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La Fausse Suivante
ou le fourbe puni
de Marivaux
/ Création du Collectif FAR /
/ Avec /
/ Cécile CARLES - La Comtesse, Sylvie MAURY Le Chevalier,
Olivier JEANNELLE - Trivelin, Laurent PEREZ Lélio, et Denis REY Frontin et Arlequin /
/ Production du Collectif FAR /
Co-production / Théâtre du Pont-Neuf-Toulouse / Théâtre Sorano-Jules Julien-Toulouse /
DRAC Midi-Pyrénées / Région Midi Pyrénées,
Ville de Toulouse, Conseil Général de la Haute Garonne/
Collectif FAR Association Loi 1901
Siège : 1 Rue de la Sainte Famille / 31200 Toulouse
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La Fausse Suivante,
ou Le Fourbe Puni la fable.
Comédie d’intrigue – 1724.
Une demoiselle à marier profite de son déguisement masculin de « Chevalier » pour sonder son
promis Lélio en devenant son « ami ». Elle découvre qu’il ne compte l’épouser que pour sa dot, et
qu’il doit pour cela rompre sa promesse de mariage avec la Comtesse à laquelle il doit une somme
importante qu’il ne veut pas rembourser. Sous le déguisement du Chevalier, elle affecte de séduire la
Comtesse afin que celle-ci rompe elle-même la promesse de mariage, ce qui délivrerait Lélio de sa
dette.
Cependant son valet Trivelin qui sait qu’elle est une femme, divulgue le secret de son identité
sexuelle à Arlequin, valet de Lélio. Arlequin, incapable de garder un secret, dévoile à Lélio qu’il a
été manipulé par le « Chevalier ». Découverte, la demoiselle se présente à Lélio comme une
suivante retorse, venue se renseigner pour le compte de sa maîtresse.
La fausse suivante a maintenant toutes les cartes en main : elle tient la Comtesse par le cœur, et
Lélio par la bourse. Il ne lui reste plus qu’à manipuler l’un et l’autre pour parvenir à la mise en
scène d’un aveu généralisé.
D’après le dossier du Petit Larousse Classique.
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La Pièce
un point de vue.
« Comme il ne faut jurer de rien, aussi ne doit-on
jamais faire de dédit considérable »
Dufresny, Les Dédits.
Dire de La Fausse Suivante qu’elle est la cinquième
comédie de Marivaux au théâtre italien, et son
cinquième succès en cinq ans (1720-1724), c’est dire
l’essentiel. Dans la foulée du Prince Travesti, son
unique tragi-comédie, Marivaux imagine cette histoire
de jeune fille en colère, déguisée en chevalier pour le
Carnaval et jouant une fausse suivante. Mais au
théâtre, il faut des maîtres aux valets, et des désirs dans
les urs, et l’enchaînement des actions. Dans La
Fausse Suivante, c’est une femme qui endosse le
costume.
Tromperie sur le sexe ; sur le statut social ; sur ses desseins.
Qui dit tromperie dit secret.
Qui dit secret dit désir violent de le percer.
La dramaturgie de La Fausse Suivante est d’abord une dramaturgie du secret, qui joue
sur les affects violents que suscite (sur scène et dans la salle) la lutte autour de la chose
cachée d’Œdipe à Guignol.
La dynamique de la pièce repose sur un mécanisme retors : émietter le secret, et
transformer l’aveu d’une vérité partielle en garant d’un mensonge plus grand encore (je
suis fille, il est vrai, mais déguisée au profit de ma maîtresse qui veut ceci ou cela...) ;
faire circuler le secret entre les personnages qui ne l’atteignent qu’en ordre dispersé, et
trop tard, ou n’en saisissent que l’apparence, parce que comme le disait Louis Jouvet,
« ils sont dupes du piège dans lequel ils se sont mis eux-mêmes »
1
Par une inversion de sexe, si enracinée dans les origines du théâtre, la jeune aristocrate
s’expose au chantage sexuel et monétaire de Trivelin, aux pulsions violeuses
d’Arlequin ; pseudo-chevalier, elle engage avec la Comtesse un rapport dont la charge
homosexuelle n’est qu’à peine voilée. Par le travestissement, le mensonge, la
tromperie, la jeune aventurière découvre et révèle la vérité au monde : que le mariage
est un commerce, que les femmes sont la proie des loups, que les mots mentent, que les
cœurs se manipulent, que l’argent entend régler tous les désirs. Découverte
douloureuse, qui mêle son désespoir aux jubilations énergiques de la vengeance.
(1)
1
/ Louis Jouvet : Molière et la comédie classique ed. NRF Gallimard.
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Face à cette téméraire aventurière, Marivaux place un Lélio qui respire le mal lucide.
Sa conscience et ses sens paraissent soumis absolument au calcul monétaire ; on dirait
aujourd’hui, à la loi du marché. Loin de son homonyme du Prince Travesti, moin
d’une nostalgie de la générosité héroïque, le Lélio de La Fausse Suivante incarne plutôt
la fascination du mal au quotidien. Caution faite à une certaine moralité, le fourbe est
puni d’avoir dit sur scène ce que chacun d’entre nous pense peut-être en privé
Le petit monde éreinté entraîné dans sa chute finale ne s’en trouve pas sauvé pour
autant. Les diatribes philosophiques alambiquées d’un Trivelin masquent mal la
lubrique vénalité des valets. La fragilité de la Comtesse n’a de pendant que son
insouciante légèreté. Quant à notre Chevalier, ce qui l’autorise à pousser si loin la
séduction d’une Comtesse déjà éprise, est moins la quête de la vérité comme elle le
prétend, que l’évident plaisir qu’elle y prend.
Nul amour ne venant compenser l’omniprésence du travestissement et la surenchère
des ruses, cette pièce aussi âpre que comique trouve ici un dénouement brutal qui, loin
de résoudre tous les conflits, s’arrête plutôt sur un constat cruel et sur une violente
insatisfaction. Aucune des alliances tentées, aucune des amours naissantes, aucun des
marchés conclus n’aura abouti. Restent, au bout de cette course folle, des êtres
probablement hagards, rendus à un nécessaire silence, ressort ultime de cette
dramaturgie de la parole comme la décrit si bien Arnaud Rykner « c’est en se frayant
un chemin au cœur du silence que la parole se réalise pleinement, mais son succès est
aussi le moment de son échec : dès qu’elle devient efficace, il n’y a plus rien à dire,
plus rien à faire sinon se taire. »
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/ Arnaud Rykner : Un certain silence ed. José Corti.
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Notes d’intention pour un spectacle.
La fête comme déni de la réalité (ou) Un Carnaval triste - en noir et blanc.
Au début du spectacle, nous voyons les protagonistes de La Fausse Suivante dans un
camaïeux de noir et de blanc, prolonger en Province une soirée de Carnaval
commencée à Paris on dirait aujourd’hui un « after ». Cette idée du Carnaval nous
inspire. Moins sans doute par la joyeuse explosion de couleurs à laquelle on l’associe le
plus souvent que par ce qu’il représente un espacetemps de licence, le monde est
mis à l’envers, et la morale court le risque « d’être mise en de cruels embarras ».
Nous travaillons sur des pulsions de jeunesse, presqu’adolescentes chaque chose est
mesurée dans son immédiateté. Nous traquerons les rouages qui conduisent les
personnages à générer puis amplifier une situation sauvage, finalement très moderne,
où chacun passe d’un état à un autre en un violent mouvement de yo-yo.
En l’absence de toute autorité référente (il n’y en a pas dans La Fausse Suivante), nous
observerons comment ces êtres se trouvent finalement confrontés au doute, face
obscure de la liberté.
Là où l’argent mène le monde…
Nous constatons une troublante similitude avec notre époque les appétits qui
s’expriment sont individualistes, tous aiguisés par l’obsession de l’argent, l’amour
même devient une marchandise que l’on peut « titrer », comme s’il s’agissait d’un
vulgaire placement à court terme. Du plus haut au plus bas de l’échelle, tous sont
capables sans le moindre scrupule, de s’en remettre au plus offrant. Les valets, n’ayant
en ceci, rien à envier à leurs maîtres.
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