posture Annexe 5 20 Les entretiens se sont déroulés dans un bureau du service de diabétologie. Ils ont duré un peu plus de 50 minutes chacun et ils n’ont été interrompus par aucun facteur extérieur. L’environnement était propice à l’échange : calme, luminosité et température adéquates. Nous étions deux étudiantes lors de chaque entretien, l’infirmière était assise face à nous derrière un bureau. Posture des infirmières : les deux infirmières n’avaient pas la même attitude. L’infirmière non expérimentée se tenait enfoncée dans son fauteuil, en retrait. Elle butait sur ses mots et employait beaucoup l’expression « euh… », ne parlait pas très fort. L’infirmière expérimentée, également assise dans son fauteuil, avait les bras posés sur le bureau et se tenait bien droite. Elle était « présente », dans le sens où elle était plus imposante. Elle parlait de façon fluide et audible, cherchait peu ses mots, de façon volubile. La posture de l’infirmière non expérimentée semble traduire un manque d’assurance, de confiance qui pourrait correspondre à son manque d’expérience. En revanche, l’infirmière expérimentée semble avoir davantage confiance en elle et sa posture semble correspondre à un autre niveau d’expérience. 2.4.2.2 Contenu11 Lors des deux entretiens, les deux infirmières abordent l’adhésion du patient de façon différente. En effet, concernant les facteurs interférant l’adhésion, l’infirmière non expérimentée désigne du côté des patients divers éléments, à savoir : la peur, l’angoisse, le stress, la douleur, la non acceptation, le bouleversement des habitudes de vie, la lassitude, l’idée de contrainte, la différence générationnelle et l’âge. L’infirmière expérimentée pointe quant à elle les problèmes sociétaux préexistants et amplifiés par le diabète, la maladie chronique, le sentiment de ne pas se sentir écoutés. Elles ont une vision commune concernant le choc de l’annonce du diagnostic et la résistance au changement. Concernant les facteurs favorisant l’adhésion, les deux infirmières parlent de la confiance et de la motivation ; en revanche, l’infirmière expérimentée approfondit ses propos en y ajoutant la liberté du patient à parler, le temps accordé, la valorisation et l’encouragement, la possibilité de négocier et la décision incombant au patient. Du coté soignant, à propos des freins limitant l’adhésion, l’infirmière non expérimentée indique le manque de temps, l’organisation du service. De son côté, l’infirmière expérimentée parle de la difficulté au changement des habitudes soignantes, du fait d’être 11 Annexe 6 21 trop directif, dans la confrontation, le jugement, et d’être plus dans la technique que dans le relationnel. Pour les facteurs favorisants l’adhésion, l’infirmière non expérimentée indique l’attention, la remise en question, le professionnalisme, un ton serein, la patience, la relation d’aide. L’infirmière expérimentée parle de la formation de tous les professionnels, la connaissance de la pathologie, la connaissance du patient et de son vécu. Elles s’accordent sur la négociation, l’environnement, le temps, l’écoute, l’attitude, l’expérience, la formation spécifique à l’éducation thérapeutique, les capacités relationnelles, les réunions d’équipe et l’annonce du diagnostic adaptée. Néanmoins, l’infirmière expérimentée insiste davantage sur l’écoute en spécifiant bien que celle-ci est centrée sur le patient de façon globale. Elle développe tout ce dont elle a besoin pour connaître son patient (modèle bio-psycho-social) quand l’infirmière non expérimentée ne fait que nommer les moyens favorisant l’expression du patient. Après nous être entretenues avec ces professionnelles, plusieurs éléments favorisant l’adhésion du patient se démarquent : l’annonce du diagnostic et l’écoute. En effet, l’infirmière débutante s’est rendu compte dans l’analyse de son expérience qu’elle ne laissait pas la liberté aux patients de s’exprimer, qu’elle ne prenait pas le temps de les écouter et que cela n’était finalement pas aidant pour la suite de la prise en soins. Pour l’infirmière expérimentée, il est essentiel d’écouter les patients s’exprimer sur leurs craintes afin de mieux les connaître, les comprendre et ainsi d’établir une meilleure relation soignant-soigné, favorisant l’adhésion du patient au programme d’éducation thérapeutique. Dans les deux entretiens, l’annonce du diagnostic a été un élément important de la prise en charge du patient dans l’amorce de l’éducation thérapeutique. En effet, au fil de leurs expériences, elles se sont rendues compte que lorsque l’annonce du diagnostic n’était pas faite de façon adaptée au patient, il était alors plus difficile pour les soignants de mettre en place une éducation thérapeutique. Nous allons donc les développer ci-dessous les deux éléments clés de nos entretiens : l’annonce du diagnostic et l’écoute. 2.5 2.5.1 Les concepts dégagés L’annonce du diagnostic 2.5.1.1 Définition 22 Diagnostic (Larousse) : Temps de l'acte médical permettant d'identifier la nature et la cause de l'affection dont un patient est atteint. Annonce de diagnostic : dans le cadre médical, fait de transmettre au patient les interprétations des différents symptômes, tests et contrôles permettant d’identifier la pathologie dont il est atteint, son évolution, les traitements possibles avec les résultats attendus et les risques encourus. 2.5.1.2 Législation La loi du 4 mars 2002 du Code de la Santé publique relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, redéfinit le droit d’accès du patient à son dossier de soins personnel. Selon les articles L1111-2 et L1111-7 : - Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé ; - Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel ; - La volonté d'une personne d'être tenue dans l'ignorance d'un diagnostic ou d'un pronostic doit être respectée, sauf lorsque des tiers sont exposés à un risque de transmission ; - La présence d'une tierce personne lors de la consultation de certaines informations peut être recommandée par le médecin ; - Toute personne a le droit d’accès à l’ensemble des informations concernant sa santé. La loi du 4 mars 2002 ou les plans cancer et Alzheimer12, montrent la volonté gouvernementale de prendre en charge un évènement qui, s’il est mal réalisé ou dans des conditions inadaptées, peut majorer la difficulté de l‘entrée dans la maladie et par conséquent l’adhésion du patient à son traitement. 2.5.1.3 L’annonce du diagnostic L’annonce du diagnostic est vécue par le patient comme un moment inoubliable. L’impact de l’annonce et les conditions dans lesquelles celle-ci est faite, va être déterminant pour la suite de son parcours de soins. Elle nécessite un cadre et un accompagnement 12 Annexe 7 23 relationnel adapté. Les critères de qualité de l’annonce du diagnostic ont été établis par les malades et la Ligue nationale contre le cancer lors du plan cancer 2003-2007.13 L’annonce du diagnostic est toujours réalisée par le médecin qui suit le patient. C’est un point de départ qui démarre un processus dynamique sur le plan relationnel et thérapeutique. Pour cela, le temps de consultation long et spécifique à l’annonce permet de favoriser l’ancrage de la relation entre les soignants et le patient. Le travail effectué par le Réseau des malades de la Ligue en 2001 aboutit à une grille de recommandations sur le dispositif d’annonce du diagnostic : l’importance du lieu de l’annonce, le temps consacré, l’attitude du médecin vis-à-vis du patient et de la maladie dans le contexte de la consultation, l’information délivrée et la façon dont celle-ci est amenée, la place des proches… De plus la dimension relationnelle soignants-patient a une grande importance lors de l’annonce du diagnostic d’une maladie chronique : elle conditionne les suites de la prise en soins. En effet, l’écoute et la disponibilité soignante permet d’établir une relation de confiance qui, quand elle est associée à un cadre sécurisant et à la qualité de l’information donnée, permet d’accompagner le choc de l’annonce. 2.5.1.4 Le travail de deuil Le travail de deuil commence à la suite de la perte d’un être cher, d’un objet ou d’un état de santé. Le travail de deuil se définit par plusieurs étapes. C’est un sentiment de tristesse associé à la perte, à la souffrance et considéré comme un processus de délivrance. Les travaux d'Elisabeth Kübler-Ross font retenir cinq étapes du deuil : choc; déni; colère; marchandage; dépression; acceptation.14 Les cinq phases ne sont pas systématiquement linéaires, la personne va à son rythme dans ce processus de deuil, elle peut revenir à une phase antérieure. Le travail de deuil est un moment où les émotions et les sentiments sont très présents et il est souvent nécessaire de pouvoir parler et de se sentir écouté. L’annonce d’un diagnostic confronte le patient à un changement brutal lié à sa santé, avec des perturbations dans ses habitudes de vie, dans sa projection à l’avenir, ce qui va amener le patient dans un processus où il doit faire le deuil de sa bonne santé. Il existe alors deux chemins possibles lors du travail de deuil selon Anne Lacroix : un processus d’intégration, vers l’acceptation de la maladie ; ou alors un processus de distanciation. Il y a alors le risque d’échec du travail de deuil dans lequel le changement d’état de santé est mis à distance et non accepté. Lors de l’annonce du diagnostic, le soignant doit être vigilant quant aux réactions psychiques et émotionnelles du patient afin de pouvoir adapter son 13 14 Annexe 7 Annexe 7 24 comportement. Cette évaluation et adaptation seront facilitées par l’expérience, en affutant les capacités d’analyse et de réponses appropriées aux situations. Ce travail de deuil va donc être important pour la suite de la prise en soins du malade et notamment pour l’adhésion du patient au programme d’éducation thérapeutique. Le temps d’annonce du diagnostic va donc être le point de départ d’un processus relationnel et thérapeutique. 2.5.2 L’écoute 2.5.2.1 Définition Il y a deux façons d’écouter : écoute passive et écoute active. L’écoute passive est une écoute simple sans vérification du contenu, le récepteur a seulement un rôle de contenant. L’écoute active est une écoute attentive et centrée sur celui qui parle. Le récepteur a une attitude (communication15 non verbale : posture corporelle, regard, positionnement soignant-soigné, gestuelle, environnement), une disponibilité (disponibilité psychique, organisation et planification des soins) et une authenticité (honnêteté et connaissance de soi pour aller à la rencontre de l’autre) qui permettent à l’émetteur de se sentir respecté, reconnu et entendu. Il utilise également des techniques de communication comme la reformulation (vérification du contenu en reformulant) ou le reflet (nommer les sentiments exprimés), afin de s’assurer de la bonne compréhension du discours, sans porter de jugement ou d’interprétation. Dans l’écoute active, le soignant écoute avec ses représentations et son histoire, il doit donc réussir à ce décentrer de lui-même, à se différencier de ses émotions, désirs ou préoccupations, pour se recentrer sur le soigné. L’acceptation et la connaissance de soi, qui permet de repérer ses fonctionnements, ses émotions, ses représentations, ses capacités et limites, sont indispensables au soignant, pour pouvoir entendre, comprendre et accepter l’autre. Elle nécessite donc, un apprentissage d’outils et de pratique qui sont abordés en formation, et améliorés par un travail sur soi, l’expérience et l’analyse de la pratique. 2.5.2.2 Objectif 15 Annexe 1 25 L’écoute va permettre à l’émetteur de structurer sa pensée en exprimant ce qu’il pense : « …le langage ne sert pas seulement à communiquer ce qu’on sait, il sert aussi à découvrir ce qu’on pense vraiment, la plupart du temps il faut parler pour penser. » Jacques Piveteau (Formateur d’enseignants, de cadres d’entreprise et de formateurs). L’écoute active va ainsi permettre à l’émetteur de prendre conscience de certains éléments ou de trouver une solution aux problèmes rencontrés. L’écoute active est un des piliers de la relation d’aide16, avec l’empathie17, l’authenticité, le respect, la confiance, la congruence18 et l’attention positive inconditionnelle.19 Carl Rogers (psychologue Américain) définit la relation d’aide comme une relation dans laquelle « l’un au moins des deux protagonistes cherche à favoriser chez l’autre la croissance, le développement, la maturité, un meilleur fonctionnement et une plus grande capacité à affronter la vie. »20. Pour Rogers, tout individu est porteur du potentiel suffisant pour trouver sa propre réponse à ses difficultés. 2.5.2.3 L’écoute et l’éducation thérapeutique L’écoute est primordiale, elle est considérée comme la pierre angulaire de l’éducation thérapeutique. En effet, elle s’intéresse à l’ensemble des facteurs organiques, psychosociaux et environnementaux qui interagissent dans l’évolution de la personne atteinte de maladie chronique. Quand il n’y a pas réellement d’écoute, le soignant impose ses règles sans connaitre réellement le patient, il impose juste des règles à suivre. Le patient est donc soumis à un changement qu’il subit. Cela conduit à une relation paternaliste du type « directioncoopération » qui ne favorise pas l’autonomie. Pour Jean François Malherbe, l’écoute dans l’éducation thérapeutique permet une relation entre le soignant et le soigné afin de progresser sur le chemin de l’autonomie. Elle permet au soignant d’être « celui qui doit découvrir avec l’autre ce qui est le mieux pour lui ». Sans l’écoute du patient, ce schéma ne peut se faire, le patient ne peut donc pas évoluer dans son histoire de vie. L’écoute est encore qualifiée de « rapprochement », concept connu des sciences psychologiques et sociales qui tend à se développer en santé publique et qui fait ses preuves en éducation thérapeutique. En effet, l’éducation thérapeutique permet de 16 Annexe 1 Annexe 1 18 Annexe 1 19 Annexe 1 20 Carl Rogers, Le développement de la personne p.27 17 26 rapprocher ses acteurs car elle rapproche l’éducation du soin, le patient au soignant, mais aussi le patient à lui-même, aux autres personnes qui ont le même problème de santé. 27 3 LA QUESTION DE RECHERCHE 28 3 3.1 LA QUESTION DE RECHERCHE Enseignements issus de la phase exploratoire Nos connaissances magistrales et nos recherches sur l’éducation thérapeutique nous ont donné une vision très cartésienne de son organisation, sa réalisation, son évaluation, à travers une législation récente. Dans la réalité des entretiens, il apparait que la pratique n’est pas aussi stricte que la théorie. En effet, les infirmières n’ont pas connaissance de cette législation spécifique ni des recommandations pour la mise en œuvre de l’éducation thérapeutique par les guides de la HAS et l’INPES. Dans la pratique, l’infirmière expérimentée cherche peut-être plus à s'adapter au patient plutôt que d'appliquer stricto sensu des protocoles ou guides à chaque situation, du fait de ses connaissances méthodologiques. Avant nos recherches théoriques, nous avions des représentations concernant l’apprentissage par l’expérience : nous pensions que le fait de pratiquer était l’un des facteurs nous permettant d’améliorer notre habilité. L’approfondissement de nos recherches nous a permis d’appréhender le sujet avec plus de précision. En effet, il ne suffit pas de faire pour s’améliorer. Il est nécessaire de prendre du recul face à des situations nouvelles, de les analyser afin d’en faire ressortir les invariants pour pouvoir les transférer dans d’autres circonstances (boucle expérientielle de Kolb, construire les compétences de Guy Le Boterf). De ce point de vue, l’entretien avec l’infirmière expérimentée valide l’idée suivante : un infirmier peu expérimenté et motivé peut être meilleur qu’un infirmier expérimenté si ce dernier n’a pas la volonté de s’améliorer. Les connaissances approfondies de la pathologie et du traitement (connaissances théoriques préalables et connaissances concrètes acquises lors de la pratique au quotidien) sont indispensables pour réaliser une éducation thérapeutique de qualité et rendre ainsi l'infirmière plus disponible pour le patient. En effet, cela lui permet d'être plus à l'écoute, sans être perturbée par certaines questions que pourrait lui poser le patient auxquelles elle ne pourrait pas répondre. D’après l’infirmière expérimentée, c’est non seulement un moyen de renforcer la confiance et la relation soignant-soigné, mais aussi de répondre aux craintes du patient et d'adapter son comportement face à celui-ci. Tous ces paramètres permettront ainsi de renforcer l'adhésion du patient au programme thérapeutique. 29 Nous pensions que pour faire adhérer un patient à l’ETP, nous devions être dans le faire, l’agir alors que l’infirmière expérimentée insiste beaucoup sur le fait que nous devons être dans l’attente de la décision et de la motivation du patient à être acteur de sa prise en soins. Elle insiste beaucoup sur la qualité de l’écoute et la mise en confiance du patient. L’expérience va améliorer l’écoute en permettant de se détacher de la procédure et de se concentrer alors sur ce que montre et exprime le patient. L’annonce du diagnostic tient une place importante dans l’adhésion du patient en ETP. En effet c’est une amorce qui conditionne l’adhésion du patient à sa prise en charge future. Les deux infirmières ont insisté sur ce point en expliquant que si l’annonce est adaptée, l’adhésion du patient en sera facilitée. Le patient va se sentir en confiance et soutenu par les professionnels de santé. L’expérience permet d’adapter l’approche du patient et la façon d’appréhender l’annonce de diagnostic avec le médecin. Au cas où l’annonce du diagnostic n’aurait pas été adaptée, l’expérience de l’infirmier peut contribuer à favoriser l’adhésion du patient grâce à des éléments transférables issus de situations similaires. 3.2 La question de recherche Nous avons observé à travers les entretiens que l’expérience peut permettre : - de prendre en compte le patient et d’être à son écoute, - de valoriser son expérience pour mieux maîtriser la manière de faire des séances d’ETP, - d’avoir une connaissance fine de la pathologie et du traitement, - l’infirmier doit connaître la façon dont le patient a pris en compte l’annonce du diagnostic. La connaissance de l’ensemble de ces éléments doit favoriser l’adhésion du patient. Il nous semble intéressant d’identifier plus précisément comment l’expérience du soignant joue un rôle dans l’élaboration d’une posture, d’un comportement et d’une communication verbale adaptés aux situations. En effet, nous nous interrogeons sur le fait que l’expérience peut faire évoluer l’attitude du soignant. Voici donc notre question de recherche : En quoi le savoir-faire expérientiel du soignant influence son attitude et lui permet d’avoir un comportement adapté face au patient diabétique pour favoriser son adhésion lors de la mise en place de l’éducation thérapeutique ? 30 3.3 Les hypothèses L’attitude est une expression mentale non observable, une prédisposition à se comporter de telle ou telle façon face à une situation donnée, avec une personne donnée et dans un temps donné. C’est la manière de réagir que l’on a face aux aspects du monde qui nous entoure. C’est une variable, elle s’exprime à travers le comportement de la personne (voix, gestes, posture du corps, …) et s’adapte à l’environnement qui entoure la personne21. L’attitude n’est pas innée, elle est acquise. Dans la mise en place de l’éducation thérapeutique et afin de favoriser l’adhésion du patient au programme thérapeutique, l’infirmière adapte son comportement à la personne soignée, et donc son attitude. Le savoir-faire expérientiel acquis au fil des années de pratique de l’infirmière lui permet d’optimiser son attitude et ainsi de mieux adapter son comportement à chaque situation qui se présente. A l’obtention du diplôme, l’infirmière a peu d’expériences. La motivation, l’attention portée à la pathologie, les enseignements qui peuvent être tirés des différentes ETP, l’échange de pratiques avec d’autres professionnels, lui permettent d’acquérir plus facilement une posture et un comportement adapté vis-à-vis de tout patient en ETP. 21 Stoezel (1982) 31 CONCLUSION 32 CONCLUSION Ce travail de fin d’études nous a permis de prendre conscience de l’étendue des attitudes que l’infirmier doit mobiliser pour améliorer l’adhésion du patient lors des séances d’éducation thérapeutique. Nous faisons l’hypothèse qu’il pourra, par la suite, transférer ces attitudes à d’autres soins. En effet, le soignant va développer par l’expérience la compétence de combiner ses ressources (savoir, savoir faire et savoir être) pour adapter sa prise en charge à chaque situation différente. La suite de ce travail aurait permis de mieux identifier le processus d’acquisition de savoirs expérientiels à partir d’une étude plus approfondie basée sur nos hypothèses. Pour autant, nous avons pu identifier à travers ce travail de réflexion l’importance de remettre en question notre pratique, de prendre du recul et d’analyser les situations rencontrées pour mieux appréhender les expériences à venir. Le savoir expérientiel ne prend tout son sens que s’il est croisé avec des éléments d’ordre conceptuel. Ce qui peut permettre de conscientiser son apprentissage passé et futur. 33 BIBLIOGRAPHIE 34 BIBLIOGRAPHIE Basdevant A, Diss M-C, L’ère des maladies chroniques (Dossier), L’infirmière magazine, janvier 2011, N°270, pp14-21. Benner Patricia, De novice à experte, InterEditions, Paris, 1995. Burlet Béatrice, Les concepts fondamentaux de l’éducation thérapeutique, Soins, n°764, avril 2012. Carl Rogers, la relation d’aide et la psychothérapie,1942, traduit en 2008, ESF éditeur, 235p. 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Page 16, note (6) Savoir : Le savoir désigne toutes les composantes acquises par nos apprentissages mais aussi façonné par nos expériences. Le savoir est donc individuel, se fait par rapport aux différentes situations que tout individu rencontre. On ne peut donc pas toujours le transmettre, mais il peut être transféré dans les situations que l’on rencontre. Savoir-faire : Il dépend du savoir, la capacité physique à retranscrire notre savoir dans les situations rencontrées. Dans le domaine de la psychologie cognitive, le savoir faire se caractérise par la capacité à retranscrire les procédures : on sait ce qu’il y a à faire dans un cas donné, on applique ce qu’il faut faire (exemple : protocoles). C’est être capable d’analyser une situation et d’agir en respectant les règles. Le savoir-faire nécessite une capacité d’observation, d’analyse et d’action dans une situation donnée. Savoir être : Il touche au domaine de l’affect, il est relié à notre personnalité, à nos valeurs, et à notre façon d’appréhender les situations. Il est orienté par rapport à notre approche de l’autre, notre comportement en société, nos réactions. Ces différents savoirs sont liés entre eux : l’un ne va pas sans l’autre, dans le sens où nos actions dans une situation donnée sont influencées par notre éducation (savoir), notre capacité à analyser, à réutiliser nos connaissances dans nos actions (savoir-faire), et la façon de le faire et les comportements que l’on adopte (savoir être), mais aussi aux connaissances didactiques enseignées, le passage par l’école, les apprentissages, les connaissances empiriques, les savoirs expérientiels en termes de connaissances issues de l’expérience. Page 17, note (8) Le psychologue Bloch définit l’attitude comme un « état de préparation dans lequel se trouve un individu qui va recevoir un stimulus ou donner une réponse et qui oriente de façon momentanée ou durable certaines réponses motrices ou perceptives, certaines activités intellectuelles ». Page 25, note (15) La Communication : le modèle cybernétique : décodage par le soignant de l’information donné par le patient : liens entre les éléments de la communication verbale et non verbale et les éléments du contexte, possibilité que l’IDE interprète l’info par 38 l’intermédiaire de ses représentations, émotions, mécanismes de défense… et la déforme, donc importance de l’écoute active dans le soins. (16) Le Robert définit la relation comme « tout ce qui dans l’activité d’un être vivant implique une interdépendance, une interaction, dés lors qu’une modification de l’un entraîne une modification de l’autre.», de plus il définit l’aide par « l’action d’intervenir en faveur d’une personne en joignant ses efforts aux siens.» On peut donc en conclure que la relation d’aide est une relation de soutien mise en place par le soignant, en réponse à la demande du soigné. Selon Jacques Salomé (Relation d’aide et formation à l’entretien, Lille, presses universitaire, 1993) la relation d’aide est une relation de soutien et d’accompagnement dans laquelle la soignante aide le malade « à opérer son ajustement personnel à une situation à laquelle il ne s’adapterait pas sans le soutien ou sans apport d’un tiers ». (17) L’empathie est une attitude de compréhension : le soignant va se saisir de la situation que vit le soigné, sans se mettre à la place de celui-ci, et ainsi éviter d’être affecter des mêmes sentiments. (18) La congruence est la façon de se comporter en harmonisant les ressentis, les pensées, le discours, le comportement verbal et non verbal : le soignant adopte un comportement en accord avec lui-même. (19) La considération positive est le sentiment de respect et de confiance manifesté par le soignant, afin d’amener le soigné à se percevoir dans toute sa valeur et sa dignité. 39 Annexe 2 (2) HPST articles L.1161-1 à L.1161-4 : Article L1161-1 Créé par LOI n°2009-879 du 21 juillet 2009 - art. 84 L'éducation thérapeutique s'inscrit dans le parcours de soins du patient. Elle a pour objectif de rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie. Elle n'est pas opposable au malade et ne peut conditionner le taux de remboursement de ses actes et des médicaments afférents à sa maladie. Les compétences nécessaires pour dispenser l'éducation thérapeutique du patient sont déterminées par décret. Dans le cadre des programmes ou actions définis aux articles L. 1161-2 et L. 1161-3, tout contact direct entre un malade et son entourage et une entreprise se livrant à l'exploitation d'un médicament ou une personne responsable de la mise sur le marché d'un dispositif médical ou d'un dispositif médical de diagnostic in vitro est interdit. Article L1161-2 Créé par LOI n°2009-879 du 21 juillet 2009 - art. 84 Les programmes d'éducation thérapeutique du patient sont conformes à un cahier des charges national dont les modalités d'élaboration et le contenu sont définis par arrêté du ministre chargé de la santé. Ces programmes sont mis en œuvre au niveau local, après autorisation des agences régionales de santé. Ils sont proposés au malade par le médecin prescripteur et donnent lieu à l'élaboration d'un programme personnalisé. Ces programmes sont évalués par la Haute Autorité de santé. Article L116-3 Créé par LOI n°2009-879 du 21 juillet 2009 - art. 84 Les actions d'accompagnement font partie de l'éducation thérapeutique. Elles ont pour objet d'apporter une assistance et un soutien aux malades, ou à leur entourage, dans la prise en charge de la maladie. Elles sont conformes à un cahier des charges national dont les modalités d'élaboration et le contenu sont définis par arrêté du ministre chargé de la santé. Article L1161-4 Créé par LOI n°2009-879 du 21 juillet 2009 - art. 84 Les programmes ou actions définis aux articles L. 1161-2 et L. 1161-3 ne peuvent être ni élaborés ni mis en œuvre par des entreprises se livrant à l'exploitation d'un médicament, des personnes responsables de la mise sur le marché d'un dispositif médical ou d'un dispositif médical de diagnostic in vitro ou des entreprises proposant des prestations en lien avec la 40 santé. Toutefois, ces entreprises et ces personnes peuvent prendre part aux actions ou programmes mentionnés aux articles L. 1161-2 et L. 1161-3, notamment pour leur financement, dès lors que des professionnels de santé et des associations mentionnées à l'article L. 1114-1 élaborent et mettent en œuvre ces programmes ou actions. Compétences nécessaires pour dispenser l'éducation thérapeutique du patient : « Art.D. 1161-1.-L'éducation thérapeutique du patient peut être dispensée par les professionnels de santé mentionnés aux livres Ier et II et aux titres Ier à VII du livre III de la quatrième partie du présent code. « Elle peut être assurée avec le concours d'autres professionnels. « Les membres des associations agréées conformément à l'article L. 1114-1 et des organismes œuvrant dans le champ de la promotion de la santé, la prévention ou l'éducation pour la santé peuvent participer à l'éducation thérapeutique du patient dans le champ déterminé par les cahiers des charges mentionnés à l'article L. 1161-2 et à l'article L. 1161-3. « Art.D. 1161-2.-Pour dispenser l'éducation thérapeutique du patient, les professionnels mentionnés à l'article D. 1161-1 disposent des compétences suivantes : « 1° Compétences relationnelles ; « 2° Compétences pédagogiques et d'animation ; « 3° Compétences méthodologiques et organisationnelles ; « 4° Compétences biomédicales et de soins. Le référentiel déclinant ces compétences et les conditions nécessaires à leur acquisition sont fixés par arrêté du ministre chargé de la santé. » (3) Les étapes de l’ETP : 1ère étape élaborer un diagnostic éducatif : connaissance du patient (personnalité, réceptivité, environnement social et familial, ressources et freins personnels, connaissance de la maladie), identification de ses besoins, attentes et projets. 2ème étape définir un programme personnalisé en priorisant les apprentissages : établir avec le patient les compétences à acquérir en lien avec le projet 3ème étape planifier et mettre en œuvre les séances : coordination des différents acteurs, sélection des méthodes et techniques qui seront utilisées 4ème étape évaluation des compétences acquises : évaluer avec le patient ce qu’il sait, ce qu’il a compris, ce qu’il sait faire et ce qu’il reste à acquérir pour lui proposer d’autres séances de suivi ou de renforcement. 41 Annexe 3 (5) Les compétences d’autosoins sont les décisions que le patient prendra dans l’intention d’intervenir sur les effets de la maladie sur son état de santé : soulager les symptômes ; prendre en compte les résultats d’une autosurveillance, d’une automesure ; adapter des doses de médicaments ; initier un autotraitement ; réaliser des gestes techniques et des soins ; mettre en œuvre des modifications à son mode de vie (équilibre diététique, activité physique, etc.) ; prévenir des complications évitables ; faire face aux problèmes occasionnés par la maladie ; impliquer son entourage dans la gestion de la maladie ; des traitements et des répercussions qui en découlent. Les compétences d’adaptation sont selon l’OMS «les compétences personnelles et interpersonnelles, cognitives et physiques qui permettent à des individus de maîtriser et de diriger leur existence, et d’acquérir la capacité à vivre dans leur environnement et à modifier celui-ci» : se connaître soi-même ; avoir confiance en soi ; savoir gérer ses émotions et maîtriser son stress ; développer un raisonnement créatif et une réflexion critique ; développer des compétences en matière de communication et de relations interpersonnelles ; prendre des décisions et résoudre un problème ; se fixer des buts à atteindre et faire des choix ; s’observer, s’évaluer et se renforcer. (6) le rôle IDE Le rôle propre. L'article R.4311-3 du code de santé publique dispose que "relève du rôle propre de l'infirmier ou de l'infirmière les soins liés aux fonctions d'entretien et de continuité de la vie et visant à compenser partiellement ou totalement un manque ou une diminution d'autonomie d'une personne ou d'un groupe de personnes. Dans ce cadre, l'infirmier a compétence pour prendre les initiatives et accomplir les soins qu'il juge nécessaires conformément aux dispositions de l'article 5 ci-après. Il identifie les besoins de la personne, pose un diagnostic infirmier, formule des objectifs de soins, met en œuvre les actions appropriées et les évalue. Il peut élaborer, avec la participation des membres de l'équipe soignante, des protocoles de soins infirmiers relevant de son initiative. Il est chargé de la conception, de l'utilisation et de la gestion du dossier de soins infirmiers." Le rôle sur prescription : Outre les actes et activités visés aux articles 11 et 12, l'infirmier est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d'une prescription médicale qui, sauf urgence, est écrite, qualitative et quantitative, datée et signée, soit en application d'un protocole écrit, qualitatif et quantitatif, préalablement établi, daté et signé par un médecin :… 42 Annexe 4 Note (9) Etapes de l'adhésion selon modèle Proschaska Entrée Sortie RUPTURE Pré-intention Maintien Intention Action Détermination Etape de pré-intention : Inviter le patient à s’exprimer sur sa prescription médicale, répondre aux questions, et donner des informations simples. Etape de l’intention : Explorer avec le patient les bénéfices et les inconvénients du traitement. Etape de détermination : Préparer le terrain, voir si le patient veut, peut et se sent prêt. Etape de l’action : Soutenir la motivation du patient, explorer les incidents rencontrés, renforcer les connaissances et faire le point. Etape du maintien : Identifier les acquis, anticiper les baisses de motivation, les prévoir…. Si la motivation n’est pas soutenue, elle peut s’essouffler et mener à la phase de rupture. 43 Annexe 5 : Grille d’entretien Depuis combien de temps travaillez-vous dans le service ? Depuis combien de temps mettez-vous en place des séances d’ETP ? Racontez-moi vos débuts en ETP ? Et maintenant ? Quelles ont été vos difficultés et facilités lors des premières séances ? Avez-vous toujours ces difficultés ou avez réussi à y remédier et si oui par quels moyens ? Face à une situation difficile par rapport à l’adhésion du patient, qu’avez-vous mis en évidence du côté patient ? Du côté soignant ? Concernant la relation soignantsoigné ? Quelles capacités infirmières utilisez-vous lors de la mise en place d‘une ETP ? Ontelles évolué avec votre pratique ? Lesquelles selon vous facilitent ou freinent l’adhésion du patient lors de cette ETP ? Plus généralement qu’est-ce qui favorise ou nuit à l’adhésion du patient ? Comment s’organise la mise en place de l’ETP au sein de l’équipe pluridisciplinaire (rôle de chacun) ? A quel moment de la prise en charge du patient proposez-vous une ETP ? Pourquoi ? Quelles conditions doivent-être réunies lors de la mise en place d’une ETP favorisant l’adhésion du patient ? Comment pouvez-vous les influencer ? Quelles stratégies le service met-il en place pour améliorer la qualité de la prise en charge ? Quels écarts observez-vous entre vos connaissances théoriques et votre expérience du terrain ? Pourquoi ? Evalueriez-vous l’efficacité des ETP proportionnellement à votre expérience dans ce domaine ? Que vous a apporté l’évolution des pratiques en ETP depuis que vous exercez ? Avez-vous reçu une formation spécifique ? Si oui, que vous a-t-elle apporté ? Utilisez-vous les guides et recommandations de l’HAS et INPES ? 44 Annexe 6 Analyse entretien 1 Patient Freins Facteurs favorisants Résistance au changement Peur Non acceptation Lassitude Angoisse stress Choc à l’annonce Idées de contraintes Douleur Habitude de vie Différence générationnelle Age Entretien motivationnel Confiance Motivation Processus externes Processus internes Soignant Manque de temps Organisation du service Stéréotype Environnement Temps Formation Outils Réunion d’équipe Bilan annuel Ecoute Attitude Relation d’aide Attention Remise en question Ton serein Patience Capacités relationnelles Professionnalisme Outils Capacités relationnelles 45 Analyse entretien 2 Patient Annonce du diagnostic Problèmes autres que la maladie (financiers, sociaux, familiaux, Freins professionnels…) amplifiés par le diabète Maladie chronique Ne pas se sentir écouté Difficulté au changement Soignant Difficulté au changement, aux habitudes Etre directif Confrontation Jugement Etre plus technicienne, ne pas adhérer au relationnel Tous formé quel que soit le niveau (secrétaire, ASH, Facteurs favorisants Laisser liberté de parler diététicienne, AS, IDE, Temps accordé médecins) Cadre environnemental : calme, Maîtrise du sujet, connaissance non dérangé de la maladie Patient valorisé, rassuré, Négociation encouragé Répéter, reformuler, faire Volonté répéter Motivation Temps à l’écoute Négociation Expérience Patient qui décide Connaissance du patient, de son vécu Aimer le relationnel Légende Processus externes Processus internes Outils Capacités relationnelles Hypothèses 1- Entretien 1 : soignant avec manque d’expérience, dissocie outils et connaissances ; Entretien 2 : soignant expérimenté ne dissocie pas outils et connaissances ; Les 2 sont indispensables pour mener à bien une ETP ? 2- En fonction de l’expérience du soignant, les facteurs favorisants et les freins ne sont pas identifiés de la même façon : - Le soignant expérimenté identifie les freins chez le patient comme des processus externes ; 46 - Le soignant moins expérimenté identifie davantage les freins comme des processus internes ; - Or, il est impossible ou difficile de modifier des processus externes alors qu’il est possible d’agir sur des processus internes. Le soignant expérimenté ne mettra pas dans les freins les processus internes car il les a identifié et va les utiliser comme facteurs favorisants, pour la mise en place d’une ETP. 3- L’expérience ne permettrait l’atteinte d’objectifs que par un investissement dans la relation d’aide lors d’une ETP. L’expérience pour la mise en place d’une ETP n’a de valeur que si le soignant a les capacités relationnelles et le goût pour ce type de soins. 4- L’adhésion du patient est favorisée par le tout premier contact de qualité (secrétaire lors de la prise de rdv, annonce diagnostic du médecin…) réalisé dans le service, d’où la formation faite à tous les professionnels, pour avoir le même discours, une cohérence dans les interventions auprès du patient. Si le premier contact est de qualité, l’adhésion du patient n’en sera que meilleure. 5- Au début des années 2000, on observe une évolution des pratiques : auparavant, on tentait de modifier le mode de vie du patient quant aux conséquences de la maladie alors que désormais le traitement de la maladie est adapté au mode de vie du patient. De ce fait, l’adhésion semble facilitée car il y a un peu moins de contraintes pour le patient, notamment alimentaires. 6- Les facteurs externes (problèmes personnels autre que la pathologie : financiers, sociaux, professionnels, familiaux…) ont une influence sur l’adhésion du patient. Ecouter le patient sur sa vie en général, ne pas le réduire à une pathologie lui permettrait d’évacuer les problèmes qui le perturbent pour se concentrer sur le problème médical. La notion essentielle pour favoriser l’adhésion du patient serait pour le soignant expérimenté : l’écoute 7- Le patient atteint de maladie chronique doit modifier son comportement. Il est suivi pour cela sur la durée. Une bonne prise en charge dès le départ permet une meilleure autonomie, moins de complication, d’où des économies pour la société. 8- L’expérience est indispensable pour débuter l’etp : une expérience minimum d’1 an et une formation spécifique sont requises pour les soignants avant de pouvoir commencer l’etp dans le service de diabéto 47 Annexe 7 (12) Le plan cancer 2003-2007 (mesure 40) met en place le dispositif d’annonce, spécifique à l’annonce de pathologies cancéreuse (Evaluation de ce dispositif en cours, plan cancer 2009-2013). L’annonce s’articule autour de 4 points forts : - Un temps médical : annonce faite par le médecin, avec une décision thérapeutique présentée et expliquée au malade. Celle-ci, comprise et acceptée par le malade, lui sera ensuite remise sous forme d'un programme personnalisé de soins (PPS). - Un temps d'accompagnement soignant : après la consultation médicale, en règle général un infirmier, qui reprend avec le malade ce qui a été compris, le déroulement des soins et e réoriente si nécessaire vers d’autres professionnels. - L'accès à une équipe impliquée dans les soins de support : assistant social, psychologue, kinésithérapeute, nutritionniste... - Un temps d'articulation avec la médecine de ville. Le plan Alzheimer 2008-2012 (mesure 8) met également en place un dispositif d’annonce spécifique (HAS : Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : annonce et accompagnement du diagnostic, Septembre 2009) : - Il est recommandé que le médecin spécialiste qui a établi le diagnostic, sur la base d’un bilan et de critères diagnostiques validés, l’annonce de façon explicite. - Le patient est informé le premier de son diagnostic. À sa demande, cette annonce est partagée avec une personne de son choix. - Il est recommandé que le médecin traitant soit informé avant qu’il ne revoie le patient et que le compte rendu de la consultation d’annonce du diagnostic lui soit envoyé. - L’annonce est un processus spécifique qui doit s’accompagner d’une proposition d’un plan de soins et d’aides. (13) Critères qualité annonce du diagnostic : - Disposer de temps pour mener les consultations d’annonce - Etre disponible professionnellement et psychologiquement pour écouter, expliquer, accompagner le malade au bon moment. - Proposer des interlocuteurs complémentaires avant ou après la consultation d’annonce faite par le médecin pour mieux répondre aux différents besoins et attentes du malade. - Mettre à disposition des malades, des informations sous forme écrite, audiovisuelle ou électronique. - Accueillir le malade dans des locaux dignes et conviviaux. 48 (14)Les étapes du deuil : Choc, déni : au moment de l’annonce de la perte, la personne refuse d'y croire. Les émotions semblent pratiquement absentes. Ensuite la réalité de la perte s’installe. Colère : sentiment de colère face à la perte. C’est une période ou il y a beaucoup de questionnements. Marchandage : phase faite de négociations. Dépression : phase plus ou moins longue caractérisée par une grande tristesse, des remises en question, de la détresse. Acceptation : Dernière étape : la réalité de la perte est comprise et en voie d’acceptation. La personne réorganise sa vie en fonction de la perte.